LES CAS SIGINIFICATIFS DE LA CINQUIEME PARTIE

UNE VIGNETTE CHASSE L'AUTRE

Services fiscaux - Vignette automobile
Réclamation n° 90-2712, transmise par M. Roger Castaing, sénateur du Gers.

 

Le sentiment d'injustice ressenti par un usager du service public ne dépend pas toujours des conséquences de la mesure dont il se plaint.

Le rôle du Médiateur de la République est d'intervenir pour éviter qu'un litige à l'enjeu financier modeste ne donne une image de rigueur excessive à l'administration.

M. L... a été interpellé par les gendarmes qui lui ont dressé procès-verbal pour "apposition non réglementaire de la vignette fiscale". En effet, l'article 155-H du Code général des impôts prévoit que cette pièce doit être apposée dans le coin inférieur droit du pare-brise.

L'intéressé avait eu le tort de ne pas retirer de son pare-brise plusieurs vignettes périmées pour que le timbre en cours de validité puisse trouver place à l'endroit prescrit. Négligence coûteuse, puisque M. L... s'était vu infliger une amende d'un montant égal au double du prix de la vignette.

Le prix de la sanction, parfaitement légale, n'était pas négligeable, mais il est surtout apparu au Médiateur de la République que cette sanction prévue par les règlements était disproportionnée par rapport à la gravité de l'infraction commise. L'administration en avait d'ailleurs eu conscience puisque, dans une instruction en date du 25 février 1975, elle avait précisé que l'apposition du timbre à un autre emplacement du pare-brise ne devait pas être considérée comme une infraction fiscale. De plus, par une autre note en date du 1er mai 1985 elle avait invité ses agents a faire preuve de bienveillance.

C'est en s'appuyant sur ces considérations que le Médiateur de la République a obtenu des services fiscaux la remise totale de la pénalité encourue.

UNE DECISION EXEMPLAIRE A L'ACTIF DU MINISTERE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET

Rachat d entreprise par les salariés - Fonds commun de placement
Réclamation n° 91-0585, transmise par Mme Christine Boutin, député des Yvelines.

 

Mme D..., secrétaire de direction, a été invitée à participer, comme tous ses collègues, à une opération de rachat de leur entreprise. Elle acquiert une part représentée par 100 actions de 100 F. Afin de regrouper les petits actionnaires, un fonds commun de placement (F.C.P.), alimenté par un plan d'épargne d'entreprise (P.E.E.) a été constitué.

Ce dispositif a été conçu à la fois pour simplifier la gestion et permettre aux actionnaires minoritaires, désireux de revendre leurs titres, de le faire dans des conditions équivalentes à celles offertes aux actionnaires principaux, c'est-à-dire aux cadres.

Deux années plus tard, un groupe étranger se porte acquéreur de l'entreprise rachetée par ses salariés. Une plus-value en est résultée sur la valeur nominale des titres détenus par les salariés actionnaires. Mais tous ne pouvaient pas en profiter.

Seuls, en effet, les salariés dont la participation n'est pas passée par l'intermédiaire du P.E.E./F.C.P. ont pu céder immédiatement leurs titres et percevoir la plus-value. Les autres devaient attendre cinq ans, échéance fixée par la loi en matière de plan d'épargne et de fonds communs de placement, pour disposer de leurs apports et céder leurs titres.

Devant cet obstacle posé par la loi, les personnes concernées en appellent à l'aide du Médiateur de la République.

Cédée au groupe étranger, l'entreprise continuera cependant à fonctionner avec les mêmes salariés. La disparité de traitement consécutive à cette opération est de nature à susciter un conflit. On peut par ailleurs craindre que le salarié pénalisé ne soit tenté de démissionner de l'entreprise pour bénéficier d'un cas légal de déblocage anticipé.

Sur le terrain de l'équité, le Médiateur de la République plaide auprès du ministre de l'économie, des finances et du budget, la situation de Mme D...

Averti déjà de ces faits, le ministre, moins d'un mois après l'intervention du Médiateur de la République, consent à titre tout à fait exceptionnel, de débloquer les avoirs de Mme D... et de ses collègues dans la même situation, provenant de leurs versements propres. La plus-value réalisée est d'autre part exonérée d'impôt, dans la limite de 150.000 F.

Cette issue logique confirme les excellentes dispositions du ministre d'Etat, Ministre de l'économie, des finances et du budget à partager avec le Médiateur de la République le sens de l'équité.

LES ADMINISTRATEURS SOUHAITENT AVOIR UN COMPORTEMENT EQUITABLE

Pénalités fiscales - Dégrèvement
Réclamation n° 90-0307, transmise par M. Jean Bousquet, député du Gard.

 

M. L..., agriculteur, connaît d'importantes difficultés pour assurer l'équilibre financier de son exploitation. Il obtient successivement des prêts à ce titre. Mais des difficultés pressantes d'ordre privé le contraignent à effectuer sur ces prêts des prélèvements, sans en faire ressortir les incidences fiscales dans la déclaration de son revenu imposable.

A l'occasion d'un contrôle fiscal, un redressement d'imposition de 71.632 F est infligé à M. L... au titre de l'impôt sur le revenu, tant pour les droits en principal que pour les pénalités.

Ce redressement est parfaitement légal, mais ses conséquences sont catastrophiques pour M. L...

Appelé à son aide, le Médiateur de la République a fait valoir que la situation désastreuse de M. L... était due à un concours de faits indépendants de sa volonté. En particulier, la longueur excessive des délais, près de quatorze années, mise pour reclasser la production de son exploitation dans une catégorie méritée plus rémunératrice.

Pendant ce temps M. L... ne pouvant trouver, pour son exploitation, d'acheteur qui pût lui offrir un prix à la mesure de la valeur de son bien, dût continuer à emprunter et à aggraver ses dettes jusqu'à la dégradation de sa vie privée

Le directeur des services fiscaux a montré beaucoup de compréhension en s'appliquant à tirer du dispositif réglementaire régissant les cas de l'espèce des possibilités d'atténuation des difficultés de M. L... N'ayant pas le pouvoir de prononcer la remise gracieuse du principal des impositions, il a pu accorder à M. L... des dégrèvements atteignant le montant du redressement.

C'est, indéniablement, la preuve d'une bonne prise en compte de la situation difficultueuse d'un contribuable.

UN EXEMPLE DE PREVENTION DU CONTENTIEUX

Contrôle économique - Irrégularités
Réclamation n° 90-1371, transmise par M. Louis Brives, sénateur d Tarn.

 

A la suite de vérifications de la comptabilité de son activité professionnelle, M. G... s'est vu notifier des redressements d'impôt sur le revenu et de taxes sur le chiffre d'affaires.

M. G... a protesté auprès de l'administration fiscale contre le conditions dans lesquelles les contrôles ont été effectués et a demandé l'annulation des impositions et des pénalités qui lui étaient infligées.

N'ayant pas obtenu satisfaction, M. G... a saisi le tribunal administratif, puis successivement la Cour administrative d'appel; parallèlement, il a demandé l'intervention du Médiateur de la République.

Dans des affaires de ce genre, relevant d'une réglementation très stricte, il est rare que l'administration fiscale se trompe. Cependant, au vu des informations recueillies dans le dossier présenté par M. G... un doute est apparu sur la régularité des opérations effectuées.

En conséquence, d'une part un rapport circonstancié fut demande au directeur général des impôts sur cette affaire et, d'autre part, 1e directeur général fut prié d'étudier la solution au plan gracieux, en raison des difficultés éprouvées par M. G... à s'acquitter de ses dettes

Après une enquête diligentée par ses services, le directeur général des impôts a invité le directeur des services fiscaux concerné à prononcer le dégrèvement des impositions litigieuses. Il a par ailleurs adressé à la cour administrative d'appel des conclusions de non-lieu statuer.

Dans cette affaire, l'administration n'a pas hésité à reconnaître les torts qui lui ont été reprochés sur la forme dans laquelle la vérification avait été conduite, non sur le fond de ses constatations, et à faire amende honorable élégamment.

CONCOURS DE CIRCONSTANCES OU HARCELEMENT FISCAL ?

Services fiscaux - Communication interne
Réclamation n° 89-2345 transmise par M. Serge Franchis, député de l'Yonne

 

A la suite d'erreurs successives commises par le centre des impôts et la trésorerie principale dont relevait son domicile fiscal, M. L... a connu, entre 1985 et 1987, les affres du harcèlement fiscal.

Bien qu'ayant signifié, à qui de droit, son changement de domicile, ou acquitté une imposition non due, ou obtenu la reconnaissance de sa bonne foi et le rétablissement de droits un moment omis, faute de coordination entre les services, M. L... demeurait toujours un redevable impénitent aux yeux du percepteur.

Les voies de recours à tiers détenteur de la saisie-arrêt aboutirent chez son employeur. Bien qu'il se fût acquitté de tout ce qui lui était réclamé, il n'obtiendra la mainlevée des oppositions que plusieurs années après.

L'intéressé, au milieu de ces turbulences, perd son emploi dans des circonstances qui ne seraient pas dépourvues de liens avec ces incidents.

L'intervention soutenue du Médiateur ayant réussi auprès du ministre du budget, il faudra cependant plusieurs mois, du fait encore d'erreurs successives, avant que la situation de M. L... soit effectivement régularisée.

En compensation, des intérêts seront versés à M. L... Une telle cascade d'incidents est certes exceptionnelle. Elle démontre cependant qu'une grande vigilance s'impose toujours pour vérifier le bon fonctionnement des circuits de communication interne, même dans une administration aussi exemplaire que celle des services fiscaux.

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LA BONNE FOI PRISE EN COMPTE

Pension de réversion
Réclamation n° 90-1507, transmise par M. Lucien Neuwirth, sénateur de la Loire.

 

Mme B... sollicitait du directeur général de la Caisse des dépôts et consignations la remise gracieuse d'une somme proche de 150.000 F qu'elle avait perçue à tort au titre d'une pension de réversion.

Cette somme provient de ce que, au décès de son premier mari, M. P..., survenu en 1971, son épouse, la réclamante, a obtenu une pension de réversion versée par la caisse des dépôts et consignations. Lorsque, le 4 juillet 1981, elle se remarie avec M. B..., elle signale alors à la caisse des dépôts et consignations son changement de situation matrimoniale. Le 28 mars 1990, elle était informée qu'à compter de la date de son remariage, elle ne pouvait plus prétendre à la pension de réversion de son ancien mari et qu'en conséquence, le trop-versé de 150.000 F devait être remboursé.

S'estimant de bonne foi et considérant que la situation dans laquelle elle se trouvait placée avait pour origine un mauvais fonctionnement de la caisse des dépôts et consignations, Mme B... a sollicité l'aide du Médiateur de la République pour obtenir soit la remise gracieuse de la somme qui lui était réclamée, soit l'échelonnement de la dette mise à sa charge.

A la suite des démarches effectuées, le directeur de la caisse des dépôts et consignations a accepté de prendre en considération la bonne foi de Mme B... et de reconnaître qu'un dysfonctionnement de son service était à l'origine de la prise en compte tardive du remariage de Mme B... Il a décidé qu'en conséquence, la somme qui avait été versée à tort à Mme B... ne serait pas réclamée.

