Année 1978


CONCLUSION




1. Comme il en est depuis plusieurs années, le Médiateur a poursuivi, en 1978, son double rôle d'intercesseur entre l'Administration et le public et de promoteur de réformes.

Dans le même temps, ce dernier aspect de son rôle prenait une part grandissante dans l'ensemble de ses activités : il est bien de combattre l'iniquité quand elle se présente dans un cas particulier, il est encore mieux de la prévenir, au bénéfice de toute une classe d'administrés, par une modification de la loi ou du règlement qui l'avait engendrée.

On sait (cf. rapport de 1977) que les années 1976 et 1977 ont été décisives en ce domaine : consacrée par la loi du 24 décembre 1976, vigoureusement appuyée par le pouvoir exécutif depuis 1977, l'action réformatrice du Médiateur peut, désormais, se déployer dans toute son ampleur : les résultats de l'année 1978, comme ceux de 1977, témoignent de cet épanouissement.

Mais il ne faudrait pas en déduire que le Médiateur se sente de ce fait investi de la mission globale de réformer l'Administration et le corps des textes qui règlent son activité : d'abord, il faut le répéter, parce que son action en ce domaine ne peut s'exercer qu'a posteriori, c'est-à-dire à partir des situations concrètes qui lui sont dénoncées : en d'autres termes, le Médiateur n'invente pas les sujets de ses propositions de réformes ; ensuite parce que la mise en oeuvre de celles-ci, bien que commandées par un souci d'équité qui ne souffre, en théorie, aucune espèce de contestation, peut parfois se heurter à des obstacles d'ordre budgétaire, insurmontables en raison de la situation économique et financière actuelle de notre pays.

C'est donc avec vigueur, mais aussi avec prudence, que le Médiateur entend poursuivre son rôle de promoteur de réformes.

2. Dans son rapport de 1976 (p. 4), le Médiateur se demandait si, compte tenu de la stagnation, d'une année sur l'autre, du nombre des réclamations reçues (3 150 en 1975, 3197 en 1976), l'Institution n'avait pas atteint son rythme de croisière, avec une moyenne d'un peu plus de 3 000 saisines nouvelles par an.

Mais en 1977 le nombre de ces saisines s'est élevé à 3 539, et en 1978 à plus de 4 000.

Il n'y a donc pas stagnation, mais progression continue.

3. Si l'on considère maintenant le fond des affaires, on constate (cf. ci-avant bilan thématique) que les types de mésadministration constatés sont demeurés sensiblement les mêmes que par le passé - ce qui ne décourage pas pour autant le Médiateur, car il ne s'est jamais caché que guérir l'Administration de ses défauts serait une entreprise de très longue haleine...

Mais il s'est révélé en 1978 un type de mésadministration - qui touche d'ailleurs plutôt à l'organisation administrative, et même à l'organisation gouvernementale - sur lequel le Médiateur se doit d'attirer l'attention des pouvoirs publics :

Il a été constaté dans plusieurs affaires (notamment II 2652, analysée plus haut au Bilan thématique ; I 673, analysée au chapitre du Ministère de l'Industrie) que certains services ne tenaient pas compte de la position ou de la décision prise par l'autorité ministérielle, et même dans certains cas par le Premier Ministre (affaire III 2296). Et c'est pourquoi le Médiateur est de plus en plus souvent amené à s'adresser directement aux ministres pour leur demander de faire exécuter leurs décisions...

Lorsqu'il s'agit d'un service placé directement sous l'autorité d'un ministre (affaire II 2652) une telle attitude pose un grave problème de discipline ; lorsqu'il s'agit d'un établissement sous tutelle (affaire I 673), on peut aller jusqu'à conclure à la vanité de certaines tutelles, et cela pose un problème d'organisation gouvernementale.

En examinant cette organisation, on constate en effet que s'il existe des ministères " techniques ", assurant directement une mission de service public qui peut être à caractère industriel ou commercial, d'autres doivent se borner à exercer leur tutelle sur des établissements ou entreprises nationales investis d'une mission du même ordre : or, certains de ces établissements ou entreprises (E.D.F. - G.D.F. - Charbonnages de France) constituent des organismes puissants, sur lesquels l'exercice d'une tutelle suffisamment stricte est a priori difficile.

Il n'en reste pas moins que le système de la tutelle, par l'autonomie qu'il laisse à des services publics qui doivent échapper à la rigidité des règles administratives traditionnelles, comporte plus d'avantages que d'inconvénients et pourrait même être étendu, si l'on songe aux difficultés que rencontre la gestion des services en régie.

4. En ce qui concerne les rapports de l'Institution avec le public (cf. également ci-avant, " Vie de l'institution ") l'année 1978 a été particulièrement marquée par l'installation des correspondants départementaux du Médiateur.

Il faut souligner qu'il ne s'agit pas là d'une déconcentration de l'Institution : ces correspondants n'ont reçu mission - mais elle est importante - que d'orienter les réclamants éventuels, de leur expliquer ce qu'ils peuvent attendre du Médiateur, et, plus généralement, de répandre dans le public une meilleure connaissance de l'Institution.

En résumé, ces prolongements de l'Institution tendent à rapprocher le Médiateur des administrés et des réalités locales, et leur activité ne peut être que favorable à l'Institution, en facilitant sa tâche, et en lui permettant une desserte plus complète du territoire : ce sont là des bénéfices importants.

5. S'agissant des rapports du Médiateur avec l'Administration, il convient de noter que s'ils demeurent dans l'ensemble excellents, il est regrettable, et même inadmissible que dans certains cas (voir notamment affaires V 1765 et V 499, citées plus haut au Bilan thématique), les ministères concernés n'aient daigné faire connaître au Médiateur que plusieurs mois après sa première intervention que " l'affaire était d'ailleurs favorablement réglée ".

De telles attitudes, en contravention formelle avec les instructions gouvernementales relatives au traitement des dossiers du Médiateur, doivent cesser.

En définitive on peut, sans optimisme excessif, considérer comme très positif le bilan de l'activité du Médiateur en 1978.

L'institution a continué de s'affirmer au prix d'une volonté tenace qui exige une patience sans relâche.

Ce qu'il faut souhaiter, c'est la poursuite de son effort dans un large esprit de coopération :
- coopération confiante avec l'Administration qu'elle entend associer à son souci de réforme ;
- coopération étroite avec le Parlement, garantie de son indépendance et de son impartialité.

C'est là la bonne voie : il convient de s'y tenir.



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