LA MEDIATION FISCALE



L'institution du Médiateur de la République a été créée en 1973 dans un contexte marqué par une dénonciation des excès de l'Administration. Elle répond avant tout à un besoin de contrôle qualitatif de l'action administrative, dont les dysfonctionnements ne se prêtent pas nécessairement à des recours juridictionnels.

Les notions de mauvaise administration ou de mauvais fonctionnement inspirent ainsi directement la rédaction de l'article 6 de la loi du 3 janvier 1973, et font du Médiateur le garant d'une certaine idée du service public, à l'écoute des administrés.

Il est toutefois souvent amené à proposer des solutions amiables en l'absence de toute erreur ou abus de pouvoir de l'Administration.

Les grands principes qui fondent l'action du Médiateur trouvent, bien évidemment, à s'appliquer à l'égard des administrations financières de l'État.

Il a cependant paru intéressant de souligner l'originalité de l'action du Médiateur dans un système fiscal marqué par une pratique déjà ancienne de règlement amiable des litiges.

La négociation en matière fiscale existait en effet antérieurement à l'institution du Médiateur, et des solutions amiables sont encore aujourd'hui trouvées, très fréquemment, sans que l'institution ne soit saisie ni même informée de la contestation.

De ce fait, les contribuables comme leurs représentants, voire l'Administration, n'ont pas toujours une idée exacte de l'étendue et des limites de l'action du Médiateur de la République telle que l'a définie le législateur.

I. LES POUVOIRS DU MÉDIATEUR DE LA RÉPUBLIQUE EN MATIÈRE FISCALE


Ces pouvoirs ne diffèrent pas, par leur nature ou par leur étendue, de ceux dont il dispose dans d'autres domaines, la loi n'ayant pas prévu de disposition spécifique vis-à-vis des administrations financières.

Nombreux sont ainsi ceux qui, soit pour le déplorer soit pour s'en réjouir, considèrent que le Médiateur de la République n'a, en matière fiscale, qu'un pouvoir très relatif puisqu'il ne peut imposer aucune solution aux services des impôts, des douanes ou du Trésor public.

Or, il n'est pas inutile de rappeler, dès à présent, que l'idée même de médiation s'oppose à ce que l'autorité investie de cette fonction puisse décider elle-même de l'issue du litige.

Cette médiation apparaît généralement sous la forme d'une intercession gracieuse et gratuite auprès des administrations financières, en faveur d'un contribuable, pour qu'une solution amiable puisse être trouvée dans le litige.

L'intercession ne constitue cependant qu'un des aspects de la fonction de médiation qui s'est enrichie au fil des ans; le Médiateur de la République dispose à présent d'une gamme de pouvoirs variés allant de l'intercession proprement dite à l'injonction, en passant par la recommandation et la proposition de réforme.

On peut alors affirmer, a contrario, que la médiation n'est pas une forme supplémentaire de juridiction, d'autorité hiérarchique supérieure, d'arbitrage ou de conseil fiscal.

A. LE MÉDIATEUR DÉTIENT DES POUVOIRS LÉGAUX ADAPTÉS À SES MISSIONS

Pour l'exercice de sa première mission, de traitement des réclamations individuelles, le Médiateur dispose d'un large pouvoir d'appréciation quant à l'opportunité d'une médiation, ainsi que d'un pouvoir d'intervention étendu et gradué.

C'est à partir de l'examen de ces réclamations qu'il peut exercer ensuite une deuxième mission de proposition de réformes, et tente ainsi de faire évoluer les textes dans le sens de ses préoccupations.

1. Un large pouvoir d'appréciation quant à l'opportunité d'une médiation

Saisi d'une réclamation par un contribuable, le Médiateur n'a pas l'obligation d'intervenir systématiquement auprès de l'administration financière mise en cause.

Il s'assure d'abord que des démarches préalables suffisantes ont bien été accomplies auprès de l'Administration. Il apprécie ensuite, après l'instruction du dossier, si la réclamation mérite une intervention.

a. Accomplissement des démarches préalables

En matière fiscale, pour que la réclamation soit considérée comme précédée de démarches préalables suffisantes, il faut en règle générale qu'une décision ait été prise.

En effet, un dysfonctionnement ne se présume pas. Il doit résulter d'une prise de position claire de l'Administration. Les conséquences inéquitables d'une décision ne peuvent également s'apprécier que par rapport au contexte dans lequel cette décision est intervenue.

La démarche du contribuable auprès de l'Administration peut être écrite ou orale. Dès lors qu'il s'est adressé au service concerné, celui-ci doit prendre position sur la demande dont il est saisi. Ce sera une décision d'acceptation, partielle ou totale, ou une décision de rejet explicite ou implicite en cas de silence de l'Administration.

Lorsqu'elle refuse de faire droit aux prétentions d'un contribuable, ce dernier peut s'adresser au Médiateur pour exposer ses griefs.

À cet égard, les démarches préalables que le requérant aura accomplies, et la réponse qu'il aura reçue, revêtent une importance particulière en matière fiscale pour la compréhension du dossier. Il faut en effet noter que pour une même affaire, le litige peut porter sur plusieurs impôts et plusieurs années; les solutions retenues pour certains aspects des problèmes soulevés peuvent par ailleurs emporter des conséquences sur d'autres points et les possibilités de règlement amiable peuvent varier, notamment en fonction de la nature de l'impôt et/ou de l'ancienneté du différend.

b. Appréciation des possibilités d'intervention

Après avoir examiné si cette réclamation entre dans le champ de ses compétences et présente tous les caractères de recevabilité, le Médiateur peut apprécier souverainement, avant toute tentative de médiation, la valeur des justifications présentées ainsi que les chances de succès d'une éventuelle intervention.

Cette faculté de choix trouve sa traduction dans les statistiques élaborées au niveau du secteur fiscal de la médiature : ainsi, au cours des dernières années, 25 % environ des dossiers jugés recevables ont été clos pour cause de réclamation dite " non justifiée ", après examen du dossier et avant toute intervention.

Le pouvoir d'appréciation du Médiateur, bien que prévu par l'article 9 de la loi du 3 janvier 1973 modifiée, peut paraître exorbitant. Il est susceptible d'engendrer des interrogations quant à des discriminations arbitraires, d'autant que les requérants ne disposent d'aucune voie de recours à l'encontre de la position du Médiateur, explicitée par ailleurs dans une réponse motivée.

La médiation fiscale reposant, dans la quasi-totalité des cas, sur une dynamique de persuasion, il est certain que la transmission des réclamations, y compris des moins plaidables ne peut être systématique car elle nuirait à l'action et à la crédibilité de l'Institution.

Il arrive ainsi que le Médiateur ne donne pas suite à une demande de suspension des poursuites engagées par le Trésor public, lorsqu'il apparaît que le requérant ne paye pas régulièrement ses impôts ou n'a pas respecté les plans de règlement qui lui avaient été précédemment accordés.

Une réclamation ne se prête pas non plus à une tentative de médiation lorsque le litige porte sur une question de pur droit déjà soumise à l'appréciation du juge ou lorsque rien dans le dossier ne permet d'envisager une solution amiable.

2. Un pouvoir d'intervention étendu et gradué

La loi du 3 janvier 1973 modifiée a fixé un cadre d'intervention dans lequel le Médiateur peut exercer la plénitude de ses fonctions.

Lorsqu'il est compétent en raison de l'objet du litige, et lorsque le dossier est recevable, le Médiateur peut intervenir :

- quelle que soit la situation juridique du litige, il a, par exemple, la faculté d'évoquer certaines affaires pour lesquelles le délai de réclamation est prescrit, ou d'intervenir auprès des administrations financières même en cours d'instance juridictionnelle dès lors que le requérant préfère finalement une solution négociée;

- quelle que soit la situation financière du requérant;

- quels que soient la nature et le montant de la dette fiscale;

- quel que soit le degré de responsabilité de l'Administration pour tenter d'obtenir l'indemnisation du préjudice subi.

Cette fonction de médiation constitue traditionnellement le premier niveau d'intervention, dans une gamme d'actions allant de la recherche d'une solution amiable à une injonction publique de faire.

En matière fiscale comme en d'autres domaines, le Médiateur a également la possibilité d'utiliser une procédure plus solennelle, la recommandation, qui peut être rendue publique à défaut de réponse satisfaisante (article 9 de la loi du 3 janvier 1973).

Il dispose en outre d'un pouvoir d'injonction :

- à l'égard des organismes mis en cause en cas d'inexécution des décisions de justice passées en force de chose jugée (article 11);

- à l'égard des agents et corps de contrôle, pour l'obtention de renseignements ou d'enquêtes nécessaires à l'exercice de sa fonction (article 12).

Par ailleurs, les règles du secret professionnel ou le caractère confidentiel des documents ne sont pas opposables au Médiateur dans le domaine fiscal (article 13).

3. Un pouvoir de proposition

C'est à partir de l'examen des réclamations individuelles que le Médiateur formule ses propositions de réforme. Certains de ces cas révèlent des situations dont les effets critiquables sont susceptibles de concerner de nombreux contribuables, parfois en raison d'une lacune de la réglementation, plus souvent à cause de la méconnaissance des textes ou de la difficulté à les comprendre.

Le Médiateur de la République va alors proposer aux pouvoirs publics de réformer la réglementation relative au point de litige, la modification pouvant porter sur les textes eux-mêmes, ou sur les formulaires ou les notices administratives qui les accompagnent, notamment afin d'assurer une meilleure information des contribuables.

Cette mission comporte, en matière fiscale, des particularités liées à l'imbrication des objectifs de la politique fiscale, au coût budgétaire des propositions formulées, et à la complexité de la législation fiscale.