LES AVIS DES INSTANCES PRECONTENTIEUSES DOIVENT ETRE PRIS AU SERIEUX

Contrôle fiscal - Commission départementale des impôts
Réclamation n° 90-2799, transmise par M. Bernard Charles, député du Lot.

 

Mme D..., commerçante à S... (Lot), a fait l'objet d'un contrôle fiscal qui s'est traduit par un important redressement en matière de T.V.A. et d'impôt sur le revenu.

N'ayant pu convaincre le centre des impôts, elle saisit la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Dans son avis émis le 29 janvier 1990, la commission donne largement satisfaction à la requérante.

Or, dans sa notification en date du 3 avril 1990, l'administration fiscale a maintenu strictement sa décision initiale de redressement, sans expliquer pourquoi elle s'écartait de l'avis de la commission.

Devant ce refus. Mme D... sollicite l'intervention du Médiateur de la République.

Dans cette affaire encore, l'administration fiscale avait fait une application stricte de la loi qui n'eût probablement pas été censurée par le juge de l'impôt. Néanmoins, la position qu'elle a adoptée postérieurement à l'avis émis par la commission départementale des impôts était critiquable.

Ayant été partie dans une procédure contradictoire devant cette commission, l'administration fiscale aurait dû, en effet, dans sa décision, exposer les motifs pour lesquels elle estimait devoir écarter les raisons de la commission.

Comme elle s'était bornée à maintenir strictement l'imposition initiale, elle se trouvait placée dans une situation où, dans l'éventualité d'un contentieux, elle aurait à supporter la charge de la preuve, alors qu'elle n'avait pas été en mesure de convaincre la commission.

Ces observations ont permis à la direction départementale des services fiscaux, après un nouvel examen de la situation de Mme D.... de procéder à une nouvelle liquidation des impositions litigieuses conformément à l'avis de la commission auquel, de son côté, Mme D... avait adhéré.

Cette affaire montre que les administrations peuvent être tentées de s'affranchir, sans motif réel et sérieux, des avis des instances précontentieuses dont le rôle est précisément d'éviter le recours au juge. Une circulaire récente du Premier ministre a pourtant invité les administrations à éviter autant que possible les actions contentieuses.

IL Y A TOUJOURS UNE PORTE OUVERTE A LA COMPREHENSION

Revenus imposables - Etalement des revenus dans le temps
Réclamation n° 90-2765, transmise par M. Rudy Salles, député des Alpes- Maritimes.

 

M. S..., agent commercial, a été chargé par l'entreprise N... d'une mission en Arabie Saoudite, de 1975 à 1977. Il n'a perçu la totalité de ses honoraires qu'en 1984, à la suite d'un règlement transactionnel ordonné par voie judiciaire.

Lors de la déclaration de ses revenus de 1984, il demande au service des impôts de dissocier ses honoraires de la période 1975 à 1977 du reste de ses revenus et d'en autoriser, pour le calcul de l'impôt, l'étalement sur les périodes d'activité qu'ils rémunèrent. Or, bien que la réglementation fiscale prescrive cette possibilité, le service compétent refuse de lui donner satisfaction au motif que ces revenus, ayant pour origine le règlement transactionnel intervenu en 1984, doivent être déclarés au titre de cette année

Il en est résulté, pour M. S..., l'interdiction de décompter les dépenses exécutées entre 1975 et 1977, liées aux activités que ces honoraires rémunèrent. D'autre part, leur addition aux revenus de son activité exercée en 1984 aboutit à une imposition très lourde.

Devant ces difficultés, M. S... sollicite l'aide du Médiateur de la République.

L'examen du dossier fait apparaître que l'appréciation de la situation de M. S... par le service fiscal est manifestement erronée. Tant en ce qui concerne l'étalement des honoraires perçus sur les années auxquelles ils se rapportent, qu'en ce qui concerne la déductibilité des dépenses liées aux activités auxquelles correspondent ces honoraires, la lecture des dispositions du Code général des impôts ne laisse aucun doute. Le refus opposé à M. S... est juridiquement illégal.

A ces considérations s'ajoute le fait qu'en 1984, l'intéressé étant placé dans le cadre d'une nouvelle activité relevant fiscalement de la catégorie des bénéfices non commerciaux, se trouve, en raison de l'encaissement de ces honoraires, placé dans un régime fiscal moins favorable, alors qu'aucun lien n'existe entre les deux types d'activité et de ressources.

Cette analyse de la situation de M. S... a été entendue par le service du contentieux de la direction générale des impôts. Des instructions ont en conséquence été données pour prononcer, en faveur de l'intéressé, les dégrèvements qui s'imposent.

UNE ATTITUDE EXEMPLAIRE DE L'ADMINISTRATION FISCALE

Association 1901 - Régime d'imposition - Fraudes
Réclamation n° 90-2325, transmise par M. Michel Dreyfus-Schmidt, sénateur du Territoire de Belfort.

 

Mlle M..., kinésithérapeute, a mis au point une méthode de traitement qui porte son nom. Devant les résultats obtenus dans 1'application de cette méthode et l'intérêt manifesté dans le monde médical pour son développement et sa diffusion, elle conclut en 1974 avec un de ses confrères, M. S..., un contrat de société en participation ayant pour objet l'enseignement de sa méthode.

L'année suivante est créée une association loi 1901 dont l'objet est de collecter l'épargne formation dans la profession pour dispenser aux professionnels l'enseignement de la méthode de Mlle M... La composition du bureau comprend, avec Mlle M...., présidente, son associé M. S.... vice-président, et un trésorier.

Accaparée par son activité d'enseignement, de conférences, d'écrits et de stages, Mlle M... n'a jamais eu le temps de participer à la gestion des deux organismes. Son associé, qui l'y supplée, ne s'en est jamais préoccupé non plus. Leurs rapports se sont détériorés en 1979 lorsqu'elle a assigné M. S... en justice pour contrefaçon littéraire. Le tribunal lui donnera raison.

A ce fait, s'en ajouteront d'autres qui écarteront irrémédiablement Mlle M..., la présidente en titre, de toute fonction dirigeante. M. S... devient le seul gestionnaire de l'enseignement de la méthode inventée

L'association loi 1901 prend peu à peu le relais de l'activité de la société en participation, en s'écartant de son objet statutaire limité au domaine de la formation continue , qui bénéficie d'un régime favorable d'imposition.

Ces faits conduiront les services fiscaux, lors d'une vérification de comptabilité, à considérer que l'association sert désormais d'écran aux activités lucratives de la société en participation, pour bénéficier indûment d'un régime fiscal allégé et masquer le partage des bénéfices entre les codirigeants. Il en est résulté un redressement fiscal atteignant la somme de 2.500.000 F.

Pour les services fiscaux qui s'en sont tenus aux statuts d'origine des deux organismes, c'est Mlle M.... présidente statutaire de la société en participation, qui est appelée à en répondre. Il faut signaler que l'action judiciaire engagée par elle en 1980 pour rompre le contrat d'association dans la société en participation et mettre fin ou prévenir les manúuvres de son associé n'était pas, à l'époque, encore jugée.

Lorsque l'intervention du Médiateur de la République a été sollicitée, Mlle M..., alors en état de santé difficile ayant entraîné une longue hospitalisation, était sur le point d'être dépossédée de l'ensemble de ses revenus et de ses biens. Les procédures correspondantes étaient déjà engagées. Et il ne pouvait pas en être autrement car, en l'espèce, l'administration a compétence liée. Il ne pouvait être invoqué que des arguments d'équité.

Tout d'abord, rappeler les faits:

- les manúuvres exercées contre l'intéressée la mettant, comme en attestent les procès-verbaux d'huissiers et l'expertise du tribunal de grande instance d'Auch, dans l'impossibilité d'avoir accès au siège des deux organismes et aux documents comptables;

- les démarches en cours tendant à obtenir du tribunal précité la désignation d'un séquestre, puis d'un administrateur judiciaire pour arrêter la dérive statutaire des organismes;

- la consignation des sommes que lui versait l'association.

Le Médiateur de la République demande à l'administration, au regard de ces éléments, de suspendre l'action en recouvrement forcé puis de reconsidérer l'affaire en équité. Satisfaction lui sera donnée. Le 27 décembre 1990, Mlle M... obtient la remise totale de l'ensemble de impositions mises à sa charge pour le compte de 1'association.

Cette issue, totalement favorable, est d'autant plus exemplaire du bon accueil réservé par le ministère de l'économie, des finances et du budget aux demandes du Médiateur de la République que les circonstances propres de l'affaire étaient complexes.

Dans une lettre adressée au directeur général des impôts, le Médiateur de la République exprime sa grande satisfaction.

UN MINISTRE SENSIBLE AU MALHEUR DU CITOYEN

Formalités fiscales - Détournement
Réclamation n° 90-2433, transmise par M. Jean åhier, député du Bas- Rhin.

 

M. L..., ancien employé de la S.N.C.F., désireux de créer une entreprise, décide d'acquérir en indivision avec un de ses collègues, le nom commercial et la clientèle d'une discothèque. En sa qualité de gérant, il confie à son associé la gestion administrative du fonds.

Peu de temps après, M. L... s'aperçoit que son associé ne remplissait pas ses obligations d'associé. Plus encore, il détournait à son profit une grande partie des recettes. Une plainte auprès du procureur de la République s'ensuivit.

A la suite d'une vérification de comptabilité, à laquelle M L avait collaboré, d'importantes impositions ont été émises à l'encontre de l'indivision constituée par M. L... et son associé. Ce dernier s'étant révélé insolvable, c'est donc à M. L... que le paiement des impôts dus par 1'indivision est en totalité réclamé. Or l'intéressé, père de trois enfants, se trouvait alors au chômage, et sa maison mise en vente par l'établissement bancaire en recouvrement du prêt consenti pour son acquisition.

Devant ces difficultés, M. L.. sollicite l'aide du Médiateur de la République.

M. L... ne comprend pas les poursuites dont il est l'objet. Il trouve anormal qu'après avoir dénoncé les malversations de son associé et facilité le déroulement des différentes enquêtes menées, il soit tenu pour responsable du paiement des impositions éludées par son associé.

Certes, il peut lui être reproché une certaine négligence pour n'avoir pas contrôlé assez tôt les agissements de son associé. Ceci étant, il n'est pas contesté qu'il n'a été ni l'instigateur, ni le complice des fraudes commises. De plus, il ressortait du jugement du tribunal de grande instance, saisi d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la P.M.E., que M. L... n'a jamais exploité la discothèque, et que, par ailleurs, le contrat de location-gérance de ce fonds a été résilié en son temps. La décision de liquidation judiciaire n'a donc visé que l'associé.

Au regard de la règle de droit, les mesures prises par l'administration fiscale sont irréprochables dans leur principe. Le Médiateur de la République, tout en faisant valoir les considérations que lui inspirait la situation de M. L..., ne pouvait intervenir que sur le terrain de l'équité, dans le cadre de l'article 9 de la loi du 3 janvier 1973 instituant sa fonction.

La demande faite dans ce sens au ministre du budget sera bien accueillie. L'impôt sur le revenu, la taxe d'apprentissage et la T.V.A. ont fait l'objet d'une décision de dégrèvement. D'autre part, un dégrèvement de près de 400.000 F concernant divers autres éléments lui est consenti.

