JURIPOLE DE LORRAINE

Serveur d'Information Juridique

Réalisé par Alexis BAUMANN


LES ENGAGEMENTS PUBLICITAIRES
Hélène JUPILLE



DEUXIEME PARTIE





TITRE II

- LA MISE EN OEUVRE DE L'ENGAGEMENT PUBLICITAIRE PAR VOLONTE UNILATERALE -

Nous avons pu constater que rien ne s'opposait à la reconnaissance de l'engagement publicitaire par volonté unilatérale, si nous ne l'étendons pas à toutes les publicités mais à celles seulement qui sont suffisamment précises et largement diffusées (1). La nécessité de reconnaître ce mécanisme en matière de publicité est due, non seulement à une volonté de respecter la réalité comme l'énonce Madame IZORCHE, mais aussi à ses caractéristiques plus adaptées aux espérances des plaideurs (2).

Il est en effet opportun de faire peser une obligation immédiate et irrévocable (3) sur l'annonceur, cela peut même être dans son intérêt puisque plus les consommateurs feront confiance à ses promesses, plus ses publicités seront efficaces. Selon Monsieur AUBERT, "il faut que l'offre, sitôt qu'elle apparaît très ferme, puisse valablement susciter la confiance. Les tiers doivent pouvoir, sans danger, en tenir compte " (4). Il en est de même pour la publicité.

Le mécanisme de l'engagement unilatéral est incontestablement plus intéressant au niveau de ses effets que celui de la responsabilité délictuelle, il apporte une solution plus adaptée aux espérances des plaideurs, la réparation de leur préjudice n'étant pas toujours ce qu'ils espèrent. Par rapport à la qualification de document contractuel, ceci apparaît plus discutable, les effets semblant être sensiblement les mêmes si on omet de considérer la révocabilité de la publicité. En effet, grâce au mécanisme de l'engagement publicitaire par volonté unilatérale, l'annonceur est tenu de respecter le contenu de la publicité dès son émission et non à partir de la conclusion du contrat qu'elle a incité.

Force est de constater que l'engagement par volonté unilatérale respecte plus la nature des publicités et qu'il fournit les solutions les plus favorables aux plaideurs en la matière. Il importe cependant de détailler un peu plus ces solutions et pour cela il faudra définir avec précision les obligations de l'annonceur et la cause de son engagement (Chapitre I) avant de considérer son exécution (chapitre II).

Les publicités, pour les explications données dans cette partie, sont considérées dans leur ensemble, la prédominance des loteries n'a plus lieu d'être puisque nous montrerons que leur contenu et leurs effets sont relativement clairs. Elles n'interviendront à titre incident que pour infirmer ou confirmer une tendance des publicités en général. Leur utilité est d'ailleurs réduite puisqu'elles ne peuvent être intégrées au contrat qu'elles ont incité, l'engagement pris étant autonome.



CHAPITRE 1

L'OBJET ET LA CAUSE DE L'ENGAGEMENT DE L'ANNONCEUR

En matière contractuelle (5), l'objet de l'engagement de l'une des parties est la cause de l'autre. Par exemple, lors d'une vente, la cause de l'acheteur est le transfert de propriété, c'est-à-dire l'objet de l'engagement du vendeur et inversement pour le paiement de la somme d'argent. Les deux parties sont toutes deux débitrices et créancières.

Une personne, par sa seule volonté, ne peut faire naître d'obligation qu'au profit d'un tiers, elle ne peut obliger un tiers en sa faveur (6). L'auteur de l'engagement, seul débiteur, ne pourra alors puiser sa cause dans l'objet de l'obligation du bénéficiaire de l'engagement. La cause n'en est pas moins une condition de validité de l'obligation, il importe donc de la définir en matière d'engagement publicitaire par volonté unilatérale.

L'annonceur promet une qualité ou une caractéristique du bien ou du service qu'il espère vendre. Par exemple, il s'engage à fournir des tuiles ingélives (7), quelles que soient leurs autres caractéristiques (taille, forme, poids, couleur, etc.) ou leur prix qu'il ne mentionne pas. L'objet de l'engagement est la ou les obligations essentielles que le promettant a mis à sa charge. Ces obligations devront être précisément délimitées (Section 1) avant de considérer leur cause (Section 2).



SECTION 1 : L'OBJET DE L'ENGAGEMENT DE L'ANNONCEUR

Les engagements publicitaires en général et ceux découlant des loteries publicitaires n'ont pas le même objet. Celui de l'organisateur d'une loterie est clairement posé : il s'engage à verser une somme d'argent ou à transmettre la propriété d'une chose (voiture, bague avec diamant, etc.) à la personne qu'il annonce gagnante du jeu. C'est une obligation de résultat (8) puisque aucun aléa n'entoure l'exécution de l'obligation (9).

L'objet de l'obligation de l'engagement publicitaire au sens large n'est pas aussi facilement cernable. La qualification des obligations et leur insertion dans les catégories classiquement posées (§2), point important car il a une influence sur leur sanction en cas d'inexécution, ne peut se faire qu'après leur détermination précise, c'est-à-dire la définition de l'objet de l'engagement de l'annonceur (§1).

§1 La détermination des obligations de l'annonceur

L'annonceur a promis, au travers de son message publicitaire, de fournir certains biens ou services aux personnes le désirant (10). C'est une sorte de variante du contrat de promesse unilatérale (11) contenant une obligation de contracter à la charge de l'annonceur et un droit d'option ou une condition suspensive au profit du bénéficiaire. L'annonceur a une obligation principale, soumise à une condition purement potestative, et une obligation accessoire. Ces obligations seront détaillées (A) avant d'analyser la condition suspensive qui touche l'une d'elles (B).

A. Une obligation principale et une obligation accessoire

Nous avons vu que l'annonceur a voulu faire croire au destinataire de la publicité que les biens ou services qu'il proposait à la vente avaient les caractéristiques qu'il décrivait dans sa publicité (12) - qu'ils les aient effectivement ou non - ou qu'il a volontairement formulé un message ambigu et, a ainsi laissé croire à une donnée différente de la réalité. Le désir aidant, le destinataire de la publicité l'a forcément comprise dans le sens de son intérêt et non dans le sens de la réalité. Ayant clairement perçu les conséquences de sa publicité puisqu'il les a voulues, l'annonceur s'est engagé à fournir des produits (13) ayant les mêmes caractères que ceux vantés.

Cette obligation est plus ou moins contraignante selon la précision des termes publicitaires (14). En effet, un message décrivant avec précision les caractères d'une imprimante, sa taille, sa vitesse d'impression, les différents styles d'impression, etc. sera révélateur de la volonté de l'annonceur de vendre ce type de machines respectant tous ces paramètres. En revanche, une agence de voyage annonçant un voyage de Paris à Prague pour X francs devra fournir un produit de ce type que le voyage soit en avion ou en car, qu'il y ait un voyage par semaine ou un départ tous les jours, etc. Son engagement sera donc beaucoup moins rigoureux.

L'obligation, de fournir un produit ayant les mêmes caractéristiques que celui vanté, est accompagnée d'une autre obligation. Reprenons l'exemple des tuiles ingélives. Comme l'annonceur s'engage à fournir des tuiles ingélives si le destinataire de la publicité veut lui acheter des tuiles, il doit donc posséder des stocks de tuiles ayant cette caractéristique. Par conséquent il est possible de dire que promouvoir ses ventes par la description de produits dans une annonce publicitaire impose de pouvoir les proposer à la vente, ce qui est la conséquence logique de l'obligation de vendre un produit ayant les caractéristiques vantées.

Il est à noter que ce mécanisme ressemble à celui de l'obligation d'information. En effet, une obligation de s'informer pour informer le créancier de l'information est mise à la charge du débiteur de celle-ci. C'est l'idée de se donner les moyens de remplir son obligation (15).

En somme, lors de la diffusion de sa publicité, l'annonceur consent, aux destinataires de celle-ci, la faculté d'acquérir le type de bien ou de service qu'il a vanté dans son message publicitaire. Son obligation de proposer à la vente le produit vanté doit être exécutée quelle que soit l'évolution des relations entre les parties tandis que l'obligation de vendre ledit produit dépend de la volonté du destinataire de la publicité de l'acquérir. Cette obligation semble donc conditionnelle.

