Année 1999


PREMIERE PARTIE


ACTIVITE DES DELEGUES DEPARTEMENTAUX


BILAN DE L'ANNEE ECOULEE

Chaque trimestre, les délégués départementaux ont dressé un rapport d'activité au Médiateur de la République.
Ce document en cinq points permet de rendre compte de leur action au cours des trois mois écoulés en précisant notamment :
- les dossiers que le délégué départemental n'a pas pu régler localement et qui devraient être ultérieurement transmis au Médiateur de la République par l'intermédiaire d'un parlementaire ;
- les affaires du trimestre mentionnant les coordonnées du réclamant, la nature de l'affaire, l'administration saisie, le secteur d'instruction intéressé et la suite donnée ;
- les affaires "en cours" des trimestres précédents qui ont pu être clôturées, avec indication de leur nombre, de leur nature et de la solution qui leur a été apportée ;
- les interventions locales effectuées à la demande du Médiateur de la République pour aider à régler certains dossiers traités au siège de l'Institution ;
- les initiatives prises pour promouvoir l'Institution concernant, en particulier, les relations avec les médias, les conférences ou exposés et les relations avec les parlementaires locaux et leurs assistants.
En outre, les délégués indiquent, au début du rapport, le nombre des demandes d'informations et de conseils qui ne donnent pas lieu à l'ouverture d'un dossier.

1. Les demandes d'informations et de conseils hors champ de compétence

Le nombre de demandes de conseils ou d'informations qui n'entrent pas dans le champ de compétence des délégués départementaux ne cesse d'augmenter.
Il est passé de 21.431 à 24.602 entre 1998 et 1999, soit une progression de près de 15 % en un an. Cette partie de l'activité des délégués a presque doublé en six ans.
Cette progression est la manifestation de l'intérêt croissant de nos concitoyens pour l'idée de médiation, mais aussi de la difficulté de leur faire comprendre les limites du domaine d'intervention du Médiateur de la République.
Bien des personnes retenant essentiellement le terme de "Médiateur" pensent pouvoir trouver auprès des délégués départementaux une aide pour régler des problèmes de toute nature. Il arrive souvent que des particuliers viennent demander conseil au délégué départemental pour le règlement d'affaires d'ordre privé.
Face à de telles situations, le délégué les oriente vers un "conciliateur", éventuellement un organe de médiation spécifique ou bien leur recommande de faire appel à un avocat.
Cette disponibilité, cette écoute, les conseils prodigués expliquent que le délégué départemental est perçu très positivement par les particuliers.

2. Les réclamations

En 1999, le nombre de réclamations reçues par les délégués départementaux s'est élevé à 19.693, soit une augmentation de 5,5 % par rapport à l'année précédente.
Dès que le délégué estime qu'une réclamation est recevable, c'est-à-dire qu'elle a fait l'objet de démarches préalables et qu'elle correspond aux critères de compétence définis par la loi, un dossier est ouvert.

A. Le traitement des réclamations

Le délégué est guidé dans sa démarche par trois lignes directrices que l'on peut résumer ainsi : écouter, comprendre, intervenir.
L'écoute d'un réclamant - ou la lecture attentive d'un courrier - est la première étape essentielle qui va permettre d'ouvrir un dossier.
Il s'agit d'accueillir un citoyen confronté à un problème administratif qu'il se sent incapable de résoudre seul ou pour lequel il n'a pas obtenu les réponses qu'il attendait.
A partir des documents présentés par le demandeur et d'un échange de type "questions-réponses", le délégué départemental identifie l'origine du différend, sa nature ainsi que la situation sociale du réclamant.
Le délégué saisit alors l'administration concernée au niveau local, généralement par écrit, afin que la question soulevée fasse l'objet d'un nouvel examen.
Si l'affaire ne paraît pas susceptible de trouver une solution amiable au plan local, le dossier peut être transmis au Médiateur de la République, par l'intermédiaire d'un parlementaire choisi par le réclamant. Le délégué aide alors celui-ci à préparer le dossier qui sera transmis.
En 1999, 1.421 réclamations ont ainsi été orientées vers un parlementaire pour être transmises au Médiateur de la République dont la moitié a été effectivement communiquée aux services de la Médiature. Dans les autres cas, on peut penser que le parlementaire est intervenu directement auprès de l'administration, ou que la réclamation a été abandonnée par l'administré soit parce qu'il avait obtenu satisfaction entre-temps, soit parce qu'il avait considéré lui-même que sa réclamation n'était pas fondée.