En revanche, les droits d'enregistrement (131.400 F) ne pouvant pas être, de par la loi, dégrevés, le ministre, pour tenir compte de la situation de l'intéressé, en suspend le recouvrement dans l'attente de l'amélioration de sa situation financière et lui accorde la remise intégrale des pénalités.

Une fois encore, le ministre du budget a fait preuve de compréhension et de sens de l'équité.

LA RIGUEUR DE LA LEGISLATION FISCALE DEVANT LE PRINCIPE DE L'EQUITE

Imposition - Solidarité entre époux
Réclamation n° 90-3611, transmise par M François Léotard, député du Var, ancien ministre.

 

L'épouse de M. F... exploitait un fonds de commerce dans des conditions économiques désastreuses qui la menèrent à la faillite en 1980.

Bien qu'ayant divorcé en 1983, M. F... fut requis en 1986 par les services fiscaux de payer la quotité d'imposition correspondant aux revenus de son ex-épouse pour les années 1982 et 1983.

La demande de décharge qu'il présente n'aboutit pas. C'est dans ces conditions qu'il sollicite l'intervention du Médiateur de la République.

Au strict point de vue du droit, la position des services fiscaux est fondée. Il faut en effet rappeler que la loi du 24 décembre 1982 supprimant la notion de chef de famille, a placé les époux sur un pied d'égalité. De ce fait, la responsabilité solidaire en matière d'imposition concerne effectivement les deux conjoints De sorte que le trésor public pouvait exercer des poursuites contre l'un ou l'autre conjoint pour la totalité de l'impôt établi.

La nouvelle législation offre certes à chacun des conjoints, s'il est victime d'un comportement coupable de la part de l'autre, la possibilité d'être déchargé de sa responsabilité. Cette possibilité relève toutefois de l'ordre des mesures gracieuses, par conséquent de la libre appréciation de l'administration pour l'application de la loi en fonction des circonstances particulières de chaque affaire.

En conséquence, dans cette situation, M. F... devait payer la somme réclamée, puis en demander la compensation sur les éléments d'actifs des comptes du couple lors de leur liquidation.

Néanmoins, le Médiateur de la République a noté que, dans un jugement rendu postérieurement à la décision de rejet par l'administration fiscale, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence signalait que l'ex-épouse de M. F... avait commis, dans l'exploitation de son commerce, "des malversations commerciales amplement démontrées". Ceci lui parut constituer un argument de nature à permettre à M. F... de présenter une nouvelle demande de décharge au directeur des service fiscaux, demande que le Médiateur de la République appuya d, toute son autorité auprès du trésorier-payeur général.

Après examen des nouveaux éléments du dossier, le trésorier-paveur général informa le Médiateur de la République de sa décision d'accorder à M. F.. la décharge partielle de sa responsabilité, soit une somme de 99.351 F.

LE PRINCIPE DE LA SOLIDARITE EN MATIÈRE DE SUCCESSION

Héritage - Droits de succession
Réclamation n° 90-4276, transmise par M. Charles Millon, député de l'Ain.

 

Mme G..., décédée en 1985, a eu pour héritiers son frère, ainsi que son neveu et sa nièce, venant en représentation de son second frère prédécédé.

Mme G... avait donné à son frère procuration sur les comptes ouverts à son nom à la Caisse d'épargne. Au décès de sa súur, celui-ci en usa pour retirer, à son profit, toutes les sommes déposées sur ces comptes, soit plus de 313.000 F.

Trois ans plus tard, les descendants du frère prédécédé, supposés avoir bénéficié du partage des sommes retirées par leur oncle, ont fait l'objet d'un redressement fiscal mettant à leur charge des droits de succession s'élevant à plus de 86.000 F. C'est par ce redressement fiscal que les intéressés apprennent le détournement opéré à leur détriment.

Ne parvenant pas à convaincre les services fiscaux qu'ils ont été frauduleusement évincés de la succession, ils sollicitent l'intervention du Médiateur de la République.

Lorsque la victime est condamnée à payer pour son détrousseur, il y a manifestement atteinte à l'équité.

Mais en l'espèce, les services fiscaux n'ont fait qu'appliquer les règles du Code des impôts dont un des principes est que chaque héritier est solidairement responsable du règlement des droits de succession.

Certes, dès qu'ils apprirent le détournement commis par leur oncle, les héritiers se sont pourvus devant le tribunal de grande instance et obtinrent de lui la condamnation de leur oncle à leur reverser les sommes détournées.

Le Médiateur de la République, pour résoudre des situations d'iniquité en l'espèce, doit rechercher la possibilité de ménager et le droit, et la protection du citoyen. C'est ainsi qu'il a demandé, dans cette affaire, que toute action juridictionnelle ou administrative susceptible d'être engagée soit suspendue à l'égard des héritiers évincés et orientée sur l'oncle indélicat.

Le service fiscal de recouvrement a bien voulu accéder à cette proposition. Il reste toutefois qu'en cas de défaillance de leur oncle, les intéressés resteraient solidairement responsables du règlement de droits de succession.

LE BON SENS TRIOMPHE DE LA LOGIQUE

Viager immobilier - Débirentier légataire
Réclamation n° 91-1141.

 

Pour se garantir un revenu supérieur pendant sa retraite, M. P... a vendu, en 1974, à Mme V... sa maison en viager et en a conservé l'usufruit.

Au fil du temps, des relations de sympathie se sont établies entre les deux contractants. En gage de cette bonne entente, M. P... prévoit, dans son testament, de léguer à Mme V... un meuble, d'une valeur estimée à 800 F.

Malheureusement, c'était sans compter avec l'article 751 du Code général des impôts.

En effet, pour éviter les donations ou les ventes fictives permettant d'éluder les droits de succession, cet article dispose que tout immeuble appartenant pour l'usufruit au défunt et pour la nue-propriété à l'un de ses légataires, fait partie de la succession de l'usufruitier.

Or, en l'occurrence, Mme V... entre bien dans la catégorie des légataires de M. P..., même si ce n'est que pour un meuble de 800 F.

En conséquence, Mme V... va être considérée comme légataire des biens de M. P..., y compris la maison qu'elle a achetée en viager. Le fisc réclame donc à Mme V... 265.000 F de droits de succession pour un héritage dont l'essentiel est constitué par la maison pour laquelle elle a déboursé plus de 200.000 F en rente viagère.

Mme V... est d'autant plus victime de cette situation que la législation fiscale prévoit que, dans ce cas, les droits sont dus même si le légataire renonce à la succession.

Devant cette situation, elle sollicite l'aide du Médiateur de la République.

C'est le cas typique prévu par les dispositions de l'article 9, 2ème alinéa, de la loi modifiée du 3 janvier 1979 instituant la fonction de Médiateur de la République.

Sur ce terrain, l'intervention parviendra à faire partager par l'administration fiscale le sentiment d'iniquité qui caractérise cette affaire.

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UNE ERREUR DE L'ADMINISTRATION REPAREE

Imposition - Remise de pénalités
Réclamation n° 90-2778, transmise par M. Gilbert Mathieu, député de la Côte-d'Or.

 

A la réception de son avis d'imposition relatif aux revenus de l'année 1987, M. P... constate que le calcul de l'impôt est erroné et sollicite, par voie de réclamation auprès du centre des impôts, une rectification et le dégrèvement correspondant, ainsi que, dans l'attente de la régularisation, le bénéfice du sursis de paiement. Il en informe le percepteur.

Le sursis de paiement lui est toutefois refusé parce que les garanties demandées en contrepartie, propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor, n'ont pas été constituées en temps utile. En outre, l'imposition fixée initialement, majorée d'une pénalité de retard de 10 %, est recouvrée après l'engagement de poursuites par le service du Trésor.

Quelques mois plus tard, le centre des impôts fait droit à la réclamation de M. P... en réduisant sa cotisation d'impôt sur le revenu de plus de 7.100 F.

C'est dans ces conditions que M. P... ayant réclamé, sans succès, au trésor public le remboursement de la majoration de 10 %, souhaite l'intervention du Médiateur de la République.

L'instruction du dossier a permis de constater que la demande de l'intéressé aurait dû être accueillie, au moins partiellement. L'attention du trésor public est attirée sur le fait que M. P... a droit au remboursement de la partie de la majoration de 10 % correspondant aux sommes dégrévées, soit 711 F.

De plus, eu égard aux circonstances propres à cette affaire et à la bonne foi du requérant, il semblait équitable que l'administration aille au-delà du simple remboursement des 711 F, d'autant plus que le service des impôts a mis plus d'un an pour rectifier l'imposition initiale.

Conscient de l'erreur commise par ses services, qui n'auraient pas dû refuser le remboursement des 711 F, le trésorier-payeur général accepte la suggestion du Médiateur de la République d'accorder à M. P... la remise totale de la majoration de 10% appliquée à l'impôt sur le revenu de 1987, soit la somme de 3.697 F.

TEL PONCE PILATE L'ADMINISTRATION S'EN "LAVE LES MAINS"

Services fiscaux - Droits de succession
Réclamation n° 90-4387, transmise par M. Christian Spiller, député des Vosges.

 

A la suite de recherches généalogiques, M. M..., résidant dans l'est de la France, apprit qu'il héritait d'une tante décédée dans le département de la Gironde où elle résidait.

La succession comprenait notamment un immeuble dont la valeur avait été estimée à 230.000 F, selon un rapport d'expertise présenté par le notaire chargé de liquider la succession. La vente de cet immeuble à une agence immobilière a été réalisée effectivement à ce prix. Les droits de succession acquittés par M. M... et les autres héritiers ont donc été calculés par référence à cette somme.

Deux semaines plus tard, le même immeuble est revendu, par l'intermédiaire du même notaire, à une autre société au prix de 300.000 F.

Les services fiscaux en ont déduit que la valeur vénale mentionnée dans la déclaration de la succession avait été sous-estimée. Il en est résulté pour M. M... et les cohéritiers un redressement entraînant le versement d'un complément de droits et de pénalités y afférentes.

Quelques mois plus tard, les P.T.T. informent les héritiers de l'existence d'un deuxième livret d'épargne au nom de la défunte. L'adjonction de ce second livret à l'inventaire de la succession entraîna à son tour le versement de compléments de droits et de pénalités dans les mêmes conditions que s'il s'était agi d'une dissimulation volontaire.

Au parlementaire qui était intervenu en faveur des intéressés, le ministre de l'économie, des finances et du budget opposa un refus au motif que "l'Etat ne saurait supporter les conséquences des erreurs ou omissions commises par un tiers", ce tiers étant, en l'occurrence, le notaire.

M. M... sollicite l'intervention du Médiateur de la République. Cette situation, manifestement inéquitable, conduit le Médiateur de la République à demander aux services fiscaux concernés le réexamen du dossier.

S'il a pu obtenir au profit des intéressés l'annulation des pénalités sa satisfaction n'a cependant pas été complète. La sous-estimation de la valeur de l'immeuble a été le fait de gens du métier auxquels la loi obligeait les héritiers à avoir recours. Elle n'a pas, d'autre part, apporté à ces derniers un quelconque profit; ils n'ont perçu de la vente de l'immeuble que la somme de 230.000 F, déclarée dans le règlement de succession.

