Le droit à l'information en matière d'environnement
Eric LIMARE


DEUXIEME PARTIE





DEUXIEME PARTIE
L'APPLICATION DU DROIT A L'INFORMATION EN MATIERE D'ENVIRONNEMENT
PAR LES ADMINISTRATIONS FRANCAISES ET COMMUNAUTAIRES


En France comme dans le reste de l'Union européenne les préoccupations relatives à l'environnement occupent une place toujours plus grande et ont des incidences de plus en plus importantes. L'application en France de la directive 90/313 sur l'accès à l'information en matière d'environnement n'a pas présenté de difficultés particulières. En effet depuis la loi du 17 juillet 1978 ZZZ les administrés ont droit à la communication des documents administratifs (nominatifs et non nominatifs) dans des conditions très simples et sous le contrôle de la Commission d'accès aux documents administratifs (C.A.D.A). Cette loi a crée une révolution dans les mentalités administratives et le principe de transparence ont désormais remplacé celui du secret qui prévalait.

Il existe en France un droit à l'information spécifique à l'environnement. Le droit à l'information, et la participation au processus de décision, des citoyens en matière d'environnement résultent en premier lieu d'une loi de 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement. A part ce texte, un droit à l'information avait été consacré par le législateur mais uniquement dans des domaines spécifiques. C'est le cas d'une loi de 1987 en matière de risques technologiques et naturels, la loi modifiant une loi de 1975 en matière de traitement des déchets et une loi de 1992 en matière de dissémination des organismes génétiquement modifiés. Récemment, la loi Barnier de 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement a crée une nouvelle consultation du public pour les grandes opérations d'intérêt national.

Avant d'adopter un principe général de droit à l'information en matière d'environnement, la législation européenne l'envisageait uniquement dans certains domaines spécifiques. La situation française est quelque peu similaire dans le sens ou seulement quelques lois particulières envisageaient le droit à l'information. Néanmoins la France n'a pas eut à adopter de législation spécifique au droit à l'information en matière d'environnement puisque la loi de 1978 avait mit en place un système d'accès général aux documents de l'administration quelque soit le domaine. La directive européenne 90/313 a donc eut pour conséquence une simple précision de la législation française, dont les dispositions répondaient majoritairement aux exigences de la directive.

Nous aborderons dans un premier temps les dispositions de la loi de 1978 qui ont permis de mettre fin au règne du secret dans l'administration. Le législateur y proclame un véritable droit à l'information qui se traduit concrètement par l'octroi aux administrés d'un droit d'accès aux documents administratifs (1). Nous verrons également que différentes lois en matière d'environnement établissent des modes spécifiques de circulation de l'information. Par exemple depuis longtemps des procédures traditionnelles , telles que l'enquête publique, permettaient une certaine information des administrés dans le domaine de l'environnement (2). Puis nous analyserons l'impact limité produit par la directive européenne 90/313 sur la législation française (3). Enfin nous devrons analyser la situation des institutions communautaires, dont la situation était quelque peu paradoxale. En effet la législation européenne prévoyait un droit à l'information en matière d'environnement obligeant les Etats membres alors qu'aucune obligation de cette nature ne prévalait pour les institutions communautaires. L'adoption de mesures régissant l'accès du public aux documents détenus par le Conseil et la Commission ont mis fin à cette situation paradoxale (4). La place sans cesse croissante du thème de la transparence s'appliquant aux administrations nationales et communautaires s'inscrit dans le mouvement de démocratisation de la vie publique récemment rappelé lors de l'adoption du Traité d'Amsterdam en 1997.

I- La situation en France

A- Les origines du droit à l'information en matière d'environnement avant la directive 90/313

1) L'élaboration d'un droit général à l'information

a. Genèse du droit à l'information


De tout temps l'administration a collecté, produit et utilisé de l'information pour l'accomplissement de ses missions. L'Etat ayant évolué vers plus d'interventionnisme la demande d'informations s'est faite de plus en plus importante. Mais ce passage d'une tradition de secret à une exigence de transparence ne s'est fait que très progressivement.

En effet traditionnellement l'administration française classique est secrète. Elle agit de manière unilatérale et ses décisions ne comportent aucune motivation. La seule solution offerte à l'administré étant la contestation a posteriori de la décision par la saisine du juge administratif. Mais une telle solution pouvait être très préjudiciable à l'administré dans les situations d'urgence. En effet le recours avait que très rarement un effet suspensif. La décision administrative contestée continuait donc à s'appliquer. En général l'administration invoquait comme justification le secret professionnel ou bien l'intérêt de la défense nationale par exemple.

On peut néanmoins estimer qu'un certain droit à l'information existait même s'il était limité à des domaines très spécifiques :

1) Tout d'abord des textes remontant à la révolution ZZZ organisent la consultation des archives (textes refondus en 1979). La loi prévoyait la communication des archives nationales. Cela permettait ainsi aux citoyens de mieux connaître l'étendue de leurs droits à un moment de l'histoire où les droits féodaux furent abolis et où les domaines nationalisés vendus.

2) Ensuite une loi de 1810 réglemente les enquêtes publiques qui permettent aux citoyens de donner leur avis et de s'informer sur les projets de l'administration. Ces enquêtes ont principalement trait à des expropriations, des concessions de mines, des établissements dangereux, incommodes et insalubres.

3) Une catégorie d'administrés, l'habitant et le contribuable de la commune, a depuis une loi de 1884 le droit de demander communication, sans déplacement, de prendre copie totale ou partielle des procès verbaux du conseil municipal, des budgets et des comptes de la commune, des arrêtés municipaux. Il peut les publier sous sa responsabilité".

4) Enfin existe le droit du fonctionnaire à la communication de son dossier résultant d'une loi de 1905. On peut estimer que ce fut le point de départ du principe des droits de la défense ZZZ .

b. La reconnaissance du droit à l'information


L'affirmation d'un véritable droit à l'information date des années 70. Tout d'abord l'Etat étant de plus en plus interventionniste l'administration est parallèlement plus présente dans la vie quotidienne des citoyens. L'évolution sociale et économique avec un niveau de vie culturel accru, amène le public à vouloir connaître les démarches qu'il a à entreprendre et discuter les projets de l'administration susceptibles de le concerner. Ainsi au fil des années les jalons d'un droit à l'information sont posés. Le législateur intervient une première fois par la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Elle reconnaît notamment le droit d'accès de chacun à son dossier personnel automatisé ou manuel

La consécration du droit à l'information en général fut opérée par la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public. C'est le titre 1 qui traite de la "liberté d'accès aux documents administratifs". La loi énonce que "le droit de toute personne à l'information est garanti par le présent titre en ce qui concerne la liberté d'accès aux documents administratifs de caractère non nominatifs". Le texte pose ce principe, en fixe les limites (les secrets légitimes) et crée la CADA (Commission d'Accès aux Documents Administratifs) L'accès aux documents nominatifs par les personnes concernées fut réglé par la loi du 11 juillet 1979. Le principe est devenu celui de l'accès et le secret considéré comme une exception.

Il convient donc d'aborder les principales dispositions concernant la liberté d'accès aux documents administratifs.

2) Les enquêtes publiques : les débuts d'une prise en compte de l'environnement
dans le droit à l'information
.


Les premières traces d'un droit à l'information remontent au XIXème siècle. En effet le législateur est intervenu très tôt pour permettre à l'administré d'obtenir de l'administration la communication de certains renseignements indispensables à la protection de ses intérêts. Tel est la cas de l'enquête publique qui est apparue au début du XIXème siècle pour protéger la propriété privée foncière ou immobilière des atteintes de l'administration. La loi du 8 mars 1810 permit ainsi au propriétaire lésé par une expropriation d'avoir accès à certains renseignements, et l'ordonnance du 28 février 1831 introduisit dans le droit positif l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique. Mais l'évolution économique et sociale de la France et la dimension nouvelle de l'aménagement du territoire vont progressivement remettre en cause la conception initiale de la loi. De nouvelles considérations apparaissent comme la qualité de la vie ou la protection de l'environnement.

L'enquête publique, trop axée autour de la seule garantie de la propriété individuelle, ne permettait pas de prendre utilement en compte le droit des individus à la jouissance de valeurs collectives et à la préservation de l'environnement. Ce champ d'application trop étroit ne correspondait plus aux exigences de la réalité. Un premier décret de 1976 même s'il n'apporte que des réformes de détail se réfère pour la première fois à la protection de l'environnement.

