LA MOBILITÉ DANS LA FONCTION PUBLIQUE



Le principe de la mobilité des agents publics a été reconnu par les textes statutaires, notamment comme l'un des éléments de la modernisation et de l'amélioration de l'Administration.

Des difficultés peuvent cependant surgir dans la mise en uvre des procédures, ainsi qu'en témoignent les réclamations qui me sont adressées, chaque année, par des agents publics concernant la mobilité qu'ils ont souhaitée au cours de leur carrière.

Mes possibilités d'intervention en ce domaine et la délimitation de cette intervention ont dû, tout d'abord, être appréciées au regard de la compétence générale dévolue au Médiateur de la République.

L'article 8 de la loi du 3 janvier 1973 modifiée qui a institué le Médiateur de la République limite sa compétence, dans le cas de réclamations émanant d'agents publics en fonction. Soumis au cours de leur carrière au pouvoir hiérarchique de leur administration, à des règles statutaires qui ont fixé leurs obligations, mais aussi institué en contrepartie des modalités de recours contre les dérives éventuelles de l'autorité administrative, les intéressés ont en effet la possibilité de faire appel à des moyens juridiques et à des instances institutionnelles qui garantissent le respect de leurs droits.

Il en est ainsi des recours auprès de l'Administration (recours gracieux et hiérarchique), auprès des commissions administratives paritaires, et auprès des juridictions administratives (recours contentieux).

C'est pourquoi le Médiateur de la République se refuse à intervenir dans les litiges touchant à la carrière d'un agent public, tels que ceux relatifs à l'avancement, aux sanctions disciplinaires, à la rémunération, au classement, aux décisions de nomination ou licenciement, relevant du seul pouvoir hiérarchique.

Il intervient en revanche lorsque l'auteur de la réclamation n'a pas encore la qualité d'agent public (pour certains litiges relatifs aux recrutements et aux concours), lorsqu'il a perdu cette qualité à l'occasion d'un licenciement, d'une mise à la retraite, ou lorsque le lien avec l'Administration se trouve suspendu définitivement ou temporairement (agent en difficulté de réintégration après une mise en disponibilité, un congé de longue durée). Il peut également intervenir lorsque les litiges portent sur l'attribution de droits sociaux ou lorsqu'ils mettent en cause d'autres autorités que l'administration employeur. Il intervient enfin lorsque la requête touche à l'inexécution d'une décision de justice.

Parallèlement, dans la mesure où la loi donne compétence au Médiateur de la République pour connaître des réclamations fondées sur un dysfonctionnement du service public, il peut intervenir lorsqu'il est saisi de difficultés concernant la mise en uvre des procédures organisées pour favoriser la mobilité des agents.

La perspective de la mobilité constitue pour le fonctionnaire un outil de perfectionnement et de motivation dans l'exercice d'une mission de service public. Elle permet également l'adaptation de la Fonction publique aux aspects les plus modernes de sa mission.

Animés par le souci d'élargir l'expérience professionnelle, de lutter contre les cloisonnements et d'améliorer l'égalité des chances, les pouvoirs publics ont cherché à favoriser la mobilité des agents publics, par l'institution de mécanismes adaptés qui ont marqué l'évolution de la fonction publique ces dix dernières années. Au statut de la fonction publique de l'État s'est notamment greffé le statut des agents de la fonction publique territoriale puis celui de la fonction publique hospitalière, afin d'adapter, sur l'ensemble du territoire, le service public à toutes ses missions compte tenu, en particulier, des lois de décentralisation.

La mobilité de ses agents offre à l'Administration un moyen essentiel de modernisation de ses structures, en permettant un redéploiement deseffectifs et en favorisant l'adaptation des organisations territoriales aux besoins sociaux et techniques. Elle répond aux exigences de la déconcentration et de la décentralisation des compétences et aux règles de subsidiarité posées par la loi sur l'organisation territoriale de l'État, grâce à l'instauration d'une perméabilité accrue entre l'autorité centrale et les services locaux.

Dans le cadre de la réforme de l'État, dont les grandes orientations ont été fixées par la circulaire du Premier ministre en date du 26 juillet 1995, puis par le séminaire gouvernemental du 14 septembre 1995, le développement de la mobilité professionnelle apparaît ainsi comme un instrument privilégié de rénovation de la Fonction publique.

Deux moyens ont été définis en ce sens.

C'est d'une part la simplification du " paysage statutaire ". Il existe actuellement plus de mille corps dans la fonction publique de l'État, leur regroupement constitue un objectif prioritaire. Après un travail d'identification préalable mené par la direction générale de l'Administration et de la Fonction publique et le Commissariat à la réforme de l'État, un comité interministériel du 29 mai 1996 a précisé le champ d'application de cet effort de regroupement : il s'agit des 250 corps exerçant des fonctions d'administration générale, des fonctions de service et des fonctions ouvrières.

C'est ensuite la mise en place par le Gouvernement d'un nouvel outil : le dispositif de " formation mobilité ". Comme il est indiqué dans le rapport d'activité 1995-1996 du Commissariat à la réforme de l'État, " il portera sur la détermination des besoins, en termes de personnels et de qualifications, apparaissant dans certains secteurs (l'administration des universités ou celle de la justice, par exemple) et sur l'identification des candidats souhaitant exercer de nouvelles fonctions dans ces secteurs de l'Administration. La direction générale de l'Administration et de la Fonction publique est en train de définir le cadre de ce nouveau dispositif qui prévoira, non seulement les modalités de formation des agents et l'évaluation de leurs qualifications et de leurs compétences, mais aussi les modalités de leur intégration dans les administrations d'accueil, à l'issue des formations ". Après concertation avec les représentants du personnel, ce dispositif pourrait entrer en application en 1997.

La mobilité que nous entendrons dans le sens le plus large peut prendre différentes formes :

- mobilité au sein d'une même Fonction publique;

- mobilité entre deux fonctions publiques;

- mobilité par un passage temporaire hors de la Fonction publique;

- mobilité par un passage dans des organisations internationales.

Enfin, dans le cadre d'une plus large ouverture de la Fonction publique notamment pour adapter l'Administration à la construction européenne, de nouvelles mesures ont été adoptées, permettant d'une part l'ouverture de la fonction publique française aux ressortissants de la Communauté européenne (la seule restriction à ce principe concerne les emplois dont les attributions sont liées à l'exercice de la souveraineté, ou comportent une participation à l'exercice de prérogatives de puissance publique), et d'autre part la présence de fonctionnaires français dans les administrations des États membres de l'Union européenne.

Ces situations ne vont pas sans susciter des difficultés d'ordre pratique, dont certaines, soumises à l'attention du Médiateur, ont motivé son intervention.

Si le Médiateur de la République ne peut s'immiscer dans le choix des orientations de politique générale, il est autorisé à apprécier le fonctionnement des administrations et des organismes investis d'une mission de service public. Son domaine d'action s'étend aux modalités concrètes d'exécution de ces missions de service public, eu égard à leurs incidences individuelles.

Appliquée aux réclamations émanant d'agents publics, sa compétence se trouve ainsi délimitée, et définie dans le contexte de la mise en uvre de leur droit à la mobilité.


I. LES MODALITÉS DE LA MOBILITÉ

La loi no 83-634 du 13 juillet 1983 portant statut général des fonctionnaires de l'État et des collectivités territoriales ouvre la possibilité d'échanges entre les différentes fonctions publiques. Pour marquer l'importance de cette perspective de mobilité, le statut général la représente comme une garantie fondamentale de la carrière des fonctionnaires.