B. Une condition suspensive en faveur du destinataire de la publicité

Une condition suspensive est "un événement futur et incertain auquel est subordonnée la naissance d'une obligation " (16). Cette condition est soit casuelle - elle dépend du seul hasard, indépendamment de la volonté de l'une des parties -, soit potestative ou purement potestative - sa réalisation repose essentiellement ou exclusivement sur la volonté de l'une des parties -, soit mixte - elle dépend à la fois de la volonté des parties et de celle d'un tiers (17).

En l'espèce la condition est purement potestative, sa réalisation ne dépendant que de la volonté d'une partie. Ce type de condition est nul si la volonté sur laquelle sa réalisation repose est celle du débiteur, il est en effet paradoxal de dire "je m'engage si je veux". En revanche, elle est valable si sa réalisation dépend de la volonté du créancier et, en pratique, elle se rencontre dans tous les contrats de promesses unilatérales de vente. Paul promet à Pierre de lui vendre sa maison si celui-ci désire l'acheter jusqu'à une certaine date.

Il en est de même pour les offres publicitaires, à la différence qu'elles naissent non d'un accord de volonté mais d'une volonté unilatérale. L'annonceur s'engage à vendre le produit vanté aux destinataires de sa publicité pendant un certain laps de temps (18) si ceux-ci le veulent.

Lorsque le destinataire de la publicité souhaite devenir acquéreur du produit vanté, il lève l'option dont il dispose. Lorsque la condition suspensive se réalise, en matière contractuelle, elle fait naître l'obligation rétroactivement au jour de la conclusion de l'accord la contenant. Cet effet rétroactif n'est que facultatif (19), les parties pouvant stipuler une autre date pour la naissance de l'obligation.

En matière de publicité, l'annonceur s'engageant à fournir le produit vanté aux destinataires de sa publicité lors de sa diffusion,  la volonté de l'acquéreur n'est alors pas intervenue et il ne connaît pas forcément la date de diffusion. Le mécanisme de la rétroactivité ne semblant donc pas être adapté à la promesse née d'une seule volonté, cette règle n'est pas transposable aux engagements unilatéraux puisque l'intervention des deux parties apparaît comme nécessaire. La levée de l'option n'aura donc pas de valeur rétroactive, valeur qu'elle n'a d'ailleurs pas en matière de contrat de promesse unilatérale de vente, celle-ci étant conclue au jour de la levée de l'option et non au jour de la conclusion de la promesse.

En somme, l'annonceur prend une obligation conditionnelle de fournir le produit vanté aux destinataires de sa publicité qui le souhaiteraient et la réalisation de la condition ne dépend que de la volonté du destinataire de la publicité. Il est alors indispensable que l'annonceur soit à même de fournir le produit vanté et dispose donc des stocks nécessaires, sinon une contrainte matérielle s'opposerait à l'exercice de la volonté du destinataire.

Il importe désormais, après avoir précisé les obligations de l'annonceur, de les qualifier pour connaître les sanctions dont elles sont susceptibles en cas d'inexécution.

§2 La garantie d'exécution des obligations de l'annonceur

Deux obligations sont à la charge de l'annonceur : l'obligation de proposer à la vente les biens ou services vantés dans la publicité (A) et l'obligation de vendre ce type de bien ou de service lorsque le destinataire de publicité souhaite l'acquérir (B).

A. L'obligation de proposer à la vente

L'annonceur s'engage à faire tout ce qui est en son pouvoir pour satisfaire les demandes que sa publicité suscitera. Il ne peut être tenu d'une obligation de résultat puisque le créancier de son engagement a un rôle actif lors de l'exécution de celui-ci (20). Pour être plus précis ce n'est pas un seul destinataire de la publicité qui acquiert ce rôle actif mais la multitude de destinataires qui vont choisir de venir acheter le produit vanté. En effet, le slogan de l'annonceur peut être beaucoup plus performant qu'il ne l'avait imaginé, une mode subite peut se déclarer entre l'émission de la publicité et son terme, ou encore une catastrophe naturelle peut emporter, par exemple, toutes les tuiles et la demande d'achat de tuiles atteindra alors des niveaux inespérés (21), etc.

L'évaluation exacte des demandes étant difficilement possible, l'annonceur ne peut être obligé qu'à une obligation de moyens puisque les destinataires de la publicité jouent un rôle, ainsi que parfois le fabricant du produit vanté qui peut avoir stoppé la production de celui-ci (22).

L'annonceur, tenu à faire tout son possible pour proposer le produit vanté à la vente, ne pourra pas baser sa campagne publicitaire sur un produit qu'il n'a pas en stock ou qu'il possède en très petite quantité. De plus, si la publicité a un succès inespéré, et qu'il lui est possible de se réapprovisionner, il pourra être déclaré responsable de ne pas l'avoir fait.

Lorsque l'annonceur insère à sa publicité une clause telle que "nous disposons de stocks suffisant pour satisfaire vos demandes, si jamais il venait à manquer un article présenté dans cette publicité, veuillez le commander à l'accueil, le produit ou un produit similaire vous sera fourni dans les meilleurs délais au prix annoncé dans ce dépliant ", il s'engage à commander le produit manquant mais il n'engage alors pas le destinataire de la publicité à l'acheter; il ne peut exister une obligation d'achat à sa charge par la seule volonté de l'annonceur. Le destinataire de la publicité bénéficie toujours de son droit d'option sur la proposition que l'annonceur lui fait d'acquérir le produit vanté.

L'annonceur alourdit son obligation de proposer à la vente les produits vantés lorsqu'il s'engage à commander le produit manquant ou un produit similaire. Cette obligation de commande peut être qualifiée d'obligation de résultat puisqu'il est toujours possible de se procurer un produit similaire contrairement au produit précis vanté dans la publicité. En effet, si l'annonceur propose à la vente des tasses jaunes, le fabricant de celles-ci peut avoir décidé par la suite de les peindre en vert et de ne plus produire de tasses jaunes, l'annonceur ne pourra alors plus commander des tasses jaunes mais il pourra fournir des tasses vertes !

Il est à noter que cette obligation contraint l'annonceur qui est aussi le distributeur du produit vanté. En effet, un distributeur n'ayant pas participé à une campagne publicitaire ne peut être obligé de proposer à la vente le produit vanté dans une publicité qui n'est pas la sienne. Par exemple, si le fabricant d'une lessive vante ses mérites dans une annonce publicitaire, il ne peut obliger, par sa seule volonté, l'ensemble des distributeurs de ladite lessive à la posséder en stocks suffisant pour répondre aux demandes suscitées par sa publicité. Il est à noter que la publicité peut donc bénéficier à un distributeur qui ne sera pas engagée par celle-ci.

En revanche si le distributeur appose son nom sur la publicité, il sera contraint de proposer à la vente le produit vanté. Par exemple, plusieurs grandes surfaces appartenant au même groupe s'assemblent pour diffuser une publicité, toutes celles qui auront indiqué leur nom dans la publicité seront tenues de la respecter.

B. L'obligation de vendre le produit vanté

Il importe de distinguer entre la fourniture du produit et l'insertion de la qualité dudit produit dans l'offre de contracter. La fourniture appartient à la phase contractuelle, elle est liée à l'exécution du contrat vanté par la publicité, son inexécution sera donc régie par les règles classiques de la responsabilité contractuelle (23) tandis que l'obligation d'insérer la qualité est celle qui découle directement de l'engagement publicitaire. Celle-ci est une obligation de résultat.

Le créancier de l'engagement ne joue pas de rôle dans son exécution, seul le comportement de l'annonceur est actif. De plus son exécution n'est source d'aucun aléa. Seul le caractère apparemment gratuit de l'opération pourrait faire basculer cette obligation dans le domaine des obligations de moyens mais nous nous apercevrons que l'annonceur y trouve un avantage (24).