Finalement la fonction de l'enquête publique a été modifiée par une loi du 12 juillet 1983 dite loi Bouchardeau. Cette procédure doit désormais permettre de susciter les observations des citoyens à l'égard des projets susceptibles d'affecter leur environnement. L'intitulé même de la loi fait référence à la démocratisation de l'enquête publique et à la protection de l'environnement. Cette dernière précision reflète bien l'élargissement de la notion d'enquête publique Elle va donc beaucoup plus loin que la loi de 1810 qui se souciait principalement de protéger le droit de propriété. La loi de 1983 concrétise des droits nouveaux à l'information.

A travers l'évolution de l'enquête publique le droit à l'information s'est développé parallèlement à une prise en compte accrue de la protection de l'environnement. Bien que limité au domaine des enquêtes publiques on peut déceler dans la législation de 1983 l'ébauche d'un certain droit à l'information concernant précisément le domaine de l'environnement. Mais une telle précision semblait nécessaire pour assurer une protection effective de l'environnement. De nombreuses législations sur des domaines spécifiques de l'environnement vont donc prévoir ce droit à l'information. Dans la majorité des cas c'est une information active qui est prévue. L'administration doit donc agir spontanément afin d'informer le public sur la qualité de son environnement (ex : informer sur la qualité de l'air) ou bien sur les conséquences dangereuses pour l'environnement de certaines activités. C'est l'étude de ces différentes législations que nous allons désormais effectuer.

3) La prise en compte accrue de l'environnement dans le droit à l'information


Avant l'adoption de la directive européenne relative à la liberté d'information en matière d'environnement, la France bénéficiait déjà d'un système de droit d'accès général à l'information comme nous venons de l'examiner. En ce qui concerne le domaine spécifique de l'environnement plusieurs législations ont inclue un droit à l'information dont l'exercice diffère selon le domaine de l'environnement traité.

B- La compatibilité de la liberté d'accès aux documents en France
avec le droit à l'information en matière d'environnement de la directive 90/313


Dans cette partie nous effectuerons une comparaison entre les dispositions françaises de la loi du 17 juillet 1978 et celles de la directive européenne du 7 juin 1990. Le droit français a repris certaines dispositions de la directive qui ne figuraient pas dans la législation déjà en place depuis la fin des années 70 et qui répondent à la spécificité du domaine envisagé : l'environnement. En fait le législateur ne s'est pas trouvé confronté à de grandes difficultés quant à la transposition de la directive. Nous commencerons à chaque fois par la disposition française en analysant sa compatibilité avec les dispositions de la directive européenne.

Tout d'abord il convient d'observer que la législation européenne concerne uniquement le domaine de l'environnement alors que la législation française a un caractère général. On peut certes déduire de ce caractère général que l'environnement y est inclus automatiquement. Mais le fait pour le législateur européen d'avoir établi un système d'information spécifique à l'environnement nous amène à s'interroger sur les raisons d'un tel choix. Nous pourrons ainsi développer de point et mieux comprendre pourquoi le législateur français n'a pas eut à adopter de législation spécifique ; le système déjà en place répondant bien aux critères imposés par la directive.

Ensuite il est nécessaire de rappeler que le législateur européen à réglementer ce domaine au moyen d'une directive. Il en résulte donc que pour un certain nombre de dispositions les Etats membres bénéficient d'une marge de manœuvre quant à la transposition dans leur droit interne. Ces dispositions instaurent des "minimas" que les Etats peuvent adapter en étant plus libéraux ZZZ . Mais il est d'autres dispositions qui présentent un caractère impératif et qui doivent expressément être transcrites en droit interne ZZZ .

1) Les informations communicables


Le droit d'accès à l'information détenue par l'administration est ouvert à toute personne, physique ou morale, sans considération d'intérêt pour agir, à l'égard des documents non nominatifs.

Le législateur a retenu une conception très large de la notion de document communicable. L'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 indique qu'il peut s'agir de "tous dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives, avis, à l'exception des avis du Conseil d'Etat et des tribunaux administratifs, prévisions et décisions...". Cette liste n'est pas exhaustive puisque la CADA et le Conseil d'Etat ont la possibilité d'y ajouter de nouvelles catégories de documents communicables ZZZ . La loi reconnaît ainsi un droit à l'information sans attacher d'importance à la forme prise par le document. L'extrême largeur de la conception de document communicable témoigne de l'importance de la réforme mise en place et mettant fin à plusieurs décennies de secret administratif. Formellement il peut s'agir d'écrits, d'enregistrements sonores ou visuels ou de traitements automatisés d'informations non nominatives (Art 1 in fine). Cette dernière disposition montre une volonté du législateur de l'époque de prendre en compte les évolutions technologiques. La question de la compatibilité entre l'évolution des techniques d'information (comme Internet par exemple) et le droit d'accès n'a donc pas présenté de problèmes particuliers en ce qui concerne le sujet de notre étude.

Non prévue à l'origine, la communication des documents nominatifs a été ajoutée par la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs. L'article 6 bis prévoit que "les personnes qui le demandent ont droit à la communication (...) des documents de caractère nominatifs les concernant, sans que des motifs tirés du secret de la vie privée, du secret médical ou du secret en matière commerciale et industrielle, portant exclusivement sur des faits qui leur sont personnels, puissent leur être opposés.". C'est une disposition très importante de la loi de 1978 et montre que celle ci n'est pas limitée à l'accès aux documents non nominatifs. Cela traduit la volonté du législateur d'améliorer la mise en œuvre d'une véritable démocratie administrative se traduisant par une information et donc une participation plus active des administrés, particulièrement importante dans le domaine de l'environnement.

Sont considérés comme nominatifs, selon la CADA, les "documents qui portent une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique nommément désignée ou facilement identifiable, ou incluant la description du comportement d'une personne dès lors qu'il s'avère que, d'une manière ou d'une autre, la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice". Pour que l'accès au document soit refuser du fait du caractère nominatif de celui-ci les conditions sont très bien précisées par la CADA. Cette position préserve ainsi le secret de la vie privée tout en donnant une interprétation assez libérale de la loi de 1978. De plus elle vise à ne pas limiter abusivement la liberté d'accès des tiers à ces documents qui irait ainsi à l'encontre de la philosophie générale de la loi.

Les documents administratifs visés par la loi sont ceux détenus par l'administration. Les documents fournis à l'administration par des personnes extérieures sont-ils considérés comme administratifs et donc communicables ?. Il peut s'agir en fait de documents qui lui sont adressés aussi bien par des particuliers que par des entreprises ou associations. Seuls sont exclus de la communication les documents qui ne présentent pas par leur nature et leur objet un caractère administratif. C'est le cas des documents relatifs à la gestion d'intérêts privés comme par exemple un contrat de location de droit commun passé par une administration dans le cadre de la gestion de son domaine privé. Enfin un autre point essentiel est celui du caractère achevé du document dont on demande la communication. L'état provisoire ou partiel d'un document justifie donc un refus de communication.

L'article 1er de la loi française donne une liste des documents qu'elle considère comme administratifs. Cette qualité donne à ces documents un caractère communicable. Au contraire l'article 1 et 6 de la directive européenne indiquent seulement que toute information détenue par l'autorité publique est communicable. La directive est plus large puisque le type de document n'est pas précisé.

Il est nécessaire de savoir si la liste de l'article 1er de la loi française présente un caractère exhaustif ou pas. En cas de réponse positive, la législation française serait en recul par rapport aux exigences de la directive 90/313. En limitant l'accès aux documents énumérés le demandeur ne pourrait pas ainsi prétendre à la communication de toute information relative à l'environnement. Bien que la C.A.D.A ait considéré que la liste de l'article 1 ne présentait pas un caractère exhaustif, le juge administratif tend vers une application restrictive de cet article. L'application de la loi française sur ce point montre qu'il n'existe pas une totale concordance entre les deux législations. Ainsi il est théoriquement possible qu'une demande d'information en matière d'environnement soit refusée par le juge administratif français, celui-ci appliquant restrictivement l'article 1 de la loi de 1978. Une étude détaillé de cet article montre donc l'existence d'un risque incompatible avec les exigences de la directive.