L'article 14 dispose en effet que " l'accès de fonctionnaires de l'État à la fonction publique territoriale et des fonctionnaires territoriaux à la fonction publique de l'État, ainsi que leur mobilité au sein de chacune de ces deux fonctions publiques, constituent des garanties fondamentales de leur carrière ". L'ensemble de ces dispositions s'applique aussi aux fonctionnaires relevant de la fonction publique hospitalière.

Ce texte marque une évolution sensible de la notion de carrière pour les fonctionnaires, puisque le déroulement de celle-ci ne s'apprécie plus uniquement au regard d'une seule fonction publique.

Les dossiers transmis par les requérants au Médiateur de la République conduisent à envisager le problème de la mobilité sous deux aspects : la mobilité au sens strict, telle que prévue par l'article 14 de la loi du 13 juillet 1983 et les extensions utilisées, dans la pratique, pour réaliser une mobilité.

A. LA MOBILITÉ AU SENS STRICT

Les procédures susceptibles de permettre la mise en uvre de ce droit fondamental à la mobilité sont définies par le deuxième alinéa de l'article 14 précité, aux termes duquel l'accès des fonctionnaires de l'État à la fonction publique territoriale, et des fonctionnaires territoriaux à la fonction publique de l'État s'effectue par voie de détachement, suivi ou non d'intégration. Les statuts particuliers peuvent également prévoir cet accès par voie de concours interne, et, le cas échéant, de tour extérieur.

De ces trois procédures, seules les deux premières s'appliquent pour accéder, par la mobilité, à la fonction publique territoriale et à la fonction publique hospitalière. Elles ont été intégrées de manière systématique et au fur et à mesure de la construction statutaire de celles-ci. Pour permettre cette mobilité, les corps des fonctionnaires d'État ont été sensiblement modifiés, afin que puisse être pris en compte l'existence et les niveaux reconnus parallèlement aux différents cadres d'emplois territoriaux et hospitaliers.

1. Le détachement

Le détachement permet d'accéder à un autre corps, de niveau équivalent, avec possibilité de retour dans le corps d'origine et sans perdre le bénéfice des droits à l'avancement et à la retraite. Limité dans le temps, le détachement peut s'analyser comme un mode de recrutement provisoire, essentiellement révocable, qui peut prendre fin par intégration dans le corps d'accueil lorsque le statut particulier le prévoit, ou par réintégration dans le corps d'origine.

Le détachement d'un fonctionnaire dans un autre corps est possible dès lors que l'agent est titulaire de diplômes et (ou) a exercé des fonctions au moins équivalentes dans son corps d'origine. À ces conditions peuvent s'en ajouter d'autres portant sur le niveau de rémunération atteint et sur celui qui est postulé.

Des règles particulières peuvent être prévues, excluant la possibilité pour certains agents d'être détachés vers d'autres fonctions, compte tenu de clauses particulières d'incompatibilité de fonctions.

2. Le concours

Il constitue l'un des modes de promotion priviligié et traditionnel des fonctionnaires. Le concours interne, réservé à des agents ayant déjà la qualité de fonctionnaire ou d'agent public, permet normalement d'assurer une mobilité fonctionnelle, sans rupture de carrière.

3. Le tour extérieur

Il permet l'accès direct, sans concours, à un corps de niveau supérieur. Il n'est prévu que pour les corps les plus élevés dans la hiérarchie. Il existe deux formes de tour extérieur :

- l'une qui réserve ce mode d'accès aux fonctionnaires d'un certain niveau de grade, justifiant d'une certaine ancienneté dans un corps d'origine;

- l'autre qui permet à toute personne, même étrangère à la fonction publique, d'accéder aux grades les plus élevés des grands corps d'État, aux corps d'inspection ou de contrôle. Elle reste une forme très limitée d'accès à la fonction publique d'État.

L'ensemble de ces procédures (détachement, suivi ou non d'intégration,concours et tour extérieur), instituées par le statut général des fonctionnaires, permettent de changer temporairement ou définitivement de corps entre les fonctions publiques, et dans une certaine mesure, sans rupture de carrière.

B. LES EXTENSIONS UTILISÉES DANS LA PRATIQUE POUR RÉALISER UNE MOBILITÉ

Il existe dans chaque fonction publique trois autres positions dans lesquelles les intéressés peuvent être placés pour assurer leur mobilité fonctionnelle : la mise à disposition, la mise en disponibilité et la position hors cadre.

1. La mise à disposition

L'une des nouveautés du statut général est l'officialisation de la situation de mise à disposition. Le fonctionnaire reste en activité dans son corps d'origine, mais cette position est fictive puisque l'agent est seulement censé occuper son emploi dont il perçoit la rémunération, alors qu'il effectue son service dans une autre administration, ou dans un établissement public de l'État. C'est donc un moyen de mobilité limité, qui ne se justifie que par les nécessités du service, et ne permet pas de généralisation. À terme, elle ne peut pas déboucher sur l'intégration du fonctionnaire dans un autre corps.

La mise à disposition est prévue à l'intérieur des trois fonctions publiques, elle peut être l'occasion pour le fonctionnaire d'exercer temporairement ses compétences dans un autre cadre de la même fonction publique, ou auprès d'un organisme associatif qui assure une mission d'intérêt général. Un certain nombre de fonctionnaires français sont également mis à la disposition d'organisations internationales, notamment de l'Union européenne. Elle ne peut donner lieu, à terme, à une intégration dans un nouveau corps.

2. La disponibilité

La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration d'origine, cesse de bénéficier de ses droits à l'avancement et à la retraite. Cependant, il continue d'appartenir à son corps d'origine, y conserve ses droits acquis, et est susceptible d'y être à nouveau intégré.

La mise en disponibilité sur demande du fonctionnaire, dans des cas limités et sous réserve des nécessités du service, a une durée statutaire variable. Elle peut être un moyen de s'orienter vers d'autres activités de manière temporaire, et permet ainsi de répondre, dans certains cas particuliers, à un souci de mobilité fonctionnelle.

3. La position hors cadre

Elle concerne un nombre plus restreint de fonctionnaires de haut niveau. La position hors cadre est celle dans laquelle un fonctionnaire, remplissant les conditions pour être détaché dans une administration ou une entreprise publique, dans un emploi ne conduisant pas à pension du régime général de retraite, ou détaché auprès d'un organisme international, peut être placé pour servir dans cette administration, cette entreprise, ou cet organisme.

Dans cette position, le fonctionnaire cesse de bénéficier de ses droits à l'avancement et à la retraite.

Il est soumis au régime statutaire et de retraite régissant la fonction qu'il exerce dans cette position.

Lorsqu'il est réintégré dans son corps d'origine, l'organisme dans lequel il a exercé ses fonctions doit, s'il y a lieu, verser, pour la constitution des droits à retraite, une contribution identique à celle exigible en cas de détachement.

II. LES DIVERS OBSTACLES À LA MOBILITÉ DES FONCTIONNAIRES : L'INTERVENTION DU MÉDIATEUR

Dans la pratique, l'exercice du droit à la mobilité ne se réalise pas toujours sans problèmes. Les réclamations soumises à l'attention du Médiateur de la République mettent en lumière certains obstacles structurels. Ces situations particulières font apparaître différentes difficultés : difficultés de réintégration, obligation pour les fonctionnaires de respecter l'engagement de servir dans leur administration d'origine pendant un certain nombre d'années, ou, au cours d'un détachement, de verser une double cotisation pour pension de retraite ou pour la protection sociale. Enfin, un certain nombre de dysfonctionnements peuvent apparaître et compromettre le déroulement de la mobilité. L'intervention du Médiateur consiste essentiellement à proposer des solutions susceptibles d'atténuer les conséquences matérielles parfois difficiles qui pénalisent les intéressés.

