LE JURIPOLE DE LORRAINE


Serveur d'Information Juridique


Dirigé par François JACQUOT
Professeurs à la Faculté de Droit de Nancy

Réalisé par Alexis BAUMANN





Sophie HEL






LES PROMESSES DE VENTE EN DROIT FRANCAIS ET ESPAGNOL



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Les droits français et espagnols connaissent tous deux les promesses de vente : la promesse unilatérale et synallagmatique de vente, et les définissent de manière identique. Pourtant, la nature, le régime juridique, et les effets de ces promesses s'analysent parfois différemment en France et en Espagne.

L'étude comparative franco-espagnole porte donc sur la promesse unilatérale de vente (I) puis sur la promesse synallagmatique de vente (II).

I) LA PROMESSE UNILATERALE DE VENTE OU LE CONTRAT D'OPTION



La promesse unilatérale de vente est appelée en Espagne contrat d'option. Elle se définit comme un contrat par lequel le promettant consent au bénéficiaire la faculté d'acheter un bien à un prix déterminé ou déterminable.

Ce contrat de promesse est un contrat unilatéral puisque seul le promettant s'est engagé à conclure le contrat définitif de vente. Le bénéficiaire a seulement accepté la promesse.

Le contrat d'option doit remplir des conditions de fond pour être valable (Art. 1108 C. civ. fr. et 1261 C. civ. esp.). Les contractants doivent notamment être capables, avoir la qualité nécessaire pour contracter, et surtout donner leur consentement au contrat. La chose et le prix doivent être déterminés ou déterminables dès la promesse. Pourtant, en Espagne, les tribunaux ont admis, dans des conditions exceptionnelles, de réviser le prix. Ils admettent, en effet, d'appliquer la théorie de l'imprévision. Lorsque la situation contractuelle a changé. Finalement, le droit espagnol requiert une condition supplémentaire pour que le contrat d'option soit formé : la fixation du délai d'option.

Le contrat de promesse unilatérale n'est en principe soumis à aucune condition de forme. Pourtant la loi de 1963, article 1840-A CGI a imposé en France des formalités impératives.

Les parties au contrat ont des obligations. Le promettant doit pour l'essentiel maintenir son offre et ne pas empêcher la réalisation du contrat définitif. Le bénéficiaire n'a aucune obligation, sauf lorsqu'il s'est engagé à payer une indemnité d'immobilisation.

Le contrat de promesse unilatérale confère au bénéficiaire un droit d'option, c'est à dire le droit de conclure le contrat définitif de vente s'il le désire. Ce droit est traditionnellement considéré comme un droit personnel.

Lorsque le promettant ou le bénéficiaire décède, leurs droits et obligations sont transmis à leurs héritiers (Art. 1122 C. civ. fr. et 1257 C. civ. esp.). Lorsque le bénéficiaire souhaite céder son droit à un tiers, en France, il doit simplement informer le promettant, en Espagne, au contraire, il doit obtenir le consentement du promettant.

En cas de vente de la chose par le promettant à un tiers, la promesse est violée. En France, les tribunaux ont admis que le contrat conclu entre le promettant et le tiers acquéreur puisse être annulé, lorsque le bénéficiaire leur fournit la preuve de la mauvaise foi du tiers acquéreur. Or, cette preuve est difficile à établir. La nullité est donc rarement la sanction. Le bénéficiaire n'obtient le plus souvent que des dommages-intérêts pour réparer son préjudice. En Espagne, le promettant ne peut être condamné qu'à verser des dommages-intérêts au bénéficiaire. Mais lorsque le bénéficiaire a fait publier son droit d'option(Art. 14 R.H.), la publicité est alors opposable aux tiers. Ce dernier est subrogé dans les droits et obligations du promettant.

Le contrat d'option s'éteint pour des causes générales d'extinction des obligations, par l'expiration du délai d'option, par l'exercice du droit d'option qui donne naissance au contrat de vente.

II) LA PROMESSE SYNALLAGMATIQUE OU BILATERALE DE VENTE



La promesse synallagmatique de vente est dite promesse bilatérale en Espagne. Elle suppose que les deux parties s'engagent, l'une à acheter et l'autre à vendre.

Ce contrat est synallagmatique puisque les deux parties sont engagées par des obligations réciproques.

Il est consensuel. Aucune condition de forme n'est requise. Les conditions de fond à remplir pour que le contrat soit conclu valablement sont les mêmes que celles citées pour la promesse unilatérale de vente.

En France et en Espagne, la promesse synallagmatique de vente est considérée comme un contrat préparatoire à la vente, dont l'inexécution est sanctionnée par des dommages-intérêts. Cependant, lorsque les parties ont donné leur consentement à la vente dès la promesse, les tribunaux français et espagnols considèrent que la vente est conclue dès la promesse. Ses effets sont simplement retardés jusqu'à l'accomplissement des formalités supplémentaires prévues par les parties. Les juges français appliquent alors l'article 1589 du Code civil selon lequel " la promesse de vente vaut vente " et les juges espagnols décident que les " effets de ce contrat de promesse sont les mêmes que ceux du contrat de vente ". En conséquence, la partie victime du refus de l'autre d'accomplir les formalités supplémentaires peut obtenir du juge qu'il condamne l'autre à s'exécuter, ou obtenir un jugement valant titre de vente.

Lorsque le promettant a vendu la chose à un tiers, la promesse ne peut plus être exécutée. Sa violation doit être sanctionnée. La sanction est la même qu'en cas de violation de la promesse unilatérale de vente. Cependant, en France, une promesse qui porte sur un droit réel immobilier doit être publiée. Pèse alors une présomption irréfragable de mauvaise foi sur le tiers acquéreur. Le contrat de vente est donc annulé plus facilement puisque la preuve de la mauvaise foi est simplifiée. En Espagne, le bénéficiaire n'obtient que des dommages-intérêts pour réparer son préjudice.

La promesse synallagmatique s'éteint pour des causes générales d'extinction des obligations ou une fois accomplie la formalité supplémentaire prévue par les parties.


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