LE JURIPOLE DE LORRAINE


Serveur d'Information Juridique


Dirigé par François JACQUOT
Professeurs à la Faculté de Droit de Nancy

Réalisé par Alexis BAUMANN





Xavier CARONNA






LA MODIFICATION DU CONTRAT DE TRAVAIL EN DROIT FRANÇAIS ET DROIT ESPAGNOL



Lorsque deux personnes concluent un contrat de travail à durée déterminée ou indéterminée, elles se soumettent à des obligations dont l'exécution va s'étendre dans le temps.
Pendant cette période, il peut se produire des changements économiques techniques ou sociaux nécessitant la modification des prévisions initialement prévues par les parties : c'est la modification du contrat de travail.

Il est apparu intéressant d'étudier cette question en droit français et droit espagnol pour deux raisons principales : d'abord parce que les sources de la modification ne sont pas les mêmes dans les deux législations, ensuite parce que les procédures et les conséquences de la modification ne semblaient pas être équivalentes.
C'est pourquoi nous avons divisé l'examen de ce thème en deux parties

- Sources, champ d'application et définition de la modification (PARTIE I).

- Procédure et conséquences de l'acceptation ou du refus par le salarié de la modification (PARTIE II).

Nous avons, tout au long de ce travail, essayé d'apprécier comment les deux droits ont concilié les intérêts apparemment opposés du chef d'entreprise et du salarié : c'est la question du pouvoir de direction de l'employeur.

S'agissant des sources, il convient de faire deux remarques :

- D'une part, les deux droits de la modification ont des sources principales différentes mais utilisent tous deux des sources annexes. Nous pouvons résumer la situation de la manière suivante : le droit français est essentiellement jurisprudentiel mais quelques textes de loi interviennent en la matière.
Le droit espagnol au contraire, est principalement légal mais la jurisprudence joue un rôle non négligeable, puisqu'elle intervient en amont pour apprécier la substantialité de la modification et en aval pour contrôler si l'employeur a respecté toutes les conditions posées par la loi.

- D'autre part, nous avons traité dans cette partie des conventions collectives, car le droit espagnol envisage celles-ci comme une source possible de modification du contrat de travail.
En ce qui concerne le champ d'application et la définition de la modification, ils sont équivalents. Deux nuances sont à apporter :

- d'abord, le droit espagnol prévoit un régime distinct pour la modification des conditions de travail, la mobilité géographique et la mobilité fonctionnelle, ce qui n'est pas le cas en droit français, puisque la jurisprudence pose un système unique dans les trois cas.

- Ensuite le droit espagnol ne pose pas de règles spécifiques et ne donne pas de définition de la modification non substantielle du contrat de travail.
L'examen comparé des deux droits nous a permis de constater une différence essentielle : l'employeur, en matière de modification substantielle, détient en droit espagnol un pouvoir unilatéral de modification alors que le droit français prévoit le nécessaire accord du salarié pour pouvoir procéder à celle-ci.

Il y a donc en Espagne, une rupture complète avec les principes posés par le code civil selon lesquels la rupture ou la révision d'un contrat doit se faire d'un commun accord.
Ce pouvoir unilatéral de révision n'est cependant pas absolu ou arbitraire : le chef d'entreprise devra respecter les prescriptions légales. Il a notamment, comme en droit français, l'obligation de justifier la modification par l'intérêt de l'entreprise.
En cas d'irrespect de ces règles le salarié pourra contester la modification, soit par la résolution de son contrat de travail (il n'est pas nécessaire de la demander au juge, il peut y procéder d'office), soit par la contestation devant le juge si l'employeur n'a pas justifié sa décision.
Il y a donc une seconde différence : le salarié en droit français à le droit de refuser la modification alors que le travailleur espagnol ne peut que la contester.

En matière de modification non substantielle, le droit espagnol ne prévoit pas de procédure spéciale. Les sentences du Tribunal suprême se contentent de rappeler qu'elle est laissée au "ius variandi" de l'employeur c'est à dire a son pouvoir de direction. La solution est donc la même que celle prévue en droit français. Il faut toutefois apporter une nuance à ce propos, car la jurisprudence hexagonale oblige le chef d'entreprise à justifier sa décision par l'intérêt de l'entreprise.



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