B. Quelques exemples de réclamations

- l'ancien propriétaire d'une voiture est menacé de poursuites par le Trésor public pour non-paiement de contraventions concernant ce véhicule régulièrement cédé ;
- des indemnités journalières, déclarées au fisc, doivent être remboursées à la sécurité sociale alors que le montant de l'impôt a déjà été établi ;
- travaillant en France depuis 1966, un Portugais se voit refuser le bénéfice d'une pré-retraite versée par l'ASSEDIC car sur sa déclaration de revenus, il a mentionné par erreur qu'il était domicilié au Portugal ;
- un instituteur exerçant à Berlin, dans le cadre d'un échange franco-allemand, tente de se procurer le formulaire E 101 pour éviter de payer deux fois des cotisations de sécurité sociale et aucun service ne veut lui répondre ;
- un chômeur qui n'a pas déclaré un changement de sa situation dans les délais doit rembourser aux ASSEDIC des sommes indûment perçues ;
- un père de six enfants, qui n'en a pas la garde, sollicite en vain une carte de circulation SNCF lui permettant de bénéficier du tarif "famille nombreuse".
De manière plus générale, les délégués sont fréquemment confrontés à des problèmes liés au RMI, à l'allocation logement, aux indemnités journalières, ou bien à des questions de prise en charge incomplète, d'ouverture de droits ou de remboursement d'indus....

3. La répartition des réclamations

Cette répartition s'effectue dans des proportions très inégales selon les secteurs :
Secteur Social 34 %
Secteur Administration générale 29 %
Secteur Fiscal 22,5 %
Secteur Urbanisme/Justice 11,5 %
dont Justice : 3,5 %
et Urbanisme : 8 %
Secteur Agents publics 3 %

> Secteur social

Plus du tiers des réclamations adressées aux délégués départementaux concerne le secteur social.
Les trois-quarts des réclamations concernent les litiges intéressant les Caisses d'allocations familiales, les Caisses de sécurité sociale et les ASSEDIC.
Le dernier quart porte sur des litiges avec les Caisses de retraite, les COTOREP, l'URSSAF, les services sociaux départementaux et communaux, l'ANPE.

> Secteur administration générale

29 % des réclamations concernent le secteur administration générale. Elles se caractérisent par la multiplicité des organismes saisis et la variété des questions traitées.
Le recours aux délégués pour des litiges mettant en cause des communes (25 %) et des services de préfectures (21 %) est très fréquent.
Dans les communes, les contestations portent principalement sur les problèmes d'eau, d'assainissement, d'ordures ménagères (60 %) et de voirie (30 %).
La situation administrative des étrangers est à l'origine des deux-tiers des réclamations concernant les préfectures, alors que la délivrance des documents d'état civil, des permis de conduire et d'autorisations administratives diverses constitue l'autre tiers y compris quelques réclamations en matière d'expulsions et d'amendes de police.
On peut noter que le nombre de dossiers concernant la contestation de factures d'EDF-GDF est faible si l'on se rapporte au total des factures émises ; il en est de même pour La Poste eu égard au volume de son activité. Les litiges relatifs à l'Education nationale - dérogations, inscriptions, concours - représentent 2 % seulement de l'activité des délégués départementaux, compte tenu de la création en 1998 de médiateurs académiques.

> Secteur fiscal

Le secteur fiscal représente 22,5 % des réclamations.
Les problèmes posés concernent essentiellement les services fiscaux et le Trésor public.
Des réclamations concernent, par exemple, des redressements fiscaux à propos :
- de frais réels déduits des traitements et salaires (manque de justificatifs, conditions non- remplies) ;
- de déductions pour travaux d'amélioration, de réparation et d'entretien dans l'habitation principale ou la propriété louée (les conditions ne sont pas remplies ou la nature réelle des travaux n'autorise pas de déduction) ;
- de sommes non déclarées par les entreprises ou bien de livres de comptes mal ou non-tenus ;
- de l'évaluation assez fortement sous-estimée d'un bien immobilier (maison, terres) ou d'un passif surévalué dans une succession.
Nombreuses, également, sont les demandes d'exonération ou de dégrèvement partiel pour les taxes foncières, la taxe d'habitation, la taxe professionnelle, la redevance de l'audiovisuel. Dans ces domaines, le caractère social de la réclamation intervient de plus en plus fréquemment.
De même, les demandes de délais ou d'échéanciers pour le règlement des impôts de toute nature, pour cas de force majeure ou problèmes conjoncturels, font souvent l'objet d'interventions de la part des délégués départementaux.