A. LES DIFFICULTÉS LIÉES À L'APPLICATION DES TEXTES

1. Les difficultés liées à la réintégration dans le corps d'origine

La mobilité envisagée dans son sens le plus large peut ainsi se réaliser de diverses façons et notamment par voie de détachement sur un autre emploi, ou de mise en disponibilité pour exercer d'autres fonctions publiques ou privées. Le fonctionnaire, dans l'une ou l'autre de ces positions, a vocation à réintégrer son administration. Or la réintégration s'avère parfois problématique. Seul le détachement de courte durée (moins de 6 mois) offre à l'intéressé la garantie statutaire d'être réintégré dans son emploi d'origine. La réintégration à l'issue d'un détachement de longue durée, tout comme à l'issue d'une disponibilité, suppose a priori un poste vacant dans le corps d'origine.

Ainsi, le principal obstacle à la réintégration est-il le plus souvent d'ordre budgétaire en raison de l'absence de poste vacant susceptible d'accueillir la personne sollicitant sa réintégration. Parfois, la nécessité pour l'agent, en raison d'une évolution de sa situation familiale, d'obtenir à la fois une nouvelle affectation et une mutation dans un autre secteur géographique vient encore aggraver les difficultés. De nombreux cas les illustrent.

Réclamation no 92-3479, transmise par M. Jean-Yves Autexier, ancien Député de Paris.

M. R..., agent hospitalier titulaire, fut mis en disponibilité pourconvenances personnelles. Lorsqu'il demanda sa réintégration auprès de l'hôpital où il travaillait, aucune réponse favorable ne put lui être faite, faute de vacance de poste budgétaire au moment de sa demande. Sa mise en disponibilité fut donc prolongée. Il fit acte de candidature auprès de 26 hôpitaux, mais aucun ne put l'accueillir. Saisi de la situation, le Médiateur de la République a insisté sur le caractère dramatique des conséquences du prolongement de sa disponibilité, sur sa vie familiale. Les arguments d'équité développés à cette occasion ont reçu un écho favorable, puisqu'il a pu être réintégré en surnombre (bien que la réglementation ne prévoie pas une telle obligation dans ce cas) dans son hôpital d'origine, dans l'attente d'un poste qui devait se libérer ultérieurement.

Réclamation no 92-4004, transmise par M. Georges Colombier, Député de l'Isère.

M. N... était un agent de la fonction publique hospitalière. En 1990, il souhaita changer d'orientation et bénéficia d'un détachement d'un an auprès du ministère de l'Éducation nationale. Il fut affecté dans un collège. Au terme de cette année, son poste ne fut pas maintenu par l'Éducation nationale et M. N... sollicita sa réintégration auprès de son établissement d'origine. Faute de vacance de poste sur un emploi de sa catégorie, il ne put obtenir satisfaction.

De ce fait, il fut placé en disponibilité d'office sans traitement, en application de l'article 56 de la loi no 86-33 du 9 janvier 1986 relative au statut de la fonction publique hospitalière.

M. N... demanda au Médiateur d'intervenir, compte tenu de sa situation financière difficile. Après plusieurs interventions, le Médiateur obtint que l'établissement hospitalier procède, vu l'urgence, à la réintégration de l'intéressé sur un emploi à mi-temps dans l'attente de la vacance d'un autre emploi.

Ainsi, malgré des dispositions réglementaires prévoyant l'aménagement de modalités de réintégration, tous les problèmes ne peuvent être évités.

Si pour chaque fonction publique, les modalités de réintégration d'un agent, à la suite d'un détachement ou d'une mise en disponibilité, varient sensiblement, le principe en est le même dans l'ensemble : si un emploi correspondant au grade de l'intéressé est libre, il doit lui être proposé. Si ce n'est pas le cas, il arrive que les choses se compliquent.

Parfois même, au mépris des textes, l'employeur préfère procéder à un nouveau recrutement plutôt qu'à une réintégration.

Réclamation no 95-2441, transmise par M. Georges Sarre, Député de Paris.

M. N..., gardien de police municipale, a été mis en disponibilité pour convenances personnelles en juin 1990. À partir de 1992, il a plusieurs fois demandé sa réintégration dans les délais requis. Les services de la mairie concernée ne lui ont pas donné satisfaction, estimant ne disposer d'aucun poste vacant.

M. N... a été maintenu d'office en disponibilité sans traitement du 1er juillet 1992 au 17 novembre 1994.

Il a été radié des effectifs du personnel municipal par arrêté du 22 novembre 1994. Ayant contesté cette décision, il lui a été opposé le motif qu'il avait omis de solliciter sa réintégration deux mois avant la fin de sa disponibilité d'office.

M. N... a fait savoir qu'il avait formulé régulièrement une demande de réintégration en temps utile, que des postes existaient et qu'ils avaient été pourvus par des recrutements au lieu de lui être proposés.

Il a saisi le Médiateur de la République dont la démarche a consisté à rappeler que la réintégration est un droit pour l'agent, prévu par les textes et confirmé par la jurisprudence du Conseil d'État, dès lors qu'existent les emplois correspondants.

Cette argumentation n'a pas convaincu la collectivité qui a décidé de s'en remettre à la décision de la juridiction saisie.

Dans l'attente, l'intervention du Médiateur a permis à l'intéressé d'être admis au bénéfice des indemnités pour perte involontaire d'emploi, et ce, conformément à la jurisprudence du Conseil d'État (CE, 10 juin 1992, Bureau des affaires sociales de la ville de Paris).

La création systématique de postes pour réintégrer les agents en l'absence de vacance ne peut être envisagée eu égard aux conséquences financières qu'une telle pratique aurait pour les personnes publiques.

La réintégration en surnombre est une solution possible et elle est prévue dans le cadre de la fonction publique d'État, faisant suite à un détachement dans certains cas particuliers.

Cette solution reste cependant limitée. Néanmoins, en exposant la situation des agents confrontés à des difficultés matérielles graves, le Médiateur de la République a obtenu, à diverses reprises, la réintégration en surnombre.

Des efforts importants ont été entrepris afin de faciliter la mobilité entre les fonctions publiques. " Le guide de la mobilité du fonctionnaire " recense ainsi tous les corps et cadres d'emplois ouverts aux fonctionnaires relevant de fonctions publiques différentes. Si le nombre de corps et de cadres d'emplois ainsi concernés, estimés à 90, reste faible, cette tendance constitue cependant un facteur de décloisonnement des carrières dans les fonctions publiques qui mérite d'être encouragé.

Par ailleurs, on notera, qu'à certains égards, les ressortissants de la fonction publique territoriale bénéficient d'une stabilité de l'emploi plus fragile par rapport à ceux relevant de la fonction publique de l'État.

Ces différences ne sont pas sans incidence sur les obstacles rencontrés dans la mobilité entre les deux fonctions publiques.

Pour mémoire il faut rappeler que le Centre national de la fonction publique territoriale avait en charge, au 1er mars 1996, 221 fonctionnaires territoriaux en situation de perte d'emploi, soit à la suite d'une décharge d'un emploi fonctionnel, soit à la suite de suppressions d'emplois, ou d'une non-réintégration après un détachement.