CONCLUSION de la SECTION 1

L'annonceur a mis deux obligations à sa charge : d'une part, l'obligation de proposer à la vente des produits ayant les caractéristiques énoncées à travers le message publicitaire et d'autre part, de vendre ce type de produit si le destinataire de la publicité souhaite l'acquérir. La première obligation est, en principe, une obligation de moyens sauf si l'annonceur s'engage à commander le produit vanté dans sa publicité ou un produit similaire s'il est en rupture de stocks, l'obligation devenant alors une obligation de résultat. La seconde est en revanche toujours une obligation de résultat, l'annonceur devant insérer dans son offre de contracter la qualité promise (25). La reconnaissance d'une obligation de résultat permet d'obliger l'annonceur à exécuter son engagement donc, en quelque sorte, il pourra être considéré que la qualité promise est "automatiquement" insérée au contrat conclu entre l'annonceur et le destinataire de la publicité.



SECTION 2 : LA CAUSE DE L'ENGAGEMENT DE L'ANNONCEUR

Toute obligation pour être sanctionnable doit avoir une cause puisque, selon l'article 1131 du code civil, "l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet ". La généralité des termes de la règle contractuelle permettant de la transposer en matière d'engagement unilatéral (26), il importe donc de définir la cause de l'engagement de l'annonceur (27).

De manière générale, la notion de cause peut avoir deux sens: soit il s'agit de la cause efficiente, c'est-à-dire l'élément générateur, l'origine d'un fait, cause exploitée en matière délictuelle (28); soit il s'agit de la cause finale, c'est-à-dire "l'intérêt de l'acte juridique pour son auteur " (29), notion utilisée dans les rapports contractuels. La personne qui s'engage a des raisons de le faire qui lui sont propres et qui seront différentes chez chaque personne qui s'engage (30) - cause impulsive et déterminante, purement subjective - et elle a aussi un but objectif, invariable dans un même type d'acte (31) - cause abstraite ou objective.

En matière d'engagement unilatéral, plusieurs auteurs (32) considèrent que la notion de cause objective ne peut s'adapter à ce type d'engagements, ils n'envisagent donc la cause que sous son aspect subjectif (§I). Nous verrons que l'engagement publicitaire contient les caractéristiques d'un contrat intéressé et aurait donc à ce titre une cause objective, identique pour tous les engagements publicitaires par volonté unilatérale (§II).

§1 Difficultés pour déceler une cause objective en matière d'engagement unilatéral

Les notions de cause objective et de cause subjective n'ont pas les mêmes implications juridiques puisque la première sert à analyser l'existence de la cause tandis que la seconde permet de vérifier la licéité de celle-ci. Cette distinction tranchée a tendance à s'estomper en matière d'engagement unilatéral puisque l'existence d'une cause objective peut être difficilement reconnue sans porter atteinte à la force obligatoire de la volonté unilatérale (A); donc seule une cause subjective peut permettre de constater l'existence d'une cause en matière d'engagement unilatéral (B). Nous n'envisagerons pas la licéité de la cause en matière d'engagement unilatéral puisque pour cette licéité les règles contractuelles classiques sont transposables.

A. La cause objective d'un engagement unilatéral

La jurisprudence, contrairement à la doctrine, semble être favorable à la notion de cause objective appliquée aux engagements unilatéraux. Dans une espèce jugée par la Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (33), une femme, séparée de biens, s'était engagée à payer un créancier de son mari alors en liquidation judiciaire. La femme, après avoir effectué quelques paiements, se ravisa et demanda l'annulation de sa reconnaissance pour défaut de cause. La Cour fit droit à sa demande en constatant que la cause d'une reconnaissance de dettes consiste dans l'existence de dettes préalables et, en leur absence - cas en question puisqu'il s'agit des dettes du mari -, "l'obligation se trouve privée de cause et par-là même privée d'effet en application de l'article 1131 du code civil " (34). Cependant les paiements effectués ne pourront lui être restitués, selon l'article 1235 du code civil, car elle s'était sentie "moralement tenue de rendre service au créancier de son mari, qui avait un besoin urgent de liquidité " (35).

La Cour de cassation (36) reconnut comme sans cause une reconnaissance de dette, dette contenue dans un contrat annulé, au motif qu'il existait "un lien indissociable entre ledit contrat et la reconnaissance de dette (...) qui en constituait le prolongement et l'exécution ".

Cette tendance jurisprudentielle a été confirmée récemment par la première chambre civile lorsqu'elle constata que "la transformation - improprement qualifiée de novation - d'une obligation naturelle en obligation civile, laquelle repose sur un engagement unilatéral d'exécuter l'obligation naturelle, n'exige pas qu'une obligation civile ait elle-même préexisté à celle-ci " (37).

Dans tous ces cas, les juges ont recherché une obligation naturelle ou un contrat préexistant à l'engagement pour déceler l'existence d'une cause. Celle-ci est alors abstraite, il s'agit d'une obligation naturelle ou d'une obligation civile préexistante, mais la source de l'engagement n'est donc plus seulement la volonté interne. N'étant alors plus par lui-même créateur d'obligations, l'engagement unilatéral ne peut être qu'affaibli très sérieusement par la théorie de la cause objective.

B. La cause subjective de l'engagement unilatéral

La cause subjective, c'est-à-dire les motifs déterminants de l'auteur de l'engagement unilatéral, permettraient de définir la cause de l'obligation souscrite et de constater son existence. La Cour d'appel d'Aix-en-Provence (38) semble retenir ce type de conception de la cause, contrairement au reste des tribunaux. Dans une espèce concernant aussi une reconnaissance de dettes faite par une femme pour les dettes de son mari, elle considéra que la cause de l'engagement de la femme était d'éviter à son mari des poursuites pénales pour non-paiement. La Cour d'appel ne s'est pas fondée sur une obligation préexistante pour valider l'engagement de la femme mais bien sur ses motifs personnels.

Cette position est approuvée par une partie de la doctrine parce qu'elle "a le mérite tout à la fois de respecter la volonté affichée dans l'acte unilatéral et, par l'exigence d'une cause-contrepartie, de la protéger contre des expressions inconsidérées " (39). Cette exploitation de la cause subjective permet effectivement au juge de constater la fin d'un engagement unilatéral lorsque la cause disparaît, ce qui du reste affaiblit la valeur contraignante de l'engagement unilatéral (40). Pourtant, en matière d'engagement publicitaire par volonté unilatérale, il semble possible de déceler une "cause-contrepartie" objective.

§2 La cause objective de l'engagement publicitaire

Nous montrerons qu'il est possible d'admettre le principe d'une cause objective en matière d'engagement publicitaire sans affaiblir la force de la volonté unilatérale (A). Cette cause pourra être définie grâce au caractère intéressé de la promesse publicitaire(B).

A. L'équivalence voulue par l'annonceur lorsqu'il s'engage

La doctrine (41) et la jurisprudence (42) semblent parfois considérer la cause d'un engagement comme l'équivalence voulue par le débiteur entre sa situation s'il ne s'engage pas et sa situation s'il se lie. Pour cela, il ne peut exister d'obligation préexistante à l'engagement.

En matière contractuelle, il existe une cause objective par obligation découlant d'une même catégorie d'accord. Chaque catégorie d'engagement unilatéral aurait donc une cause propre. L'engagement publicitaire n'aura alors pas la même cause que, par exemple, la reconnaissance de dette faite par une personne pour s'engager à payer les dettes d'une autre personne. La discussion, en matière de reconnaissance de dette de ce type, pour savoir s'il s'agit d'une obligation créée seulement par la volonté, ou s'il s'agit d'une obligation naturelle préexistante transformée en obligation civile par la volonté, ne concerne pas les engagements publicitaires puisqu'il nous semble difficile de déceler un devoir de conscience chez l'annonceur envers le destinataire de la publicité. Il semble en effet clair qu'entre l'annonceur et un des futurs destinataires de la publicité, il n'existe, aucun lien juridique ou moral. Même lorsque l'annonceur et le destinataire de la publicité ont déjà été en relation comme, par exemple, lorsque l'annonceur envoie des promotions à des "bons clients", le lien juridique préexistant ne concerne pas directement la nouvelle campagne publicitaire. De plus, dire que la reconnaissance envers la fidélité de ses clients ferait naître une obligation naturelle à la charge de l'annonceur, semble quelque peu exagéré par rapport aux cas d'obligations naturelles de reconnaissance admis par la jurisprudence (43). La volonté sera la seule source des obligations de l'annonceur, la cause de l'engagement ne pourra donc découler que de la contrepartie espérée (44).