La fiscalité appartient, par nature, au domaine régalien de l'action de l'État, et le Médiateur est bien sûr particulièrement attentif à ne pas s'immiscer dans la politique fiscale, économique et sociale mise en úuvre par les pouvoirs publics.

Mais il lui est parfois difficile d'apprécier les effets induits d'une proposition de réforme fiscale.

Ainsi, par exemple, était-il apparu anormal au Médiateur que la loi, en matière d'impôt sur le revenu, écarte du bénéfice du crédit d'impôt attaché aux économies d'énergie, les contribuables qui installaient eux-mêmes une nouvelle chaudière.

Or, le ministre du Budget n'a pas accepté cette proposition de réforme, et a décidé de maintenir la condition d'installation de la chaudière par une entreprise, estimant que l'aide fiscale accordée aux particuliers ne devait pas être dissociée de l'activité économique normale.

Le ministre a en effet souhaité maintenir l'incitation fiscale à l'économie d'énergie dans le contexte plus global de l'activité économique des entreprises et de l'emploi, ce qui bien sûr, se comprend parfaitement.

De même, lorsque la réforme entraîne un coût budgétaire, ce qui est souvent le cas en matière fiscale, la proposition est-elle plus difficile à faire accepter.

À titre d'exemple, une proposition de réforme des textes régissant le régime du dégrèvement d'office est actuellement en cours d'examen.

La réglementation fiscale prévoit que les conséquences de certaines erreurs commises par l'Administration peuvent être réparées au-delà du délai normal de réclamation, par voie de dégrèvement dit " d'office ".

Le Médiateur a saisi le ministre du Budget sur ce point afin que l'octroi du dégrèvement d'office au profit du contribuable ne soit plus une simple faculté laissée à la discrétion de l'Administration, susceptible d'entraîner des décisions administratives disparates pour des situations similaires, mais devienne une procédure destinée à corriger les surimpositions résultant d'erreurs de l'Administration.

Enfin, la législation fiscale constitue un corps de réglementation particulièrement cohérent et homogène, actualisé par ailleurs chaque année dans le cadre de la loi de finances.

La réforme d'un point particulier des textes peut donc conduire à des effets en cascade, susceptibles de compliquer cette réglementation, de l'alourdir, ou d'entraîner une gêne dans l'action de l'Administration.

Ainsi, le principe de l'imposition des revenus disponibles annuellement (article 12 du code général des impôts) peut conduire à des surtaxations, même après application de la règle dite " du quotient " destinée à atténuer la progressivité de l'impôt sur le revenu.

Ces situations peuvent apparaître comme injustes lorsque des personnes ne deviennent imposables qu'au titre de l'année au cours de laquelle elles perçoivent un rappel de revenu en raison de la régularisation de leur pension, par exemple à la suite d'une erreur commise par l'organisme de retraite, et qu'elles ne peuvent rattacher les rappels perçus aux revenus des années antérieures concernées.

Malgré les propositions du Médiateur, le ministre du Budget a estimé inopportun, quelles que soient les circonstances, de déroger, par un texte, à la règle de l'imposition des revenus disponibles annuellement.

L'Administration préfère corriger par voie gracieuse, éventuellement, les seules situations qui lui sont soumises plutôt que d'éviter la répétition de ces litiges en modifiant une règle bien établie, à la fois simple et efficace et permettant un contrôle déclaratif aisé, ce qui là encore peut se comprendre.

B. LA MÉDIATION N'INTERFÈRE PAS AVEC LES AUTRES MODES DE RÈGLEMENT DES LITIGES

Définir la médiation par ce qu'elle n'est pas constitue une approche qui permet de répondre aux interrogations et aux espoirs des réclamants. Il n'est pas rare, en effet, de voir les requérants s'adresser au Médiateur comme à un justicier qui saurait faire entendre raison à l'Administration.

Il semble donc important de préciser que le Médiateur ne peut prendre une décision sur le fond qui s'imposerait tant à l'Administration qu'au requérant, ni apporter systématiquement aide et conseil fiscal au contribuable qui s'estime lésé par une décision des administrations financières.

1. Le Médiateur n'est pas un juge

Après examen du litige dont il est saisi, le Médiateur peut certes parvenir à la conclusion qu'un redressement n'est pas fondé en droit ou que les administrations financières ont commis des erreurs en matière d'assiette ou de recouvrement des impositions contestées.

Il ne peut toutefois, alors même que l'Administration aurait pu commettre une erreur manifeste et flagrante, remettre en cause par un acte unilatéral la position du service quant à la qualification juridique ou à l'appréciation matérielle des faits, ou annuler une procédure en raison de vices de forme constatés.

Il en est ainsi, par exemple, des litiges concernant l'application incorrecte par les administrations financières des règles de prescription en matière de droit de reprise ou d'action en recouvrement.

Par ailleurs, contrairement au juge de l'impôt, le Médiateur ne peut développer ni se prévaloir d'une quelconque " jurisprudence " à partir des cas pour lesquels il a pu, antérieurement, obtenir satisfaction.

Chaque tentative de médiation s'inscrit en effet dans un contexte propre à l'affaire, qui ne peut donc être invoqué pour la résolution d'autres litiges.

2. Le Médiateur n'est pas une autorité hiérarchique

Il ne peut réformer une décision prise par les services des impôts, du Trésor public ou des douanes, ni prendre unilatéralement une décision administrative de remise ou de dégrèvement en vertu d'un pouvoir hiérarchique.

De la même façon, il ne peut exiger des services financiers que le litige soit traité dans le sens qu'il souhaite.

3. Le Médiateur n'est pas un arbitre

Il n'examine pas les réclamations qui lui sont soumises dans la perspective d'un règlement qu'il édicterait lui-même et qui s'imposerait tant aux administrations financières qu'aux réclamants.

La distinction qu'il convient d'opérer entre les fonctions de médiation et d'arbitrage est peut-être celle qui, dans l'esprit des contribuables, peut prêter le plus à confusion.

Outre le fait que le Médiateur et l'arbitre sont tous deux extérieurs au litige qui leur est soumis, ils ont en effet en commun, à la différence du juge, la faculté de rechercher une solution qui tend à s'affranchir de l'ordonnancement juridique établi pour parvenir à un règlement équitable, conciliant les intérêts des parties.

Cependant, et à la différence de l'arbitrage, la médiation n'a pas pour but ni pour effet d'imposer une solution à laquelle les deux parties auraient accepté par avance de souscrire, les administrations financières conservant toujours, en dernier ressort, la possibilité de refuser les solutions proposées par le Médiateur.

4. Le Médiateur n'est pas un conseiller juridique

La loi n'a pas conféré au Médiateur une mission de consultant ou d'avocat, et s'il est fréquemment amené à expliquer aux requérants les mécanismes de la réglementation fiscale et les causes des redressements dont ils font l'objet, ces éclaircissements n'ont jamais le caractère d'une consultation juridique qui aurait pour but de construire une argumentation à opposer à l'Administration.

En matière fiscale, l'action du Médiateur ne se place en outre que très rarement sur le même terrain que celui des avocats, dont le rôle est de contester la position de l'Administration par tous les moyens juridiques mis à leur disposition par le droit fiscal.

En toute hypothèse, il n'appartient pas au Médiateur d'engager les mêmes expertises que les professions organisées à cette fin, pour la résolution de problèmes juridiques complexes ou faisant l'objet d'une jurisprudence controversée.

II. UN CHAMP D'INTERVENTION ÉTENDU

Les litiges dont le Médiateur est saisi en matière fiscale sont de nature très diversifiée.

Ils portent essentiellement sur le principe même de l'imposition, la détermination de la base imposable, les modalités de calcul, l'application d'un avantage particulier (abattement, exonération...), le recouvrement.

Ils peuvent concerner les particuliers, les associations ou bien encore les entreprises.

Lorsqu'une réclamation a été considérée comme remplissant les conditions de recevabilité, le Médiateur apprécie librement l'opportunité d'une intervention. Il recherche la cause du litige (dysfonctionnement, iniquité, difficultés financières) et peut proposer une solution susceptible de mettre fin au différend par la voie amiable. Cette démarche est facilitée par le fait que l'Administration est expressément déliée du secret professionnel vis-à-vis du Médiateur, tant par la loi de 1973 (articles 12 et 13) que par l'article 115 du livre des procédures fiscales.

Si, en revanche, l'étude du dossier ne permet pas de déceler un mauvais fonctionnement, une iniquité, ou une situation personnelle et financière délicate pouvant justifier une mesure d'ordre gracieux, le dossier est clos. Le parlementaire qui l'a transmis est alors informé des motifs de droit et d'opportunité qui ont conduit le Médiateur à considérer que l'affaire ne pouvait être plaidée utilement auprès de l'Administration ou de l'organisme dont émane la décision litigieuse.

La clôture du dossier en l'absence de toute intervention ou à la suite des éclaircissements apportés par l'Administration ou l'organisme saisi, n'est pas susceptible d'être contestée par le réclamant, à défaut de voies de recours à l'encontre des décisions du Médiateur.

La loi du 3 janvier 1973 modifiée a conféré au Médiateur de la République deux domaines privilégiés d'intervention : le mauvais fonctionnement des administrations et les situations manifestement inéquitables. La pratique quotidienne de la médiation l'a naturellement conduit à s'intéresser également aux situations d'exclusion sociale ainsi qu'aux difficultés financières que peuvent connaître, momentanément ou durablement, les contribuables.