Ainsi, la fin anticipée d'un détachement ou d'une disponibilité peut conduire à de réelles difficultés pour retrouver l'emploi d'origine, pour percevoir des allocations compensant la perte d'emploi, et même à la perte définitive d'emploi.

a. Situation de l'agent ne pouvant retrouver son emploi d'origine

Le cas de M. V... illustre cette situation (Réclamation no 94-5398, transmise par M. François Lesein, Sénateur de l'Aisne).

Enseignant, M. V... a souhaité donner une nouvelle orientation à sa carrière professionnelle en exerçant un emploi dans une commune. Il a demandé à être placé en position de détachement mais sa demande n'a pas été prise en considération. En définitive, pour pouvoir exercer ses fonction auprès de la commune, il a été placé en position de disponibilité, à compter du mois de novembre 1989.

À la suite d'un changement à la tête de la municipalité, il a été mis fin brutalement aux fonctions de M. V..., qui a été remis à la disposition du ministère de l'Éducation nationale à compter du mois de mai 1990.

L'intéressé n'a repris une activité professionnelle d'enseignant qu'à la rentrée de septembre 1990.

En conséquence, du mois de mai 1990 à fin août 1990, aucun traitement ne lui a été versé ni aucune cotisation d'assurance-vieillesse et sociale n'a été enregistrée par le Trésor public, qui lui a réclamé 8 750 F au titre de rappel de cotisations pour pension.

L'intéressé a demandé à la commune concernée le maintien de sa prise en charge qui lui a été refusée. Saisi de ce litige, le juge administratif a rejeté sa requête au motif qu'il ne pouvait produire, à l'appui de son recours contre l'autorité communale, un arrêté ministériel prononçant son détachement.

En effet, seule la position de détachement lui aurait permis de bénéficier des dispositions de l'article 22 du décret no 85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'État, qui prévoit que lorsqu'il est mis fin au détachement à la demande de l'organisme d'accueil, le fonctionnaire continue, si son administration d'origine ne peut le réintégrer immédiatement, à être rémunéré par l'organisme d'accueil jusqu'à réintégration.

Pour régulariser sa situation, un arrêté interministériel rétroactif est intervenu le 20 avril 1994 prononçant le détachement de l'intéressé du 6 novembre 1989 au 31 août 1990.

C'est alors que M. V... a souhaité qu'un règlement amiable puisse intervenir sur la base de cette dernière décision.

Les interventions successives du Médiateur n'ont pas permis d'établir clairement les raisons pour lesquelles la demande de détachement formulée par M. V... avant sa mise en disponibilité n'avait pu être prise en compte.

En raison de son caractère rétroactif, la mesure de régularisation de son détachement n'a pu avoir que des effets limités. Elle a ainsi permis la prise en compte de ces années dans la durée de sa carrière publique pour la retraite. Toutefois, à l'égard de la commune d'accueil, le maire a pu opposer le jugement du tribunal administratif qui a considéré qu'en l'absence d'acte statutaire portant détachement, sa situation ne s'inscrivait pas dans le cadre des dispositions du décret du 16 septembre 1985 précité.

Par ailleurs, les diligences entreprises ont fait apparaître que l'intéressé n'a pas demandé à être réintégré immédiatement dans ses fonctions d'enseignant dès la fin de ses fonctions d'agent territorial. En raison de ce non-respect des délais requis, les dispositions du décret du 16 septembre 1985 susvisées ne pouvaient pas, en tout état de cause, être opposables au refus du maire de le prendre en charge pour la période litigieuse.

La réclamation de M. V... témoigne que la mise en uvre des mécanismes de passage d'une fonction publique à une autre est, dans la pratique, parfois aléatoire.

Une autre situation, celle de M. Claude Niox (Réclamation no 94-0652, transmise par M. François Lesein, Sénateur de l'Aisne) longuement évoquée dans le cadre d'un précédent rapport du Médiateur (1994, p. 219), a mis en évidence de façon paroxystique les difficultés liées à l'absence de réintégration d'un agent dans ses fonctions d'origine à l'issue d'un détachement dans un cadre d'emplois relevant d'un statut différent.

En l'espèce, même si la collectivité d'accueil de ce fonctionnaire pouvait mettre fin au détachement avant le terme prévu, elle devait continuer à prendre en charge les rémunérations, au moins jusqu'à sa réintégration dans son administration d'origine.

L'organisme de détachement ayant refusé d'appliquer cette garantie statutaire, M. Niox a été privé de tout traitement pendant plusieurs mois malgré les décisions de justice rendues en sa faveur.

Dans la perspective de l'Union européenne et de la maîtrise du droit européen, la mobilité des fonctionnaires français vers les institutions communautaires est un élément majeur. Les difficultés de réintégration et les retards de carrière qu'elle implique souvent pour de hauts fonctionnaires nécessitent de mieux organiser la circulation des agents concernés. Cela fut souvent souligné, notamment dans le rapport public du Conseil d'État de 1992, qui préconise la mise en place, sur le plan interministériel, d'une gestion prévisionnelle des carrières franco-européennes de nature à lever les obstacles à la mobilité.

b. Situation de l'agent ne pouvant retrouver un emploi au regard de l'indemnisation du chômage

Lorsqu'il se trouve dans une situation équivalente à une perte involontaire d'emploi, le fonctionnaire peut-il prétendre à une indemnisation du chômage ?

L'indemnisation de la perte involontaire d'emploi des agents non titulaires de l'État se trouve organisée, par référence à la réglementation en matière de chômage, telle que déterminée par les partenaires sociaux pour le secteur privé.

La situation d'un fonctionnaire soumis à des règles statutaires qui organisent le déroulement de sa carrière et la continuité du lien avec l'Administration à travers les diverses positions qui aménagent l'éloignement temporaire, rend a priori marginale la situation de perte d'emploi.

Pourtant la pratique, notamment dans la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière, a révélé des situations de non-emploi de longue durée, assimilables à des situations de perte d'emploi.

Le contentieux soulevé par ces situations a conduit la jurisprudence à faire évoluer la réglementation en faveur des requérants.

C'est ainsi que le Conseil d'État (CE, 10 juin 1992, Bureau d'aide sociale de la ville de Paris), a confirmé qu'un agent territorial mis en disponibilité pour convenances personnelles et qui n'a pu obtenir, faute de poste vacant, sa réintégration doit être considéré comme involontairement privé d'emploi au sens de l'article L. 351 du code du travail.

L'intéressé a droit aux allocations chômage telles que définies par les dispositions des articles L. 351-12 et L. 351-3 du même code. Concernant la fonction publique territoriale, l'article 9 de la loi no 82-939 du 4 novembre 1982 a en effet étendu aux agents titulaires des collectivités territoriales le bénéfice de l'allocation pour perte d'emploi prévue à l'article L. 351-16 du code du travail (décret d'application no 83-976 du 10 novembre 1983).

Cette jurisprudence est-elle applicable lorsque l'agent est un fonctionnaire d'État placé en disponibilité, le cas échéant pour exercer des fonctions d'agent contractuel auprès d'une autre administration ?

À défaut de texte spécifique, la jurisprudence découlant de l'arrêt précité du Conseil d'État pourra venir renforcer, voire fonder de façon nettement plus précise, le principe général énoncé plus haut. Cette décision rendue concernant un agent de la fonction publique territorial à la suite du refus de l'employeur de le réintégrer après une disponibilité, devrait pouvoir être appliquée, dans des situations analogues, à l'ensemble des fonctionnaires, quel que soit le statut dont ils relèvent.