La cause de l'engagement unilatéral, selon Marie-Laure IZORCHE, se situe dans l'équivalence entre la situation de l'auteur de la promesse s'il ne s'engage pas, et sa situation s'il se lie. Il en tire un avantage calculé qui forme sa cause. Celui-ci peut être soit subjectif, par exemple lorsqu'une personne veut éviter à un proche des poursuites pénales, soit objectif, hypothèse très nette en ce qui concerne les publicités qui sont toujours émises dans le but d'inciter à la vente, le bénéfice de l'annonceur étant supposé inférieur s'il ne la diffuse pas.

Madame IZORCHE analyse une espèce proche d'une publicité. A la suite du règlement judiciaire d'une banque, l'Association Française des Banques (A.F.B.) prit l'engagement de rembourser les petits et moyens épargnants titulaires de comptes dans ladite banque à concurrence de 200 000 F. Une Dame, bénéficiaire de l'engagement, se voyant refuser le remboursement, assigna l'A.F.B. en exécution de sa promesse. Selon la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, cet engagement, dont l'initiative est libre (45), a une cause "qui peut être qualifiée d'obligation naturelle, et qui est en toute hypothèse une cause cohérente " (46). Or, selon l'auteur (47), cette "cause cohérente ", plus certaine que la possible obligation naturelle, est l'intérêt de l'A.F.B. à ce que ne soit pas ternie l'image des banques quitte à rembourser dans l'instant les petits et moyens épargnants. " L'initiative de l'A.F.B. n'est que le résultat d'une démarche logique du professionnel qui calcule l'intérêt qu'il a à s'obliger pour recueillir plus tard les fruits de son engagement " (48).

Cette interprétation de l'intérêt de l'A.F.B. correspond à l'engagement publicitaire, l'annonceur espérant bien, s'il a eu la volonté de s'engager au sens strict, obtenir la contrepartie de ce désagrément dans l'augmentation de ses ventes et ceci parce que l'engagement publicitaire est intéressé.

B. L'engagement publicitaire, engagement unilatéral intéressé

Le caractère intéressé peut être supposé dans tous les engagements unilatéraux. Par exemple, lorsqu'une femme s'engage à payer les dettes de son mari pour éviter à celui-ci des poursuites pénales, elle y trouve un intérêt; mais celui-ci se rapporte essentiellement au domaine de l'honneur et non à un avantage matériel. En matière d'engagement publicitaire, la philanthropie n'existant pas dans les relations d'affaires, l'intérêt de l'annonceur est financier et se rapproche alors du contrat de prêt intéressé sur lequel la doctrine et la jurisprudence ne sont pas toujours en accord.

L'étude du prêt à usage en matière commerciale semble intéressante sur ce point (49). En effet, le prêt à usage, contrat réel, est désintéressé: le contrat se forme lorsque le prêteur remet la chose à l'emprunteur qui a alors l'obligation de la restituer, le prêteur n'a pas un avantage direct puisque ce type de prêt n'est pas rémunéré comme en matière bancaire. Sa cause émane de son intention d'aider ou de rendre service à l'emprunteur, cause qui se comprend très bien lorsque, par exemple, une personne prête une échelle à son voisin.

Lorsqu'un commerçant prête une chose, comme par exemple un chariot à commissions (50), à un client potentiel, son but n'est alors pas de rendre service car il espère bien en tirer un avantage. La doctrine a proposé de considérer qu'il s'agissait là d'un contrat intéressé, d'une gratuité d'affaire: le commerçant n'est pas totalement désintéressé, il s'engage en espérant obtenir dans le futur un avantage - c'est-à-dire l'augmentation de ses ventes - qui n'est pas certain lors de la conclusion du contrat de prêt.

Cet avantage, quand il ressort d'un engagement publicitaire, ne peut se comprendre qu'en considérant, d'une part qu'il est lié au fait que l'annonceur s'engage pour inciter à la vente, donc espère conclure d'autres contrats et, d'autre part à la multitude d'engagements pris par l'annonceur (51).

L'engagement publicitaire, sans pour autant faire naître d'obligation à la charge de son bénéficiaire, a pour fonction d'inciter à la vente, soit directement - cas de toutes les publicités vantant un produit, une marque, etc.-, soit indirectement - cas essentiellement des loteries (52). L'annonceur espère lors de la diffusion de sa publicité qu'elle lui permettra d'augmenter ses ventes, en concluant plus de contrats que s'il ne l'avait pas émise. Son intérêt à s'engager résultera des contrats qu'il souhaite conclure du fait de l'émission de sa publicité, cet avantage étant futur et incertain.

L'incertitude du résultat diminue si l'annonceur s'engage envers beaucoup de personnes. En effet, il serait bien étrange qu'aucune ne réagisse à son message. Il obtiendra donc forcément des réponses et son avantage sera d'autant moins aléatoire qu'il communiquera sa publicité à d'autant plus de personnes (53). L'annonceur n'est pas certain de conclure des contrats, sa publicité pouvant s'avérer un désastre. Mais en matière contractuelle, l'existence de la cause n'est vérifiée qu'à la conclusion de l'accord; si l'on transpose cette règle aux engagements unilatéraux, l'existence de la cause serait envisagée lors de la naissance de l'obligation et donc pour les publicités lors de leur diffusion. A ce moment précis les annonceurs ont voulu et ont fait leur publicité dans le but d'inciter à la vente et tous ont eu cet intérêt de s'engager. Le juge ne pourrait pas annuler la promesse unilatérale pour disparition de la cause comme il le fait parfois.

Il est à noter cependant que la jurisprudence reste peu encline à accepter cette interprétation puisqu'elle continue à classer les contrats intéressés parmi les contrats gratuits.

CONCLUSION de la SECTION 2

L'engagement publicitaire se distingue d'une grande partie des engagements unilatéraux parce qu'il est intéressé, l'annonceur espérant obtenir un avantage financier extérieur à son engagement mais qui le compensera de sa peine. Cet avantage ressort de la conclusion, potentielle mais quasiment certaine eu égard à la grande diffusion de sa publicité, de contrats et de là de l'augmentation de ses bénéfices. Cet avantage pouvant objectivement se constater dans tous les engagements publicitaires, y compris pour le cas particulier des loteries incitant indirectement à l'achat, peut être considéré comme la cause objective de l'annonceur.



CHAPITRE 2

LA DUREE DE L'ENGAGEMENT PUBLICITAIRE

La période d'exigibilité de la promesse (Section 1) est à envisager avant son devenir, puisque les parties, grâce à leur relation, influent sur la promesse (Section 2), essentiellement, durant cette période d'exigibilité. Il est noter que si aucun bénéficiaire de la promesse publicitaire ne se manifeste, celle-ci ne sera pas contrôlée dans sa véracité (54), les sanctions ne s'envisageant qu'en cas de manquement à l'une des deux obligations à la charge de l'annonceur, voire aux deux.

SECTION 1 : LA PERIODE D'EXIGIBILITE DE LA PROMESSE

L'annonceur semble toujours poser des limites temporelles à son engagement soit expressément (§I) soit tacitement (§II).

§1 Respect des limites temporelles posées par l'auteur de l'engagement

Les limites temporelles renforcent la qualité d'engagement unilatéral de la publicité. Elles permettent de déduire que l'auteur de l'engagement a eu une volonté ferme de s'engager puisqu'il a limité la durée de son engagement, sinon pourquoi l'aurait-il fait s'il ne se sentait pas contraint de le respecter (55) ?