A. LE MAUVAIS FONCTIONNEMENT DES ADMINISTRATIONSFINANCIÈRES

Les dysfonctionnements résultent, pour l'essentiel, de l'application erronée d'un texte, de l'appréciation incorrecte d'une situation au regard de la mise en úuvre d'une règle fiscale, mais aussi, plus exceptionnellement, d'un comportement fautif du service.

1. L'application erronée d'un texte

Ce cas de dysfonctionnement peut être illustré par l'exemple suivant :

Certains propriétaires d'un ensemble immobilier ayant financé leur acquisition à l'aide d'un Prêt pour l'Accession à la Propriété (PAP), estimaient remplir les conditions d'exonération de taxe foncière pour une durée de 10 ans.

Or, le centre des impôts a rejeté leur demande d'exonération de longue durée, au motif que les PAP accordés ne dépassaient pas la moitié du prix total d'acquisition du logement.

Sur la foi d'une brochure d'information du ministère du Logement évoquant l'éxonération de 10 ans si le PAP représentait au moins 50 % du coût de l'opération, les intéressés avaient strictement limité la demande de PAP à la moitié, au franc près, du coût total de l'opération de construction, taxe sur la valeur ajoutée incluse.

Ils perdaient ainsi, pensaient-ils, pour un franc près, et à cause d'une interprétation divergente de la réglementation par les ministères du Logement et du Budget, une exonération de taxe foncière de longue durée, qui constitue un avantage non négligeable.

L'examen de leur dossier à la Médiature a permis de constater que le centre des impôts avait commis une erreur d'interprétation des textes applicables, dans la mesure où, conformément à la jurisprudence du Conseil d'État à laquelle l'administration fiscale s'était ralliée, le caractère prépondérant du financement des constructions à l'aide de PAP devait être apprécié hors frais d'acquisition et hors taxe sur la valeur ajoutée immobilière.

En fait, le PAP obtenu par les requérants était d'un montant très supérieur à 50 % du prix de vente hors TVA, si bien que l'intervention du Médiateur a permis de les rétablir dans leurs droits.

2. L'appréciation incorrecte de la situation d'un contribuable

Les services de l'administration fiscale ne sont pas non plus à l'abri d'une évaluation incorrecte de la situation des contribuables lorsqu'il s'agit de déterminer si une disposition fiscale leur est ou non applicable, dès lors que cette appréciation implique des connaissances particulières dans un domaine technique.

C'est ainsi qu'une entreprise d'informatique avait bénéficié de crédits d'impôt-recherche, imputés sur l'impôt sur les sociétés, destinés au développement et à la mise au point d'architectures logicielles fondamentales. Cependant, dans le cadre d'un contrôle fiscal effectué par la suite, le service des impôts avait estimé que les réalisations de la société ne relevaient pas de la recherche fondamentale ou appliquée et ne constituaient pas des travaux de développement expérimental, éligibles au crédit d'impôt-recherche.

Ces travaux consistaient, selon l'Administration, en la mise au point de méthodes et d'outils à usage interne, sans caractère innovant, ne présentant pas un haut degré de complexité et n'ouvrant pas droit, par conséquent, au crédit d'impôt-recherche.

Les rappels d'impôt sur les sociétés que l'entreprise n'avait pas prévus étaient, de son point de vue, de nature à hypothéquer sa survie alors qu'elle soutenait, rapport d'expert à l'appui, avoir effectué des réalisations telles que définies par la réglementation applicable en matière de crédit d'impôt-recherche.

Au cas particulier, une exacte appréciation de la nature de ces travaux s'avérait indispensable. C'est ainsi qu'à la suite de l'intervention du Médiateur, l'administration fiscale a décidé de solliciter l'avis des services compétents du ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Ces derniers ont pu confirmer que les réalisations de la société concernée ouvraient bien droit au crédit d'impôt-recherche et les redressements d'impôt sur les sociétés notifiés à l'entreprise ont été abandonnés par l'administration fiscale.

3. Le comportement fautif du service

Enfin, le mauvais fonctionnement peut résulter d'un comportement regrettable du service. Il peut s'agir tout simplement du refus d'examiner véritablement les éléments présentés par le contribuable à l'appui d'une démarche écrite ou verbale, alors que sa bonne foi doit être présumée jusqu'à preuve du contraire.

C'est ainsi que des contribuables peuvent se voir poursuivis de façon répétée, pour le recouvrement d'impositions diverses émises au nom d'homonymes ou même de tiers, malgré de nombreux courriers de réclamation adressés sans succès au service des impôts chargé de l'émission des rôles d'imposition, et au Trésor public, responsable du recouvrement.

Une telle situation peut avoir de graves conséquences pour le contribuable car elle peut conduire, pour des impositions dont il n'est en aucun cas le redevable légal, à la mise en úuvre de poursuites pouvant aller jusqu'à la saisie de ses biens.

Il peut s'agir également de prises de position inopportunes, comme par exemple la remise en cause d'une décision notifiée par écrit au contribuable, sous prétexte du non-respect de procédures de délimitation de compétences, internes à l'Administration.

Au cas particulier, un contribuable avait obtenu de la part de la trésorerie dont il dépendait des délais de paiement de l'impôt sur le revenu, assortis d'une décision de remise gracieuse de la majoration de 10 % pour paiement tardif à concurrence de la totalité du montant, sans autre démarche de sa part.

Cette mesure de remise totale était subordonnée à l'exact respect du plan de paiement, lequel avait été scrupuleusement suivi par le contribuable.

Néanmoins, l'autorité hiérarchique supérieure avait remis en cause partiellement la décision conditionnelle de remise gracieuse totale de majoration, au motif que celle-ci relevait de sa compétence.

Aussi, bien qu'ayant pour sa part respecté ses obligations, le contribuable faisait les frais d'une mauvaise application, par l'Administration, de ses propres procédures d'instruction des demandes en remise, étant précisé que la somme maintenue à la charge du réclamant à titre de majoration, était supérieure à 13 000 F.

La Direction de la comptabilité publique, saisie de ce dossier, a cependant accepté de prononcer la remise gracieuse totale de la majoration de 10 %.

Le champ d'intervention du Médiateur de la République ne se limite pas aux cas de mauvais fonctionnement qui viennent d'être évoqués.

B. LES DOMAINES DE L'ÉQUITÉ ET DU RECOURS GRACIEUX

L'examen d'une réclamation peut aussi conduire, en l'absence de tout dysfonctionnement, à une intervention dictée par les circonstances de l'affaire ou la situation du contribuable.

1. L'intervention en équité

Le champ de compétence dévolu initialement au Médiateur par la loi du 3 janvier 1973 se limitait à la défense du citoyen contre le mauvais fonctionnement de l'Administration, et il n'était alors pas possible de suggérer au responsable de la décision contestée de s'écarter de la lettre de la loi pour aboutir à une décision plus équitable pour le réclamant.

La loi du 24 décembre 1976, modifiant la loi de 1973, a étendu considérablement ses moyens d'action en prévoyant l'intervention en équité.

Cette loi complète l'article 9 de la loi de 1973 par les dispositions suivantes :

" Lorsqu'il apparaît au Médiateur, à l'occasion d'une réclamation dont il a été saisi, que l'application de dispositions législatives ou réglementaires aboutit à une iniquité, il peut recommander à l'organisme mis en cause toute solution permettant de régler en équité la situation du requérant, proposer à l'autorité compétente toutes mesures qu'il estime de nature à y remédier et suggérer les modifications qu'il lui paraît opportun d'apporter à des textes législatifs ou réglementaires ".

Le législateur a voulu, par ce texte, éviter que le responsable de la décision contestée ne refuse d'examiner des situations exceptionnelles et particulières en invoquant l'obligation de s'en tenir à la lettre des dispositions légales ou réglementaires, l'objectif étant de permettre une compensation ou une atténuation des conséquences inéquitables de l'application d'une loi ou d'un règlement.

Le Médiateur intercède alors en faveur du réclamant pour que l'application des règles au bénéfice de la collectivité ne sacrifie pas à l'excès les intérêts particuliers, afin de rendre la loi plus supportable.

Il n'invoquera cependant l'équité que sous réserve du respect de l'esprit de la loi, d'une conciliation optimale des intérêts en présence et dans le souci de ne pas entraver l'application des règles de droit.

Ainsi, lorsque les pouvoirs publics fixent eux-mêmes de manière très précise les limites de l'objectif recherché, par exemple en subordonnant l'octroi d'avantages fiscaux à des situations bien définies, l'esprit de la loi ou du règlement est volontairement restrictif et s'oppose à ce que le Médiateur demande, au nom de l'équité, une interprétation plus généreuse des textes.

L'intervention en équité ne doit pas, par ailleurs, méconnaître les intérêts du plus grand nombre. Elle ne sera donc tentée que sous réserve d'une disproportion flagrante entre la gêne subie par le particulier et l'avantage moyen que les membres de la collectivité en retireront, de la possibilité d'octroi d'une compensation, de la capacité pour la collectivité d'en supporter le coût et dans le respect du droit des tiers.

L'iniquité peut, par exemple, découler de l'insuffisante formulation des dispositions de la loi ou d'un simple oubli qui fait qu'une situation n'a pas été prise en compte pour bénéficier de l'avantage prévu.

- La mésaventure arrivée à deux frères, dirigeants de sociétés, illustre parfaitement cette situation :

L'année n, les intéressés réalisent une plus-value dans le cadre d'un échange de titres de sociétés.

Conformément aux dispositions fiscales applicables, ceux-ci optent, dans une déclaration spécifique, pour le report d'imposition, et mentionnent dans leur déclaration de revenus de l'année n le montant global des plus-values dont le report d'imposition était demandé.

Au titre de l'année suivante, soit l'année n+1, il leur incombait de faire apparaître dans leur déclaration de revenus le montant cumulé des plus-values dont le report d'imposition n'était pas encore expiré.