> Autres secteurs

Les secteurs urbanisme/justice et agents publics ne représentent qu'une part assez faible des réclamations adressées aux délégués (11,5 %).
Les litiges qui concernent les certificats d'urbanisme, les permis de construire et les modifications d'un plan d'occupation des sols constituent l'essentiel des demandes d'intervention en matière d'urbanisme. Ces situations sont souvent assez difficiles à traiter, car il s'agit, dans la plupart des cas, de problèmes très localisés et les maires se montrent parfois réticents pour répondre.
Les interventions des délégués départementaux dans le domaine de la justice sont moins fréquentes et portent principalement sur la non-exécution de décisions de justice. S'agissant souvent de situations délicates et compliquées, les délégués orientent généralement les requérants vers un parlementaire pour qu'il saisisse le Médiateur de la République.
Il en est de même pour les affaires relevant du secteur agents publics (3 %), pour lesquelles il est indispensable d'interroger des administrations centrales, ce que les délégués n'ont pas vocation à faire.

4. Les relations entre les délégués départementaux et le siège de l'Institution du Médiateur de la République

Pour assurer le succès de sa politique de déconcentration dans l'intérêt des citoyens, le Médiateur de la République s'attache à resserrer les liens entre ses délégués départementaux et le siège de l'Institution.
Ainsi, une lettre d'information bimestrielle, intitulée Médialogue, sur l'activité du Médiateur de la République leur est notamment destinée.
Chaque fois que cela est nécessaire, ils sont consultés ou associés au règlement de cas particuliers traités au siège de la Médiature lorsque ceux-ci concernent des réclamants de leur département.
Ils reçoivent copie de toutes les réponses définitives adressées par le Médiateur de la République aux parlementaires de leur département.
Ils sont invités à formuler des suggestions de réformes.
Enfin, le Médiateur de la République réunit les délégués régulièrement au cours de rencontres régionales. Ces réunions ont pour objet de dresser le bilan de l'action des délégués au plan local et d'étudier les améliorations susceptibles d'être apportées dans la façon dont ils accomplissent leur mission.
Au cours de l'année 1999, le Médiateur de la République s'est déplacé à Dijon le 9 février, à Caen le 18 mars, à Marseille le 30 mars, à Rennes le 27 avril, à Amiens le 19 mai et à Montpellier le 27 octobre : il a ainsi pu rencontrer 45 délégués départementaux.