En revanche, la transaction qui, en l'espace de deux semaines, fit grimper le prix de l'immeuble de plus de 30 % a fait profiter d'une part, le premier acquéreur d'une plus-value avec une taxation non assortie de pénalité et, d'autre part, le Trésor public qui en tira une double imposition.

Le Médiateur de la République constate en outre que certain; notaires ne méritent pas toute la confiance qui ressort de leur qualité sans que les victimes puissent obtenir, en pratique, réparation des erreurs de ces officiers ministériels.

DE LA DIFFICULTE DE SE FAIRE ENTENDRE

Service fiscaux - T.V.A.
Réclamation n° 90-1354, transmise par M. Henri d'Attilio, député des Bouches-du-Rhône.

 

M. R..., dirigeant d'une entreprise en redressement judiciaire, s'est vu réclamer par les services fiscaux une dette de T.V.A. s'élevant à la somme de 152.081 F. Il conteste le montant de cette dette qui ne prend pas en compte les versements effectués directement par lui-même ou par prélèvement en exécution d'avis à tiers détenteur. Versements que M. R... estime supérieurs au montant de la créance du trésor public.

En réponse, le service des impôts lui notifie un nouveau décompte ramenant le montant de la dette à la somme de 88.401 F.

L'intéressé, après avoir contesté vainement ce nouveau chiffre, sollicite l'aide du Médiateur de la République.

L'enquête révèle rapidement que les versements opérés n'ont pas tous été comptabilisés ou ont été imputés à tort sur des pénalités, dans la gestion du compte de M. R... par la recette des impôts.

Mais pour y voir tout à fait clair, il a fallu échanger de nombreuses communications écrites ou téléphoniques avec les services concernés pendant près de onze mois.

En fin de compte, le Médiateur de la République parvient à obtenir avec exactitude les renseignements sur la situation du compte de l'intéressé et à établir que la dette de M. R... n'est que de 26.725 F. Il a par ailleurs demandé que le syndic chargé du redressement judiciaire de l'entreprise soit informé de cette situation afin de préserver les droits des autres créanciers de l'entreprise.

Il est exceptionnel qu'un service fiscal accumule autant d'omissions et de négligences. Mais cet exemple montre devant quelles difficultés peut se trouver placé un redevable isolé.

UN EFFORT DE RECHERCHE RECOMPENSE

Fiscalité - Solidarité en paiement de dette
Réclamation n° 90-1662, transmise par M. Louis Mercier, sénateur de la Loire.

 

Mme M..., séparée légalement de son mari, M. S... et chargée de la garde de ses trois enfants mineurs, décède dans des circonstances tragiques.

Une décision de justice confie aux parents de Mme M... l'autorité parentale sur ces trois enfants.

La charge des frais d'entretien et d'éducation entraînait pour les tuteurs d'importantes difficultés financières. Aucune ressource particulière leur permettant de faire face à ces besoins ne leur était ouverte. Plus encore, tous les biens mobiliers que contenait l'immeuble, propriété de leur fille et de son époux, avaient disparu, et le père des enfants, M. S... astreint par le juge des affaires matrimoniales à une pension alimentaire au montant mensuel de 4.500 F, devint introuvable.

Par ailleurs, en raison d'importantes dettes fiscales d'une société commerciale dont M. S... avait été le gérant, le Trésor public, faisant jouer la règle de solidarité en paiement de dette, fit vendre la propriété de Mme M... et prélever sur le produit de la vente le montant de ses créances, soit la somme de 632.943 F.

Confrontés à cette situation particulièrement douloureuse, et préoccupés par l'avenir des trois jeunes enfants dont ils assument la charge les parents de la défunte sollicitèrent l'aide du Médiateur de 1a République.

L'étude du dossier révéla des points obscurs qui conduisirent le Médiateur de la République à demander au ministre du budget d'en faire reprendre l'examen complet. La démarche a permis de découvrir qu'à la date du fait générateur des pénalités fiscales, M. S... n'était plu gérant de la société en cause. Il ne pouvait plus, par conséquent, être recherché solidairement en paiement de dette.

Le ministre du budget, ayant pris acte de ce fait, a décidé de faire restituer aux intéressés la somme de 632.943 F qui avait été prélevé par le trésor public, et d'y ajouter les intérêts moratoires.

Cette affaire justifie l'initiative du législateur de créer un Médiateur capable d'aider le citoyen dans son dialogue avec l'administration.

UN PROGRES DE LA REGLEMENTATION FISCALE

Dégrèvement d'impôt - Intérêts moratoires
Réclamation n° 90-3412, transmise par M. Alain Dufaut, sénateur de Vaucluse.

 

S'étant aperçu que, dans le calcul de son impôt, l'administration n'avait pas pris en compte un avoir fiscal dont l'imputation lui aurait procuré une réduction de sa cotisation de près de 35.000 F, M. R... lui a demandé de lui rembourser l'excédent perçu.

M. R... a dû attendre six années pour recevoir ce remboursement, qui n'était accompagné d'aucun intérêt de retard. Il s'adresse de nouveau au service des impôts et sollicite parallèlement l'intervention du Médiateur de la République.

Bien qu'elle soit juste dans son principe, cette réclamation se heurte à la réglementation fiscale alors en vigueur qui, tout en prévoyant le versement d'intérêts moratoires dans le cas de dégrèvement prononcé à la suite d'une réclamation préalable, exclut expressément de cette indemnisation le remboursement fondé sur un avoir fiscal.

Ce cas, révélé par une réclamation individuelle, a paru susceptible de se renouveler pour d'autres administrés.

Aussi, une démarche a-t-elle été entreprise auprès du ministre chargé du budget afin que de nouvelles dispositions modifient cette restriction injuste. Le succès de cette démarche, malgré le fait que l'application de ces nouvelles dispositions ne soit pas rétroactive, permettra à M. R... de bénéficier de l'indemnisation demandée.

UN SERVICE PUBLIC SOUCIEUX DES BONNES MANIÈRES

Redevance de l'audiovisuel - Erreur d'identité du redevable
Réclamation n° 90-3905, transmise par M. Hubert Falco, député du Var.

 

En 1988 la mère de Mme F..., malade, a dû être hospitalisée. Elle détenait un téléviseur en location et était exonérée du paiement de la redevance de l'audiovisuel. Cet appareil, alors en panne, avait été remis par Mme F... à la société de location pour sa réparation.

Depuis cette date, une redevance a été établie au nom de Mme F... qui ne possède cependant aucun téléviseur. Les nombreuses réclamations adressées au centre de la redevance sont restées inopérantes. Plus encore, des poursuites ont été engagées par le centre à l'encontre de Mme F...

De l'enquête effectuée, il semble qu'il y ait eu confusion d'identité entre Mme F... et sa mère, laquelle porte le même nom et habite dans le même immeuble, mais dans un appartement différent.

L'intervention du Médiateur de la République a davantage retenu l'attention des services concernés, lesquels ont, sans tarder, pris les mesures de régularisation nécessaires.

Par ailleurs, le chef du service a estimé de son devoir de présenter à Mme F... les excuses du service de la redevance. Même lorsque le service public admet son erreur, une telle démarche est peu courante; elle mérite donc d'être notée (cf. courrier suivant).


LE MEDIATEUR DE LA REPUBLIQUE
N.Ref. : PR/CB/FIN 90.03
53,avenue d'Iéna
75116 PARIS
Tél : 01.45.01.86.56

à

Monsieur GUINGAND
Trésorier payeur général
Chef du service de la redevance de l'audiovisuel
46 rue d'Amsterdam
75009 PARIS

 

 

Paris, le 28 mai 1991

 

Monsieur le Chef de service,

 

Dans mon rapport au Président de la République et au Parlement pour 1990, 1e problème de l'amélioration des relations du service central de la redevance télévision avec les usagers a été évoqué en rappelant les raisons qui m'avaient conduit à formuler, au milieu de l'année 1990, la proposition de réforme FIN 90.03.

Cette trop courte relation ne tient malheureusement pas compte de l'excellence des rapports qui se sont tissés par la suite entre votre service et l'lnstitution. Je le regrette très vivement.

C'est pourquoi je souhaite vous confirmer en tous points les termes de ma lettre du 9 août 1990. J'insiste en particulier sur le fait que les différends que je suis parfois amené à évoquer ne relèvent généralement que de difficultés relationnelles avec des téléspectateurs qui ont pu ne pas comprendre les indispensables formalités à accomplir ou qui ont vécu des modifications de situation qu'ils n'ont pas signalées suffisamment tôt. Dans les autres cas, vous avez procédé à la régularisation des situations litigieuses avec une grande célérité.

J'ajoute également aujourd'hui que la qualité des relations que nous avons établies au niveau parisien de nos institutions se retrouvent en province. Comme vous le leur avez demandé, vos responsables locaux se sont rapprochés de mes délégués départementaux. Ceux-ci m'en ont fait part et ont insisté sur le bon accueil qu'ils trouvaient sur place pour traiter plus rapidement et avec la même efficacité les dossiers dont ils avaient connaissance. Je crois que c'est un bon point pour la déconcentration et un service de meilleure qualité rendu à l'usager.

Il m'a semblé utile de vous rappeler combien j'appréciais les résultats obtenus grâce à l'ensemble des mesures que vous avez prises à un moment où votre service doit faire face à une double et contradictoire exigence: d'une part, améliorer le rendement de la redevance pour financer les chaînes publiques en difficulté, d'autre part satisfaire les réclamations des redevables qui ne sont pas spontanément portés à apporter leur contribution et qui vous accusent injustement de ne pas leur donner les programmes de leur choix.

Je me propose, dans ces conditions, d'insérer dans mon rapport pour 1991 un texte qui exprime cette satisfaction. Le moment venu, mes collaborateurs vous contacterons pour la mise au point d'un texte approprié. Mais une autre solution pourrait consister à publier le fac-similé des correspondances que nous avons échangées.

J'adresse enfin copie de cette lettre à M. Michel CHARASSE, ministre délégué au budget.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Chef de service, l'expression de mes sentiments les meilleurs et bien cordiaux.

Paul LEGATTE

L'EQUITE ACCEPTEE

Titre de transport - Infraction
Réclamation n° 90-3253, transmise par M. Jean-Michel Couve, député du Var.

 

Mme M..., voyageant de nuit, en France, dans un train de grande ligne, a été victime du vol d'une partie de ses bagages. Lors d'un contrôle de billets, elle n'a pas pu présenter son titre de transport, qui se trouvait dans l'un des sacs volés.

Selon la réglementation en usage, le défaut de possession d'un titre de transport constitue une infraction punie d'une amende. Dans le cadre de Mme M..., le montant de cette amende était de 394 F.

Elle plaide sa situation de victime du vol de ses affaires et obtient de la S.N.C.F. la réduction du montant de l'amende à la somme de 199 F. Cette mesure est toutefois assortie de la condition de s'acquitter de l'amende avant le 30 mars 1990, sous peine de poursuites pénale

Mais Mme M... n'enverra son chèque de paiement que le 1er avril 1990. Un mois plus tard, le chèque lui est renvoyé et une procédure pénale est engagée à son encontre en réclamation d'une somme de 2.060 F.