Par ailleurs, la question d'un droit éventuel du fonctionnaire à percevoir des indemnités de licenciement reste une question délicate. Il n'y a pas de texte général en la matière. Néanmoins, le principe veut qu'une indemnité soit allouée aux titulaires licenciés pour motif non disciplinaire qui ne sont pas reclassés ou qui ne satisfont pas aux conditions pour être admis à la retraite avec jouissance immédiate d'une pension. Mais l'application de ce principe est très incertaine du fait qu'il est conditionné par le croisement de nombreux textes ou décisions du Conseil d'État, au champ d'application limité, et à l'appréciation, par l'Administration, d'éléments ponctuels.

Le cas suivant illustre ces problèmes.

Réclamation no 95-2479, transmise par M. Henri Labourdette, Délégué départemental du Médiateur dans le Loiret.

Mme B... est un fonctionnaire de l'État, placée en disponibilité pour élever son enfant, puis, pour convenances personnelles, entre 1990 et 1996.

Durant ses années de mise en disponibilité, Mme B... a été recrutée par un rectorat en qualité d'enseignante contractuelle, pour descontrats successifs d'un an, du 1er octobre 1990 au 30 septembre 1994.

Avant la fin de son dernier contrat, le 6 juin 1994, l'intéressée a sollicité le renouvellement de sa disponibilité pour deux ans, qui lui fut accordé, sans avoir alors l'assurance qu'un nouveau contrat lui serait proposé par le rectorat pour l'année 1994-1995. Or, au 1er octobre 1994, son contrat n'a pas été renouvelé.

Mme B... a alors demandé des allocations pour perte d'emploi auprès du rectorat, ce qui lui fut refusé. L'intéressée n'a par ailleurs sollicité sa réintégration sur son emploi d'origine que le 6 avril 1995. Elle a été réintégrée presque aussitôt, le 1er mai 1995, avant expiration de sa période de disponibilité prévue pour le 1er octobre 1996.

À la suite des contacts pris avec le rectorat concerné et le ministère de la Fonction publique il a été souligné que l'intéressée ne remplissait pas les conditions requises pour une indemnisation du chômage. Elle ne pouvait pas être considérée comme en situation de perte involontaire d'emploi, en raison de l'absence de demande de réintégration dans les délais requis avant la fin du contrat en cours, dont la durée était limitée au 30 septembre 1994.

On peut en conclure que si elle avait respecté cette exigence, elle aurait pu prétendre à indemnisation.

En raison des incertitudes et de la complexité de ce genre de cas, la question mériterait qu'un texte interministériel apporte des précisions permettant de répondre aux diverses situations.

c. Les cas de perte définitive d'emploi

Outre les difficultés matérielles occasionnées par les problèmes de réintégration, il reste à souligner certains cas où le fonctionnaire ayant souhaité effectuer une mobilité peut perdre, non seulement son emploi d'origine mais aussi, sa qualité de fonctionnaire.

En premier lieu, si la mise en disponibilité répond à sa propre demande, il doit solliciter sa réintégration deux mois au moins avant l'expiration de la période en cours. S'il ne la demande pas, ou s'il la demande avec retard, on peut considérer qu'il a rompu tout lien avec l'Administration, ce qui lui fait perdre sa qualité de fonctionnaire.

En second lieu, le fonctionnaire qui refuse les postes de réintégration qui lui sont proposés ou qui ne rejoint pas un poste peut être rayé des cadres par licenciement après consultation de son dossier et après avis de la commission administrative paritaire.

Enfin, le fonctionnaire peut être licencié lors de l'examen de sa demande de réintégration qui est soumise au contrôle de l'aptitude physique à exercer des fonctions, et perdre ainsi tous ses droits statutaires à protection sociale en cas de maladie.

2. Les difficultés liées à l'engagement de servir dans l'emploi d'origine

Lors de sa nomination comme stagiaire ou de sa titularisation, l'agent public doit, depuis la loi du 13 juillet 1983, s'engager à exercer les fonctions pour lesquelles un enseignement spécifique lui sera ou lui a été dispensé, dans le cadre d'une école préparant aux métiers de la fonction publique, outre la formation initiale, la formation professionnelle continue fait partie des droits des fonctionnaires. Ceux-ci peuvent, en effet, bénéficier, en étant rémunérés partiellement, de congés pour formation professionnelle. En contrepartie, ils s'engagent, pour une certaine durée, au service de la personne publique qui a assuré le financement de leur formation.

S'il ne respecte pas cet engagement, l'agent doit rembourser à l'Administration le montant des avantages financiers (frais de rémunération et d'études) qui lui ont été accordés, soit au titre de sa formation initiale, soit pour préparer un diplôme, un examen ou un concours dans le cadre d'un congé de formation. Le remboursement alors exigé est proportionnel au nombre de mois restant à accomplir au service de la personne publique dont il relève.

Il y a là un moyen de prévenir le risque d'abandon par un fonctionnaire formé aux frais des contribuables qui cède, après avoir acquis de nouvelles compétences, à la tentation que pourraient exercer sur lui des conditions d'emploi plus avantageuses dans le secteur privé. À l'évidence, l'engagement de servir constitue un élément de dissuasion, destiné à prévenir des départs trop précoces ou gênants sur le plan de la déontologie. De façon pragmatique, l'engagement de servir permet à l'État ou à la personne publique de se dédommager des frais engagés pour la formation d'un agent qui, en définitive, décide de ne pas servir dans le corps auquel il s'était initialement destiné.

Pour l'Administration, qui serait alors amenée à former un nouvel agent, les frais de formation seraient doublés pour un même poste. Cependant, par delà ces aspects contraignants, la formation professionnelle consacre aussi le rôle dévolu à l'Administration dans la mise en place de moyens susceptibles de permettre aux membres de la fonction publique de répondre au mieux aux exigences de leur mission, de progresser dans le sens d'une meilleure aptitude à l'exercice de leurs fonctions, avec la préoccupation d'être capables de faire face à tous problèmes nouveaux et d'accéder à des emplois supérieurs.

La durée de l'engagement est très variable d'un corps de fonctionnaires à l'autre, et peut aller jusqu'à dix ans pour les élèves de l'École nationale d'administration ou les écoles normales supérieures. Il est cependant admis que cet engagement ne revêt pas un caractère continu et peut être interrompu par les différentes positions analysées ci-dessus (disponibilité, détachement...).

Cet assouplissement ne soustrait pas le fonctionnaire à son engagement. L'échéance est seulement repoussée.

L'engagement souscrit par un fonctionnaire de servir une collectivité publique pendant une certaine période constitue une obligation à caractère réglementaire et non à caractère contractuel, qui découle de dispositions prévues par un texte statutaire. En cas de rupture, le Conseil d'État (CE Sect., 30 mars 1991,De Friocourt) a considéré que les mesures sanctionnant la méconnaissance de cette obligation s'appliquent aux seuls fonctionnaires ayant, expressément et par écrit, souscrit l'engagement prévu par les dispositions statutaires qui l'instaurent.

Néanmoins, une telle obligation constitue un frein à la mobilité. L'engagement de servir dans l'emploi d'origine est interprété de façon stricte. Ainsi, le Conseil d'État (CE, 18 mars 1994, Verpeaux), a considéré que l'engagement de servir l'État est un engagement pour le servir dans certaines fonctions déterminées. Dans le cas analysé par la haute juridiction, la requérante avait auparavant bénéficié d'une bourse d'enseignement supérieur versée aux candidats à un poste d'élève-professeur dans les instituts de préparation à l'enseignement secondaire (IPES). Elle n'avait donc pas intégré les cadres de la fonction publique enseignante mais était néanmoins devenue fonctionnaire de l'État en qualité d'inspecteur des impôts.