Or, au moment de l'établissement de leur déclaration, ceux-ci avaient omis d'inscrire ce montant dans la mesure où l'un d'entre eux n'avait reçu de l'administration fiscale qu'un formulaire de déclaration simplifiée, ne comportant pas le cadre adéquat où devait être inscrit le chiffre cumulé des plus-values.

Dès réception de la notification de redressements remettant en cause le bénéfice du report d'imposition, les contribuables avaient établi et adressé au service des impôts des déclarations rectificatives comportant l'information initialement omise. Une telle démarche n'ayant pu aboutir, le Médiateur a fait valoir le caractère inéquitable de ces redressements auprès de l'administration fiscale.

En effet, il apparaissait dans cette affaire que l'envoi par le centre des impôts d'un formulaire de déclaration inadapté au cas particulier ne permettait pas à l'un des contribuables concernés de remplir ses obligations déclaratives en matière de plus-values, ce qui avait certainement contribué à l'omission relevée plus tard par ce même centre des impôts.

La sanction était donc disproportionnée et, par conséquent, inéquitable au regard de l'omission relevée, au demeurant purement formelle, alors qu'au titre de l'année de réalisation de la plus-value (année n), les contribuables n'avaient pas manqué de respecter les obligations déclaratives attachées à l'octroi du report d'imposition.

Enfin, il était clair que cette omission avait été commise en toute bonne foi, étant précisé qu'elle n'était pas susceptible de leur apporter un avantage fiscal indu.

Sensible à l'équité, le ministre délégué au Budget a décidé de maintenir le régime du report d'imposition en faveur des deux réclamants.

- Mme S... avait acquis, dans le sud de la France, un débit de boissons, qu'elle envisageait de donner en gérance libre dans l'attente de son retour de l'étranger.

Des raisons administratives s'opposaient toutefois à la mise en gérance du fonds de commerce, si bien que ce dernier avait été finalement revendu avec une plus-value, étant précisé toutefois que l'acte de vente prévoyait un paiement étalé sur six ans.

Or, peu de temps après la cession, l'acquéreur s'était trouvé en situation d'insolvabilité en raison de la liquidation de son entreprise, si bien que la plus-value escomptée, au titre de laquelle Mme S... avait acquitté un impôt sur le revenu de 43 000 F, s'était en fait transformée en une importante moins-value.

Mme S... ne pouvait, en droit, obtenir la remise en cause de l'impôt sur la plus-value légalement établi lors de la cession, dès lors que la faillite et l'insolvabilité du débiteur étaient survenues postérieurement à l'année de cette cession.

Elle ne pouvait pas non plus déduire de ses revenus la perte subie au titre de l'année de la liquidation de biens ou de celle de la répartition de l'actif de liquidation, dès lors qu'elle n'avait pas disposé, au cours des années considérées, de revenus imposables en France.

Cette situation était pour le moins inéquitable, l'intéressée se trouvant privée, en raison de ces circonstances particulières, de la possibilité de récupérer un impôt qui se révélait être sans véritable justification.

Acceptant de prendre en compte le caractère inéquitable d'une application trop rigoureuse de la loi, le directeur des services fiscaux, saisi de cette affaire, a prononcé la remise gracieuse de la totalité de l'impôt.

- La notion d'équité a également bénéficié à M. D..., qui bien qu'appelé sous les drapeaux, s'est vu verser à tort par l'Éducation nationale ses traitements d'août à octobre sur lesquels il a été imposé, et qu'il a dû reverser l'année suivante, sans pouvoir récupérer l'impôt correspondant mis à sa charge.

En effet, la réglementation fiscale prévoit que l'imposition porte sur les revenus dont le contribuable a eu la disposition au cours de l'année d'imposition. Les reversements de salaires effectués au cours des années suivantes s'imputent alors sur les revenus de ces mêmes années.

Or, l'année du reversement, M. D... n'avait travaillé que quatre mois, après son service militaire. Il n'était donc pas imposable, au cas particulier. Dès lors, il n'a pu récupérer l'impôt précédemment acquitté.

Dans cette affaire, l'iniquité résultait principalement du fait que M. D... n'avait pu rembourser ses émoluments au cours de l'année de leur perception. Il était en effet tenu d'attendre l'émission, par l'employeur, d'un document comptable fixant la somme à rembourser; or, ce document n'avait été établi qu'au mois de mars suivant l'année de perception des revenus.

Compte tenu de ces circonstances particulières, l'administration fiscale a accepté de procéder exceptionnellement au remboursement de l'impôt sur le revenu acquitté au titre des revenus reversés par M. D...

De même, des mesures en équité sont sollicitées par le Médiateur en faveur des entreprises lorsque, en raison de situations particulières tenant, là aussi, soit à l'application obligée des textes, soit aux circonstances ou aux conditions spécifiques d'exercice de leur activité, elles ne paraissent pas pouvoir raisonnablement supporter les impositions mises à leur charge.

Telles sont les difficultés auxquelles se sont trouvés confrontés plusieurs viticulteurs de la région de Cognac au moment de la cession de leur exploitation.

À cette occasion, ces agriculteurs ont été imposés sur la cession de leur matériel mais aussi sur la valeur de leurs stocks d'eau-de-vie constitués, pour certains, depuis une quarantaine d'années.

Ces alcools qui représentaient en fait la seule " richesse " de ces petits propriétaires ont entraîné des impositions très élevées qu'ils ne pouvaient pas acquitter sauf à y consacrer une part importante du produit de la vente de leur exploitation.

De plus, ces eaux-de-vie avaient déjà été imposées forfaitairement, chaque année, lors de la levée de la récolte.

Enfin, les coûts de production, au cours des années de stockage, ne pouvaient plus être déduits.

Les conséquences de cette situation étant très inéquitables et injustes pour ces viticulteurs à l'âge de la retraite, la Direction générale des impôts, à la demande du Médiateur, a tenu compte des conditions réelles d'exploitation et notamment des variations des stocks d'eaux de vie vendues.

Ces mesures, prises en équité, ont entraîné une atténuation très substantielle des impositions litigieuses, replaçant ainsi ces viticulteurs dans une situation fiscale acceptable.

De nombreuses affaires soumises au Médiateur ne peuvent toutefois trouver une issue favorable au plan de l'équité, en l'absence de circonstances particulières. Cependant, dans les litiges où le contribuable, en raison de sa situation personnelle et financière, réunit les conditions pour bénéficier d'une mesure gracieuse, l'équité peut être prise en compte par la remise du principal de l'impôt.

2. L'intervention au plan gracieux

Beaucoup de litiges de nature fiscale ou douanière trouvent leur solution auprès des administrations compétentes dans le cadre de procédures amiables traditionnelles, par le biais de la transaction, de la remise ou de la modération des droits et/ou des pénalités.

Les administrations relevant du ministère de l'Économie et des Finances ou du Budget se distinguent en effet par une pratique ancienne des solutions négociées, ce qui facilite incontestablement l'action du Médiateur de la République.

Le pouvoir d'accorder des remises, transactions ou modérations de la dette fiscale, à titre gracieux, est prévu par l'article L 247 du livre des procédures fiscales.

Ce texte fixe les conditions de remises totales ou partielles d'impôt direct en cas de gêne ou d'indigence, de remises ou de transaction portant sur les amendes fiscales ou les majorations d'impôts, de décharge de responsabilité au profit de personnes tenues au paiement d'impositions dues par un tiers.

Sont exclues cependant les remises totales ou partielles de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de taxes sur le chiffre d'affaires, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes et contributions.

Les remises ou modérations gracieuses et le recours au règlement transactionnel des infractions, généralement sur demande des contribuables, sont d'un usage courant dans les administrations financières, ce qui n'est pas toujours le cas dans les autres administrations.

La remise ou la modération s'analysent comme un abandon définitif ou conditionnel, consenti au contribuable sur tout ou partie de la créance, lorsque celle-ci ne peut plus être contestée en droit.

Dans le principe, aucune remise ou modération ne peut être accordée avant l'expiration du délai de réclamation. Toutefois, les services ont pour instruction de ne pas faire une application systématique de cette règle, et il peut être passé outre lorsqu'il apparaît que l'imposition en cause ne donnera lieu à aucune réclamation.

Les demandes de remise ou de modération qui visent l'impôt en principal ne peuvent être sollicitées qu'en matière d'impôts directs, et pour cause de gêne ou d'indigence mettant les contribuables intéressés dans l'impossibilité de se libérer à l'égard du Trésor. Aussi, il est tenu compte, au cours de l'instruction des demandes, de la situation matérielle du contribuable et de sa famille proche ainsi que de son comportement fiscal. S'agissant des entreprises, seule la situation de celles qui traversent de graves difficultés financières, mais paraissent susceptibles de les surmonter, sont prises en considération. Ces demandes peuvent être présentées sans condition de délai.

Contrairement à la remise ou à la modération, qui constituent un acte unilatéral d'abandon de créance, la transaction est un contrat passé entre l'Administration et le contribuable par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître.

Elle suppose des concessions réciproques faites par le créancier et le débiteur sur leurs droits respectifs, mais ne peut porter sur le principal de l'impôt (droit, taxe, prélèvement, redevance). Elle comporte une atténuation de certaines amendes et pénalités à l'exclusion des intérêts de retard, moyennant l'engagement par le contribuable bénéficiaire de verser au Trésor, à titre de sanction, une somme inférieure aux pénalités encourues ou prononcées ainsi que sa renonciation à toute procédure contentieuse née ou à naître, relative aux pénalités ou aux droits qu'elles concernent.