A ce stade, Mme M... sollicite l'intervention du Médiateur de République.

Il va de soi que la loi, en prévoyant des pénalités pour sanctionner les situations irrégulières des voyageurs, n'a pas distingué les situations des voyageurs de bonne foi de celles des fraudeurs. Si elle laisse à la S.N.C.F. une marge d'appréciation, cette faculté ne peut pas dépasser certaines limites, au risque de transformer la nature des obligations auxquelles cet organisme est tenu envers l'usager.

Le Médiateur de la République ne peut dès lors contester, en son principe, l'attitude de la S.N.C.F. Cependant, deux points méritaient d'être pris en considération. Le fait que, si Mme M... n'a adressé son chèque de paiement que deux jours après la date limite qui lui était fixée par la S.N.C.F., elle n'a pas pour autant manifesté une quelconque intention de refus de payer cette amende. La majoration qui lui est appliquée se trouve donc dépourvue de motif plausible. D'autre part, les circonstances dans lesquelles elle a perdu ses bagages dans le train ajoutent à cette raison, en faveur de l'intéressée, un motif de régler 1'affaire avec bienveillance et équité.

Cette démarche a convaincu le président du conseil d'administration e la S.N.C.F. qui, en sa qualité de partie civile, s'étant désisté de l'action, a permis à l'officier du ministère public de procéder au classement pur et simple du dossier.

UN GRAND SERVICE PUBLIC SOUCIEUX DE L'EQUITE

S.N.C.F.- Accident - Partage de responsabilité
Réclamation n° 90-4224, transmise par M. Jean-Claude Gaudin, sénateur des Bouches-du-Rhône.

 

Mme F... a fait une chute, en gare de Marseille-Blancarde, le 24 juin 1990, en descendant du train en provenance de La Ciotat. Plus précisément, la voiture à bord de laquelle elle voyageait s'était arrêtée en regard d'un passage planchéié, présentant une forte dénivellation entre le marchepied et le quai. Dans sa chute, Mme F... s'est fracturée une vertèbre lombaire. Après une hospitalisation son état n'était toujours pas consolidé.

A sa demande d'indemnisation, la S.N.C.F. a d'abord opposé un refus en soutenant que la descente de voiture était un acte personnel que le voyageur accomplissait sous sa seule responsabilité et qu'il lui incombait d'en assurer la sécurité.

Devant cette attitude, Mme F... sollicite l'intervention du Médiateur de la République, après avoir tenté vainement d'obtenir une solution par l'intermédiaire du délégué départemental.

L'argumentation développée par la S.N.C.F. est effectivement conforme à la jurisprudence des tribunaux dans les cas d'accidents survenant lors de la descente d'un train. Mais les jurisprudences ne sont pas immuables. Par ailleurs, Mme F... était âgée de plus de soixante-six ans et, l'arrêt prévu en cette gare étant de courte durée, elle ne disposait pas du temps nécessaire pour trouver une issue mieux aménagée. Enfin, le système de communication phonique qui équipe les voitures aurait pu être utilisé pour prévenir les voyageurs et éveiller leur attention.

Le président du conseil d'administration de la S.N.C.F. a accueilli favorablement la démarche du Médiateur de la République et a proposé à Mme F... un arrangement amiable en partage de responsabilité.

UN ETABLISSEMENT PUBLIC N'EST PAS AU-DESSUS DES LOIS

Inexécution d'un jugement
Réclamation n° 90-0124, transmise par M. Marc Dolez, député du Nord

 

M. M..., employé de la Chambre de commerce et d'industrie de Douai, a été licencié de son emploi le 19 décembre 1985. Il attaque cette mesure devant le tribunal administratif, qui lui donne raison par un jugement en date du 18 novembre 1987.

Son employeur le réintègre le23 décembre 1987, puis le révoque à nouveau le 22 mars 1988. M. M... introduit une nouvelle action devant le tribunal qui lui donne une nouvelle fois raison par jugement en date du 28 janvier 1989.

La Chambre de commerce et d'industrie refuse d'appliquer le dispositif de ce deuxième jugement, qui décide la réintégration de M. M..., la reconstitution de sa carrière et le versement rétroactif des salaires qui lui étaient dus.

C'est ainsi que M. M... sollicite l'intervention du Médiateur de la République.

La loi qui institue la fonction du Médiateur de la République dispose en son article II qu'il peut, "... en cas d'inexécution d'une décision de justice passée en force de chose jugée, enjoindre à l'organisme mis en cause de s'y conformer dans un délai qu'il fixe". En cas d'abstention, il peut dénoncer le fait dans un rapport spécial publié au Journal officiel.

Désirant ne pas en arriver là, le Médiateur de la République demande au ministre de l'industrie et de l'aménagement du territoire d'user de son pouvoir de tutelle à l'égard de l'organisme défaillant pour le contraindre à exécuter les jugements rendus, c'est-à-dire ni plus ni moins de respecter la loi.

L'action du Ministre a produit les effets escomptés. M. M... a enfin obtenu satisfaction. Une somme de près de 187.000 F lui a été versée.

Il n'en reste pas moins que l'attitude de la Chambre de commerce et d'industrie de Douai révélait une méconnaissance et un mépris de la loi nuisibles à l'accomplissement de la mission de service public qu'elle assume.

UN ORGANISME PUBLIC PEU RESPECTUEUX DE LA LOI

Licenciement d'agent - Réparation
Réclamation n° 88-3163, transmise par Mme Marie-France Lecuir, député du Val-d'Oise.

 

M. T..., ancien salarié de la Chambre de commerce et d'industrie (C.C.I.) de Douai, a été mis à la retraite d'office le 31 mars 1986, à l'âge de soixante-trois ans. Devant le tribunal administratif de Lille, il obtint, le 19 octobre 1987, l'annulation de la décision de la C.C.I.

Après avoir vainement attendu l'exécution de ce jugement par la C.C.I., il sollicite l'intervention du Médiateur de la République le 15 septembre 1988.

En matière d'inexécution des décisions de justice, la loi du 3 janvier 1973, article II, 2ème alinéa, a donné au Médiateur de la République la faculté d'enjoindre à l'organisme concerné d'exécuter le jugement rendu. La C.C.I. mettra près de quinze mois pour donner signe de vie. Non pas pour annoncer sa volonté de donner au jugement la suite qu'il impose, mais pour déclarer que tant que le délai d'appel n'avait pas été révolu, comme si l'appel était suspensif, pour que jugement fût revêtu de l'autorité de la chose "irrévocablement" jugée, elle ne pouvait agir.

Mais une fois ces conditions réunies, il était apparu à la C.C.I. que, comme il ne restait plus que trois mois et huit jours avant que M. T atteigne la limite d'âge, il n'était pas nécessaire de passer à l'exécution du jugement. D'autant plus qu'une réintégration paraissait à la C.C.I. de nature à contrarier la bonne marche du service.

Cependant, pour pallier le refus d'exécuter la loi, la C.C.I. déclara avoir "de son plein gré" versé à M. T... une somme de 91.000 F.

Ces réflexions étaient formulées le 7 février 1990, c'est-à-dire près de cinq ans après la naissance du litige et plus vingt-sept mois après le prononcé du jugement.

Dans cette affaire, le principal, pour le Médiateur de la République est que M. T... soit indemnisé correctement. Il appartiendra donc juge de se prononcer éventuellement sur la valeur de cette indemnisation par rapport aux conséquences subies par M. T... dans sa vie professionnelle et même dans sa vie sociale si la réparation du dommage apparaît insuffisante à l'intéressé.

En l'espèce, la Chambre de commerce et d'industrie de Douai a adopté une attitude de mépris caractérisé de la loi. Il faut espérer qu'elle n'affiche pas la même désinvolture à l'égard du droit dans les autres actes qu'elle accomplit pour l'exercice de sa mission.

EN RETARD D'UNE JURISPRUDENCE

Allocation de chômage - Agents publics
Réclamation n° 90-4364, transmise par M. Dominique Gambier, député de la Seine-Maritime.

 

Mme B... avait été recrutée, sous contrat à durée déterminée, par Chambre de commerce et d'industrie de Rouen pour exercer, à temps partiel, les fonctions de professeur de formation générale. Son engagement parvenu à son terme, son employeur refuse de lui verser les allocations pour perte d'emploi auxquelles elle estimait pouvoir prétendre en raison de sa qualité d'ancien agent non titulaire d'organisme public.

Devant le refus réitéré de son employeur, elle fait appel à l'aide du Médiateur de la République.

L'examen du dossier a révélé que la Chambre de commerce d'industrie de Rouen avait cru pouvoir se référer à la jurisprudence dégagée par le Conseil d'Etat dans l'affaire Ruez (9 octobre 1987). La Haute Juridiction avait en effet considéré que la perte d'emploi, résultant de l'arrivée à terme d'un contrat à durée déterminée était conséquence de l'accord même des parties à ce contrat. Il s'ensuivait que la privation d'emploi ne pouvait pas, pour ouvrir droit aux allocations de chômage, être assimilée à la perte involontaire d'emploi condition exigée par l'article L. 351-16 du Code du travail.

L'appréciation du Conseil d'Etat portait sur un litige né en 1983 sous le régime d'une législation que modifiera l'ordonnance n° 84-198 du 21 mars 1984. Cette ordonnance aligne les modalités d'octroi de l'indemnisation du chômage des agents non titulaires des collectivités publiques, sur celles qui sont appliquées aux personnels dans le secteur privé.

Le Conseil d'Etat, dans un arrêt (Dame Duprez - Wacrenier) en date du 26 juin 1989, conformera sa jurisprudence à la nouvelle réglementation.

L'analyse du Médiateur de la République a convaincu interlocuteurs qui, rapidement, ont réparé leur erreur.

POUR UNE MEILLEURE OUVERTURE DU SERVICE PUBLIC

Service postal - Obligations
Réclamation n° 90-3156 transmise par M. Kléber Malecot, sénateur du Loiret

 

Le 11 décembre 1989, M. V... a demandé au bureau de poste proche de son domicile l'envoi à son fils, étudiant à Londres, d'un mandat de 1.500 F. Cette somme a été débitée de son C.C.P.

Un mois plus tard, le mandat n'était pas encore parvenu à son destinataire. Au bureau expéditeur, il a été répondu à l'expéditeur que dans l'attente de la date d'expiration de la période de validité du mandat, soit quatre mois, il ne peut être émis de titre de remplacement ni effectué de remboursement.

Au mois de février 1990, M. V... apprend que le mandat a été encaissé en Angleterre par une tierce personne dont l'identité n'a pas été révélée par le service britannique, contrairement aux modalités convenues pour les titres de cette valeur.

Ne parvenant pas à obtenir la restitution de la somme déboursée M. V... sollicite l'intervention du Médiateur de la République.

A l'évidence, l'administration française des postes, tout en n'ayant commis aucune faute dans la perte du mandat, n'en a pas moins laissé supporter par son client les conséquences de l'erreur commise par le service postal britannique dont elle a été, en la circonstance, et l'intermédiaire et le correspondant.

Certes, souvent, l'exécution du service postal relève du concept de l'obligation de moyens. Mais à partir du moment où l'administration française a su:

- que le mandat a été, par négligence de l'organisme britannique, détourné de son véritable destinataire.