Ces limites devant être respectées, il nous importe de comprendre leurs effets sur l'engagement publicitaire avant (A) et après (B) la période stipulée, l'engagement étant irrévocable au cours de cette période (56). Les limites que nous envisageons ne se veulent pas exhaustives.

A. Quelle est la valeur de la promesse avant le début du délai stipulé ?

La première tentation serait de dire aucune. L'auteur de l'engagement n'a voulu se contraindre qu'à partir d'une certaine date et pendant un laps de temps précis. Pourtant une distinction s'impose entre le contenu même de la promesse et son maintien.

Le bénéficiaire de la promesse ne peut demander son exécution avant le moment indiquée, ce point est indéniable. La discussion est plus délicate qu'en au maintien de la promesse. Existe-t-il un engagement unilatéral de maintenir la promesse (1) ? Ou l'obligation est-elle née lors de la diffusion de la publicité et seule son exigibilité serait différée par l'existence d'un terme suspensif (2) ?

1. Explication par l'engagement unilatéral

Le promettant est-il tenu de maintenir sa promesse avant la date qu'il a lui-même fixée ? Nous avons constaté qu'avant la diffusion de sa publicité le promettant n'était pas tenu, sa volonté ne pouvant être déduite qu'à partir d'une diffusion conséquente. La période en question est, par conséquent, celle s'écoulant de la diffusion massive de la publicité au début du délai fixé par l'annonceur. Cette question se pose rarement puisque généralement la réception de la publicité concorde avec le début de l'opération.

L'obligation de maintenir la promesse publicitaire fait penser à celle de maintenir l'offre de contracter. La doctrine considère que les offres contenant un délai et faites à personne déterminée ne peuvent être révoquées pendant ce délai, l'offrant ayant par sa seule volonté pris l'engagement de maintenir son offre (57). Les stipulations de délai alors envisagées ne faisant jamais référence à une date de début de l'engagement, la période considérée commence lors de l'émission de l'offre. De plus le maintien de l'offre de contracter n'est considéré comme un engagement unilatéral que lorsque l'offre est adressée à personne déterminée, cas rares en matière de publicité. Les discussions de la doctrine sur le maintien de l'offre de contracter n'apporteront donc pas de solution quant à la valeur juridique des publicités avant le délai fixé par l'annonceur.

Il serait peut-être possible de contraindre l'annonceur à maintenir sa promesse en considérant que les destinataires de la publicité ont cru à son maintien. Comme nous l'avons constaté, les croyances des destinataires de la publicité sont primordiales puisque l'annonceur les avait prévues et voulues. En effet, l'annonceur a choisi de diffuser sa publicité, avant le début de l'opération commerciale qu'elle annonce, pour que son impact soit plus grand et que ses destinataires en prennent connaissance avant le début de l'opération.

Il semble alors envisageable de retenir un engagement unilatéral de maintenir la promesse publicitaire faite. L'obligation contenue dans la promesse ne serait pas encore née, la proposition n'aurait en elle-même pas encore une valeur juridique, en revanche, elle devrait être maintenue. Ceci semblant quelque peu complexe une autre solution est à envisager.

2. Explication par le mécanisme du terme

Les obligations contenues dans une promesse publicitaire seraient à terme, le terme étant un événement futur dont l'arrivée est certaine et qui n'affecte pas l'existence de l'obligation mais uniquement son exigibilité - cas du terme suspensif, ici envisagé. Les obligations de l'annonceur seraient donc nées lors de la diffusion de la publicité (58) mais ne seraient exigibles qu'à partir de la date fixée par l'auteur de la promesse.

Le terme étant suspensif, l'exécution des obligations, c'est-à-dire proposer à la vente et insérer dans le contrat incité par la publicité la qualité promise dans celle-ci, ne pourra être exigée qu'à l'échéance. Celle-ci pourra être certaine, par exemple, "le 4 mai", ou incertaine, "au prochain arrivage". Dans tous les cas la survenance de l'événement est posée par l'annonceur comme certaine, contrairement au mécanisme de la condition contenu dans l'obligation d'insérer, au contrat incité par la publicité, les qualités vantées dans celle-ci si son destinataire le souhaite. Ce terme n'aura pas pour origine un accord de volonté comme en matière de crédit, mais la volonté unilatérale de l'annonceur, la règle contractuelle semblant être transposable sur ce point.

Ce mécanisme semble préférable au premier, trop complexe. La question se repose quant à l'après échéance du délai.

B. Quelle est la valeur de la promesse après le délai stipulé ?

Ceci peut être analysé comme un terme extinctif qui concerne les obligations successives (59) et qui fixe le moment où elles cessent d'être dues. Il n'est pas question de rétroactivité, ceci ne concerne que le futur. Le contrat dans lequel un terme est stipulé se déroule normalement jusqu'à l'échéance et lors de sa survenance les relations entre les parties cessent pour l'avenir.

Comme l'engagement publicitaire a pour source la volonté unilatérale, il en est de même pour le terme. L'annonceur doit tenir sa promesse jusqu'à la date fixée et se trouve libéré après ce délai. Le terme peut aussi être, comme pour le terme suspensif étudié ci-dessus, un événement incertain, non quant à sa survenance mais quant à la date de celle-ci. Ce pourrait être l'exemple de la clause, discutée en droit de la consommation, de limite des stocks disponibles.

Cette analyse permet de dire que les limites temporelles fixées par l'annonceur dans sa publicité sont des termes, le premier suspensif et le second extinctif. Ils contraignent l'annonceur qui ne peut les modifier sauf accord du destinataire de la publicité (60). Que se passe-t-il alors lorsque l'annonceur n'a pas stipulé de limite ?


§2 Absence de stipulation de limites temporelles

Il n'est pas pensable de considérer que l'annonceur a voulu se lier indéfiniment. Il a implicitement stipulé un délai, les publicités ayant une durée de vie réduite. Ce délai doit néanmoins être relativement précis. A partir de quand a-t-il voulu se lier (A) et jusqu'à quand (B) ?

A. La naissance de l'engagement et son exigibilité

La diffusion de la publicité permet de supposer la volonté de l'annonceur de se lier. Il semble donc cohérent de considérer la naissance de l'obligation par rapport à ce moment. Elle n'en est pas pour autant exigible automatiquement comme nous l'avons vu ci-dessus.

L'annonceur a-t-il inclus dans sa promesse un terme implicite ? Les usages semblant être muets en la matière, il serait donc possible de dire que la promesse est exigible dès sa diffusion, dès que la première personne la reçoit et non à la fin de sa diffusion, qui peut s'avérer très longue.

Madame IZORCHE propose une autre solution: " à partir du moment où une personne qui s'est obligée, fût-ce unilatéralement, manifeste son intention d'échapper à ses propres engagements, alors l'obligation souscrite devient exigible " (61). Les obligations de l'annonceur seraient donc exigibles lorsqu'il souhaiterait y déroger, c'est-à-dire lors de la conclusion du contrat s'il le fait à des conditions différentes ou lors de la livraison s'il transmet un objet différent de celui annoncé dans la publicité ou encore lorsqu'il refuse de verser un lot, en matière de loterie publicitaire.

Cette solution semble s'adapter aux publicités mais suppose que le destinataire de la publicité demande l'exécution de l'engagement de l'annonceur, ce qui complique l'exécution des obligations de l'annonceur. Il nous paraît donc plus simple de considérer comme exigibles les obligations l'annonceur dès qu'il diffuse sa publicité sauf s'il stipule un terme suspensif dans ladite publicité.

B. La disparition de l'obligation

L'annonceur, lorsqu'il ne stipule pas un terme à son obligation ne souhaite pas pour autant se lier indéfiniment. La dette de l'annonceur ne peut être perpétuelle en vertu de la prescription de toute obligation par écoulement d'un certain laps de temps. Ceci reste pourtant trop long par rapport à ce qu'a pu vouloir l'annonceur et ce qu'a espéré le destinataire de la publicité.

La détermination de ce délai est fondamentale car les publicités peuvent s'égarer et n'être lues que très longtemps après leur diffusion, l'annonceur ne peut plus alors être tenu. Comment fixer ce terme ? Nous proposerons quelques indices permettant de déterminer ce terme.