Quant au support formel de l'information l'article 1er de la loi et l'article 2.a de la directive sont en totale harmonie. Les informations sous forme écrite, visuelle, sonore ou de banque de données sont communicables. Aucune difficulté ne se rencontre sur ce point

L'une des originalités de la loi française est de créer dans son article 5 une Commission d'Accès aux Documents Administratifs. Cette autorité administrative indépendante permet de mieux fixer les contours du droit d'accès. Elle est notamment chargée "de veiller au respect de la liberté d'accès aux documents administratifs" dans les conditions prévues par la loi. En cas de refus, total ou partiel, exprès (écrit et motivé) ou implicite, de communiquer le document demandé, l'administré doit saisir la C.A.D.A dans les deux mois suivant le refus. La commission va notifier à l'administration et au demandeur l'avis qu'elle a rendu sur le caractère communicable ou non du document (un mois après sa saisine). Dès lors l'administration dispose d'un mois après réception de l'avis pour informer la C.A.D.A des suites qu'elle entend donner à la demande. La saisine de la C.A.D.A est déterminante puisqu'elle constitue un préalable obligatoire (phase précontentieuse) de celle du juge administratif en cas de refus maintenu du juge après l'avis de la commission. Si la C.A.D.A n'a pas été saisie préalablement le recours tendant à l'annulation d'un refus de communication serait irrecevable.

L'existence de cette Commission d'Accès aux Documents Administratifs répond de manière très satisfaisante à l'exigence de l'article 4 de la directive 90/313/CEE concernant les droits de la défense. Cette disposition vise à ce que la personne à qui l'administration oppose un refus de communication puisse introduire un recours judiciaire ou administratif. Les dispositions de la loi de 1978 vont bien plus loin que l'exigence minimum de la directive. En effet la saisine de la C.A.D.A s'effectue avant tout contentieux administratif. Ce n'est qu'en cas de confirmation du refus de communication après l'avis de la C.A.D.A que l'intéressé pourra saisir le juge administratif. La législation française est donc sur ce point très en avance sur la directive européenne. Il n'y a donc eût aucune difficulté d'application de cette disposition. Ce système s'avère être avantageux pour l'administré qui évite ainsi la lourdeur et le caractère onéreux des procédures judiciaires courantes. Cela permet également une plus grande possibilité d'ouverture de l'administration qui s'efforce ainsi de mieux répondre aux attentes des administrés.

2) Les personnes concernées


A l'origine l'article 1er de la loi de 1978 précisait que ce droit à l'information appartenait a tout administré sans aucune autre précision. L'inconvénient était de restreindre le droit à l'information aux nationaux. Mais la loi du 11 juillet 1979 a étendu ce droit à toute personne sans que l'administration puisse imposer aucune condition liée à la qualité de la personne du demandeur. La largeur de ce terme permet donc a priori d'y inclure l'ensemble des personnes physiques ou morales quelle que soit leur nationalité. En effet ce n'est que tacitement que les personnes morales sont concernées par la loi de 1978 puisque celle-ci donne un droit d'accès à "toute personne". Mais il parait évident que ce droit est également ouvert aux personnes morales, particulièrement présentes dans le domaine de l'information en matière d'environnement.

Pour sa part la directive est plus explicite puisqu'elle a dès l'origine précisé dans son article 3 que le droit à l'information appartient à toute personne physique ou morale. Sur ce point la législation française était donc en parfaite adéquation avec la directive européenne. Cela s'est confirmé dans la pratique où les associations bénéficient de la même façon d'un accès aux documents administratifs français. Il est néanmoins regrettable de s'apercevoir que le législateur français à négliger ce principe dans certaines lois en matière d'environnement. Ainsi la loi Barnier du 2 février 1995 sur le renforcement de la protection de l'environnement a t-elle limité ce droit aux citoyens. Il semblerait donc que dans l'application de cette loi les étrangers et les personnes morales ne soient pas concernées. C'est là un net recul par rapport à la législation de 1978. De plus c'est aller à l'encontre des impératifs communautaires. Le problème juridique est de savoir si dans le cadre de cette loi un étranger ou une personne morale ne peut demander l'information en s'appuyant sur la loi du 17 juillet 1978. Il y a manifestement une incompatibilité entre ces deux lois sur le droit à l'information puisque la seconde en restreint l'accès quant aux personnes alors que la première n'en prévoit aucune limite. Le caractère général de la loi de 1978 permet d'affirmer que l'étranger ou la personne morale ne pourrait être autorisée à demander l'information prévue dans la loi Barnier. Il nous semble néanmoins nécessaire qu'un décret puisse mettre fin à cette incertitude.

L'absence d'un intérêt à agir vise à étendre au maximum le nombre des bénéficiaires du droit à l'information. Selon la loi de 1978 tout administré peut donc demander communication d'un document; l'intérêt pour les questions d'environnement pouvant, à lui seul, justifier la demande. Une fois de plus la législation française est en parfaite adéquation avec la directive communautaire qui prévoit en son article 3 al 1 que le droit d'accès s'exerce sans que le demandeur "soit obligé de faire valoir un intérêt".

Cette absence d'intérêt à agir peut être très favorable à l'administré dans le domaine de l'environnement. Ainsi toute demande d'accès à un permis de construire ou à un dossier d'enquête publique est possible pour toute personne physique ou morale extérieure à la commune et même de nationalité étrangère. Sur de dernier point tant la législation française que la législation communautaire ne posent de conditions de citoyenneté pour pouvoir accéder à une information intéressant l'environnement.

3) Les autorités publiques concernées


Contrairement aux informations communicables où la directive est beaucoup plus large que la loi de 1978, la définition des autorités chargées de répondre à une demande d'information semble plus large dans la législation française. L'article 2 de la loi prévoit que sont communicables les documents émanant "des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes, fussent-ils de droit privé, chargés de la gestion d'un service public". Contrairement à la directive qui ne vise que "toute administration publique au niveau national, régional ou local", la loi de 1978 fait expressément référence aux organismes de droit privé chargés de la gestion d'un service publique. Par cette dernière disposition le législation française vise à accroître le droit à l'information puisque même des organismes privés peuvent être sollicités. Néanmoins la gestion d'un service public reste une condition essentielle de l'autorité publique pour être concernée par l'obligation de délivrer l'information à tout demandeur. On peut déduire de l'article 6 de la directive que les organismes de droit privé sont également concernés puisqu'il précise que sont également communicables les documents détenus par les "organismes ayant des responsabilités publiques en matière d'environnement et contrôlés par des autorités publiques".

4) Les modalités pratiques d'accès à l'information


La directive européenne dans son article 5 laisse la possibilité aux Etats membres de percevoir une redevance pour la communication des informations. Si l'Etat instaure une telle redevance, celle-ci doit être raisonnable pour éviter de dissuader le public de faire une demande d'information. La loi de 1978 prévoit dans son article 4 que l'accès aux documents peut s'effectuer gratuitement sur place. La reproduction des informations aux frais du demandeur est possible sans que le montant n'excède le coût réel des charges de fonctionnement. La législation française est en totale adéquation avec la directive sur ce point. Elle bénéficie même de dispositions précises visant à assurer un total libre accès aux documents.

La législation française ne précise pas le délai imparti à l'administration pour répondre à la demande d'information. Seul l'article 7 précise que le juge saisi d'un recours contentieux contre le refus de communication doit statuer dans un délai de six mois. Concernant la contestation d'un refus de communication le dispositif français répond parfaitement aux exigences de l'article 4 prévoyant qu'en cas de rejet de la demande la personne doit pouvoir "introduire un recours judiciaire ou administratif". En effet, comme nous l'avons analysé précédemment, l'une des grandes originalité de la loi de 1978 est de créer une autorité administrative indépendante chargé de veiller au respect de la liberté d'accès aux documents administratifs (la C.A.D.A). Il s'avère que le système français présente de nombreux avantages au public. De ce fait la liberté d'accès aux documents administratifs est pleinement garantie et l'administration ne peut pas agir comme bon lui semble tant le moindre refus injustifié pourra très facilement faire l'objet d'une procédure contentieuse.

Comme nous venons de l'étudier, la loi du 17 juillet 1978 définit très largement le droit d'accès aux documents administratifs quant à la nature des documents qui peuvent être demandés, à la qualité des personnes qui formulent une demande et au nombre des administrations soumises à l'obligation de communiquer leurs documents administratifs. Tout comme la directive européenne, la loi a prévu que dans un certain nombre de cas l'administration pourra refuser l'accès à une demande de communication. Nous montrerons que la législation française va, nous semble t-il, malheureusement plus loin que la directive sur ce point.