- que l'institution britannique assume l'entière responsabilité de l'erreur,

- que la poste française dispose de la faculté de compenser les dettes et créances de son homologue britannique,

le fait d'avoir attendu pendant plus de sept mois pour rembourser M. V... ne caractérise pas un bon fonctionnement du service public.

UN COMPORTEMENT RAISONNABLE A L'ACTIF DES P.T.T.

C.C.P. - Vol de chèque
Réclamation n° 90-3076, transmise par M. Patrick Devedjian, député des Hauts-de-Seine.

 

Au mois de juillet 1989, Mme B... s'aperçoit que son C.C.P. a été débité, à son insu, d'une somme de 42.000 F. A partir des renseignements fournis par son centre, elle remarque que, dans un carnet délivré en 1987, un chèque avait été dérobé.

Les chèques postaux n'étant pas soumis à l'obligation de porter le nom et l'endos du bénéficiaire, le détenteur du chèque n'a pas eu à décliner son identité pour en obtenir le paiement. Selon le code des P.T.T., en effet, un titre sous cette forme vaut chèque au porteur.

Diverses indications fournies par le centre des chèques postaux permirent à Mme B... de porter des soupçons précis sur un individu et de porter plainte contre lui. Très vite, l'insolvabilité de celui-ci conduira le parquet à classer sans suite la plainte.

Mme B... se tourne alors vers l'administration pour lui réclamer un dédommagement. Celle-ci s'y refuse en niant une quelconque faute commise par ses services. En fait, la loi décharge l'administration des P.T.T. de toute responsabilité pour toute opération non entachée de faute lourde incombant au service.

Désespérée, Mme B... sollicite l'intervention du Médiateur de la République.

Une première saisine se heurte à un refus, toujours sur la base d'absence de faute lourde.

Dans une nouvelle intervention, l'argumentation fera ressortir l'existence d'un défaut d'attention suffisamment vigilante de la part des services ayant facilité le dommage subi par Mme B...

Les circonstances de l'affaire inciteront l'administration à admettre que les responsabilités, dans cette affaire, sont suffisamment partagées pour accepter d'indemniser Mme B... à concurrence de 50% du montant du chèque.

Un procès à l'issue et de toute façon coûteux pour les finances publiques a été ainsi évité cependant que l'administration des P.T.T acceptait un comportement équitable.

UNE ADMINISTRATION SENSIBLE AUX DIFFICULTES DU CITOYEN

Catastrophe naturelle - Indemnisation
Réclamation n° 90-2167, transmise par M. Pierre Pasquini, député de la Haute-Corse.

 

Au début de septembre 1989, des pluies diluviennes s'abattirent sur la Haute-Corse, notamment dans les régions de Solaro, Solenzara et Ghisonaccia, provoquant plusieurs sinistres importants.

En particulier, le camping de la Côte des Nacres subit des dégâts et des pertes importants, évalués à 970.000 F. De même, le Domaine de Tovisano enregistra la perte de dix bêtes d'excellente race, la destruction d'un mur d'enceinte, de 2.500 mètres de clôtures, l'apparition d'une crevasse et le déplacement de pierres et de troncs d'arbres.

Les propriétaires saisirent les maires concernés d'une demande de secours et une réunion de travail fut organisée par le sous-préfet. Ils espéraient que la Commission interministérielle retiendrait ces communes parmi celles qui bénéficieraient de la procédure d'indemnisation dite de "catastrophes naturelles". Leur déception fut grande quand ils constatèrent que leurs communes étaient absentes de la liste de l'arrêté du 8 janvier 1990 énumérant les communes atteintes par une catastrophe naturelle.

Ils en appelèrent à l'aide du Médiateur de la République.

L'enquête révélera que l'absence, dans l'arrêté de constatation de l'état de catastrophe naturelle, du nom des communes sinistrées était due au fait que les autorités locales avaient oublié de déposer les dossiers concernant leurs communes en temps utile à la préfecture. Le délai fixé pour l'accomplissement de cette formalité était désormais clos.

L'intervention du Médiateur de la République a trouvé un bon accueil auprès du ministre de l'intérieur. Il a accepté que la situation des communes concernées soit examinée, par les soins de la direction de la sécurité civile, lors d'une très prochaine réunion de la commission interministérielle.

A CHAQUE PROBLEME, SA SOLUTION

Déclaration de travaux - Légalité
Réclamation n° 91-0293, transmise par M. Jean-François Mancel, député de l'Oise

 

M. F..., demeurant à M..., a obtenu le 8 juin 1990 une déclaration de travaux pour la réalisation d'un garage.

Un de ses voisins a formé auprès du maire, le 6 août 1990, un recours administratif fondé sur l'illégalité de la déclaration de travaux délivrée à M. F...

L'instruction de cette requête par les services de la mairie révélera effectivement que l'implantation du garage n'était pas conforme aux prescriptions du règlement de la Z.A.C. Ce constat amènera le maire de la commune à décider, le 1O octobre 1990, le retrait de l'autorisation qu'il avait accordée, alors que l'édification du garage était achevée.

Entre temps, une modification importante a été apportée à la réglementation, rendant possible la régularisation de la situation. Mais l'intéressé s'y refuse en alléguant que l'autorisation avait acquis un caractère définitif au moment de son annulation.

Il saisit le tribunal administratif aux fins de déclarer nulle la décision d'annulation en date du 10 octobre 1990. Il demande, parallèlement, au Médiateur de la République d'intervenir en sa faveur de manière qu'une solution amiable soit trouvée.

S'adressant au maire, le Médiateur de la République lui rappelle que l'acte de retrait de l'autorisation qui avait été accordée à M. F... ne pouvait pas avoir pour effet de clore la procédure. L'autorité municipale demeurait encore saisie d'une demande à laquelle il lui appartenait de répondre. Faute de quoi M. F... pourrait s'estimer légalement détenteur d'un permis tacite.

Peu de temps après, le maire faisait savoir qu'il se rangeait aux arguments du Médiateur de la République. Il reconnaît que M. F... détient désormais une autorisation de construire tacite.

L'ARBITRAIRE D'UN MAIRE

Personnel communal - Congés de maladie - Obligation salariale
Réclamation n° 90-1954, transmise par M. Umberto Battist, député du Nord.

 

Les agents relevant du statut de la fonction publique territoriale ont droit, en application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, article 7 à des congés dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de 12 mois consécutifs lorsqu'une maladie les empêche d'exercer leurs fonctions.

Pendant cette période, ils perçoivent l'intégralité de leur traitement durant trois mois, pendant les neufs mois suivants seulement la moitié.

M. B..., secrétaire de la mairie d'O..., victime d'un accident cérébral, a été mis en congé de maladie en février 1989. Aussitôt remplacé dans ses fonctions, il n'a pas perçu les traitements auxquels il avait droit durant son indisponibilité.

Non seulement les démarches de M. B... restèrent sans réponse, mais la municipalité, en réponse à une injonction du ministre de l'intérieur de verser ces indemnités, prit une décision déniant le fondement de ce droit.

M. B... sollicita l'intervention du Médiateur de la République.

Il fut rappelé au maire l'obligation qu'impose à sa commune la loi du 26 janvier 1984. Mais simultanément, il fut demandé au préfet du département du Nord d'envisager l'engagement d'une procédure pour régler cette affaire par voie d'inscription d'office au budget de la commune de la dépense correspondant aux salaires dus à M. B...

Moins d'un mois plus tard, le nécessaire fut fait.

Cette affaire n'est pas la seule où il apparaît que certains maires ont interprété les lois de décentralisation comme leur conférant un pouvoir discrétionnaire pour tout ce qui relève de l'administration communale.

DES TERGIVERSATIONS ILLEGALES

Logement des instituteurs - Délais des demandes

Réclamation n° 89-2427, transmise par M. Roland Courteau, sénateur de l'Aude.

 

M. S..., instituteur à l'école publique de M... depuis la rentrée scolaire de 198I, n'occupant pas de logement de fonction, demande en septembre 1988 l'attribution de l'indemnité représentative de logement.

Le maire de la commune concernée refuse de lui donner satisfaction. M. S... demande alors l'attribution d'un logement de fonction. Une décision de rejet lui est opposée. Il s'adresse au sous-préfet de sa circonscription.

Le 29 juin 1989, M. S... apprend que le sous-préfet, ne pouvant pas le recevoir, a transmis sa requête au préfet du département qui ne lui donne pas satisfaction.

Devant ces refus successifs, M. S... sollicite l'intervention du Médiateur de la République.

L'étude du dossier révèle que les refus opposés à M. S... évoquaient pour motif le fait que l'intéressé, lors de son installation, aurait décliné l'offre de logement qui lui était faite. Cependant, aucune preuve corroborant cette déclaration n'a pu être produite.

En revanche, il ressortait de la correspondance échangée entre le maire et les services de la préfecture que le motif portait en réalité sur la tardiveté de la demande de logement de M. S...

Or, les textes concernant le logement des instituteurs et les conditions d'attribution de l'indemnité représentative ne prescrivent pas de délais pour la présentation de leur demande. C'est pourquoi, de manière constante, la jurisprudence du Conseil d'Etat rappelle que le fait, pour un instituteur, de ne pas avoir présenté sa demande de logement ou d'indemnité dès son installation à son poste n'entraîne pas la déchéance de son droit pour l'avenir.

Si la demande est présentée à une date postérieure à son installation, la seule conséquence à en tirer est de ne faire partir le droit à l'indemnité représentative de logement qu'à cette date.

Un mois après son intervention, des assurances ont été données au Médiateur de la République, tant par le maire que par le préfet, de régler la situation de M. S... dans les meilleurs délais.

LE MEDIATEUR DE LA REPUBLIQUE RAPPELLE LA PORTEE DE LA LOI

Chômage - Indemnisation
Réclamation n° 90-3371, transmise par M. Claude Pradille, sénateur du Gard.

 

Mme G... a travaillé successivement pour divers employeurs, durant une période qui s'est étendue du 16 septembre 1988 au 31 juillet 1989, date d'expiration de son contrat d'embauche par la mairie de N...

N'ayant pas pu trouver immédiatement un emploi, Mme G... demande à la mairie, aussitôt après son inscription à l'A.N.P.E., le versement des prestations prévues au bénéfice des travailleurs privés d'emploi. Des allocations pour perte d'emploi lui furent versées jusqu'à la date de son embauche, pour une période de deux mois du 13 septembre au 13 novembre 1989, par une entreprise de commerce.

Mme G... se retrouve de nouveau au chômage du 15 novembre 1989 au 1er avril 1990, puis de nouveau le 29 août 1990. Chaque fois, elle demande à la mairie de N... de lui rétablir le service des prestations qui lui étaient allouées précédemment. La mairie s'y refuse, mais l'oriente sur l'ASSEDIC de la localité. Cet organisme, de son côté, la renvoie sur la mairie de N...

C'est ainsi que Mme G... en appelle à l'aide du Médiateur de la République.