Le terme extinctif ne peut être la fin de la diffusion car la dernière personne recevant la publicité ne pourrait bénéficier des promesses qu'elle contient. Toujours est-il que la disparition de toutes les affiches sur les panneaux publicitaires ou la fin de la diffusion des slogans à la télévision laisse supposer la fin imminente de l'action commerciale.

Le déclenchement d'une nouvelle campagne par la même société de fourniture de biens ou de services sonne le glas des anciennes promesses, l'annonceur ayant désormais la volonté de respecter de nouvelles promesses. Les opérations publicitaires étant très coûteuses elles ne se succèdent pas rapidement, l'annonceur souhaitant "rentabiliser" sa campagne. Il n'est pas pour autant envisageable de ne poser que cette limite. En effet, ce serait contraindre l'annonceur à une nouvelle campagne publicitaire pour ce trouver délier de la précédente, cercle dont il ne sortirait jamais.

L'épuisement des stocks ne peut non plus être l'élément du terme car il est inconnu du destinataire de la publicité, il ne peut être perçu par lui. Et qui plus est, ce serait un moyen trop simple pour l'annonceur de se soustraire à sa responsabilité. Il n'aurait qu'à ne commander qu'en toute petite quantité pour être instantanément délié. Cette malhonnêteté sanctionnée sur le terrain pénal, l'est aussi si la valeur d'engagement unilatéral est reconnue aux publicités puisque l'annonceur a alors l'obligation de proposer à la vente le produit vanté.

Plusieurs indices matériels contenus dans la publicité sont aussi à prendre en considération. Par exemple, une publicité sur des denrées périssables sera plus éphémère que les autres publicités. Il en est de même d'une publicité apposée directement sur la façade de l'annonceur, lorsqu'elle est enlevée, l'annonceur n'est plus tenu de respecter ses promesses.

Ces différents indices servent à trouver un délai raisonnable d'exigibilité de la promesse. Il est inspiré par celui du maintien de l'offre de contracter, qui sera déterminé au cas par cas en fonction du produit vanté, par exemple. L'annonceur ne peut être lié pendant trente ans, prescription de droit commun, sa promesse, de part sa nature, ne pouvant être maintenue que pendant un période assez réduite. De plus, le destinataire de la publicité ne l'a pas considérée comme perpétuelle, il ne lui accorde qu'une importance momentanée. Force est de constater que l'existence d'une limite temporelle ne pose guère de problème mais qu'il en est autrement de sa détermination exacte. Il est évident qu'au jour de la diffusion, l'annonceur est tenu et que très longtemps après celle-ci, il est délié de son engagement mais il est difficile de donner une limite précise entre ces deux extrêmes. Pour plus de sécurité et de clarté, il pourrait être conseillé aux annonceurs de mentionner un délai.

Il est à noter qu'après la survenance du terme la promesse étant éteinte, l'annonceur n'est plus tenu de la respecter mais il peut toujours vendre les produit annoncés dans sa publicité. Le destinataire de celle-ci devra seulement se mettre d'accord avec lui pour en bénéficier des qualités du produit anciennement vantées, ce ne sera plus automatique.

CONCLUSION de la SECTION 1

Les obligations de l'annonceur, c'est-à-dire proposer à la vente le produit vanté et le vendre aux destinataires de sa publicité si ceux-ci le souhaitent, sont exigibles durant le délai qu'il fixe ou durant un délai raisonnable évalué en fonction du type de la publicité, de sa date de diffusion, de la nature du produit vanté et d'autres indices matériels qui l'entourent. Avant ce délai la promesse existe sans être exigible et après ce délai, elle s'éteint. Ces différents points ont été unilatéralement fixés par l'annonceur et bénéficient à tout lecteur de la publicité, ils peuvent être modifiés comme le reste de la promesse par un accord de volonté entre l'annonceur et un des destinataires de la publicité, modification ne touchant alors pas les autres destinataires de ladite publicité.

SECTION 2 : L'EVOLUTION DE LA PROMESSE EN CAS D'INTERVENTION DES PARTIES

La promesse publicitaire peut être modifiée ou résiliée, non pas par la volonté d'une seule partie mais par un accord de volonté entre les deux parties (§I). La promesse initiale ou modifiée sera insérée dans le contrat que la publicité a incité (§II).

§1 Les modifications ou altérations de la promesse

La promesse publicitaire née d'une seule volonté ne peut être modifiée ou résiliée par une seule volonté (A) mais pourra l'être par un accord de volonté entre les deux parties (B).

A. Le pouvoir modificateur d'une seule volonté

La volonté exprimée peut être celle de l'annonceur (1) ou celle du destinataire de la publicité (2).

1. La volonté de l'annonceur

Un des grands arguments opposé à la reconnaissance de l'engagement unilatéral a été qu'une volonté se liant seule pouvait se délier seule. La controverse n'est plus de mise. Selon Monsieur AUBERT, "si l'on admet qu'une personne peut s'engager valablement par sa propre volonté, cela ne signifie pas qu'elle puisse, ensuite, se délier de la même manière: la liberté dont dispose chacun est de s'engager ou de ne pas s'engager, non de s'engager et de se délier " (62).

L'annonceur ne peut donc pas se délier seul après s'être engagé seul. Ce principe pourrait être atténué par deux exceptions contractuelles, transposables aux engagements unilatéraux, mais qui semblent étrangères au mécanisme de la promesse publicitaire. Il est, en effet, admis, en matière contractuelle qu'une partie peut se délier seule pour l'avenir dans deux hypothèses notamment: d'une part, si le contrat est conclu intuitu personae et d'autre part, s'il est à durée indéterminée.

Il semble qu'une personne puisse s'obliger par sa seule volonté en considération de la personne de son créancier. Mais, ici, il est difficile de constater un caractère intuitu personae, les qualités des destinataires de la publicité n'intervenant qu'à titre commercial. Si l'annonceur détermine les personnes à qui s'adresse sa publicité (63), limitant alors le nombre des bénéficiaires, il ne s'est engagé que par rapport à eux mais ne s'est pas réservé la possibilité de refuser certains d'entre eux en fonction de leurs aptitudes personnelles.  S'il diffuse sa publicité au grand public, il ne prend en considération les qualités du destinataire de celle-ci que pour augmenter son impact et non pour limiter son engagement: lorsqu'il cible sa publicité par rapport aux caractères de son acheteur potentiel, il n'a pas voulu insérer un caractère intuitu personae à sa promesse puisque si elle atteint d'autres personnes, il n'en sera que plus satisfait.

Il est tout à fait possible de constater l'existence d'un engagement par volonté unilatérale à durée indéterminée et à exécution successive. Un exemple est donné par le droit social: un employeur peut s'engager à accorder des avantages réguliers à ses salariés sans limiter cet engagement dans le temps. Il peut alors revenir sur son engagement en respectant certaines conditions, notamment en informant ses créanciers de la rétractation de sa promesse pour l'avenir et en respectant un délai raisonnable (64).

Ce mécanisme ne peut s'appliquer pour les promesses publicitaires. D'une part, elles contiennent un terme explicite ou implicite donc sont à durée déterminée (65) et d'autre part, une des conditions nécessaires à la résiliation est de porter à la connaissance des créanciers de l'engagement cette résiliation, ce qui semble quelque peu difficile en la matière.

L'annonceur ne peut modifier sa promesse ou se délier seul puisque son engagement n'est ni pris intuitu personae ni à durée indéterminée. Le destinataire de la publicité peut-il la modifier ?

2. La volonté du destinataire de la publicité

Le destinataire de la publicité peut décider de ne pas en bénéficier s'il refuse de conclure le contrat qu'elle incite, ce point ne fait pas de doute.

Quant à savoir s'il peut modifier le contenu de celle-ci sans l'accord de l'annonceur, la réponse apparaît tout aussi catégorique. Par sa propre volonté on ne peut que se lier soit même et créer ainsi une créance pour autrui, il n'est admis par personne la possibilité de créer une créance à son profit. Il semble tout aussi certain que l'on ne peut modifier la créance dont on bénéficie. Ceci aboutirait à un système aberrant.