PRESENTATION DE QUELQUES CAS SIGNIFICATIFS

Recherche d'une solution amiable pour un échange de parcelle
En 1996, M.B... a constaté qu'un pylône de TDF avait été érigé sur une parcelle (n° AA 150) lui appartenant. L'intéressé a alors demandé à la commune de lui acheter cette parcelle ou de l'échanger avec une autre parcelle communale.
Dans un premier temps, le 22 octobre 1996, la commune a accepté l'échange. Découvrant, par la suite, qu'il ressortait du cadastre récemment remanié que la parcelle AA 150 était incorporée dans le domaine public communal, la commune a alors remis en cause cet accord.
M. B... est aussitôt intervenu auprès du délégué départemental du Médiateur. Celui-ci a conseillé à la commune d'examiner une nouvelle fois les documents cadastraux.
Après vérifications, la commune a confirmé que la parcelle litigieuse était partie intégrante du Domaine public communal et que les documents cadastraux en attestaient. De son côté, M. B... maintenait que la parcelle AA 150 avait toujours fait partie de sa propriété.
Le délégué du Médiateur de la République s'est alors rapproché de la direction des services fiscaux (Service des Domaines) pour qu'il soit procédé à une vérification de la situation du cadastre remanié en 1994.
Dans une lettre du 15 juin 1999, le directeur des services fiscaux a fait savoir que les limites portées au nouveau plan cadastral ne correspondaient pas aux limites réelles de la propriété telles que les opérations de remembrement les avaient définies.
Il en résultait que M. B... était bien propriétaire de la parcelle en cause.
Après avoir rappelé que les opérations de remembrement avaient fait l'objet d'une publicité sans que le cas de la parcelle AA 150 ait été évoqué, le directeur des services fiscaux a informé le maire de la commune des modifications qu'il convenait d'apporter au dernier plan cadastral.
Le délégué du Médiateur de la République a pu informer M. B... que les documents cadastraux ainsi modifiés ne constituaient plus un obstacle à un accord amiable avec la commune.
Taxe d'urbanisme due au titre d'un permis de construire personnalisé
Mme A... était en litige avec la Trésorerie générale à propos du recouvrement de la taxe d'urbanisme due au titre d'un permis de construire délivré en 1991 à M. A..., son ex-mari.
Or, Mme A... avait contesté l'avis à tiers détenteur émis le 12 janvier 1999 par le trésorier et adressé au directeur de la chambre de commerce, son employeur. De plus, elle avait estimé ne pas être redevable des taxes en cause puisque le permis de construire avait été délivré au seul nom de son ex-mari. Par ailleurs, ayant porté l'affaire devant le tribunal administratif, Mme A... avait demandé au trésorier un sursis de paiement en attendant cette décision de justice. Ces démarches n'avaient pas abouti.
Saisi de cette affaire, le délégué départemental du Médiateur de la République a demandé au trésorier-payeur général ainsi qu'au directeur départemental de l'Equipement, un nouvel examen du dossier fondé sur les arguments que faisait valoir l'intéressée.
Une semaine plus tard, le délégué départemental du Médiateur de la République était informé que le trésorier annulait l'avis à tiers détenteur incriminé et ordonnait la restitution des sommes déjà versées, aux termes de l'article 1929-4 du code général des Impôts qui précise la qualité des personnes tenues solidairement au paiement de la taxe locale d'Equipement.
Selon ces dispositions, le copropriétaire d'un immeuble, s'il n'est pas titulaire du permis de construire, ce qui était le cas de l'intéressée, n'est pas solidairement tenu au paiement de la taxe.
Un grave défaut d'information corrigé M. J... s'était installé comme travailleur indépendant avant d'avoir déposé une demande d'aide à la création d'entreprise ; il s'était vu, pour cette raison, refuser l'octroi de l'ACCRE (Aide à la création ou la reprise d'entreprise) par la Direction départementale du Travail, de l'Emploi et de la Formation professionnelle.
M. J... s'est alors adressé au délégué départemental du Médiateur de la République en lui expliquant que personne, notamment à l'URSSAF, ne l'avait informé, en temps utile, de l'existence de cette aide et des conditions de son attribution aux entrepreneurs désireux de démarrer une activité indépendante.
Convaincue de la bonne foi de M. J..., après l'intervention du délégué départemental du Médiateur de la République, la Direction départementale du Travail, de l'Emploi et de la Formation professionnelle a accepté que l'intéressé présente un dossier ACCRE.
De plus, l'URSSAF locale s'est engagée à informer plus largement les travailleurs non salariés en joignant désormais à toute demande de déclaration de début d'activité une notice d'information sur les conditions d'attribution de l'ACCRE.
Un exclu rétabli dans ses droits
Né en 1920, M. W... avait exercé la profession de chauffeur-routier. Au cours de sa carrière, il avait eu deux accidents graves de la circulation : l'un en 1942, l'autre en 1979, date à laquelle il avait été mis en incapacité de travail avec une rente au taux de 60 %.
Par ignorance, il n'avait pas demandé sa mise à la retraite le moment venu.
Il a été hospitalisé dans un état de dénuement complet en décembre 1998. L'une des factures d'hospitalisation s'élevait à 20 526 F.
Ne pouvant régler cette somme, l'intéressé a sollicité le concours de délégué départemental du Médiateur de la République.