En fait la collectivité locale, pour opposer avec persistance sa décision de refus, avait mal analysé la réglementation qui organise l'indemnisation des salariés ayant perdu leur emploi. Cette réglementation permet, lorsqu'un chômeur en cours d'indemnisation retrouve un emploi, de suspendre les allocations dont il bénéficie. Mais en cas d'une nouvelle perte d'emploi, le service des allocations est repris, dans la limite du reliquat de la durée calculée précédemment. Excepté le cas où, depuis la suspension du service des allocations, l'intéressé a réuni des conditions de durée de travail pouvant lui ouvrir de nouveaux droits. Dans le cas contraire, la charge de l'indemnisation du travailleur incombe à l'employeur avec lequel les droits à l'indemnisation ont été ouverts.

Cette analyse conduira le maire de la ville de N... à donner satisfaction à Mme G...

PERTE INVOLONTAIRE DE L'EMPLOI DU CONDAMNE A LA PRISON

Allocations de chômage
Réclamation n° 89-2811 transmise par M. Alfred Recours, député de l'Eure.

 

M. G..., ouvrier professionnel auprès du syndicat intercommunal à vocations multiples (S.I.V.O.M.) de C..., avait commis des infractions qui ont abouti à sa condamnation pénale, à son incarcération et à sa radiation des cadres du S.I.V.O.M.

Ayant purgé sa peine, M. G... a demandé aux ASSEDIC, puis à son employeur, le versement des allocations chômage. N'ayant pas obtenu satisfaction, il sollicite l'aide du Médiateur de la République.

L'étude approfondie de ce dossier a fait apparaître qu'il incombait bien au président du S.I.V.O.M. de verser les allocations en cause.

En effet, en ce qui concerne les agents publics autres que ceux de l'Etat, l'indemnisation du chômage n'incombe aux ASSEDIC que lorsque l'employeur adhère au régime d'assurance chômage de l'UNEDIC (loi du 30 juillet 1987).

Le S.I.V.O.M. de C..., n'ayant pas opté pour ce régime d'assurance, était donc son propre assureur et, par conséquent, redevable de l'allocation-chômage à son ex-employé. Son refus, dépourvu de fondement légal, ne peut que relever d'une interprétation erronée de la règle de droit.

C'est en fait le cas. Le dispositif d'ouverture des droits aux allocations-chômage pose pour condition, lorsque le chômage ne résulte pas d'une mesure de licenciement, que la perte de l'emploi soit involontaire.

Pour le S.I.V.O.M., la radiation des cadres frappant M. G... ne peut s'assimiler à une perte involontaire d'emploi. Or, la convention du 6 juillet 1988, agréée par l'arrêté du 21 août 1988, prévoit que le bénéfice de l'indemnisation est ouvert aux travailleurs qui n'ont pas quitté volontairement leur emploi. N'ayant pas démissionné de ses fonctions, M. G... remplissait donc cette condition.

Le Médiateur de la République n'ayant pas réussi à convaincre son interlocuteur a demandé au préfet du département d'user des pouvoirs que la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 (communément appelée "loi sur la décentralisation") lui a conférés.

Une procédure a donc été engagée auprès de la Chambre régionale des comptes tendant à permettre au préfet d'inscrire d'office au budget du S.I.V.O.M. les crédits nécessaires au versement d'allocations de chômage à M. G...

Le 3 mai 1991 cette opération est accomplie et l'intéressé pourra dès lors percevoir les allocations qui lui sont dues.

ALLOCATION DE CHOMAGE ET EXCES DE POUVOIR

Perte d'emploi - Indemnisation
Réclamation n° 89-2016 transmise par M. Fabien Thiem, député du Nord.

 

M. M... a exercé, dans un centre hospitalier d'Ile-de-France, les fonctions de préparateur en pharmacie. Son contrat à durée déterminée était reconduit mensuellement du 18 mai 1988 au 3 janvier 1989.

A cette date, un nouveau contrat a été proposé à M. H... pour une durée totale d'un mois et demi. L'éloignement entre son domicile et le nouveau lieu de travail, la précarité de l'emploi offert et la modicité de la rémunération allouée l'ont conduit à décliner cette offre.

S'étant trouvé sans emploi, il a demandé à bénéficier des prestations de chômage. Le centre hospitalier, son employeur, alléguant la non-légitimité de son refus du nouveau contrat qui lui était proposé, rejeta sa demande.

M. M... porte alors l'affaire devant le tribunal administratif et demande parallèlement l'aide du Médiateur de la République.

Le Médiateur de la République demande à l'autorité de tutelle du centre hospitalier d'intervenir pour amener celui-ci à corriger l'irrégularité commise au regard des dispositions du Code du travail.

En effet, dans la procédure fixée par le Code du travail, l'employeur ne peut que porter les faits devant le service du travail et de l'emploi. A celui-ci incombe le contrôle de la légitimité du refus. Sur le rapport de ce service, la décision d'exclusion est du ressort du préfet.

Accédant à cette argumentation, l'autorité de tutelle est intervenue pour que le centre hospitalier verse à M. M... les allocations auxquelles il était en droit de prétendre.

UNE COLLECTIVITE TERRITORIALE FORT EXIGEANTE

Permis de construire - Plan d occupation des sols
Réclamation n° 91-0155, transmise par M. Paul-Louis Tenaillon, député des Yvelines.

 

Mme D..., propriétaire d'un terrain en zone constructible sur le territoire de la commune de Feucherolles, a demandé à cette collectivité de lui délivrer un permis de construire.

Le document qu'elle a reçu était assorti d'une réserve l'obligeant à implanter sa construction dans une bande de 45 mètres de profondeur à partir de l'alignement de la voie existante.

Cette contrainte imposée à Mme D... la conduit à avancer le bâtiment en limite immédiate de propriété, avec les incidences de voisinage que cette situation pourrait entraîner.

Ses démarches auprès du maire pour faire lever cette réserve n'ayant pas abouti, elle sollicite l'intervention du Médiateur de la République.

La consultation du plan d'occupation des sols (P.O.S.) n'a révélé aucune règle qui eût permis au maire de poser la condition contestée par Mme D... A la contestation de celle-ci, fondée sur la réglementation du P.O.S., le maire oppose son souci de respecter l'esprit qui aurait présidé à l'élaboration de ce document. Il cite le rapport de présentation qui recommande de préserver la continuité du bâti ancien. Or, les règles de la zone UHa, dans laquelle est situé le terrain, ne fixent aucune limite de constructibilité.

Mme D... qui, pour l'acquisition du terrain, avait contracté des emprunts, n'est plus en mesure de réaliser la construction qu'elle projetait, et ce tout en étant en totale conformité avec les textes législatifs et réglementaires en vigueur.

L'attitude de cette collectivité est injustifiable tant au plan du droit qu'au plan des faits.

Selon les dispositions du P.O.S. afférentes à la zone dans laquelle est situé le terrain, les implantations des constructions doivent être réalisées à 5 mètres au moins en recul de l'alignement. Quant à la largeur de marge d'isolement, il y est précisé qu'elle ne peut être inférieure à 8 mètres. De la consultation du P.O.S., il ressort qu'aucune disposition n'oblige à implanter les constructions dans une bande de 45 mètres mesurée à partir de la voie.

Le refus maintenu par la mairie de Feucherolles crée un préjudice susceptible d'ouvrir droit à indemnisation.

Au plan des faits, tout en considérant que l'évocation de l'intérêt général de préserver le bâti ancien est un objectif estimable, le Médiateur de la République trouve qu'il eût été préférable que cette mesure fût prise en compte lors de l'élaboration du règlement du P.O.S. Pour avoir agi au "coup par coup", la commune n'a pas valorisé cet objectif.

Au regard de l'obstination à laquelle elle se trouve confrontée, Mme D..., soucieuse de préserver ses droits, a introduit un recours devant le tribunal administratif. Cette initiative lui permet en effet de conserver la faculté de recourir au juge pour infléchir le refus, s'il persistait, que lui oppose la commune.

UN RAPATRIE A LA RECHERCHE DE SON IDENTITE

Rapatrié - Pension de retraite
Réclamation n° 90-2991.

 

Madagascar a acquis l'indépendance en 1960. M. S..., qui a quitté ce pays en 1964, voulait que la qualité de rapatrié lui soit reconnue. Cette reconnaissance lui était nécessaire pour lui permettre de bénéficier des dispositions de la loi du 4 décembre 1985 qui, afin d'améliorer leurs retraites, permet à nos compatriotes "ayant dû ou ayant estimé devoir quitter, par suite d'événements politiques, un des territoires placés auparavant sous la souveraineté de la France" d'obtenir, sous certaines conditions, la prise en charge par l'Etat de la totalité ou d'une partie du rachat de leurs cotisations de retraite.

M. S... justifiait, par une attestation du 1er mars 1965, établie par le directeur de la Société nationale malgache des transports aériens Air-Madagascar, qu'il a été employé par cette société de 1957 à 1964 et qu'il a perdu son emploi en raison de la mise en place de la Malgachisation.

Par décision du 7 avril 1989, le directeur général de l'A.N.I.F.O.M. avait cependant dénié à M. S... la qualité de rapatrié au motif qu'il n'avait pas quitté Madagascar, en 1964, pour des raisons politiques en relation avec la cessation de la souveraineté française intervenue en 1960, mais pour des considérations d'ordre économique telles que les mesures d'africanisation affectant le secteur privé.

Devant ce refus, M. S... a saisi le Médiateur de la République Il affirmait, sans pouvoir l'établir, qu'il avait été inscrit, en 1961, sur une des dernières listes de personnes que les autorités françaises se proposaient de rapatrier, mais qu'il a renoncé à cette mesure pour répondre au désir de son employeur.

Dans un premier temps, l'administration a maintenu sa position. Cependant, après un nouvel examen du dossier, le délégué aux rapatriés, se fondant sur la recommandation du Médiateur de la République, à laquelle il se réfère expressément dans sa décision, accepte de fournir à l'intéressé l'attestation de rapatriement lui permettant de bénéficier des mesures découlant de la loi du 4 décembre 1985.

Cette attestation parviendra à M. S... en même temps que la lettre du Médiateur de la République. M. S... aura l'élégance de remercier aussitôt le Médiateur de la République pour son intervention efficace.

UNE INCREDULITE EXCESSIVE

A.N.I.F.O.M. - Qualité de rapatrié

Réclamation n° 90-3631, transmise par M. Alain Calmat, député du Cher.

 

Mme Z..., née en 1923 dans le département des Landes, a vécu en Tunisie de 1926 à 1958. Elle y a exercé une activité salariée de 1941 à 1957.

Afin de pouvoir faire valoir ses droits à une pension de retraite, elle demande à l'Agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer (A.N.I.F.O.M.), sur requête de la caisse régionale d'assurance maladie, une attestation de rapatriement. N'ayant pas pu apporter la preuve de son séjour en Tunisie pendant la période qu'elle indiquait, elle se heurte au refus de cet organisme.

Elle sollicite l'intervention du Médiateur de la République.

Les démarches faites auprès du ministère des affaires étrangères révéleront que la représentation diplomatique de la France en Tunisie ne dispose pas d'archives antérieures à l'indépendance sur les ressortissants français résidant en Tunisie. Auprès du centre d'archives diplomatiques installé à Nantes, la démarche n'a pas eu plus de succès.