La volonté unilatérale de l'annonceur ou du destinataire de la publicité ne peut modifier son contenu voire la résilier. Il n'en est pas de même de l'accord de volonté entre l'annonceur et le destinataire.

B. Les modifications par accord de volonté

L'annonceur est lié envers le destinataire de la publicité. Il est admis qu'en l'absence de règles propres aux engagements unilatéraux, les règles contractuelles sont applicables. Selon l'article 1134 du code civil, les conventions ne peuvent être révoquées, en dehors des cas autorisés par la loi, que par un accord de volonté des parties. C'est une conséquence du principe d'intangibilité des conventions applicable aussi pour les modifications apportées à une convention. Cette règle pouvant être transposée à l'engagement unilatéral, un accord de volonté des parties pourra donc résilier ou modifier la promesse. Les parties pourront de plus modifier le contrat conclu à partir de la promesse publicitaire (66).

Cette solution qui semble cohérente quant à son énoncé correspond à la jurisprudence. La chambre commerciale, le 21 novembre 1972 (67), refusa d'intégrer dans le champ contractuel un dépliant publicitaire. Ce prospectus, décrivait une caravane comme comportant une cloison du type "accordéon " pour séparer les deux pièces, caractéristique non reprise expressément dans le bon de commande. A la livraison, la cloison accordéon s'était transformée en simple rideau. L'acheteur avait "pris livraison sans réserve de la caravane telle qu'elle lui avait été fournie ". Monsieur GHESTIN nota que ceci "pouvait valoir acceptation d'une modification du contrat initial " (68).

L'annonceur en livrant une caravane visiblement différente de celle promise a proposé une modification du contrat et le destinataire de la publicité, c'est-à-dire l'acheteur a accepté tacitement cette modification lorsqu'il n'a pas refusé le produit à la livraison. Ceci n'est envisageable que si la modification de la caractéristique vantée est visible.

En effet, l'acheteur d'un moulin de ferme qui devait, selon "les affirmations publicitaires ", permettre d'obtenir à partir d'avoine une farine panifiable, ne pouvait lors de la livraison se rendre compte de la défaillance dudit moulin sur ce point. Il n'a pu accepter la modification du contrat initial. La première chambre civile considéra que "les défectuosités du moulin le rendaient impropre à l'usage auquel [l'acheteur] le destinait " et que la résolution du contrat et l'attribution de dommages et intérêts avaient été légalement justifiée par les juges du fond (69).

En revanche, dans les cas où les destinataires de la publicité concluent avec l'annonceur un autre contrat que celui dont les mérites sont vantés dans la publicité, ils ne modifient pas d'un commun accord le contenu de la promesse, ils l'ignorent et choisissent de ne pas en bénéficier.

L'annonceur et le destinataire de la publicité peuvent donc par un accord de volonté expresse ou tacite modifier le contrat conclu à partir de la promesse publicitaire. Il semble tout à fait possible aussi qu'ils s'accordent pour délier l'annonceur de son obligation d'insérer la caractéristique vantée du produit dans l'offre si cet accord intervient avant la conclusion du contrat.

§2 L'insertion de la publicité dans le contrat qu'elle a incité

Autant la modification du contenu de la promesse émanant d'une loterie peut être modifiée, par exemple si le prospect préfère obtenir l'équivalent monétaire du voyage gagné, autant cette promesse ne peut-être incluse dans le contrat qu'elle a indirectement incité, ce qui serait un non-sens (70). L'insertion ne concerne donc que la publicité décrivant de manière suffisamment précise un bien ou un service. L'engagement pris par l'annonceur est d'intégrer la qualité promise dans l'offre (A), ce mécanisme permettant, semble-t-il, de satisfaire toutes les demandes des plaideurs (B).

A. Le mécanisme de l'insertion au champ contractuel par l'offre

Le Doyen GENY s'interrogeant pour savoir "s'il existe un intérêt social véritable, à tenir [la promesse] pour obligatoire en elle-même (...) avant que l'adhésion de celui, à qui elle doit profiter, soit venue s'y ajouter pour la fixer en un contrat proprement dit " (71), suppose donc que la promesse unilatérale, ayant une valeur contraignante, peut s'insérer au contrat qu'elle précède. Le principe d'une intégration d'une promesse publicitaire au contrat auquel elle est directement liée ne semble donc pas impossible.

Nous avons montré que la publicité contenait une promesse de l'annonceur de vendre le produit vanté si le destinataire de la publicité le souhaitait. Pour ce faire, nous avions repris le mécanisme du contrat de promesse unilatérale. Ce contrat, pendant un temps, a vu sa valeur diminuer puisque pendant le délai d'option, le promettant pouvait rétracter sa promesse, son obligation étant considérée comme une obligation de faire qui n'est pas susceptible d'exécution forcée (72). La Cour de cassation est revenue récemment sur cette analyse, à la plus grande satisfaction des commentateurs (73). En effet, elle constata que la vente était formée lorsque le bénéficiaire de la promesse lève l'option alors que celle-ci avait été rétractée par le promettant.

Ce revirement jurisprudentiel est d'importance pour la consécration d'une promesse publicitaire puisque sans cela l'annonceur pourrait revenir sur son engagement (74). Si ce mécanisme est admis, l'obligation de faire de l'annonceur est irrévocable, elle est en quelque sorte "automatiquement" exécutée. Dès que le destinataire de la publicité a accepté l'offre dont la publicité fait implicitement partie, la qualité promise dans celle-ci appartient au champ contractuel. En revanche, si le contrat a un objet différent de la promesse publicitaire, celle-ci n'y sera pas intégrée car l'annonceur n'a pas pris d'engagement par rapport à ce contrat.

Le problème de la connaissance de la publicité réapparaît ici puisqu'il est habituellement admis, en matière contractuelle, que ne sont intégrées au contrat que les clauses connues des parties. L'annonceur connaît bien évidemment sa publicité mais ce n'est alors pas le cas de son cocontractant, la publicité ne devrait donc pas être insérée au contrat. Ce dernier argument semble décisif pour imposer une connaissance de la publicité par le contractant de l'annonceur lors de la conclusion dudit contrat afin d'intégrer celle-ci au contrat qu'elle a incité.

Il est à rappeler en dernier lieu que ne sont insérées dans le contrat que les qualités objectives du produit vanté, les désirs qu'il évoque dans l'esprit du public ne pouvant être pris en compte (75).

B. Les conséquences de cette insertion

Lorsque la promesse publicitaire a été intégrée à l'offre de contracter - obligation ressortant de l'engagement publicitaire - s'il y a défaillance dans son exécution, les règles contractuelles s'appliqueront pour la sanctionner. Le contenu de la promesse s'alignera donc sur l'ensemble des obligations des deux parties, notamment par rapport à leur régime juridique. Par exemple, si le contrat est qualifié de vente, la promesse publicitaire se verra appliquer les règles de la vente. De plus toutes les obligations de l'annonceur s'éteindront par prescription en même temps.

Ce résultat est aussi obtenu avec la qualification de document contractuel des publicités ou lorsque le juge utilise celles-ci pour interpréter le contrat qu'elles ont incité. En effet, dans tous ces cas, le juge sanctionnera l'inexécution de la promesse publicitaire par le biais des règles contractuelles (76). Il pourra constater l'existence d'un vice caché par rapport aux qualités promises dans la publicité, ou une absence de conformité entre la chose qui a été livrée et la chose telle qu'elle a été présentée dans la publicité et donc dans l'offre.

De plus, en cas de contrat synallagmatique, le cocontractant de l'annonceur pourra refuser d'exécuter sa prestation si l'annonceur n'a pas respecté ses promesses publicitaires et si les conditions nécessaires à la mise en oeuvre de ce mécanisme sont réunies.

CONCLUSION de la SECTION 2

La promesse publicitaire est insérée "automatiquement" au contrat dont elle a incité la conclusion, soit sous sa forme originale telle qu'elle avait été conçue par l'annonceur, soit sous une forme modifiée grâce à un accord de volonté entre les parties.