Ce dernier lui a tout d'abord indiqué les formalités nécessaires pour régulariser sa situation et obtenir le versement de sa retraite. Il la perçoit désormais. De plus, les excellents rapports entretenus tout au long de cette affaire, tant avec les responsables de la Caisse d'assurance maladie que ceux de la branche vieillesse, ont permis de découvrir que M. W... était en fait titulaire de deux rentes d'incapacité permanente de travail payées au taux de 76 %.
Cette douloureuse affaire a ainsi été réglée au mieux des intérêts du requérant.
Une retraite calculée à sa juste valeur
M. X..., après avoir écrit au Président de la République, avait été orienté par le préfet du département vers le délégué départemental du Médiateur de la République afin que celui-ci l'aide à clarifier son dossier de retraite. En effet, il semblait anormal à cet ancien commerçant de percevoir une retraite particulièrement faible.
Le délégué, après avoir saisi la CRAM, s'est aperçu de l'absence de validation des années 1961 et 1962 pour cotisations non versées. Or, pendant cette période, M. X... honorait un concordat validé par le tribunal de commerce à la suite du règlement judiciaire de sa société.
Le délégué a alors saisi le greffe du tribunal de commerce qui lui a fait parvenir les documents (de plus de trente ans) attestant que les cotisations de retraite avaient bien été réglées (dans le cadre du concordat) par le syndic chargé de la liquidation.
Après avoir reçu ces documents par l'intermédiaire du délégué du Médiateur de la République, le Conseil d'administration de la Caisse de retraite a accepté de valider les deux années supplémentaires.
Ainsi, il a été mis fin à une injustice d'autant plus grande que l'ancien associé de M. X... dont la situation était identique percevait, tout à fait normalement, sa retraite.
Sans l'intervention du délégué à la fois auprès du président du tribunal de commerce et de la caisse de retraite, M. X... n'aurait jamais obtenu satisfaction.
Un trésorier-payeur général attentif à une situation particulièrement pénible
Mme S... s'était vue réclamer par le percepteur la somme de 1 200 000 F à la suite d'un redressement, opéré après contrôle fiscal de la comptabilité de son ex-mari au titre des années 1992, 1993 et 1994.
Ce dernier exerçait la profession de courtier en vente de voitures d'occasion sans avoir fait de déclaration aux services fiscaux et se trouvait insolvable lors du redressement fiscal.
Mme S..., qui avait deux enfants à charge, avait été alors invitée, par le Trésor public à rembourser cette importante dette en tant que contribuable solidaire de son ex-époux.
Le délégué départemental du Médiateur est alors intervenu auprès du trésorier-payeur général qui a pu obtenir un dégrèvement très significatif venant en atténuation des sommes dues au Trésor.
Le percepteur, pour sa part, a accepté de prélever limitativement à 1 600 F par mois (somme inférieure à la quotité saisissable définie par l'article R.145-2 du code du travail) le montant des remboursements mensuels.
Une autorisation de clôture sous condition En octobre 1997, M. et Mme L... avaient obtenu une autorisation de clôture pour leur maison d'habitation mais le maire avait précisé, par un ajout manuscrit sur le document établissant cette autorisation, qu'en application de l'article 640 du code civil, ces derniers devaient édifier la clôture à 50 cm de la limite séparative jouxtant une autre propriété privée pour permettre l'évacuation des eaux pluviales provenant de l'amont.
Les intéressés estimant qu'ils n'avaient pas à céder une partie du terrain qu'ils avaient acquis, alors que celui-ci n'était grevé d'aucune servitude, décidèrent en mai 1999 de faire couler les fondations du muret qui devait soutenir la clôture, en limite de propriété et non à 50 cm de celle-ci.
Cette décision provoqua de vives réactions du voisin concerné et surtout du maire qui décida de porter plainte contre les époux L... Ceux-ci décidèrent alors de saisir le délégué départemental du Médiateur de la République.
A la demande de ce dernier, le maire accepta d'organiser une réunion de conciliation avec les parties concernées. Au terme d'un débat houleux, un protocole d'accord fut signé qui prévoyait que la commune acceptait de procéder, à ses frais, à la destruction du muret en cause, que les époux L... consentaient à le reconstruire à 25 cm de la limite séparative et que le voisin donnait son accord pour maintenir un passage pour les eaux pluviales sur une largeur identique.
Exécution d'une décision ancienne d'une commission communale d'aménagement foncier
A l'occasion d'une opération de remembrement datant de 1985, un accord était intervenu entre la commission communale d'aménagement foncier et Mme X... selon lequel cette dernière bénéficierait de l'attribution gratuite d'un "lot à bâtir".
Cette décision n'a jamais été exécutée malgré les démarches réitérées par Mme X...
Saisi par un parlementaire de ce problème, le délégué départemental du Médiateur de la République est alors intervenu auprès du sous-préfet concerné et du directeur départemental de l'Agriculture.
Très rapidement, ce dernier faisait savoir au délégué départemental que, depuis la clôture des opérations de remembrement en 1987, la commission communale d'aménagement foncier n'avait plus d'existence juridique et que dans ces conditions, seul un accord amiable entre Mme X... et la commune concernée était susceptible de régler le litige.
Après avoir consulté le maire, le sous-préfet a ensuite informé le délégué départemental que la commune était disposée à céder un terrain du lotissement communal à Mme X... pour le franc symbolique, afin de respecter l'engagement ancien de la commission communale d'aménagement foncier.
Le 5 février 1999, Mme X... remerciait chaleureusement le délégué d'avoir ainsi mis un terme à un conflit qui durait depuis près de 15 ans.