Tout refus de communication de l'information par l'autorité publique doit être motivé aussi bien dans la législation française que dans la directive européenne. Les deux législations indiquent de la même façon que ces limites sont des exceptions à la liberté d'accès qui est désormais devenue le principe. La directive européenne indique que ces limites sont facultativement adoptées par les Etats membres. Mais la France comme la majorité des autres Etats membres a repris l'ensemble de ces exceptions et possédait déjà dans sa législation de nombreux autres cas justifiant un refus de communication. Ce point essentiel dans le domaine de l'environnement où le poids des secrets protégés par la loi est particulièrement important.

L'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 énonce les différents cas justifiant un refus de communiquer l'information demandée. Pour l'application de cet article une série d'arrêtés ministériels est intervenue, après consultation de la C.A.D.A, pour fixer la liste des documents dont l'accès peut être refusé aux administrés.

L'article 3, alinéa 2 de la directive du 7 juin 1990 mentionne également une liste d'exceptions au principe de libre communication énoncé dans son premier article. La plupart des restrictions sont énoncées selon une formulation proche de celle employée dans la loi du 17 juillet 1978. Il en est ainsi par exemple de la "confidentialité des délibérations des autorités publiques, des relations internationales, ou du secret de la défense nationale". Il nous faut néanmoins souligner que l'exception tirée de la recherche des infractions fiscales et douanière ne figure pas dans le texte communautaire. Ceci est logique puisque la directive est exclusivement consacrée aux documents relatifs à l'environnement. C'est pourquoi celle-ci a ajouté parmi ces exceptions, celle liée à la protection de l'environnement. Peut ainsi être refusée la communication de données "dont la divulgation aurait plutôt pour effet de porter atteinte à l'environnement auquel elles se réfèrent". Il nous semble nécessaire que cette disposition soit précisée dans la mesure où elle semble laisser à l'administration la faculté d'apprécier l'usage fait par le demandeur du document sollicité. Cette disposition va à l'encontre de la législation française qui ne pose pas d'autres limites à l'utilisation des documents communicables que celle de leur utilisation à des fins commerciales.

L'ensemble de ces dispositions laisse cependant à l'administration un large pouvoir discrétionnaire dans l'interprétation des exceptions au droit d'accès.

a. Les exceptions visant à assurer le bon fonctionnement de l'administration


Cette catégorie d'exception vise par exemple le secret des délibérations du Gouvernement et des autorités responsables relevant du pouvoir exécutif prévu à l'article 6 de la loi de 1978. La directive européenne prévoit de la même façon cette exception liée à la confidentialité des délibérations des autorités publiques (Art 3.2). Mais la directive est plus large puisqu'elle s'applique à l'ensemble des autorités publiques alors que la législation française ne concerne que les délibérations des autorités relevant du pouvoir exécutif. On peut d'ailleurs se demander ce que recouvre exactement ce terme. En effet l'ensemble des collectivités locales ne seraient donc par concernées par cette exception. Cette disposition est plus restrictive que la directive et évite ainsi une trop grande limitation de la communication de l'information.

La catégorie des documents préparatoires est également exclue du droit à la communication. Ce sont des documents qui sont achevés mais qui constituent les étapes nécessaire d'un processus d'élaboration d'une décision qui n'est pas encore intervenue. Ce type de document sera communicable lorsque la décision qu'ils préparaient sera prise. En matière d'environnement nous pouvons citer l'exemple des dossiers de demande de permis de construire qui ne pourront être communiqués que lorsque l'administration aura statué sur la demande. Il en est de même pour la communication des études d'impact sur l'environnement sur les conséquences de l'implantation d'une usine par exemple.

L'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 prévoit également le refus de communiquer une information pouvant porter atteinte au déroulement des "procédures engagées devant les juridictions ou d'opérations préliminaires à de telles procédures". C'est également ce que prévoit la directive 90/313/CEE dans son article 3. On peut se réjouir d'observer que la législation française est plus libérale sur ce point puisqu'elle ne concerne que la procédure contentieuse et non la procédure pré-contentieuse. En effet, alors que la directive prévoit que l'exception joue pour les affaires qui ont été pendantes ou qui ont fait l'objet d'une enquête, la loi de 1978 n'envisage que les procédures engagées devant les juridictions. Les critiques que nous avions formulé à l'encontre de la directive ZZZ en raison de son caractère trop rigoureux ne concernent donc pas la loi de 1978.

Cette exception pourrait constituer une limite importante au droit d'accès, notamment dans le domaine des pollutions qui donnent généralement lieu à une procédure contentieuse. C'est ainsi que la CADA a donné un avis défavorable à la communication du dossier relatif à la catastrophe de l'Amoco Cadiz ZZZ .

Alors que la directive européenne prévoit la possibilité de refuser de communiquer une information demandée de manière abusive (Art 3.3) la législation française ne la prévoit pas expressément. Face au silence de la loi c'est la C.A.D.A qui a été amenée à déclarer certaines requêtes abusives et donc refuser la communication de l'information.

b. Les exceptions visant à protéger l'intérêt général


Le secret de défense nationale ou de la politique extérieure sont des exceptions classiques admises qui sont rarement invoquées pour refuser une communication d'information. Elles sont toutes les deux prévues par la loi de 1978 et par la directive de 1990. Les avis donnés par la commission dans ces matières sont souvent imprécis afin d'éviter qu'une motivation trop détaillée puisse elle-même porter atteinte à ce secret.

En général le secret de défense nationale concerne la demande d'informations relatives à des installations à caractère ou à usage militaire, soit à des procédures en relation avec la défense nationale. En matière d'environnement cette exception a constitué un des fondements de l'avis défavorable donné par la C.A.D.A à la communication des extraits du rapport de sûreté de l'usine de retraitement de la Hague. La Commission a estimé qu'un lecteur averti de ces informations aurait pu déterminer assez précisément la capacité nucléaire nationale.

Le risque d'atteinte à la sécurité publique mentionné à l'article 6 de la loi de 1978 et à l'article 3 de la directive de 1990 permet également de fonder un refus de communiquer un document administratif en général et en matière d'environnement en particulier.

c. Les exceptions visant la protection légale des intérêts privés


Le secret de la vie privée

Ce motif de refus de, communication de l'information est prévu par l'article 6 de la loi de 1978 et par la directive de 1990. Ce respect de la vie privée, déjà prévu par l'article 9 du code civil français a été repris dans la loi de 1978. Cette exception qui ne concerne que les personnes physiques recouvre tous les domaines de la vie privée. Il est évident que ce type d'exceptions est très peu utilisé en matière d'environnement. Le plus souvent, le secret de la vie privée est invoqué indirectement à travers la notion de document nominatif. En effet la CADA considère comme nominatif le document qui porte une appréciation sur une personne ou sur son comportement. La directive du 7 juin 1990 confirme ce rapprochement entre la notion de document nominatif et le secret de la vie privée. Elle se réfère, en effet, à la "confidentialité des données et/ou des dossiers personnels"(Art3, al 2). L'exception liée au secret en matière industrielle et commerciale est au contraire très fréquente dans le domaine de l'environnement.

d. Le secret en matière industrielle et commerciale


La loi de 1978 adopte une conception extensive de cette notion qui comprend le secret des procédés, le secret des informations économiques et financières et le secret des stratégies commerciales. Le secret des procédés de fabrication est celui qui concerne le plus l'environnement. Par exemple la C.A.D.A a émis un avis défavorable à la communication des relevés journaliers individualisés d'analyse des effluents d'une usine dans la mesure où le détail de la composition de ceux-ci pouvait révéler les procédés de fabrication utilisés dans cet établissement ZZZ . La commission contrôle néanmoins étroitement le degré de confidentialité des informations. Elle a ainsi refusé de retenir l'exception tirée du secret industriel et commercial, lorsque le document demandé ne contient aucun renseignement précis sur des procédés techniques susceptibles d'être protégés ZZZ . Le secret des procédés est surtout invoqué dans le domaine des mesures de pollution. Il est nécessaire de concilier les impératifs de transparence de la loi de 1978 avec le fait que les mesures de rejets polluants peuvent révéler les niveaux de production et les procédés de fabrication d'un produit. Dans un avis de 1982, la commission a estimé que les mesures générales de pollution étaient communicables, mais il n'en était pas de même pour les mesures concernant une activité industrielle déterminée.