Elle a été considérée comme ayant rompu son engagement de servir dans les cadres de l'Éducation nationale, après avoir refusé plusieurs postes de maître auxiliaire qui lui avaient été proposés à la suite de ses échecs au concours du CAPES. Le fait que la situation de l'intéressée, en sa nouvelle qualité de fonctionnaire des impôts, relève de la fonction publique de l'État a été considéré comme sans incidence sur la réalité de la rupture d'engagement qu'elle avait initialement souscrit.

Sur ce point, le Conseil d'État n'a pas suivi les conclusions du commissaire du gouvernement qui mettait en évidence deux conceptions de la fonction publique : " une conception technicienne et centrée sur les administrations qui recrutent et souhaitent garder les agents qu'elles forment, et une conception plus moderne qui privilégie la mobilité de ses besoins humains reposant sur l'idée que nombreuses sont les formations de fonctionnaires qui finalement sont utiles quel que soit l'endroit dans lequel l'agent est appelé à servir ".

À l'évidence, des passerelles doivent être mises en place, afin de permettre une meilleure gestion des agents publics, dont les efforts de formation se voient compromis par les sanctions financières résultant de la rupture de l'engagement de servir une administration déterminée, bien qu'ils continuent de servir dans une autre administration de l'État.

Les difficultés sont du même ordre pour les fonctionnaires changeant de fonction publique.

Réclamation no 94-2382, transmise par M. Pierre Laguilhon, Député des Pyrénées-Atlantiques.

Fonctionnaire d'État, Mme C... a travaillé pendant sept ans dans un service des impôts. Désirant donner une nouvelle orientation à sa carrière, elle s'est inscrite au concours de recrutement des infirmières. Ayant passé avec succès les épreuves, elle a suivi une formation en école d'infirmières, puis a été titularisée dans la fonction publique hospitalière.

Mme C... avait bénéficié d'une indemnité annuelle de formation allouée à ce titre par son administration d'origine, la direction générale des impôts. Celle-ci lui en réclama le remboursement, en raison de sa non-réintégration dans la fonction publique d'État, sur le fondement de l'article 13 alinéa 5 du décret no 85-607 du 14 juin 1985, titre III, pris en application de la loi no 84-16 du 11 janvier 1984 portant statut de la fonction publique d'État.

Confrontée à de sérieuses difficultés financières, et choquée d'être considérée comme débitrice de l'État alors qu'elle continuait à remplir une mission de service public en qualité d'infirmière, Mme C... demanda au Médiateur de la République d'obtenir l'annulation du titre de perception pris à son égard, ou tout au moins une remise de la dette.

Les démarches entreprises se soldèrent par un échec, l'Administration préférant attendre la décision du tribunal administratif, devant lequel avait été portée cette affaire.

La réclamation de Mme C... met en évidence que l'obligation de revenir effectuer son service dans la même fonction publique à l'issue d'une période de formation constitue un frein sérieux à la mobilité, qui se justifie difficilement.

Il conviendrait de permettre plus facilement au fonctionnaire de passer d'une fonction publique à l'autre pour y exercer son engagement de servir. Cela permettrait une adéquation avec le droit à la mobilité dont l'article 14, alinéa 1er de la loi no 83-634 du 13 juillet 1983, fait une garantie fondamentale de la carrière d'un fonctionnaire, et avec la notion qui sous-tend l'ensemble du service public, celle de l'intérêt général. Celui-ci transcende la distinction structurelle entre les trois fonctions publiques. Certes, le fonctionnaire s'est vu permettre de suivre une formation aux frais d'une personne publique, et l'on comprend les motifs d'ordre financier et déontologique qui nécessitent qu'en contrepartie elle lui demande de rester à son service. Mais faut-il, dans tous les cas, imposer une limitation du champ des orientations possibles? L'important, en fin de compte, n'est-il pas que l'agent continue d'appartenir à la fonction publique et exerce son service dans l'intérêt général ?

Le Médiateur de la République a d'ailleurs fait part aux administrations concernées de l'opportunité de modifier la réglementation sur ce point. Une proposition de réforme (AGP 94-01) a été faite en ce sens portant sur la mobilité à l'issue de la formation initiale et à l'issue d'un congé de for-mation.

Sur le premier point, une expertise a été confiée au ministère de la Fonction publique.

Sur le second point, plusieurs pistes sont actuellement explorées.

En effet, les agents des fonctions publiques de l'État, territoriale et hospitalière, ont la possibilité de bénéficier de congés de formation afin de parfaire leur formation personnelle; ils perçoivent de leur employeur, durant les douze premiers mois de leur congé, une indemnité forfaitaire mensuelle.

Les fonctionnaires auxquels sont accordés ces congés s'engagent à rester au service de leur employeur, selon le cas l'État, la collectivité territoriale ou l'établissement dont ils relèvent, pendant une période d'une durée égale au triple de celle pendant laquelle les intéressés ont perçu l'indemnité forfaitaire. Lorsque cet engagement n'est pas respecté, l'agent rembourse les indemnités perçues, à concurrence de la période de service non effectuée.

Il en résulte que pendant la durée de l'obligation de service, les fonctionnaires territoriaux ne peuvent quitter la collectivité ou l'établissement dont ils relèvent, et que les fonctionnaires de l'État et hospitaliers ne peuvent obtenir de détachement dans une autre fonction publique.

Dans le cadre des réunions interministérielles de suivi des propositions de réforme du Médiateur, le ministère de la Fonction publique, dans un premier temps, a accepté de modifier le décret no 85-607 du 14 juin 1985 relatif à la formation professionnelle des fonctionnaires de l'État, pour permettre à ceux qui ont bénéficié d'un congé de formation d'accomplir leur engagement de servir également dans la fonction publique territoriale et dans la fonction publique hospitalière.

Le ministère des Affaires sociales a proposé de modifier dans le même sens, pour la fonction publique hospitalière, le décret no 90-319 du 5 avril 1990 relatif à la formation professionnelle continue des agents de la fonction publique hospitalière.

Pour la fonction publique territoriale, il semble que l'application de la réforme proposée présente en revanche une difficulté, dans la mesure où elle se heurte au refus des collectivités locales de voir remis en cause le cadre régissant actuellement le congé de formation. Celles-ci sont, en effet, attachées à ce que le congé de formation, qui engendre des dépenses importantes pour les collectivités locales ou les établissements publics locaux, ait pour contrepartie une obligation de service pour les fonctionnaires bénéficiaires de ces congés.

Le ministère de l'Intérieur estime que la remise en cause de cette obligation de service conduirait à une demande soit de mutualisation, soit de remboursement, entre collectivités, des dépenses supportées à l'occasion du congé de formation par l'employeur d'origine du fonctionnaire. Actuellement, les réticences sont grandes à mettre à la charge des collectivités locales une nouvelle cotisation pour le financement collectif des dépenses relatives au congé de formation.