Bien entendu, le Médiateur de la République ne peut que favoriser, par son action, ce mode de règlement des litiges, qui peut être considéré comme un moyen équitable de terminer un différend, dans la mesure où l'affaire s'y prête, notamment lorsque les infractions relevées ne présentent pas un caractère de gravité évident.

La transaction peut être sollicitée à tout moment, avant ou après la mise en recouvrement des impositions, et même dès la notification de redressement. Mais une fois que l'imposition est devenue définitive, il ne peut être accordé qu'une remise ou une modération.

L'Administration prescrit à ses services de se montrer tolérants pour apprécier la recevabilité en la forme des demandes présentées au plan gracieux, étant précisé par ailleurs que ces démarches ne sont pas suspensives de paiement. Les contribuables peuvent avoir intérêt à informer simultanément le trésorier ou le receveur chargé du recouvrement, de leur démarche.

Lorsqu'est prononcée la remise ou la modération, celle-ci est subordonnée, le plus souvent, au paiement des impositions laissées à leur charge.

III. DES MODALITÉS D'INTERVENTION SOUPLES, COMPLÉMENTAIRES DE CELLES DES ORGANES ADMINISTRATIFS DE RÈGLEMENT DES LITIGES

Une requête ne peut être valablement formulée que lorsqu'elle a été précédée d'un recours auprès de l'administration fiscale. Ce recours peut être exercé soit avant la mise en recouvrement des impositions, notamment par voie de saisine des commissions administratives ou de l'interlocuteur départemental, soit après, par une réclamation contentieuse ou gracieuse.

A. LES ORGANES DE RÈGLEMENT DES LITIGES, INTERNES À L'ADMINISTRATION

Différentes commissions administratives paritaires ont été créées pour tenter de régler les différends qui peuvent voir le jour entre les contribuables et l'Administration, dans le cadre du pouvoir de redressement de cette dernière. Elles interviennent en amont de toute procédure contentieuse et donnent un avis sur les litiges. Les deux principales sont la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et la commission de conciliation.

1. La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires

Composée de représentants de l'Administration et des catégories socio-professionnelles, cette instance est bien connue des entreprises; elle est conduite à intervenir en matière de bénéfices professionnels réels ou forfaitaires, d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée.

Elle peut aussi intervenir, ce qui est moins connu, dans le cadre des examens contradictoires de l'ensemble de la situation fiscale lorsque le contribuable fait l'objet d'une taxation d'office en raison d'un défaut de réponse à une demande d'éclaircissements ou de justifications du service des impôts, ainsi que pour la fixation des valeurs cadastrales.

La commission départementale ne peut statuer que sur des litiges concernant des questions de fait, à l'exclusion de toute question de droit. Après étude de l'affaire, elle formule un avis, auquel l'Administration n'est pas tenue de se conformer. L'Administration supporte toutefois, d'une manière générale, la charge de la preuve en cas de réclamation ultérieure.

La composition de la commission et la simplicité de ses règles de fonctionnement facilitent le règlement amiable des litiges qui lui sont soumis. Elles incitent ainsi le contribuable à recourir aux services de cette instance de médiation de proximité.

2. La commission départementale de conciliation

Cette commission est compétente pour connaître des litiges relatifs aux droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière et d'impôt de solidarité sur la fortune.

Elle est régulièrement saisie de litiges nés à l'occasion de la notification d'insuffisance de prix ou d'évaluation de valeurs vénales et peut, dans certains cas, résoudre le différend.

Tout comme la commission départementale des impôts directs, cette instance rend un avis. Elle ne peut se prononcer que lorsque la procédure de redressement contradictoire n'est pas close et sur une question de fait. Elle peut également être saisie par le contribuable ou par l'Administration.

Son avis est notifié au redevable par l'Administration qui lui fait connaître, en même temps, le chiffre qu'elle se propose de retenir comme base d'imposition, étant entendu qu'elle n'est pas tenue de suivre cet avis. L'Administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission.

Ces différentes commissions, qui examinent chaque année de nombreux dossiers, permettent de résoudre rapidement bon nombre de litiges.

3. L'interlocuteur départemental

Depuis 1976, une autre structure a été mise en place en cas de vérification de comptabilité ou d'examen de situation fiscale d'ensemble. Il s'agit de l'interlocuteur départemental. Ce dernier est chargé de répondre aux contribuables souhaitant lui soumettre les conditions de déroulement ou les résultats du contrôle.

Le recours à l'interlocuteur départemental, supérieur hiérarchique du vérificateur, constitue une garantie accordée au contribuable vérifié.

Constituant en quelque sorte la première instance de conseil, il permet auxcontribuables peu familiarisés avec l'organisation administrative de connaître les différentes voies de recours qui leur sont offertes. Il peut être aussi saisi par le contribuable en cas de difficultés durant le contrôle.

Sa saisine intervient dans un contexte très ouvert, aussi bien lors du déroulement de la vérification qu'après la fin des opérations de contrôle.

Il prévient les litiges, puisqu'il a d'une part une fonction pédagogique d'explication de la conduite des opérations de vérification, et d'autre part, la possibilité de reconsidérer les impositions envisagées.

Mais le recours à l'interlocuteur départemental ne peut avoir pour effet l'abandon des opérations de contrôle. En revanche, aucune imposition supplémentaire ne peut être mise en recouvrement tant qu'il n'a pas été statué sur le recours.

Il apparaît donc intéressant, pour le contribuable vérifié, de connaître l'existence de l'interlocuteur départemental dont les conditions de saisine, souples et informelles se rapprochent, d'une certaine manière, des instances de médiation.

B. UNE SOUPLESSE DANS LES CONDITIONS DE L'ACTION DE MÉDIATION

Les différentes instances décrites ci-dessus interviennent donc en amont de l'action du Médiateur. De leur intervention peut naître un compromis qui éteindra le litige.

Il existe pourtant des domaines où cette médiation interne à l'Administration ne peut jouer. C'est notamment le cas des taxations d'office, ou lorsque le différend porte sur une question de droit, ou, plus simplement, si les contribuables n'ont pas demandé la saisine de ces instances. En ce cas, l'intervention du Médiateur pourra être envisagée.

1. Le libre choix des interlocuteurs

La présence au dossier de la demande de l'intéressé auprès de l'Administration et de la réponse qu'il a reçue contribuent à une meilleure appréciation du litige, particulièrement indispensable lorsque le requérant n'a pas, dans son exposé au Médiateur, explicité suffisamment l'objet de la contestation, le déroulement des faits, ni indiqué clairement le résultat qu'il souhaite obtenir.

Cela permet également, lorsque le Médiateur décide d'intervenir auprès de l'Administration, de mieux cerner l'interlocuteur compétent. En effet, le Médiateur peut décider de l'interlocuteur qu'il souhaite saisir, en fonction de la nature et de l'importance du litige qui lui est soumis, en sachant que les administrations financières comportent des structures homogènes et ont des compétences bien définies.

Dans la majorité des cas, l'intervention s'effectuera au niveau de l'autorité territoriale dont dépend le service à l'origine du litige :

- le directeur des services fiscaux pour ce qui concerne l'assiette des impôts directs, des droits d'enregistrement et de la taxe sur la valeur ajoutée;

- le trésorier-payeur général pour ce qui a trait au recouvrement des impôts directs;

- le directeur régional des douanes et droits indirects pour les réclamations en matière de douane et de contributions indirectes.

Souvent, cette intervention est suffisante pour résoudre favorablement le différend ou pour connaître les éléments qui fondent la position de l'Administration et en démontrent le bien-fondé.

Le Médiateur peut toutefois juger nécessaire de porter l'affaire à un niveau hiérarchique plus élevé. Il s'adressera alors au directeur général des impôts, au directeur de la comptabilité publique ou au directeur général des douanes, parfois même au ministre chargé du Budget ou au ministre de l'Économie et des Finances.

Il le fera notamment lorsqu'il s'agit d'un dossier complexe, ou lorsque le problème évoqué touche de nombreux contribuables ou une catégorie professionnelle particulière. De la même manière, si la demande nécessite une prise de position formelle de l'Administration sur l'application d'un point de droit, l'Administration centrale pourra être utilement saisie.

Enfin, lorsqu'une intervention au plan local s'est avérée vaine et si le Médiateur est convaincu que la réclamation du requérant est suffisamment fondée, il pourra la transmettre pour réexamen à un niveau hiérarchique supérieur.

Par ailleurs, en matière gracieuse, le pouvoir de prononcer des remises étant dévolu à des autorités différentes en fonction des montants contestés, le Médiateur sera conduit à saisir tantôt les autorités départementales, tantôt les services centraux.

L'action du Médiateur en matière fiscale est ainsi facilitée par la structure même des administrations financières et par leur pratique de la transaction évoquée plus haut.

2. L'évocation d'irrégularités relevées à l'examen des dossiers

Le Médiateur étudie avec attention les dossiers et essaie d'envisager toutes les solutions possibles au litige. Il peut ainsi arriver que son action, et donc son intervention, aillent au-delà de la demande initialement présentée par le requérant.

Le Médiateur peut être amené, au cours de l'instruction d'une réclamation, à découvrir une erreur commise au détriment de l'intéressé, non décelée jusqu'alors.

Son intervention ne portera alors pas forcément sur le point particulier du litige soulevé par le requérant. L'erreur décelée sera en tout état de cause évoquée, ce qui permettra d'obtenir la régularisation de la situation.

Ainsi, le Médiateur est intervenu auprès du comptable du Trésor pour faire régulariser la situation de Mme C... :

Celle-ci faisait l'objet de poursuites engagées par le comptable du Trésor pour recouvrer des impositions supplémentaires sur le revenu émises au titre des années 1981 à 1983 établies à la suite de redressements effectués par le service des impôts.