En vertu de la directive 90/313 relative à l'accès à l'information en matière d'environnement les Etats membres disposent tous d'une législation sur la transparence administrative concernant au minimum l'environnement. Mais dans de nombreux pays c'est une législation sur l'accès à l'information en général qui préexistait ou bien qui fut mise en œuvre. En France on peut considérer que la loi Barnier du 2 février 1995 est venue préciser le droit à l'information dans le domaine spécifique de l'environnement. Ce sont les articles 2 à 10 de la loi qui traitent de l'information en abordant le thème de la participation du public et des associations en matière d'environnement. S'agissant de l'information en matière d'environnement la disposition qui nous intéresse est celle qui crée un conseil départemental de l'environnement, un comité régional de l'environnement et une commission nationale du débat public. Ces autorités sont chargées de mener à bien le débat public concernant tout projet ayant un impact sur l'environnement.

La situation des institutions communautaires était quelque peu particulière et illogique. La Communauté avait édicté des règles sur la transparence s'appliquant aux Etats membres alors qu'aucune règle réellement contraignante ne s'appliquait aux institutions communautaires. Cette situation s'avérait être paradoxale et peu compréhensible par les Etats membres. Cette situation pouvait paraître absurde plus particulièrement pour les citoyens européens qui ne bénéficiaient pas de règles précises sur l'accès aux documents détenus par les institutions communautaires.

Sous l'impulsion de la directive 90/313, la politique de transparence menée par l'Union européenne a évolué de manière significative. Tout d'abord le Traité de Maastricht indique la nécessité d'accroître la transparence au sein de la Communauté. Cela s'est traduit par l'adoption d'un code de conduite en 1993 par la Commission et le Conseil. Ce code fut mis en œuvre par une décision du conseil du 20 décembre 1993 relative à l'accès du public aux documents du conseil et par une décision de la Commission du 8 février 1994 relative à l'accès du public aux documents de la Commission. Enfin le traité d'Amsterdam prévoit le principe de transparence dans son article 191.

On peut comparer cette évolution à celle qu'ont connu les Etats membres. En effet le principe de transparence a remplacé le principe du secret qui était en vigueur auparavant. Il est important de souligner que la communauté n'a pas adopté de règles spécifiques au droit à l'information en matière d'environnement mais a consacré une liberté générale d'accès à l'information détenue par les institutions communautaires.

Nous effectuerons donc une étude détaillée de la législation en vigueur sur l'accès du public aux documents détenus par les institutions communautaires. Nous pourrons ainsi s'apercevoir que les dispositions s'accommodent parfaitement avec le domaine de l'environnement. En même temps nous ferons une comparaison entre la directive 90/313 applicable en matière d'environnement et les règles du code de conduite adopté en 1993.

L'article 191A du Traité de Rome récemment modifié par le Traité d'Amsterdam prévoit que "tout citoyen de l'Union ou toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un Etat membre dispose d'un droit d'accès aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (...)". Cette disposition vise à renforcer le caractère démocratique de la prise de décision des institutions communautaires. Ce mouvement vers une transparence accrue tend à mieux faire connaître le fonctionnement des institutions de l'Union qui pour beaucoup de citoyens européens est peu perceptible et donc difficilement compréhensible.

A l'image de l'information sur l'environnement qui vise notamment à un meilleur respect de celui-ci par les citoyens et donc à en améliorer la qualité, l'accès du public aux documents détenus par les institutions communautaires tend vers une meilleure compréhension et acceptation des mesures édictées par ces dernières. En droit communautaire comme dans les droits nationaux, la protection de l'environnement passe par le droit d'être informé de tout projet pouvant nuire à l'environnement, assortit de la possibilité de pouvoir accéder à des recours administratifs, civils ou d'ordre pénal.

Le thème de la transparence administrative des institutions communautaires est récent et les règles le régissant mettent fin au paradoxe qui existait jusque récemment. En effet les Etats membres étaient tenus en vertu de la directive 90/313 de donner libre accès au public sur les informations en matière d'environnement, alors qu'aucune disposition ne prévoyait la même obligation pour les institutions communautaires

II- Le droit à l'information applicable aux institutions communautaires


Tout comme la législation française, les règles concernant l'accès à l'information détenue par les institutions communautaires ne sont pas spécifiques au domaine de l'environnement mais abordent le droit à l'information d'une manière générale. Il est important de souligner qu'avant l'adoption de ces règles certaines institutions communautaires comme la commission avaient hésité, sur la base de différents rapports et propositions législatives, à édicter des règles spécifiques relatives à l'information en matière d'environnement mais ont finalement opté pour un droit général à l'information. L'environnement étant tout naturellement concerné par ces règles de transparence, nous allons tout d'abord présenter les règles actuellement en vigueur au sein du Conseil et de la commission.

A- Le code de conduite concernant l'accès du public aux documents de la Commission et du Conseil


C'est dès le début des années 1990 que le thème de la transparence des institutions communautaires eut un regain d'intérêts. Cette évolution fut amplifiée par l'adoption du Traité de Maastricht qui dans son acte final ZZZ précise que la transparence de l'action communautaire vise à renforcer le caractère démocratique des institutions et la confiance du public envers l'administration. Cette question de confiance envers les autorités publiques nous semble très importante s'agissant des institutions communautaires. En effet les citoyens de l'Union sont souvent méfiants vis à vis de ces institutions qui édictent des règles parfois mal comprises et de ce fait difficilement acceptées. C'est en permettant aux citoyens européens de mieux s'informer sur les différentes actions de l'Union que l'aventure européenne pourra progresser sans être complètement coupée de ses citoyens. Depuis l'adoption du Traité de Maastricht le Conseil européen lors de chacune de ses différentes réunions a demandé l'adoption de mesures visant à améliorer l'accès du public aux informations détenues par les institutions. C'est ainsi que fut adopté en 1993 un code de conduite concernant l'accès du public aux documents du Conseil et de la Commission ZZZ . Ces deux institutions se sont donc accordées pour l'établissement de règles communes. C'est le Conseil qui le premier a adopté une décision mettant en œuvre ce code en décembre 1993 ZZZ . Puis la Commission a fait de même en février 1994 ZZZ . Le Parlement a quant à lui adopté des règles similaires par une décision de juillet 1997 ZZZ .

Les décisions de ces trois institutions établissent les modalités de traitement des demandes d'accès aux documents. Elles prévoient une procédure comportant une demande écrite de l'intéressé, les phases internes de la procédure et les critères justifiant un éventuel refus. Avant l'adoption du Traité d'Amsterdam on pouvait légitimement s'interroger sur l'existence d'un droit subjectif à l'information. En effet les différentes décisions visaient uniquement à régler la façon dont les demandes d'accès devaient être traitées. Ces normes ne sont pas créatrice du droit d'accès mais ne font que l'organiser sans le consacrer explicitement.

L'extension aux institutions communautaires de la directive 90/313/CEE était devenue sans objet du fait de l'adoption des décisions du Conseil et de la Commission relatives à l'accès du public aux documents. Le projet de proposition législative sur le droit à l'information en matière d'environnement détenue par les autorités communautaires n'a donc eut aucune suite. Il s'est avéré que la spécificité de l'environnement n'apparaissait pas avec évidence par rapport à d'autres secteurs comme celui de la consommation qui concerne directement l'ensemble des citoyens pour justifier une proposition législative. Finalement la plus value d'une proposition législative par rapport au cadre juridique existant (code de conduite de 1993) a été jugé trop faible par la Commission.

Le droit d'accès à l'information sur l'environnement dont bénéficient les particuliers au plan national présente des similarités avec le droit d'accès du public aux documents détenus par le Conseil, la Commission et le Parlement européen. Néanmoins ces deux dispositifs juridiques présentent des différences ayant trait notamment au champ d'application matériel, au régime des exceptions et à l'information active. Ces décalages entre les textes ont pour conséquence que le citoyen ne dispose pas d'un droit équivalent au niveau national et au niveau communautaire et que les Etats membres et les institutions communautaires ne sont pas soumis aux même obligations. C'est cette dissymétrie entre les textes que nous allons montrer en comparant les dispositions de la directive à celles du code de conduite.