CONCLUSION du TITRE II

Les publicités n'ayant pas valeur d'offre mais étant suffisamment précises peuvent être qualifiées d'engagement unilatéral. L'annonceur a alors l'obligation de proposer à la vente et d'insérer dans son offre de contracter le produit tel qu'il est vanté dans sa publicité et cela parce qu'il espère ainsi augmenter le nombre de ses ventes. Dès la diffusion de la publicité, ces obligations sont irrévocables sauf accord de volonté entre l'annonceur et le destinataire de la publicité.



CONCLUSION GENERALE

Rien ne semble s'opposer directement à la qualification d'engagement unilatéral de certaines publicités, si ce ne sont les réticences de certains face à la force obligatoire de la volonté unilatérale, opposition au demeurant de plus en plus faible. Seulement certaines publicités pourront être ainsi qualifiées, la diversité des documents diffusés à ce titre étant telle qu'une seule qualification ne pourrait la représenter.

Cette reconnaissance a des intérêts à la fois théoriques et pratiques. La seule insertion des publicités au champ contractuel par le biais des documents contractuels ne permet pas de contraindre l'annonceur à maintenir ses promesses avant la conclusion du contrat vanté par la publicité. En revanche la consécration de l'engagement publicitaire par volonté unilatérale permettrait de considérer l'obligation de l'annonceur comme irrévocable dès la diffusion de la publicité. Sans oublier que, si la publicité est reconnue contraignante pour l'annonceur, celui-ci ne jouera plus avec ses destinataires, et ceux-ci accorderont alors une valeur plus grande à ce type d'annonce, ce qui augmentera leur intérêt pour les publicités.

Une réforme législative ne paraît pas propice pour reconnaître cette qualification, la multiplication des régimes spéciaux étant critiquée. De plus, il nous semble que la jurisprudence, ayant qualifié, dans des termes très généraux, certaines loteries commerciales d'engagement unilatéral, peut tout aussi bien étendre cette qualification aux publicités suffisamment précises qui n'ont pas valeur d'offre.



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Les loteries dans les contrats de vente par correspondance, JCP 86, I, n°3264.

De MELLO Xavier. et GRALL Jean-Christophe

Loteries et promotions des ventes ou de la nécessité du hasard, RJcom. 1991, p.151.

MOLFESSIS Nicolas

L'obligation naturelle devant la cour de cassation: remarques sur un arrêt rendu par la première chambre civile, le 10 octobre 1995, D.97, p.85.

MOURALIS Jean-Louis

Rép. Civ. Dalloz, v° Jeu-Pari, n° 218 et s. , 1994.

NANA Ferdinand

L'intérêt collectif des consommateurs, CDE 6-95, supplé. p.41.

NAJJAR Ibrahim

La "rétractation" d'une promesse unilatérale de vente (à propos d'un revirement par un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 26 juin 1996), D.97, p.119

PETIT Bruno

Contrats et obligations, obligation d'information, Juris-classeur, art. 1136 à 1145, fasc. 50, 1994.

RENAULT Charles-Edouard

La publicité et le droit à l'image des personnalités politiques, Gaz. Pal. du 5-6 juillet 1996.

RISTORI-MARIA Catherine

Les loteries publicitaires: le régal des plaideurs ou le dévoiement de l'action en justice, Gaz. Pal. du 19 sept. 1995, p. 1076.

TOURNAFOND Olivier

La publicité mensongère en matière immobilière, JCP 84, éd. N, I, p.353.

NOTES ET OBSERVATIONS

AUBERT Jean-Luc

- commentaire sous Civ. 2ème, 3 mars 1988, D. 1988, som. p.405;

- note sous civ. 1ère, 1ère déc. 1969, JCP 70, n°16445

CORNU G.

obs. sous Rennes, 19 déc. 1972, RTD civ. 1973, p.587.

DELEBECQUE Philippe

commentaire sous Civ. 1ère , 28 mars 1995, D. 95, som., p.227;

DURRY Georges

note sous Crim., 19 nov. 1959, arrêt Milhaud, D.60, p.463

EDELMAN Bernard

D.96, p.617 note sous CA Paris, 28 mai 1996.

GAVALDA Christian et LUCAS de LEYSSAC Claude

obs. sous Civ. 2ème, 3 mars 1988 et Douai, 22 juin 1988, D.90, som. p.105.

IZORCHE Marie-Laure

obs. sous Paris, 26 sept. 1991, D.92, som. p.342.

LABARTHE Françoise

note sous Civ. 1ère, 3 juill. 1996, JCP 97, I, n°4015, n°4.

LEVENEUR Laurent

note sur Civ. 3ème , 17 juill.1996, Contrats conc. Cons. 97, n°4, p.11.

MARGUERY S.

note sous Crim., 21 mai 1984, D.85 p.105.

MESTRE Jacques

- obs. sur Saint- Denis de la Réunion, 2 déc. 1983, RTD civ.1985, p.380;
- obs. sur Aix-en-Provence, 15 mars 1984, RTD civ.1985, p.730;
- obs. sur Civ. 1ère, 16 juill. 1987 (Cosani C. consort Nicolas, inédit), RTD civ. 1988, p.133;
- obs. sur Aix-en-Provence, 27 avril 1987 (Gusberti et Mme Ortiz C. Mme Fernandez), RTD civ. 1988, p. 541;
- obs. sur Poitiers, 6 janv.1993, Douai, 10 févr.1993, Civ. 1ère, 28 mars 1995, Civ. 2ème, 28 juin 1995, Paris, 27 oct. 1995 et Toulouse, 14 févr. 1996,- RTD civ. 1995, p.887 et RTD civ.1996, p.397.
- obs. sur Civ., 3ème, 17 juill.1996, RTD civ.1997, p.118 et 119.

MOURALIS Jean-Louis

note sous Civ. 1ère, 28 mars 1995 et Civ. 2ème, 28 juin 1995, D. 96, p.180;

PIGNARRE Geneviève

note sous Civ. 1ère, 10 oct. 1995, D.97, p.155.

RAYMOND Guy,

- note sous TGI Lyon, 19 sept. 1991, Mme Roger c. Société Les Trois Suisses, Contrats, conc., cons. décembre 1991, n°248;
- note sous Paris, 26 nov. 1991, SARL GTI et autres C. Pierrel és Qualités, Contrats con. cons. 1992, n°90;
- note sous Paris, 8 janv. 1992, STE " L'HERBIER DE PROVENCE " et autres, Contrats con. cons. 1992 n°142;
- note sous Crim., 21 oct. 1992, contrats, concu., consom. 1993, n°95 ;
- note sous Crim., 11 mars 1993, Dewawrin, Contrats con. cons. 1993, n°160;
- note sous Aix-en-Provence, 26 janv.1994, Contrats con. cons. 1994, n°238;
- note sous Com. 1ère mars 1994, Contrats con. cons. 1994, n°146;
- note sous TGI Castres, 1ère avril 1994, Mme Fonvieille C. SA France Direct Service, Contrats con. cons. 1994, n°132 ;
- note sous Rouen, 10 août 1994, Contrats con. cons. 1995, n°137;
- note sous Com., 28 mars 1995, Contrats con. cons 1995, n°121;
- note sous Toulouse, le 14 févr. 1996, SA FDS C. Mme Fonvieille, Contrats con. cons. 1996, n°133

RAYNARD J.

note sous Civ. 3ème, 26 juin 1996, JCP 97, I, n°617.

ROUJOU de BOUBEE

obs. sous Crim., 4 déc. 1978, D.79, inf. rap., p.180

STEINMETZ François

note sous Civ. 3ème, 23 janv. 1979, D. 80, p.412.

STEMMER Bernard

note sous Civ. 3ème, 23 janv. 1979, JCP 79, II, n°19241.

TOURNAFOND Olivier

commentaire sous  Paris, 3 mai 1994, D.96, som. p. 11;

VIRASSAMY Gérard

note sous Civ. 2ème, 3 mars 1988, JCP 89, n°21313.

VOIRIN

note sous Cass. req., 29 mars 1938, D. 39, p. 5.



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