Il ne restait plus qu'à saisir l'A.N.I.F.O.M. pour un nouvel examen de la situation de Mme Z... afin que lui soit délivrée l'attestation nécessaire.

Divers indices démontrent que la demande de l'intéressée est largement justifiée. Un acte de mariage établi en Tunisie, des certificats de travail portant sur une période allant d'octobre 1946 à juillet 1955, enfin une décision de rapatriement obligatoire datant du 2 août 1958,, constituent des éléments de preuve de la sincérité des déclarations émises à l'appui de la demande d'attestation de rapatriement.

Les espérances de l'intéressée seront-elles satisfaites ?

L'EQUITE AU SERVICE DU DROIT

A.N.I.F.O.M. - Forclusion
Réclamation n° 91-3311, transmise par M. Claude Bourdin, député du Loiret.

 

M. Z... s'est engagé en 1960, à l'âge de seize ans, dans les forces supplétives au côté de l'armée française en Algérie.

En juillet 1962, l'unité parachutiste à laquelle il était rattaché est rapatriée en métropole. Un détachement de soixante-cinq harkis, dont l'intéressé, a été laissé sur place avec la mission de surveiller le matériel qui n'a pas pu être embarqué et de maintenir l'ordre.

Fait prisonnier le 12 juillet 1962 par les autorités algériennes, M. Z... a été incarcéré et torturé. Il a toutefois survécu, contrairement à la majorité de ses compagnons de captivité.

Ayant été libéré, sans papiers, avec interdiction de quitter l'Algérie, il réussit, en 1976, après avoir soudoyé un fonctionnaire algérien, à obtenir un visa et à rejoindre la France. Dès son arrivée, il a entrepris les démarches nécessaires et a été réintégré dans la nationalité française par décret du 18 juillet 1978.

Lors de la publication de la loi du 16 juillet 1987 qui dispose, dans son article 9, qu'une allocation forfaitaire de 60.000 F sera versée aux anciens harkis, M. Z... adresse une demande en ce sens à l'A.N.I.F.O.M.

En réponse, l'agence lui déclare qu'il ne pouvait prétendre à cette allocation du fait que sa nationalité française n'a été reconnue qu'en 1978, alors que la loi précisait que pour bénéficier de cette allocation, il fallait avoir conservé la nationalité française conformément à l'article z de l'ordonnance du 21 juillet 1962. Il suffisait de souscrire une déclaration devant le juge d'instance et ce, jusqu'au 10 janvier 1973.

M. Z... en appelle à l'aide du Médiateur de la République.

Le premier argument que le Médiateur de la République expose dans son intervention est de poser la question: comment exiger d'une personne abandonnée sur le terrain avec une mission à remplir pour l'armée française, puis incarcérée, torturée et libérée treize ans plus tard sans papiers, sans travail et sans possibilité de quitter le territoire algérien, qu'elle remplisse, dans le même temps, des formalités administratives en France afin de pouvoir bénéficier d'une allocation créée au bénéfice des harkis ?

Le refus opposé à l'intéressé ne tient aucun compte de l'impossibilité d'agir dans laquelle il se trouvait. Il crée à son égard une situation particulièrement inéquitable qui ne peut évidemment rester sans solution satisfaisante, notamment au plan humain.

Tout en étant conscient des difficultés que pose ce dossier, compte tenu du caractère très strict des lois d'indemnisation, le Médiateur de la République demande qu'il soit procédé à un réexamen très bienveillant et en équité en faveur du réclamant.

CONVERSION TARDIVE A LA NOTION D'EQUITE D'UN ETABLISSEMENT PUBLIC NATIONAL

A.N.I.F.0 M. - Indemnisation et forclusion.
Réclamation n° 90-0766 transmise par M. Jacques Bérard, sénateur de Vaucluse.

 

Mme R... a déposé auprès de l'Agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer (A.N.I.F.O.M.) une demande d'indemnisation pour un fonds de commerce qu'elle avait exploité en société de fait avec Mme S...

Sa demande sera rejetée au motif que l'intéressée n'avait pas respecté, pour déposer son dossier, le délai d'un an fixé par la loi du 16 juillet 1987 instituant une levée de forclusion au profit des personnes n'ayant pas demandé, en temps utile, le bénéfice des indemnisations prévues par la loi du 15 juillet 1970.

Mme R... soutenait avoir été induite en erreur par les services préfectoraux qui lui auraient indiqué, alors que le délai fixé par le législateur lui était ouvert, que seule la propriétaire des murs, en l'occurrence Mme S..., était habilitée à déposer le dossier de demande d'indemnisation. Mme R... fut fort déçue en apprenant que la demande qu'elle avait déposée ne valait que pour la seule indemnisation de son associée.

Saisi de l'affaire, le Médiateur de la République est intervenu auprès de l'A.N.I.F.O.M. pour lui recommander le réexamen, sur le plan de l'équité, de la situation de Mme R.... Il a notamment fait valoir que, dans le traitement du dossier de Mme S..., la valeur du fonds de commerce avait été appréciée dans sa totalité, alors que son indemnisation avait été calculée sur la base de sa seule quote-part.

Sensible à ces arguments, le directeur général de l'A.N.I.F.O.M. décidera, à titre gracieux, de relever Mme R... de la forclusion encourue afin de lui permettre le dépôt de sa demande d'indemnisation, et de donner une réponse favorable au recours qu'elle avait présenté.

Le Médiateur de la République a été d'autant plus satisfait de cette décision que, jusqu'alors, les responsables de l'A.N.I.F.O.M. s'étaient toujours montrés extrêmement rigoureux dans l'application des délais de forclusion et refusaient quasi automatiquement de prendre en compte la notion d'équité et de réexaminer sur ce plan les cas exceptionnels que le Médiateur de la République jugeait utile de lui recommander. Cette évolution positive des mentalités méritait d'être notée.

UNE SOLIDARITE A DOUBLE VISAGE

Rapatriés - A.N.I.F.O.M.

Réclamation n° 89-2294, transmise par M. Philippe Séguin, député des Vosges, ancien ministre.

 

M. M..., ancien supplétif rapatrié d'Algérie, a adressé à l'Agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer (A.N.I.F.O.M.), une demande d'indemnisation concernant la maison qu'il possédait en Algérie. Sa démarche se réfère aux dispositions qui, dans la loi n° 87-549 du 16 juillet 1987, prévoient, à titre exceptionnel, la possibilité de levée de forclusion pour les rapatriés qui n'avaient pas bénéficié des mesures d'indemnisation. Sous réserve toutefois qu'ils aient déclaré, avant le 15 juillet 1970, la dépossession dont ils ont été victimes ou que les biens en cause aient déjà été évalués par l'A.N.I.F.O.M. pour des indivisaires ou des associés. D'autre part, la demande doit avoir été présentée dans le délai d'un an à partir de la loi précitée.

Or, M. M..., vis-à-vis de l'A.N.I.F.O.M., ne répond à aucune de ces conditions. Sa demande ayant été rejetée, il sollicite l'intervention du Médiateur de la République.

Si l'intéressé reconnaît que sa demande est présentée hors des délais prescrits et impute ce retard à son illettrisme, il soutient qu'en ce qui concerne la déclaration de dépossession de sa maison, qui devait être souscrite avant le 15 juillet 1970, il s'en était remis à la promesse que lui auraient faite les autorités militaires de prendre en charge les formalités nécessaires à la sauvegarde des droits des rapatriés anciens combattants. Cependant, il n'a pas été trouvé trace de telles démarches. Il faut dire qu'à l'époque, les circonstances dans lesquelles le rapatriement des troupes françaises s'était opéré pouvaient expliquer les "oublis" des promesses faites.

Mais l'attitude de l'A.N.I.F.O.M. est conforme à la légalité telle qu'elle a été définie par les textes de lois et de décrets. Il n'empêche qu'au regard de la situation qui lui est faite, M. M... a de quoi être amer. Nul doute que beaucoup d'autres, comme lui, ont souffert de tels refus. L'iniquité a malheureusement été acceptée par le législateur.

Le Médiateur de la République ne peut donc que s'incliner. Néanmoins, il essaye d'en atténuer les effets en prodiguant des conseils. Cela a été le cas pour M. M... à qui il a été rappelé l'existence d'autres possibilités d'aides prévues au bénéfice des anciens personnels des diverses formations supplétives ayant servi en Algérie et ayant conserve la nationalité française, l'appui éventuel du Médiateur de la Republique lui étant offert à cette fin.

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UN ACTE DE SOLIDARITE EXEMPLAIRE

Pension de victime de guerre - Remboursement
Réclamation n° 88-0993, transmise par M. Marcel Bigeard, ancien député, ancien ministre.

 

M. H..., résidant en Algérie, a été blessé accidentellement en 1945, à l'âge de cinq ans. Cette blessure le rendit aveugle.

En 1978, il demanda une pension du régime des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en alléguant que son infirmité a été provoquée par l'explosion d'un engin de guerre, en relation avec les événements survenus en novembre 1942.

Sa demande a été accueillie par le tribunal des pensions de Meurthe-et-Moselle. En appel, la cour régionale de Nancy confirme cette décision. La commission spéciale de cassation, sur recours de l'administration, casse les décisions rendues en faveur de M. H... et, renvoie l'affaire devant la cour régionale de Metz qui déboutera; l'intéressé. Celui-ci se pourvoit en cassation, mais n'obtient pas gain de cause.

Cette issue entraîne pour M. H... la restitution des allocations qu'il avait perçues depuis le mois de septembre 1980, suite au premier jugement favorable, jusqu'au mois de mars 1988, date de l'arrêt de cassation lui déniant le droit à pension.

M. H... sollicite alors l'intervention du Médiateur de la République.

Il est évident que, dans sa démarche, celui-ci ne pouvait nullement remettre en cause l'arrêt rendu par la commission spéciale de cassation, ni contester les arguments juridiques fondés sur la lettre de la loi et développés par l'administration.

Mais la situation dans laquelle se trouve placé M. H..., aux ressources financières modiques et devant rembourser une somme très élevée, incite le Médiateur de la République à apprécier les conséquences humaines de l'application de la loi et à porter le problème sur le terrain de l'équité. La loi du 3 janvier 1973, en son article II, offre la possibilité d'obtenir de l'administration, bénéficiaire d'une décision juridictionnelle, de renoncer à ce bénéfice au nom de l'équité.

Cette renonciation, qui ne porte pas atteinte à une tierce personne, a été facilitée par le fait que le Code des pensions prévoit, au profit des militaires dont la demande de pension est rejetée, de conserver les sommes perçues antérieurement à ce rejet. Bien que M. H... ne soit pas militaire, sa situation n'en est pas parue très éloignée.

Par ailleurs, le Médiateur de la République a pu tirer argument du fait que, contrairement aux directives précisées dans une circulaire du secrétariat d'Etat aux anciens combattants et victimes de guerre, M. H... n'a reçu aucune information sur les conséquences qui seraient tirées, par l'administration, d'un jugement rendu en sa faveur.

Ce dernier argument a permis au ministre du budget d'accepter de ne pas réclamer le remboursement des allocations perçues par l'intéressé. Mais le véritable motif de cette attitude est bien la nécessité, dans des cas exceptionnels, de demander à la collectivité nationale un effort de solidarité.

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