Mme C... contestait le bien-fondé de ces redressements et se plaignait de ne pas pouvoir payer les rappels.

Or, le bien-fondé des impositions ne pouvait être contesté au plan du droit.

Cependant, il est apparu à la lecture du dossier que les poursuites avaient été engagées très tardivement, ce qui laissait supposer que l'action du comptable public pouvait être prescrite. Le Médiateur est intervenu en ce sens auprès des services du Trésor.

L'Administration, après un examen approfondi de l'affaire, lui a fait connaître que les sommes pour lesquelles Mme C... était poursuivie en paiement étaient effectivement prescrites et que les poursuites étaient abandonnées.

L'action du Médiateur peut permettre à un contribuable de faire rétablir ses droits quand celui-ci, ignorant les textes applicables, est en fait victime d'une erreur de l'Administration.

M. V... avait transmis une requête au Médiateur visant à obtenir la modération, à titre gracieux, des intérêts moratoires très élevés mis à sa charge à l'issue du rejet de sa réclamation par le tribunal administratif. L'examen de son dossier a permis de relever une erreur dans le décompte des intérêts moratoires que lui avait adressé le comptable, qui s'était en fait trompé sur le point de départ de ces intérêts.

M. V..., ignorant la réglementation, ne pouvait bien entendu s'apercevoir de cette erreur, et seule l'intervention du Médiateur a permis la régularisation de cette situation et le remboursement d'environ 200 000 F.

L'examen approfondi des dossiers transmis permet donc au Médiateur de se déterminer sur la suite qu'il entend donner à l'affaire, en ayant le souci permanent de répondre au mieux aux aspirations des requérants de bonne foi.

IV. LES OBSTACLES À LA MÉDIATION FISCALE

A. LES DIFFICULTÉS RÉSULTANT DES PROCÉDURES ET DISPOSITIONS FISCALES

L'action du Médiateur se heurte cependant en matière fiscale à certaines contraintes dont il doit tenir compte.

Ainsi, quand une commission administrative a été saisie au cours d'une procédure d'imposition, et qu'elle a émis un avis motivé, cet avis, s'il est défavorable, peut compromettre un futur règlement amiable de la réclamation. Il peut en effet conforter l'Administration dans sa position et la rendre moins réceptive à une révision amiable du dossier.

En outre, les réclamations contentieuses sont encadrées dans des délais légaux qui, faute d'être respectés, entraînent le rejet des demandes pour irrecevabilité, laquelle est également opposable au Médiateur.

1. La prescription des délais de réclamation

À cet égard, les réclamations doivent parvenir, sauf exception :

- en matière d'impôts locaux et de taxes accessoires, au plus tard le 31 décembre de l'année suivant celle de la mise en recouvrement du rôle ou de la réalisation de l'évènement;

- en toute matière fiscale, au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant soit la mise en recouvrement du rôle, soit la notification de l'avis de mise en recouvrement, soit le versement spontané de l'impôt contesté, soit la réalisation de l'évènement qui motive la réclamation.

Lorsque le contribuable a fait l'objet d'une procédure de redressement, un délai spécial de réclamation lui est offert. Il est égal à celui dont l'Administration dispose elle-même pour établir l'impôt. Il expire, en règle générale, le 31 décembre de la troisième année suivant celle au cours de laquelle est intervenue la notification de redressement.

Les contribuables qui présentent une réclamation après l'expiration du délai légal sont forclos. Toutefois, l'Administration a la possibilité de prononcer d'office jusqu'au 31 décembre de la quatrième année suivant celle de l'expiration du délai de réclamation, le dégrèvement ou la restitution des impositions ou fractions d'impositions formant surtaxe.

Cette procédure s'inscrit dans le cadre de la juridiction gracieuse et ne constitue qu'une faculté offerte à l'Administration. Elle est régulièrement sollicitée par le Médiateur pour tenter de résoudre les litiges. Son action est cependant limitée au nombre d'années prévues par les textes et ne permet pas d'obtenir la totalité des dégrèvements réclamés dans un certain nombre de cas.

Mme L..., propriétaire d'un immeuble, a contesté en 1993 le bien-fondé des taxes foncières sur les propriétés bâties mises à sa charge depuis 1974. Elle a obtenu la modification partielle et la restitution d'une partie des cotisations au plan contentieux pour 1992 et 1993 et par voie de dégrèvement d'office pour 1988 à 1991.

Aucune mesure n'a pu lui être accordée pour les années antérieures.

2. La compétence liée

L'action de l'Administration trouve son fondement légal dans la réglementation qu'elle applique sous le contrôle du juge.

Dans un État de droit, le principe de " l'égalité des citoyens devant l'impôt " commande que les règles soient les mêmes pour tous les contribuables et, d'une manière générale, l'Administration est tenue d'appliquer la lettre des textes, en dehors des cas où la loi lui confère un pouvoir d'appréciation.

Dans cette situation, que le droit administratif qualifie de compétence liée, aucune liberté d'action n'est reconnue à l'Administration, et la marge d'intervention du Médiateur apparaît alors très étroite, voire inexistante.

Ainsi, en matière de remise gracieuse, l'article L 247 du livre des procédures fiscales précise qu'" aucune autorité publique ne peut accorder de remise totale ou partielle de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de taxes sur le chiffre d'affaires, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes et contributions ".

Il en est de même en matière de facturation de taxe sur la valeur ajoutée où, conformément à l'article 283-3 du code général des impôts, toute personne qui facture de la taxe sur la valeur ajoutée est redevable de cette taxe du seul fait de sa facturation.

Les conséquences fiscales peuvent alors apparaître très rigoureuses pour le contribuable, notamment en cas d'erreur de bonne foi, l'Administration ne pouvant rétablir la situation fiscale du réclamant telle qu'elle aurait dû être.

Tel est le cas de M. C..., entrepreneur en matériaux de récupération, qui a omis en toute bonne foi de renouveler, en 1992, son option pour le régime de l'assujettissement de son activité professionnelle à la taxe sur la valeur ajoutée.

Par voie de conséquence, les opérations commerciales réalisées par M. C... se sont trouvées exonérées, et la taxe qui avait grevé les achats correspondants n'était plus récupérable.

Or, M. C... a continué de facturer la taxe sur la valeur ajoutée à ses clients, et de déduire la taxe payée à ses fournisseurs, son intention manifeste étant de poursuivre son activité sous le régime de la taxe sur la valeur ajoutée.

Lors d'un contrôle, le service des impôts a remis en cause les déductions opérées indûment, sans pour autant lui restituer la taxe qu'il avait perçue de ses clients et qu'il avait reversée au Trésor.

Dans sa réponse à l'intervention du Médiateur, l'administration fiscale a précisé qu'elle était tenue par les dispositions de la réglementation, et qu'elle ne pouvait donc pas corriger les conséquences de l'erreur commise par M. C..., étant par ailleurs rappelé qu'aucune remise ne pouvait être légalement accordée en matière de taxe sur la valeur ajoutée.

B. LA MÉDIATION CONTRARIÉE PAR L'ACTION DES TIERS

Le rôle d'intercesseur que joue le Médiateur entre les contribuables et l'administration fiscale est parfois contrarié lorsque le litige est lié directement ou indirectement à l'action de tiers. Les réclamants demandent l'intervention du Médiateur pour tenter d'obtenir le règlement de leur différend selon leur désir mais, à l'examen du dossier, il apparaît qu'un tiers est à l'origine du litige.

Or, si l'Administration accepte volontiers de rectifier ses propres erreurs, elle se montre beaucoup plus réticente pour accorder, dans ces cas-là, une remise gracieuse. Elle invoque la possibilité dont dispose le requérant d'intenter une action contre le tiers mis en cause.

1. Cette situation se rencontre fréquemment en matière de droits de succession

Les héritiers ou légataires peuvent faire l'objet d'un redressement, assorti de majorations et de pénalités, pour avoir déposé la déclaration de succession tardivement ou d'une manière incomplète.

Ils invoquent généralement la responsabilité du notaire qu'ils avaient chargé du règlement de la succession, et donc de l'accomplissement des formalités qui y sont liées. En fait, au regard de la réglementation fiscale, seuls les héritiers et légataires sont tenus de souscrire une déclaration détaillée de succession. Ils ne peuvent donc se retrancher derrière une quelconque faute du notaire. La seule action possible du Médiateur consistera à solliciter la remise des pénalités, étant précisé que les intéressés peuvent toujours exercer une action en justice contre le notaire mis en cause.

Dans le même domaine, le code général des impôts prévoit expressément la solidarité des cohéritiers pour le paiement des droits de succession.

M. S... a été mis en cause plusieurs années après le décès de son père, en qualité de cohéritier solidaire, pour le paiement des droits de succession incombant à son frère, alors que lui-même avait déjà versé sa propre part.

Or, la procédure de recouvrement engagée par le service des impôts envers l'héritier défaillant avait duré plusieurs années avant qu'il ne soit déclaré insolvable. Les sommes alors réclamées à son frère, au nom de la solidarité légale, étaient de fait particulièrement élevées puisqu'elles comprenaient outre des droits en principal, égaux à ceux dont il s'était déjà lui-même acquitté, des intérêts de retard et des frais d'huissier.

M. S... s'estimait, à juste titre, particulièrement pénalisé.

Dans cette affaire, le Médiateur, qui ne pouvait bien entendu remettre en cause la solidarité fiscale prévue par la loi, a pu obtenir la remise gracieuse des pénalités appliquées, sous condition du paiement intégral des droits par le requérant, à charge pour lui de se retourner éventuellement contre le cohéritier défaillant.