Ces réticences ne sont pas insurmontables dans la mesure où la fonction publique hospitalière bénéficie, d'ores et déjà, d'une mutualisation du financement des congés de formation :

- mutualisation des dépenses : en application de l'article 41-6o de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, la prise en charge du congé de formation est assurée par l'Association nationale pour la formation des personnels hospitaliers qui perçoit à cet effet des établissements concernés une cotisation de 0,1 % de la masse salariale; sur le produit de cette cotisation, cette association finance les frais d'enseignement et rembourse aux établissements la charge des indemnités forfaitaires qu'ils versent aux bénéficiaires du congé de formation;

- remboursement entre établissements : l'article 100-1 de la loi du 9 janvier 1986 précitée prévoit que lorsqu'un fonctionnaire hospitalier, ayant bénéficié d'un congé de formation, vient à assurer ses fonctions dans un autre établissement avant la fin de son engagement, ce dernier rembourse à l'établissement d'origine, au prorata du temps de service restant à accomplir, les dépenses financées pendant la formation.

La situation analysée ci-après illustre les difficultés pratiques de mise en uvre de ce mécanisme.

Réclamation no 94-1563, transmise par M. Daniel Poulou, Député des Pyrénées-Atlantiques.

Mme I..., infirmière de section psychiatrique dans un centre hospitalier, rencontrait des difficultés pour obtenir sa mutation dans un autre centre hospitalier, car ce dernier devait prendre en charge ses frais de formation au prorata du temps d'engagement de servir qui lui restait à accomplir (en contrepartie des indemnités de formation payées par ce centre).

Cet engagement de servir résulte du décret no 80-253 du 3 avril 1980. La rupture de cet engagement entraîne l'obligation de rembourser les sommes exposées. Cette obligation est à la charge du fonctionnaire.

Or, depuis un arrêt (CE, 13 janvier 1988, Mlle Antonini), le Conseil d'État, de jurisprudence constante, considère que la mutation d'un agent d'un établissement public hospitalier à un autre ne constitue pas une rupture de l'engagement de servir. Le fonctionnaire n'a donc pas à rembourser ses frais de formation.

Néanmoins, le décret no 91-1301 du 19 décembre 1991, en son article 2, dispose que l'établissement, qui recrute un agent sous contrat, est tenu de rembourser à l'établissement formateur les sommes correspondant aux traitements et charges financés pendant la durée de la formation au prorata du temps restant à accomplir jusqu'à la fin de cet engagement.

Le Médiateur n'a donc pas pu intervenir plus avant pour Mme I..., son sort dépendant finalement de la capacité de l'établissement d'accueil à rembourser l'établissement d'origine.

Ainsi, en principe, l'agent est dégagé de son obligation de rembourser dans la mesure où il ne rompt pas son engagement de servir en étant muté d'un centre hospitalier vers un autre. Si cette solution a le mérite de libérer financièrement l'agent en transférant la charge du remboursement à l'établissement d'accueil, elle subordonne néanmoins le recrutement du fonctionnaire à la capacité financière de l'hôpital d'accueil à assurer cette dépense supplémentaire. Telles sont les considérations qui ont été opposées au Médiateur par l'établissement hospitalier concerné.

Dans la pratique, il est à craindre que le coût afférent à cette dépense représente un obstacle majeur au recrutement d'un agent qui ne se serait pas totalement libéré de son engagement de servir, dans l'établissement où il a été initialement souscrit.

Il est de fait que les réclamations portant sur la rupture de l'engagement de servir suscitent, chaque année, des réclamations et des interventions du Médiateur de la République dont voici quelques exemples :

Réclamation no 94-2444, transmise par M. Raymond Barre, ancien Premier ministre, Député du Rhône.

M. R... était contrôleur des services déconcentrés du Trésor en poste dans le Val-d'Oise. De 1984 à 1985, percevant une indemnité de stage de son administration, il avait, en contrepartie, signé un engagement de servir de cinq ans.

M. R... démissionna après trois ans de services effectifs pour rejoindre la région Rhône-Alpes (et apporter un soutien à sa mère, devenue veuve).

Les services du Trésor lui demandèrent le remboursement de 59 000 F représentant l'indemnité de stage, en application du décret no 64-461 du 25 mai 1964 en son article 9 (fixant le statut particulier du corps).

Bien que titulaire d'un nouvel emploi de représentant, M. R... rencontrait des difficultés pour se libérer de sa dette. Il s'adressa au Médiateur de la République pour en obtenir la remise gracieuse.

Le Médiateur obtint du Trésor public une remise partielle de 37 002 F sous réserve du règlement du solde, dont le paiement fut échelonné par mensualités.

Réclamation no 92-4930, transmise par M. Louis Souvet, Sénateur du Doubs.

M. F... était élève de l'école militaire (ENORSA) à Saint-Maixent-l'École.

À la suite de la rupture de son engagement de servir, consécutive à sa réforme pour inaptitude médicale, cette école réclamait à M. F... le remboursement de la somme de 10 924 F.

M. F... sollicita l'intervention du Médiateur de la République pour obtenir une remise gracieuse de sa dette. Une remise partielle de 5 480 F lui fut accordée (avec échelonnement du reliquat sur 24 mois).

Réclamation no 92-4555, transmise par M. Alain Richard, Député du Val-d'Oise.

Mme C... se voyait réclamer par le centre d'accueil et de soins hospitaliers de Nanterre une somme de 15 633 F qui correspondait au remboursement de la participation de l'établissement à sa formation, en contrepartie d'un engagement de servir qu'elle n'avait pu honorer, mettant elle-même fin à son contrat à l'issue d'une période d'un an.

Mme C... fit appel au Médiateur de la République pour obtenir la remise de sa dette. Le directeur de l'hôpital décida d'annuler le titre de recette émis à l'encontre de Mme C... eu égard à sa manière de servir de à l'époque où elle exerçait ses fonctions.

Réclamation no 92-2568, transmise par M. Claude Bourdin, ancien Député du Loiret.

Mme B... était élève-infirmière, entrée en 1987 à l'hôpital Bichat. Des difficultés professionnelles devaient la conduire à démissionner avant d'avoir accompli l'obligation de cinq années de services que comportait son engagement. Une somme de 12 897 F lui était réclamée à la suite de cette rupture d'engagement, en remboursement de ses frais d'études.

Financièrement en situation difficile, Mme B... demanda au Médiateur de la République d'intervenir afin qu'un allègement de sa dette et un étalement conséquent lui soit accordé. Il obtint un échelonnement mensuel du paiement de la dette, mais aucune remise, compte tenu de l'importance du coût, pour l'Administration, de la formation des élèves infirmières.

Réclamation no 92-2135, transmise par M.Jean-Pierre Bayle, ancien Sénateur des Français établis hors de France.

À la suite de son exclusion de l'école du service de santé des Armées à Lyon, M. V... était redevable, envers l'État, d'une somme de 160 835 F au titre de frais de scolarité.

Grâce aux démarches qu'effectua le Médiateur, le paiement de la dette de M. V... fut suspendu jusqu'à la fin des études qu'il avait reprises.

Ces quelques cas illustrent la compréhension et l'appréciation différenciée dont sait faire preuve l'Administration face à des situations diverses. Trois solutions apparaissent alors possibles : la remise gracieuse de tout ou partie de la dette, l'échelonnement du paiement de la totalité de la somme ou de la partie restant due après remise partielle, et enfin le report de paiement de l'intégralité de la somme. Cette liste n'est cependant pas limitative et reflète seulement les cas soumis au Médiateur de la République.

Dans l'ensemble, l'Administration s'est prononcée par rapport à la situation personnelle des intéressés. Mais elle s'est aussi prononcée en fonction de ses propres possibilités financières et de sa sensibilité devant les cas présentés.