1)la forme juridique des instruments utilisés


Quand la directive 90/313/CEE fut adoptée la base juridique d'un acte d'accès à l'information environnementale était l'article 130S du traité qui permettait aussi bien le recours à un règlement qu'à une directive. Le choix du législateur communautaire a porté sur la directive. Celle-ci a pour seul destinataire les Etats membres et leur laisse une certaine marge de discrétion quant à la définition des modalités pratiques selon lesquelles l'information sera effectivement rendue disponible (Art 3). La directive laisse également aux Etats membres la faculté de subordonner la communication de l'information au paiement d'une redevance (Art 5). L'article 130 S du Traité qui constitue la base juridique de la directive permettait également le recours à un règlement. Cela aurait permit d'introduire un droit d'information identique dans les Etats membres.

Les décisions du Conseil et de la Commission d'adopter le code de conduite sur l'accès du public à leurs documents sont fondées sur les dispositions du Traité CE leur conférant compétence pour arrêter le règlement intérieur. (Article 151 §3 pour le Conseil et article 162 §2 pour la Commission). Ici encore ces dispositions auraient pu être adoptées par un règlement du Conseil qui aurait réglé de façon générale l'accès du public aux documents. Sur le plan juridique le règlement de l'accès du public aux documents sous la forme de règlement intérieur parait contestable. C'est d'ailleurs ce qu'ont souligné les Pays-Bas dans un recours contre le Conseil en 1994. Dans cette affaire il est reproché au Conseil d'avoir adopté des dispositions créatrices de droits et d'obligations pour les individus sur la base d'un acte purement interne relatif à l'organisation et au déroulement de ses procédures. La Cour européenne de justice dans son arrêt du 30 avril 1996 ZZZ répondra que la décision du Conseil ne fait qu'officialiser et rendre publique la pratique suivie par le Conseil pour l'examen des demandes d'accès aux documents. Ces dispositions constituent donc des mesures d'organisation du fonctionnement interne du Conseil et ne créent pas en elles-mêmes un droit subjectif à l'information. La Cour se limite à reconnaître une certaine "affirmation progressive du droit d'accès" sans pour autant affirmer l'existence d'un tel droit au niveau communautaire. En effet le législateur communautaire n'a toujours pas adopté de réglementation générale sur le droit d'accès du public aux documents. De ce fait les institutions peuvent adopter des normes internes pour le traitement de ces demandes. Ces normes sont donc légales puisqu'elles ne sont pas créatrice du droit d'accès mais ne font que l'organiser.

2) Le champ d'application de la directive et du code de conduite

a) Les données communicables en vertu des textes


Nous avons déjà vu dans la première partie que l'article 2a de la directive 90/313/CEE vise l'accès aux informations concernant l'état de l'environnement, les activités ou mesures portant ou susceptibles de porter atteinte à l'environnement, les activités ou mesures visant à protéger l'environnement. C'est donc une rédaction large qui avait été adoptée et mise en œuvre.

Le code de conduite concerne l'accès du public aux documents détenus par le Conseil et par la Commission. Le code de conduite dans son principe général entend par "document" tout écrit, quel que soit son support, contenant des données existantes, détenu par la Commission ou le Conseil.

Il résulte de ces définitions qu'à la différence de la directive 90/313/CEE, le code de conduite ne couvre pas l'accès aux informations environnementales disponibles sous forme visuelle et sonore qui sont détenues par le Conseil et par la Commission.

Tout comme la directive, le code de conduite se réfère à l'information "détenue" par le Conseil et la Commission. Le code envisage l'hypothèse où le document détenu par l'institution a pour auteur une personne physique ou morale, un Etat membre, une autre institution ou organe communautaire ou tout autre organisme national ou international. Dans un tel cas, le Code de conduite prévoit l'obligation selon laquelle la demande d'information devra être adressée directement à l'auteur du document. Cette hypothèse n'est pas expressément prévue par la directive et crée de ce fait une incertitude sur le sort d'une demande d'information figurant sur un document n'émanant pas de l'autorité publique sollicitée. Si nous soulignons cette différence c'est pour indiquer qu'en vue d'une future révision de la directive le législateur européen ne devrait pas uniquement s'inspirer des principes adoptés dans la convention internationale de juin 1998. Les règles du code de conduite qui semblent être un excellent moyen d'améliorer ce domaine.

b) Les autorités chargées de communiquer les informations


L'article 2b de la directive vise les informations détenues par les administrations publiques, qu'elles se trouvent au niveau national, régional ou local. De plus cette autorité doit répondre à deux conditions cumulatives : avoir des responsabilités et être en possession d'informations relatives à l'environnement. Le code de conduite qui vise à organiser l'accès du public aux documents au plan communautaire comprend un champ d'application très spécifique puisqu'il est limité à deux institutions visées par le traité CEE, à savoir la Commission et le Conseil.

c) Les titulaires de l'information


Selon l'article 3 de la directive, l'accès à l'information sur l'environnement est un droit à la disposition de "toute personne physique ou morale". Aucune différenciation n'est faite selon la provenance géographique du demandeur qui peur même habiter en dehors de la Communauté. De plus ce demandeur n'est pas "obligé de faire valoir un intérêt".

Concernant cet aspect, le Code se conduite de caractérise par l'emploi d'une seule expression, à savoir "le public". Ce terme renvoie à la notion de "citoyens" telle qu'elle est mentionnée aux deuxième et troisième considérants du Code de conduite où sont évoquées les conclusions du Conseil européen de Copenhague. Ces considérants visent à promouvoir une Communauté plus proche de ses citoyens et un accès aussi large que possible des citoyens à l'information. Un examen en détail du Code de conduite montre que la notion de "public" est entendue de manière large étant donné que la consultation des documents est prévue non seulement dans les bureaux de représentation de la Commission dans les Etats membres mais aussi dans les délégations de la Commission des Etats tiers.

d) L'affirmation d'un droit d'accès à l'information environnementale


L'article 1er de la directive accorde un droit d'accès à l'information. Il vise également à assurer la liberté de cet accès. Ce droit d'accès trouve son pendant à travers l'obligation prévue à l'article 3 §1 de la directive selon laquelle les autorités publiques sont tenues de mettre les informations relatives à l'environnement à la disposition de toute personne physique ou morale qui en fait la demande.

Le code de conduite organise également un droit d'accès à l'information à travers le principe général qu'il formule dans les termes suivants : "Le public aura le plus large accès possible aux documents détenus par la Commission et le Conseil". Comme l'indique le guide sur l'accès aux documents de la Commission établi par le secrétariat général, ce principe correspond à "l'approche fondamentale qui doit guider l'examen de chaque demande".

e) Les exceptions au droit d'accès à l'information


Dans le cadre de la directive 90/313/CEE, la discrétion de l'administration d'accorder ou de refuser l'accès à l'information est limitée. En effet, le refus n'est possible que dans des circonstances bien précises. C'est ainsi que le septième considérant indique que "dans certains cas particuliers clairement définis, le refus de donner suite à une demande d'information sur l'environnement peut se justifier".

Le code de conduite organise également un régime des exceptions au droit d'accès aux documents. Dans le cas où la divulgation des documents pourrait porter atteinte à certains intérêts énumérés par le Code de conduite, les institutions doivent refuser leur accès. Les intérêts envisagés par le Code de conduite présentent certaines similarités avec la directive 90/313/CEE. Ce sont ces intérêts que nous allons maintenant analyser plus en détails.

En vertu du code de conduite, l'institution doit invoquer ce motif de refus dans un certain nombre de cas : quand la divulgation de l'information est susceptible de porter préjudice à la sécurité de la Communauté ou à la politique de la défense ; quand la divulgation de l'information peut compromettre ou compliquer les relations internationales ; quand la divulgation de l'information est susceptible de porter préjudice à la bonne administration de la justice, notamment à l'application du droit communautaire et compromettre ainsi le traitement des manquements à ce droit ; quand la divulgation de l'information est susceptible de porter préjudice par exemple aux tâches d'inspection et de contrôle de la Commission.