2. Des litiges peuvent également naître entre le Trésor public et des contribuables lorsqu'un tiers est appelé en paiement de leurs impositions personnelles

Tel est le cas des salariés, qui font parfois l'objet d'avis à tiers détenteur émis auprès de leur employeur pour recouvrer leurs impositions personnelles impayées.

Il arrive que l'employeur opère effectivement une retenue sur leur salaire, comme la loi l'y oblige, mais qu'il conserve cette somme, au lieu de la reverser au Trésor, en lieu et place du salarié défaillant. Celui-ci se retrouve alors poursuivi de nouveau par le comptable public.

Il est dans ce cas très difficile de dénouer le litige car l'entreprise défaillante a bien souvent disparu, et le comptable public ne peut renoncer aux actes de poursuites sous peine de voir sa responsabilité personnelle engagée.

Lorsque la situation du requérant est particulièrement dramatique, une action gracieuse est tentée auprès de l'Administration. Cette dernière, qui n'est pas responsable du manquement d'autrui, n'est pas tenue d'accorder une remise gracieuse. Malgré tout, cette circonstance est généralement prise en compte par le service qui accepte, à la demande du Médiateur, de réduire la dette.

Il peut aussi arriver qu'un commerçant soit victime d'un détournement de fonds de la part de son comptable.

M. C..., artisan-menuisier, a versé pendant plusieurs mois des sommes à son comptable pour que ce dernier établisse ses déclarations d'impôt et d'URSSAF et paye les droits correspondants. Or, ces sommes ont été conservées par le comptable.

M. C... n'a eu connaissance du problème que lorsque l'Administration lui a demandé de régler plusieurs impositions qui s'étaient accumulées.

L'Administration ne pouvait prendre en compte le fait qu'il avait déjà payé les impôts en cause puisqu'elle n'avait pas perçu les sommes; elle a donc poursuivi l'intéressé pour recouvrer sa créance fiscale. M. C... a réussi à payer en partie les impôts sur le revenu qu'il devait et l'Administration lui a accordé la remise du surplus.

Il a cependant sollicité l'intervention du Médiateur pour ses dettes de taxe sur la valeur ajoutée dont le recouvrement était toujours en cours. Aucune remise de droits n'étant légalement possible, le Médiateur a demandé qu'une remise de pénalités lui soit accordée compte tenu des circonstances de l'affaire.

Consciente de la bonne foi du requérant et des efforts qu'il avait accomplis pour s'acquitter au mieux de sa dette, l'Administration a prononcé la remise totale des pénalités.

3. Les difficultés de médiation liées à l'action des tiers dans le cas de solidarité entre associés

Une société constituée entre trois associés, MM. M..., F... et B..., restait redevable de dettes importantes d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée. Dans le même temps, deux des trois associés avaient un compte courant débiteur dans la société.

Les trois associés ont donc convenu que MM. F... et B..., dont les comptes courants étaient débiteurs, apureraient en premier les dettes fiscales de l'entreprise.

M. F... n'a toutefois pas respecté ses engagements et M. M... a dû payer, au titre de la solidarité entre associés, la totalité de la dette fiscale sans pouvoir limiter sa contribution au montant convenu avec ses autres associés.

L'Administration lui a en effet précisé que les accords privés existant entre ex-associés ne lui étaient pas opposables, l'intéressé ne pouvant qu'essayer de récupérer les fonds auprès de l'associé défaillant par la voie d'une action civile.

C. LA PRÉSERVATION DES DROITS DES TIERS LIMITE LES POSSIBILITÉS DE MÉDIATION

Dans certains cas, les tentatives de médiation sont susceptibles de porter préjudice à un tiers, lorsque la situation fiscale ou patrimoniale de ce dernier est intimement liée à celle du réclamant.

1. Il en est ainsi des demandes en décharge de responsabilité, qui peuvent aboutir à transférer sur le tiers solidairement responsable la totalité des impositions dues par les codébiteurs

Légalement, le recouvrement des impositions communes établies au nom d'un couple peut être exercé indifféremment auprès de chacun des époux. Cette situation s'applique également lorsqu'une séparation des conjoints a été autorisée ou lorsqu'un divorce est intervenu.

Dans ce cas, chacun des époux garde la possibilité de demander à être déchargé du paiement des impôts communs, en arguant de ses difficultés personnelles ou pécuniaires. Si l'un des époux obtient la décharge de responsabilité, cela implique, en général, que le recouvrement est poursuivi auprès de l'autre conjoint. Cette procédure n'est donc neutre pour aucun d'entre eux.

Le Médiateur s'est ainsi trouvé confronté à une situation délicate.

Étant intervenu auprès du ministre du Budget pour demander une décharge de responsabilité en faveur de Mme N... , satisfaction a été donnée à l'intéressée. Mme N... a donc été déchargée de tout paiement, même celui relatif à sa part d'impôt sur le revenu correspondant aux salaires qu'elle avait perçus.

Toutefois, les poursuites ont été engagées auprès de son ex-conjoint. Ce dernier est alors intervenu auprès du Médiateur pour solliciter, lui aussi, une décharge de responsabilité.

La nouvelle intervention s'est soldée par un échec et l'intéressé a dès lors été contraint de payer la totalité des impositions communes.

2. La médiation se révèle également très difficile à mettre en úuvre dans des litiges portant sur des problèmes cadastraux

Le service du cadastre est chargé du recensement de toutes les propriétés foncières, de la recherche de leurs propriétaires apparents ou réels, de la reconnaissance et de la définition des limites cadastrales de ces propriétés, de leur description et de leur évaluation.

Les contestations qui naissent contre l'action de ce service font généralement grief à des tiers. En outre, ces différends apparaissent souvent indissociables de litiges privés, voire de " querelles de clocher ".

La solution qui pourrait être retenue par l'administration fiscale à la suite de l'intervention du Médiateur risquerait donc de remettre en cause le droit de propriété des personnes extérieures au litige.

Dans de telles situations, le Médiateur s'interdit d'intervenir pour éviter que son action en faveur d'une personne ne porte préjudice aux tiers.

V. LA MÉDIATION FISCALE AU QUOTIDIEN

A. L'INFLUENCE DU MÉDIATEUR RÉSULTE AVANT TOUT DE SON INDÉPENDANCE ET DE SA PRATIQUE DE LA MÉDIATION

Dans son action quotidienne, le Médiateur n'est que très rarement conduit à constater des excès ou de grossières erreurs qu'auraient pu commettre les administrations financières. Peut-être est-ce dû au fait que les litiges fiscaux de cet ordre, lorsqu'ils apparaissent, se trouvent plus fréquemment déférés devant les tribunaux. Mais si le Médiateur est saisi de tels cas, l'Administration corrige sans difficultés l'irrégularité relevée.

Bien souvent, l'examen des réclamations laisse apparaître que le litige fiscal ne porte pas sur une question de droit ou sur un mauvais fonctionnement de l'Administration, mais plutôt sur les effets que comporte, pour les contribuables, l'application des règles de droit.

Le Médiateur est ainsi conduit à user largement de moyens de persuasion dans sa fonction de conciliation. Il n'intervient alors qu'au plan gracieux ou à celui de l'équité pour tenter de trouver un accord amiable tenant compte de la situation particulière dans laquelle se trouve le requérant.

Dans ces conditions, le Médiateur asseoit en fait la crédibilité de son action quotidienne moins sur les pouvoirs légaux dont il dispose que sur son autorité morale, servie par son indépendance et par la doctrine qu'il s'est forgée.

1. Une indépendance confirmée

Le pouvoir d'influence du Médiateur est grandement lié à la distance qu'il sait garder tant à l'égard des différentes parties prenantes dans les litiges fiscaux qu'envers les institutions politiques.

a. À l'égard des institutions politiques

Bien que nommé par décret en conseil des ministres et saisi des réclamations par l'intermédiaire des parlementaires, le Médiateur reste, ainsi que le prévoit l'article 1er de la loi du 3 janvier 1973 modifiée, une autorité indépendante qui ne reçoit d'instruction d'aucune autorité pour l'accomplissement de sa mission.

Il est par ailleurs inamovible pendant toute la durée de son mandat de 6 ans, sauf cas d'empêchement dûment constaté, ce qui exclut toute possibilité de révocation pour des motifs d'opportunité politique.

Cette protection légale lui permet de prévenir toute tentative d'interférence politique dans le traitement des dossiers, ce qui contribue à renforcer son autorité morale tant vis-à-vis des contribuables que des administrations financières.

b. À l'égard des réclamants

Libre d'apprécier si la réclamation présente un caractère justifié ou non, le Médiateur n'est pas tenu d'intervenir. Il n'a donc pas de compte à rendre aux réclamants qui l'ont saisi même si, dans la pratique, il consacre une partie de son activité à expliquer les raisons pour lesquelles il n'a pas estimé pouvoir intervenir ou pourquoi il n'a pu obtenir satisfaction.

La gratuité du recours au Médiateur accroît à la fois son indépendance à l'égard des requérants et la crédibilité de ses interventions aux yeux des administrations financières dans la mesure où il apparaît financièrement désintéressé.

Dans tous les cas enfin, le Médiateur ne se contente pas de transmettre les demandes des requérants telles que ces derniers ont pu les exprimer, mais formule les propositions qui lui paraissent de nature à favoriser un règlement amiable.

c. À l'égard des administrations financières

Il est tout aussi indispensable que le Médiateur n'apparaisse pas comme une simple émanation de l'Administration, se contentant de retransmettre, en la confirmant, la position prise initialement par celle-ci.