L'EVOLUTION DU ROLE DES DELEGUES DEPARTEMENTAUX

1. L'évolution du rôle des délégués départementaux

A. Les délégués départementaux : un échelon devenu essentiel en matière de médiation

Les délégués départementaux du Médiateur de la République exercent une mission qui ne cesse de se développer. Depuis 1986, date de leur mise en place par décret, leur activité a été multipliée par 6,5 (44 000 réclamations contre 7 000).
Ils sont devenus des acteurs à part entière de l'activité de l'Institution. Agissant au nom du Médiateur de la République, dans chaque département, ils sont invités à régler directement les affaires les plus simples dès lors que leur connaissance de l'administration locale les met en mesure d'obtenir l'information requise ou la modification d'une décision.
L'efficacité de leur action s'explique par les relations de confiance qu'ils ont su instaurer avec les services administratifs locaux. Ceux-ci, généralement ouverts et compréhensifs, s'efforcent d'apporter la meilleure attention aux litiges qui leur sont soumis et de trouver, si possible, une solution satisfaisante.
A cet égard, tous les délégués départementaux ont remarqué l'amélioration très nette de la communication avec les ASSEDIC, organismes très sollicités.
Ce constat positif vaut également pour la plupart des caisses d'allocations familiales et de sécurité sociale, ou, dans un autre domaine, pour les services fiscaux.
De l'activité des délégués, on peut déduire une évolution significative du type de public. Il y a quelques années, les délégués recevaient fréquemment des personnes expertes en matière de procédures et connaissant le fonctionnement de l'administration.
Aujourd'hui, il s'agit surtout de citoyens qui ont simplement l'impression d'être démunis face à l'administration.
Ils sont souvent précarisés, se méfiant des services publics, et se sentent désemparés face au nombre croissant et à la complexité des textes administratifs.
Il est donc particulièrement important de prendre le temps de laisser les réclamants exposer leur problème.
Lorsque le dialogue n'a pas su s'instaurer entre une administration et un administré, le délégué départemental du Médiateur de la République fait office d'intermédiaire, et, à l'incompréhension supposée de l'administration succèdent alors la communication, l'explication et la réparation éventuelle dans des délais raisonnables.
Au cours des trois dernières années, le nombre de médiations réussies au profit des citoyens par les délégués départementaux a atteint la moitié de celui des médiations tentées.

2. La reconnaissance du rôle des délégués départementaux par la loi

Si le décret du 18 février 1986 a officialisé l'existence des délégués départementaux, aucune disposition de la loi du 3 janvier 1973 ne leur conférait un statut légal. Il sera mis fin à cette situation par la prochaine adoption du projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (DCRA). Ce texte, qui est en cours d'examen par le Parlement, ajoute à la loi de 1973, un article 6-1 ainsi rédigé : "Le Médiateur de la République dispose, sur l'ensemble du territoire, de délégués qu'il désigne.
Ils apportent aux personnes visées au premier alinéa de l'article 6 les informations et l'assistance nécessaires à la présentation des réclamations.
A la demande du Médiateur de la République, ils instruisent les réclamations qu'il leur confie et participent au règlement des difficultés dans leur ressort géographique".
En prévoyant la désignation par le Médiateur de la République de délégués sur l'ensemble du territoire, la loi permet au Médiateur de la République de nommer des délégués à Mayotte, collectivité territoriale à statut particulier ainsi que dans les territoires d'outre-mer de la Polynésie française, de Wallis-et-Futuna et de la Nouvelle-Calédonie.
En outre, l'article 23 du projet de loi DCRA précise et complète la définition de la mission confiée aux délégués.
Si ceux-ci continuent à contribuer, en tant que de besoin, à la préparation des dossiers qui doivent être transmis au Médiateur de la République pour les réclamations dont sont saisis les parlementaires, ils sont désormais expressément investis d'une mission d'information et d'assistance directe des réclamants qu'ils doivent aider à constituer un dossier de réclamation. Le Médiateur de la République peut toujours leur confier l'instruction de réclamations individualisées, mais il peut également les habiliter à participer au règlement des difficultés rencontrées par les administrés dans leur ressort géographique.
Cette nouvelle définition du rôle imparti aux délégués permet de mieux prendre en considération le développement de leur activité et de mettre en cohérence les textes avec la réalité de la pratique actuelle.