En se montrant conciliante, l'Administration a montré la voie. Il serait pourtant bon qu'une action législative ou réglementaire vienne parachever une telle volonté.

C'est pourquoi le Médiateur de la République a tenu à ce que la proposition de réforme AGP 94-01 débouche sur des solutions véritablement adaptées aux difficultés rencontrées.

3. Les difficultés liées aux droits à pension et aux cotisations à caractère social

Ces difficultés concernent le plus souvent des fonctionnaires en position de détachement. Placés hors de leur corps d'origine, et continuant à bénéficier dans ce corps de leurs droits à l'avancement et à la retraite, ils doivent à ce titre verser des cotisations.

Dans certains cas, l'organisme d'accueil les contraint également à supporter un prélèvement de cotisations spécifiques pour la constitution d'unepension.

Soumis à une double cotisation, ils ne pourront cependant pas bénéficier d'une double pension pour une même période, en application de l'article L. 87 du code des pensions civiles et militaires.

Ce problème se pose notamment pour les fonctionnaires français détachés dans une organisation internationale pour lesquels le choix de la position hors cadre, lorsqu'ils remplissent les conditions requises, reste actuellement l'un des palliatifs qui peut être utilisé, mais seulement lorsque l'intéressé justifie déjà de cinq années de détachement. Un problème similaire se pose pour certains fonctionnaires détachés dans certains établissements français à l'étranger, en matière de cotisations à la Sécurité sociale.

Réclamation no 96-2147, transmise par Mme Jeanne Merian, Déléguée départementale du Médiateur en Loire-Atlantique.

Résidentes au Canada et enseignantes au collège M..., établissement français à Montréal, trois enseignantes (Mme L..., Mme A..., Mme R...) détachées administrativement ont pour obligation de cotiser pour leur retraite, mais aussi pour la Sécurité sociale en France.

Payées par l'établissement d'accueil en monnaie locale, elles se trouvent également tenues de participer à l'assurance maladie du pays d'accueil qui prélève une contribution sur les impôts directs selon sa propre législation.

Impliquant une concertation entre le ministère des Affaires étrangères et des Affaires sociales, le règlement de ce problème, en suspens depuis cinq ans, a conduit les intéressées à souhaiter l'intervention du Médiateur afin qu'une solution moins pénalisante puisse être dégagée. Ce dossier est en cours d'examen.

B. LES DIFFICULTÉS LIÉES A DES DYSFONCTIONNEMENTS

Enfin, quelques cas isolés présentés au Médiateur de la République, font ressortir des problèmes de procédure, de dysfonctionnements administratifs, ou des problèmes liés à la méconnaissance des règles applicables, par l'administration gestionnaire.

La mobilité doit se faire dans le respect des procédures qui la mettent en uvre, faute de quoi les intéressés risquent de se trouver dans des situations difficiles.

Le cas suivant en est un bon exemple (Réclamation no 94-4483, transmise par M. Francis Delattre, Député du Val-d'Oise).

M. S... était ingénieur en chef auprès de la commune de P... Il fut recruté par voie de mutation par la commune de C... pour y exercer les fonctions de secrétaire général. Ce recrutement fut annulé par le tribunal administratif.

L'illégalité tenait à la procédure utilisée pour nommer M. S... dans l'emploi de la ville de C... Il ne pouvait être muté directement à ce poste. Au préalable, il aurait dû être détaché dans le cadre d'emploi des attachés territoriaux, avant d'être affecté sur l'emploi de secrétaire général.
M. S... qui dut donc cesser toute activité dans la ville de C... ne put être réintégré dans la ville de P... faute de poste vacant. Il n'avait donc plus ni affectation ni rémunération.

M. S... s'adressa au Médiateur de la République qui proposa de résoudre temporairement son problème par le biais d'une convention de mise à disposition de l'intéressé entre les deux communes. Cela fut fait et M. S... put reprendre ses fonctions dans la ville de C... jusqu'à régularisation de sa situation dans les formes requises.

En l'espèce, " la mobilité " de M. S... était soumise au respect de certaines formes. Celles-ci n'avaient pas été respectées par le maire de la ville de C... L'agent en fit les frais puisqu'il se retrouva sans affectation et surtout sans rémunération.

Réclamation no 92-2752, transmise par M. Michel Noir, Député du Rhône.

Ouvrier des parcs et ateliers des Ponts et Chaussées, M. J... rencontra des difficultés de réintégration à la direction départementale de l'Équipement (DDE), à la suite d'une disponibilité pour convenances personnelles et fut maintenu en disponibilité faute de poste vacant.

Quand un poste lui fut proposé dans le département d'Ille-et-Vilaine, il posa sa candidature mais n'obtint aucune réponse.

M. J... fit alors valoir l'article 19-5 du décret no 89-498 du 12 juillet 1989 qui prévoit " une priorité pour occuper la première vacance de poste dans son parc d'origine " (alinéa 2) ou " en l'absence de vacance dans le parc d'origine ", qu'un " poste de la même classification devra lui être offert dans tous les autres parcs " (alinéa 4).

Faute d'y parvenir lui-même, il s'adressa au Médiateur de la République qui obtint sa réintégration auprès de la DDE du Rhône.

Si la mobilité dans la Fonction publique est un principe que diverses modalités permettent de réaliser, et dont les fonctionnaires peuvent user effectivement, elle peut aboutir, en raison de certaines insuffisances structurelles et de certains dysfonctionnements, à placer des fonctionnaires dans une situation précaire. C'est ce qui ressort des affaires soumises chaque année au Médiateur de la République. S'agissant de situations individuelles, il est difficile d'établir dans quelle proportion exacte la mobilité peut être le vecteur de difficultés substantielles pour les agents, dans leur ensemble.

Néanmoins, les requêtes transmises permettent de remarquer que la mobilité se trouverait simplifiée et améliorée par une harmonisation des dispositions relatives à chaque fonction publique ainsi que par la poursuite d'un meilleur dialogue entre elles.

Par ailleurs, au regard de l'importance des structures intergouvernementales et de la construction communautaire, la mobilité dans la Fonction publique ne peut plus être réduite à la seule fonction publique française. Les problèmes doivent donc être envisagés également à l'échelle européenne, voire internationale.

Ainsi, les économies budgétaires prévues dans le budget de certaines organisations internationales, et notamment des Nations Unies, comportent des réductions importantes en matière de coût du personnel qui ne manqueront pas d'avoir des incidences sur la situation des fonctionnaires en place, leur posant des problèmes de réintégration dans leur corps d'origine ou d'indemnisation du chômage, problèmes qui, sur bien des points, sont très proches des problèmes internes évoqués au cours de ce chapitre.

De même, la restructuration de la Fonction publique dans son ensemble, la réduction programmée du nombre de fonctionnaires impliquent une gestion prévisionnelle qui permette aux agents de vivre l'expérience de la mobilité et d'évoluer dans leurs fonctions tant au plan national qu'au plan de l'Union européenne.

La mobilité est une nécessité : il faut la favoriser et l'encourager beaucoup plus qu'on ne le fait actuellement.

Il est utile qu'un certain nombre de fonctionnaires puissent servir pendant quelques années dans une autre administration, un service à l'étranger ou une organisation internationale, élargissant ainsi leur expérience. Encore faudrait-il que leurs possibilités d'avancement restent intactes pendant cette période, et que le retour dans leur administration d'origine se fasse dans de bonnes conditions, ce qui est loin d'être toujours le cas aujourd'hui.

La mobilité doit être valorisante dans la carrière d'un fonctionnaire.

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