L'interdiction faite à toute autorité d'adresser des instructions au Médiateur dans l'exercice de ses fonctions s'applique également aux services financiers.

Aussi, même s'il ne dispose pas du pouvoir d'imposer une solution à l'Administration, le Médiateur n'est pas tenu par les appréciations que celle-ci peut porter sur le litige lui-même ou sur l'opportunité de la médiation entreprise.

2. Une pratique de la médiation sachant concilier conviction et pragmatisme

Le Médiateur fonde en général son action sur la conviction que les aspects humains ou financiers propres à chacune des affaires n'ont pas été suffisamment pris en compte par les administrations financières.

Tel n'est pas le cas, bien évidemment, lorsque le litige porte sur un dysfonctionnement des services, qui justifie une intervention sans tenir compte de la situation particulière du requérant.

De nombreuses réclamations font ainsi apparaître tantôt des difficultés financières, de plus en plus souvent liées au chômage, tantôt des situations de marginalisation sociale ou bien encore des drames familiaux, qui placent les requérants en situation d'insolvabilité momentanée ou prolongée, aggravée par les majorations de retard et les frais de poursuites.

D'autres cas révèlent des situations inéquitables. Soit la loi fiscale n'a pas prévu les conséquences particulières supportées par le requérant, soit elle a fait l'objet d'une stricte application, sans considération des objectifs poursuivis.

Lorsqu'il est lui-même convaincu du caractère inéquitable ou particulièrement pénalisant des impositions et/ou pénalités mises à la charge des requérants, le Médiateur cherche à faire partager sa conviction à l'Administration concernée qu'il est souhaitable et possible de trouver une solution adaptée au cas particulier qui lui est transmis.

Dans un domaine où les qualités relationnelles et le sens de la persuasion s'ajoutent à la légitimité de la cause que l'on défend, l'efficacité et la crédibilité du Médiateur dépendent beaucoup de son aptitude à présenter des dossiers plaidables.

B. DES RÉSULTATS PROBANTS

L'action du Médiateur repose essentiellement sur sa capacité à persuader ses interlocuteurs lorsqu'il intervient pour proposer des solutions amiables individuelles ou des réformes de portée générale.

Son efficacité est donc, par nature, forcément aléatoire et pas toujours quantifiable.

L'analyse statistique de l'action conduite par le Médiateur entre 1991 et 1995 permet cependant de dégager des tendances qui confirment l'autorité morale dont il jouit auprès des administrations financières.

1. Dans le cadre des réclamations individuelles reçues au siège de l'institution, à Paris, le Médiateur intervient ainsi 420 fois en moyenne chaque année auprès des administrations financières, sur les 600 dossiers considérés comme recevables, soit un taux d'intervention de 70 % environ

Ces interventions ne donnent pas toutes lieu à des propositions de solution amiable, le Médiateur se limitant, dans certains cas, à demander des explications avant d'envisager une médiation, pour parfaire son information et celle des requérants. Sur ces 420 interventions annuelles, 340 font en fait l'objet de tentatives de médiation, à l'aune desquelles s'apprécie le taux de réussite dans les statistiques publiées chaque année par le Médiateur.

Sur les 340 dossiers pour lesquels le Médiateur a formulé des propositions de solution amiable (remise totale ou partielle de droits et/ou de pénalités, délais de paiement, remise de majorations de retard, suspension provisoire des poursuites, etc.), 84 % d'entre-eux, soit 284 dossiers, reçoivent de la part des administrations financières une réponse partiellement ou entièrement favorable.

Il convient de noter que ce taux de réussite de 84 % est relativement constant sur la période 1991-1995 et tend même à augmenter (plus de 87 % en 1995).

Étant observé l'évolution du taux de réclamations non justifiées (38 % en moyenne, en augmentation constante sur la période 1991-1995), le niveau élevé du taux de médiations réussies illustre la crédibilité dont dispose le Médiateur.

2. En matière de propositions de réforme, 5 ou 6 par an en moyenne sur la période 1991-1995, l'action du Médiateur apparaît tout aussi significative, d'autant que l'Administration se montre réceptive aux suggestions de réforme de la réglementation fiscale

Les propositions de réforme acceptées permettent, en effet, de mettre fin aux litiges en cours devant l'Administration et préviennent, pour l'avenir, toute nouvelle contestation.

Tel est précisément le cas d'une proposition de réforme formulée par le Médiateur de la République en matière d'impôt sur le revenu dans le domaine de l'investissement locatif.

Cette proposition a permis d'éviter la remise en cause systématique et définitive de la réduction d'impôt pour de simples raisons de forme tenant à l'absence de mention devant figurer sur les pièces justificatives ou à leur présentation hors délai. La suppression de l'avantage fiscal était en effet ressentie comme inéquitable dans la mesure où toutes les conditions de fond étaient par ailleurs réunies.

Parmi les propositions de réforme en matière fiscale inscrites à l'ordre du jour des réunions interministérielles où sont régulièrement étudiées les suggestions du Médiateur, il convient de citer :

- la suppression, dans la forme où il est actuellement mis en úuvre, du privilège spécial du Trésor prévu à l'article 1920-2 du code général des impôts;

- l'aménagement de la réglementation afin d'assurer une meilleure cohérence entre les valeurs d'assiette retenues par l'Administration pour le calcul des droits de mutation à titre gratuit et de l'impôt sur les plus-values.

Ces modifications des textes sont bien sûr d'une grande portée.

Elles font l'objet d'examens particulièrement attentifs et approfondis par les administrations financières, ce qui montre bien avec quel intérêt, dans le domaine fiscal, les pouvoirs publics considèrent la mission du Médiateur de la République en matière de réformes.

Alors qu'aucun aspect de la fiscalité n'échappe aux réclamations reçues par le Médiateur, peu de questions reviennent de façon véritablement répétitive.

Les propositions de réforme fiscale ne s'appuient donc pas seulement sur la constatation de dysfonctionnements de l'Administration ou de failles dans la réglementation - au demeurant de qualité - mais également sur l'équité et sur le souci d'une meilleure information du contribuable.

Il est d'ailleurs intéressant de noter le bon accueil réservé à ces demandes par l'Administration, la notion d'équité étant assez nouvelle en droit français, et l'information administrative apparaissant encore souvent insuffisante.

- Le Médiateur a ainsi attiré l'attention du ministre du Budget sur la situation des agriculteurs qui, partant en retraite, devenaient redevables de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les bâtiments agricoles qui ne trouvaient pas preneur, l'exonération de cette taxe concernant les bâtiments en exploitation (article 1382 du code général des impôts).

Cette réglementation fiscale, fondée sur une logique économique, aboutissait à assujettir les agriculteurs âgés à une imposition nouvelle au moment où leurs ressources diminuaient très sensiblement, ce qui était inéquitable.

À la demande du Médiateur, les dispositions de l'article 1382 du code général des impôts, précisant les conditions d'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties applicables aux bâtiments agricoles, ont été modifiées comme suit : " l'exonération est toutefois maintenue lorsque ces bâtiments ne servent plus à une exploitation rurale et ne sont pas affectés à un autre usage " (article 71 de la loi de finances rectificative pour 1993 - Journal officiel - 5 janvier 1993, p. 187).

- Dans un autre domaine, il est apparu que la réglementation douanière ne permettait pas la proratisation du droit annuel de francisation et de navigation lorsque le navire affecté à la plaisance ou au sport en cours d'année avait déjà été francisé dans une autre catégorie.

En revanche, les bateaux de plaisance francisés pour la première fois en cours d'année bénéficiaient de la règle du prorata temporis.

Le Médiateur, saisi d'une réclamation sur ce point, a estimé inéquitable cette différence de régime fiscal entre les propriétaires de navires.

Il a donc demandé l'extension de la règle du prorata temporis pour les navires dont l'affectation à la plaisance ou au sport intervient en cours d'année.

Le ministre du Budget a répondu favorablement à cette proposition de réforme des textes douaniers.

- L'amélioration de l'information des contribuables constitue enfin le domaine où le pouvoir de proposition du Médiateur rencontre le plus de succès.

Nombre de nos concitoyens ignorent leurs droits. Le Médiateur a constaté que les litiges trouvaient fréquemment leur origine dans la méconnaissance de l'existence des avantages fiscaux et sociaux que la législation prévoit en faveur des personnes à revenus modestes.

Afin de contribuer à la prévention de cet important contentieux, il a proposé au ministre du Budget la mise en úuvre d'un ensemble de mesures destinées à assurer une meilleure information sur les droits fiscaux et sociaux attachés à la situation de non-imposition sur le revenu.

À la suite de ces propositions, acceptées par le ministre, la présentation de l'avis de non-imposition - qui concerne environ un foyer fiscal sur deux - a été modifiée de manière à mettre en évidence les avantages fiscaux et sociaux accordés aux personnes non imposables sur le revenu.

Par ailleurs, l'administration fiscale, en association avec le ministère des Affaires sociales, a réalisé un document d'information, sous la forme d'un dépliant de seize pages, énumérant les divers avantages résultant de la non-imposition.

Édité à 800 000 exemplaires depuis l'année 1994, sa diffusion est assurée par l'ensemble des services du ministère du Budget, les mairies et les services sociaux.

La médiation fiscale n'est pas créatrice de droits pour le contribuable et ne vaut que pour le dossier de réclamation sur lequel elle a porté.

Elle ne propose qu'une solution amiable : c'est là que résident sa force et son intérêt.

Cette approche nouvelle de règlement des litiges fiscaux apparaît ainsi remarquable, d'autant qu'elle s'exprime dans un ordonnancement juridique plusieurs fois séculaire et indissociable du pouvoir régalien de l'État.



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