3. Le développement de la médiation de proximité

Le Médiateur de la République s'est fixé comme priorité de rendre accessible à tous les citoyens, facilement et rapidement, les services qu'ils sont en droit d'attendre de l'Institution. Pour cela, il nommera 300 nouveaux délégués, à raison de 100 par an, dès l'an 2000.
Ce projet qui résulte d'une réflexion commune avec le ministère chargé de la Ville, répond principalement à trois exigences :

> une plus grande proximité territoriale

Les nouveaux délégués seront installés dans les sites prioritaires de la politique de la ville et accueillis dans des structures de proximité telles que, par exemple, les maisons de la justice et du droit (MJD) ou les antennes de justice. La récente nomination d'un délégué départemental de Paris à la MJD du XIVe arrondissement illustre cette orientation.
Des partenariats avec les collectivités locales (mairies - conseils généraux), les entreprises et établissements publics sont actuellement à l'étude en liaison avec les sous-préfets, chargés de mission pour la politique de la ville. Ces partenariats auront essentiellement pour but de mettre à la disposition du délégué des locaux situés au coeur des quartiers en difficulté.

> un recrutement élargi

Le recrutement des délégués sera diversifié : il ne sera plus réservé aux seuls agents de la fonction publique.
Le Médiateur de la République pourra ainsi nommer des délégués issus du secteur privé en plus de ceux traditionnellement mis à disposition par les administrations.
Cette évolution permettra de répondre à l'exigence de proximité territoriale et à celle d'accessibilité sociale : il sera fait appel, chaque fois que cela sera possible, à des habitants des quartiers en difficulté qui disposent des connaissances juridiques nécessaires.

> une mission collégiale

Les nouveaux délégués assureront leur mission en collégialité avec le délégué déjà en fonction au siège de la préfecture du département. Ils veilleront, par exemple, à harmoniser leurs jours de permanence pour rendre, par une plus grande disponibilité, un meilleur service à nos concitoyens. La diversité des profils et des expériences professionnelles favorisera les complémentarités dans le traitement des dossiers au niveau départemental.
Conformément à cet esprit de collégialité, le délégué le plus ancien parrainera les nouveaux délégués en les faisant bénéficier de ses contacts administratifs.
La mise en place de ces nouveaux délégués facilitera l'articulation avec les structures associatives et d'accès au droit qui existent localement.
De manière générale, cette évolution, qui s'inscrit dans le mouvement de réforme des services publics et de modernisation de l'Etat, devrait permettre de mieux répondre aux besoins immédiats des populations les plus en difficulté dans leurs relations avec l'administration.