Ainsi le motif de refus fondé sur la protection de l'intérêt public est entendu de manière large dans le Code de conduite dans la mesure où cette exception englobe "la sécurité publique, les relations internationales, la stabilité monétaire, les procédures juridictionnelles, les activités d'inspection et d'enquête". La protection est également envisagée par la directive 90/313/CEE mais selon une formulation différente. En effet, la directive distingue trois cas d'exceptions, à savoir la confidentialité des relations internationales et le secret de la défense nationale, la sécurité publique, les affaires qui sont ou ont été pendantes devant une juridiction ou qui font ou qui ont fait l'objet d'une enquête ou qui font l'objet d'une instruction préliminaire. Cette dernière hypothèse de refus des affaires pendantes ou en cours vise notamment à ne pas voir le droit d'accès à l'information entraver le bon déroulement des procédures ou des enquêtes judiciaires. Il est important de noter que l'exception du Code de conduite englobant les procédures juridictionnelles est beaucoup moins précise que celle prévue dans la directive.

La protection de cet intérêt signifie que l'accès ne sera pas accordé par exemple aux dossiers personnels concernant les fonctionnaires ou agents des institutions concernées ( par exemple les documents relatifs aux recrutements, aux promotions etc.). Ce motif de refus à une demande d'accès est également envisagé par la directive 90/313/CEE dans le cadre de son article 5 qui prévoit une exception relative à "la confidentialité des données et/ou des dossiers personnels"

Cette hypothèse de refus qui est également prévue par la directive 90/313/CEE concerne de manière générale le secret commercial et industriel qu'une entreprise souhaite légitimement garder confidentiel afin de protéger sa situation concurrentielle ou ses méthodes de production par exemple.

S'agissant du domaine de la concurrence on peut rapprocher cette exception de la suivante prévue par le Code de conduite. Cette dernière vise à protéger les intérêts financiers de la Communauté. La protection de cet intérêt de justifie quand la divulgation de l'information est susceptible de porter préjudice à la situation financière et concurrentielle de la Communauté. Cette exception vise également la protection des intérêts financiers des institutions concernées dans leurs actions relevant du droit privé. La protection de cet intérêt étant spécifique au cadre communautaire, cette exception ne se retrouve pas dans la directive européenne.

L'exception concerne précisément la protection de la confidentialité demandée par la personne physique ou morale qui a fourni l'information ou requise par la législation de l'Etat membre qui a fourni l'information. Cette hypothèse de refus signifie tout simplement que l'accès n'est pas autorisé lorsque la personne qui a fourni le document attend de l'institution concernée qu'elle ne le divulgue pas ou lorsque la confidentialité est requise par le droit de l'Etat membre qui a fourni les documents. Dans de tels cas, l'institution concernée devra inviter la personne qui a formulé une demande d'accès à l'information à s'adresser directement à l'auteur du document. La protection de cet intérêt trouve son pendant dans la directive 90/313/CEE qui envisage expressément l'hypothèse des "données fournies par un tiers sans qu'il y soit juridiquement tenu". Nous ne reviendrons pas sur les difficultés qui se posent quant au domaine spécifique de l'environnement et qui a fait l'objet d'un développement antérieur ZZZ .

Il est important de préciser préalablement que le Code de conduite ne formule pas une obligation de refus mais une possibilité de refus de la part de l'institution concernée. En effet le code indique que les instituions "peuvent (...)refuser" alors que pour les exceptions précédentes il est indiquer que les institutions "refusent" l'accès aux documents. Cette différence s'explique par le fait que la divulgation de certaines délibérations n'a pas à être refusée car allant vers une transparence accrue et nécessaire du processus de décision.

Cette exception concerne le cas où la divulgation des documents comme les comptes rendus de réunions internes, les avis des services, les rapports de mission, les notes d'information et de réflexion est susceptible de compromettre la confidentialité des réflexions des institutions.

Cette exception est également prévue par la directive qui prévoit dans son article 3 la possibilité d'opposer un refus quand la demande a trait "à la confidentialité des délibérations des autorités publiques".

Aussi bien la directive (Article 3 paragraphe 4)que le Code de conduite prévoient l'obligation de motiver le refus de communiquer l'information demandée.

Sur la base des éléments comparatifs que nous venons d'évoquer, il est possible d'affirmer que le Code de conduite et la directive 90.313/CEE présentent des similarités notables concernant le régime des exceptions au droit d'accès à l'information. Toutefois, certaines différences entre le régime prévu par la directive et le Code de conduite peuvent être relevées. Ainsi il convient de souligner qu'une exception spécifique au domaine de l'environnement n'est pas contenue dans le code de conduite. En effet, la directive envisage la possibilité d'opposer un refus à une demande d'information lorsque celle-ci a trait "aux données dont la divulgation aurait plutôt pour effet de porter atteinte à l'environnement auquel elles se réfèrent". Ce motif de refus vise à protéger l'environnement et concerne par exemple des situations où la communication d'informations relatives aux lieux de nidification de certains oiseaux rares aurait pour effet d'attirer des chasseurs.

En outre, la directive envisage l'obligation pour l'autorité publique de procéder à une communication partielle de l'information lorsqu'il est possible de retirer les mentions qui ont trait à des intérêts protégés par le régime des exceptions. Le dispositif d'une communication partielle de l'information n'est pas expressément envisagé par le Code de conduite.

Enfin, il importe d'ajouter que la directive 90/313/CEE se différencie du Code de conduite en envisageant à son article 3 §3 la possibilité pour l'autorité publique de fonder son refus pour des raisons formelles. Les quatre cas dans lesquels une demande d'information peut être rejetée sont les suivants : quand il s'agit de documents inachevés, de communications internes, lorsque la demande d'information est manifestement abusive ou est formulée d'une manière trop générale. De tels cas de refus fondés plutôt sur des raisons formelles ne sont pas prévus dans le Code de conduite.

Avant d'aborder les modalités pratiques d'accès à l'information il convient d'ores et déjà d'indiquer que le Code de conduite présente certaines lacunes quant à une éventuelle application dans le domaine de l'environnement. Il parait regrettable que le Code n'ait pas de mention particulière quant à la possibilité de refuser une demande d'information qui menacerait de nuire à l'environnement. Même si l'accès à l'information est le principe et le refus l'exception, celui lié à une meilleure protection de l'environnement nous semble indispensable afin d'éviter tout abus. Ensuite le fait de ne pas prévoir la possibilité d'une communication partielle d'un document revient à refuser le droit d'accès du public à des documents qui normalement devraient entrer dans le champ d'application du droit à l'information. Enfin l'absence de refus fondé sur des raisons formelles laisse subsister un domaine d'incertitude quant à la communicabilité de ce type de documents. Même si nous pouvons conclure à un bilan globalement positif des dispositions du code de conduite quant au fond du droit envisagé, il nous semble opportun d'effectuer quelques modifications remédiant aux critiques préalablement citées.

3) Les modalités pratiques d'accès à l'information


La directive 90/313/CEE dans son article 3 §1 impose de manière générale aux Etats membres de définir les modalités pratiques selon lesquelles l'information sera effectivement rendue disponible. Toutefois la directive consacre des dispositions spécifiques ayant trait au délai de réponse par l'autorité publique à une demande d'accès à l'information et aux frais d'accès à l'information, dispositions qu'il convient de comparer avec celles du code de conduite.

Tout d'abord le délai de réponse à une demande d'accès à l'information fait l'objet d'une disposition claire et précise dans la directive. L'article 3 §4 prévoit l'obligation selon laquelle l'autorité publique doit répondre à l'intéressé dans les meilleurs délais et au plus tard dans les deux mois. Nous nous sommes déjà prononcés dans la première partie pour un délai plus court allant vers plus de rapidité comme celui adopté dans la convention internationale de juin 1998. Sur ce point le Code de conduite va dans le bon sens puisque le délai de réponse est fixé à un mois.

S'agissant des frais d'accès à l'information l'article 5 de la directive donne aux Etats membres la possibilité de soumettre au paiement d'une redevance la communication de l'information. Toutefois, la directive assortit cette possibilité d'une condition selon laquelle la redevance ne doit pas excéder un montant raisonnable. De la même façon, le Code de conduite prévoit la possibilité de soumettre aux frais du demandeur la délivrance de copie de documents sans que le montant n'excède le raisonnable.