TEMOIGNAGE DE LA DELEGUE DEPARTEMENTALE DE LA NIEVRE

Déléguée du Médiateur de la République dans la Nièvre depuis janvier 1996, j'étais auparavant directeur départemental des Affaires sanitaires et sociales, fonctions que j'ai exercées dans ce même département pendant plus de 12 ans.
Cette situation peut apparaître comme un avantage, en raison de la connaissance qu'elle suppose de l'administration et des élus locaux.
Quelques mots sur l'installation matérielle et l'organisation.
La préfecture met un bureau à ma disposition et assure le secrétariat. Cela me permet un accès facile au service de documentation, élément non négligeable en raison de la diversité des problèmes posés et de la complexité de la réglementation.
J'assure une permanence hebdomadaire, le jeudi, au cours de laquelle je reçois, en principe sur rendez-vous, trois à quatre personnes. Je suis également saisie par téléphone ou courrier de plus en plus souvent.
Avant d'évoquer ce qui constitue ma mission et mon activité, éventuellement avec quelques éléments chiffrés, je crois intéressant de situer le département de la Nièvre.
Département rural du Centre de la France, il est le plus petit de la Région Bourgogne et, en matière de peuplement des départements, il vient au 80e rang avec ses 255 000 habitants. Cette population est implantée principalement le long du Val de Loire dans les villes de Nevers, Cosne/Loire, la Charité/Loire, Decize. La Nièvre est un des départements qui compte les habitants les plus âgés de France.
Il paraît difficile de parler de mon activité sans dire comment je ressens ma mission.
Après un peu plus de trois ans de fonctions et, au travers des différents entretiens avec mes interlocuteurs, il me semble que l'existence du Médiateur de la République et de ses délégués est assez bien connue. En revanche, leur mission est perçue de manière beaucoup plus floue.
Le Médiateur de la République apparaît vraiment comme le dernier recours, la personne qui va pouvoir tout régler, "faire céder" l'administration sur une position que l'interlocuteur estime injuste, inadaptée voire erronée. Aussi, ai-je à rappeler très souvent le rôle et les limites de la mission du délégué départemental.
Ces clarifications sont nécessaires pour éviter des confusions assez compréhensibles avec notamment les conciliateurs de justice.
Une évolution notable me semble devoir être soulignée.
Les demandes qui me sont présentées sont de plus en plus diverses, de plus en plus complexes et on peut comprendre que les réclamants soient découragés, déconcertés. A titre d'exemple, un de mes interlocuteurs avait de nombreux problèmes à régler avec les services fiscaux (impôts sur le revenu, TVA, taxe foncière et d'habitation, taxe professionnelle) l'URSSAF et les ASSEDIC : mes interventions ont été multiples et difficiles, mais des délais de règlement avec suspension des pénalités ainsi que des exonérations ont pu être finalement obtenus.
Par ailleurs, les situations sociales des bénéficiaires de certaines prestations se modifient, ce qui les amène à passer d'un régime à un autre, par exemple, de l'Allocation spécifique de Solidarité à l'Allocation Adulte Handicapé, sans qu'ils en comprennent bien les raisons. Ceci est mal ressenti d'autant que ce n'est pas sans conséquence sur le montant des prestations qui leur sont servies.
Enfin, d'autres interlocuteurs ont recours au délégué alors que manifestement leur requête ne relève pas d'un litige avec une administration mais s'explique par un réflexe "procédurier".
Ceci me conduit à affirmer qu'une part importante de l'activité du délégué est consacrée à l'écoute, au conseil, au renseignement, à l'orientation.
Même si a priori, une requête me paraît ne pas relever de ma compétence, je ne renvoie pas d'emblée le requérant. Estimant que je suis au service du public, je me dois de le renseigner, de lui préciser les raisons qui font obstacle à mon intervention, de le guider au besoin dans sa démarche. Je me refuse à donner au demandeur le sentiment qu'une fois de plus il est éconduit, sans explication.
En revanche, je n'interviens pas à la place du réclamant pour l'accomplissement de ses démarches préalables auprès de l'administration, mais je l'aide, le cas échéant, en lui préparant la lettre qu'il aura à rédiger.
Pour donner un exemple chiffré, j'ai dénombré 103 demandes d'information en 1998 auxquelles s'ajoutent 81 dossiers constitués.
Lorsque je suis amenée à traiter un litige relevant de la compétence du Médiateur de la République, si celui-ci est simple, je m'efforce de le régler par téléphone.
C'est la solution la plus rapide. S'il est trop complexe et qu'il exige des échanges de documents, je saisis l'administration par lettre ou je rencontre ses représentants : cela se passe, la plupart du temps, sans difficulté.
Une simple réflexion sur la nature des dossiers.
Dans la Nièvre, le "Social" représente plus de 50 % de l'activité du délégué, taux nettement supérieur à celui constaté au plan national. Ce chiffre est sans doute à rapprocher des caractéristiques du département, dans un contexte économique et social difficile.
Il est vrai que j'ai parfois l'impression de jouer le rôle d'une assistante sociale.
Le secteur fiscal correspond, en revanche, à la moyenne générale avec 22 % des dossiers et arrive en seconde position.
En conclusion, le délégué du Médiateur de la République me paraît constituer l'interface nécessaire entre l'administration et le citoyen. Ce dernier est souvent désarmé devant une administration qui lui apparaît toute puissante, impersonnelle, au langage hermétique et qui, de plus, lui inspire une certaine crainte.
Echelon de proximité, le délégué du Médiateur de la République joue un rôle essentiel pour progresser dans la voie de l'ouverture, du dialogue et de la compréhension.



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