A ces deux aspects, il convient d'ajouter que le Code de conduite précise davantage par rapport à la directive les modalités pratiques d'accès à l'information dans le cadre de ses dispositions se rapportant d'une part au traitement des demandes initiales d'accès à l'information et d'autre part au traitement des demandes confirmatives. Une demande confirmative est la faculté prévue par le Code de conduite d'adresser à l'institution concernée une demande tendant à réviser sa décision de refus d'accès à l'information. Le particulier dispose d'un mois à compter de la décision de refus de l'institution pour formuler une telle demande de révision et l'institution visée dispose également d'un mois pour confirmer sa décision initiale de refus à la demande d'accès à l'information. L'ensemble de ces exigences est défini par le Code de conduite dans son article intitulé "Traitement des demandes confirmatives". Cette disposition qui ne figure pas dans la directive est une garantie supplémentaire pour garantir au demandeur l'accès aux documents. Même si cette disposition n'est pas prévue par la directive, elle peut être instaurée par les Etats membres lors de la transposition de la directive. De plus prévoir un tel système aurait pu aller à l'encontre de systèmes déjà existant dans un Etat membre et prévoyant une disposition tout aussi protectrice des intérêts du demandeur.

Alors que la directive ne contient aucune précision, le code de conduite pose par exemple des exigences relatives à la présentation de la demande d'accès à l'information en précisant que celle-ci "devra être écrite et formulée de façon suffisamment précise; elle devra contenir notamment les éléments permettant d'identifier le ou les documents visés".

Au niveau du droit de recours, tant la directive que la code de conduite envisagent les voies de recours possibles dans l'hypothèse où le particulier se voit opposé un refus à une demande d'accès à l'information et estime que la décision de refus de l'autorité publique ou de l'institution concernée n'est pas suffisante. L'article 4 de la directive reconnaît un droit de recours judiciaire ou administratif conformément à l'ordre juridique national en la matière à toute personne qui estime que sa demande d'information a été abusivement rejetée ou négligée, ou qu'elle n'a pas reçu une réponse satisfaisante de la part de l'autorité publique. Dans le cas où la personne considérerait que la décision de refus de l'institution concernée n'est pas satisfaisante, il découle du Code de conduite qu'elle dispose des deux voies de recours suivantes : le recours en annulation de la décision de refus de l'institution visée, dans les conditions prévues à l'article 173 du Traité CEE; le dépôt d'une plainte auprès du médiateur dans les conditions fixées à l'article 138 E du traité CEE. Le Code de conduite impose à l'institution concernée de rappeler aux particuliers dans sa décision de refus d'accès à l'information ces deux voies de recours.

Le dernier point de comparaison entre la directive et le code de conduite concerne l'information active en matière d'environnement.

4) L'information active


Dans son article 7, la directive demande aux Etats membres de fournir au public des informations générales sur l'état de l'environnement. La directive suggère par exemple la publication périodique de rapports descriptifs. Il est évident que cette disposition de la directive spécifique au domaine de l'environnement ne trouve pas son équivalent dans le dispositif général d'accès aux documents défini par le Code de conduite, ni dans les décisions du Conseil ou de la Commission qui ont mis en œuvre le Code de conduite.

Au niveau communautaire la tâche de fournir des informations actives sur l'état de l'environnement est en quelque sorte dévolue à l'Agence européenne de l'environnement dont le siège est au Danemark à Copenhague. Une des fonctions de cette agence doit consister entre autres à "enregistrer, collectionner et évaluer les données sur l'état de l'environnement, rédiger des rapports d'expertise sur la qualité et la sensibilité de l'environnement...". Nous ne ferons pas de développement détaillé sur le rôle de l'Agence européenne de l'environnement. Il nous semble toutefois utile de préciser que face au besoin croissant de connaître l'état de l'environnement, la commission a adopté en 1985 un programme de Coordination de l'Information sur l'Environnement, ci-après désigné comme le programme CORINE ZZZ . Les résultats du programme ont montré que la Communauté et les Etats membres devaient absolument disposer d'un système permanent d'information sur l'état de l'environnement pour être en mesure d'appliquer et développer leur politique d'environnement. Cette agence fut crée par une décision du conseil du 7 mai 1990 ZZZ . L'Agence européenne pour l'environnement dispose en vertu de l'article 1er du règlement d'une mission d'information de grande envergure. La querelle relative à la question du siège de l'agence a considérablement retardé sa mise en place. En effet ce n'est que lors du sommet extraordinaire de Bruxelles du 23 octobre 1993 que fut choisi la ville de Copenhague pour y établir le siège de l'Agence.

Le règlement du Conseil du 7 mai 1990 relatif à la création de cette Agence et du réseau européen d'information et d'observation pour l'environnement définit ainsi son objectif : "fournir à la Communauté et aux Etats membres : des informations objectives, fiables et comparables au niveau européen qui leur permettent de prendre les mesures nécessaires pour protéger l'environnement, d'évaluer leur mise en œuvre et d'assurer la bonne information du public sur l'état de l'environnement; à cette fin, le support technique et scientifique nécessaire".

Les principaux domaines d'activité de l'Agence englobent, dans la mesure du possible, tous les éléments lui permettent de recueillir les informations grâce auxquelles l'état actuel et prévisible de l'environnement peut être décrit sous l'aspect de la qualité de l'environnement, des pressions subies par l'environnement, et de la sensibilité de l'environnement. L'article 6 du règlement indique que les données environnementales fournies à l'agence ou communiquées par elle "peuvent être publiées et sont rendues accessibles au public, sous réserve du respect des règles de la commission et des Etats membres relatives à la diffusion de l'information, notamment en ce qui concerne la confidentialité".

B- L'apport du traité d'Amsterdam vers plus de transparence


Le Traité d'Amsterdam a introduit trois modifications ayant pour objectif d'ancrer la transparence dans les traités.

- Tout d'abord le deuxième alinéa se l'article A du traité de l'Union européenne est complété comme suit : " Le présent traité marque une nouvelle étape dans le processus créant une union sans cesse plus étroite entre les peuples de l'Europe, dans laquelle les décisions sont prises dans le plus grand respect possible du principe d'ouverture et le plus près possible des citoyens". Le principe d'ouverture est ainsi présenté comme l'un des éléments du caractère démocratique de la prise de décision dans l'Union européenne. Ce lien entre la transparence et le caractère démocratique des institutions ressortait déjà de la déclaration n°17 de l'acte final du traité de Maastricht

- Ensuite un nouvel article 191 A est ajouté au Traité CE (renuméroté Art 255) ZZZ . Il crée un droit subjectif à l'accès aux documents des trois institutions mentionnées (Parlement européen, Conseil et Commission) sous réserve que le Parlement européen et le Conseil agissent en co-décision. Ce droit d'accès concerne donc seulement les institutions qui ont une fonction législative et exécutive.

- Enfin un nouvel alinéa au §3 de l'article 151A du Traité CE est ajouté ZZZ (renuméroté Art 207). Ce nouvel alinéa commence par répéter, en ce qui concerne le conseil, qu'il appartiendra aux institutions concernées d'élaborer dans leur règlement intérieur des dispositions particulières concernant l'accès aux documents. Les dispositions de cet article font apparaître une nouvelle notion dans le Traité, à savoir celle de législateur quand le Conseil agit en cette qualité. La notion d'efficacité est également mentionnée et est à l'origine des confidentialités des délibérations du Conseil. Les raisons de cette confidentialité sont notamment dues au processus de négociation et de compromis qui caractérise la prise de décision au sein du Conseil. Il s'agit donc de mettre en balance un meilleur accès aux documents, d'une part, et l'efficacité du processus décisionnel, d'autre part.

Le Conseil a adopté un code de conduite le 2 octobre 1995 concernant la publicité des procès verbaux et des déclarations aux procès-verbaux. L'accès du public aux documents en cours de délibération est en général refusé surtout quand les documents en question révèlent la position de l'une ou l'autre délégation.

Sans concerner le domaine de l'environnement en particulier l'ensemble de ces évolutions vers plus de transparence témoigne du changement récent des relations administrés/administration. Cette évolution des mentalités est en particulier dans le domaine de l'environnement très bénéfique pour ce dernier. En effet bénéficier d'une information fiable sur l'état de l'environnement et pouvoir s'informer sur les décisions futures pouvant affecter l'environnement permettent aux citoyens de prendre conscience de l'importance de celui-ci. Enfin une meilleure connaissance de l'environnement et des dangers d'un non respect conduit certainement les citoyens à changer leurs comportements en étant plus concernés par la préservation d'un environnement sain.


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