Année 1977


VIE DE L'INSTITUTION


A - Le fonctionnement de l'Institution



1° Effectifs

L'année 1977, plus encore que 1976 a été marquée par une stabilisation des effectifs du Médiateur.

Par rapport à l'année antérieure on n'observe aucun changement global du nombre des collaborateurs de la Médiation ou de la répartition de leurs tâches.

Au 31 décembre 1977, quarante-six collaborateurs apportaient leur concours au Médiateur. Trente et un à temps complet et quinze à temps partiel.

Actuellement ce personnel est réparti de la façon suivante :

Délégué Général, Délégué, Secrétaire Général........ 3
Conseillers du Médiateur................ 10
Assistants du Médiateur................. 15
Personnel de secrétariat et de gestion............ 18
TOTAL....................... 46

Comme par le passé, l'Institution est dirigée par un délégué général assisté d'un délégué aux réformes et d'un Secrétaire général qui anime et coordonne les différents secteurs.

Les assistants du Médiateur répartis en secteurs, instruisent les dossiers individuels, et préparent les propositions de réforme et le rapport annuel.

Ils sont aidés dans leur tâche par les avis des conseillers du Médiateur, conseillers techniques ou chargés de mission, qui sont des praticiens chevronnés généralement au sommet de leur carrière administrative.

2° Crédits

Les crédits du Médiateur pour 1977 se sont élevés à 2 839 000 F répartis de la manière suivante :
Personnel................ 1 910 000 F (67 %)
Frais de matériel ............. 509 000 F (18 %)
Frais de logement ............. 420 000 F (15 %)

Ces chiffres reflètent l'activité d'une année où le système mis en place dans les années antérieures et rôdé en 1976 a continué à fonctionner comme prévu.

A noter cependant en 1977, une tendance à effectuer davantage d'enquêtes sur place. L'acquisition d'une machine à écrire à mémoire aux performances très élevées permet d'améliorer le traitement du courrier tout en le personnalisant.

3° Perspectives d'avenir

L'année 1978 du point de vue des moyens, marquera la fin d'une époque dans la mesure où ces moyens sont devenus insuffisants pour assurer un fonctionnement satisfaisant de l'Institution.

Dès 1979, l'installation dans de nouveaux locaux, avec des moyens accrus, est prévue et permettra de poursuivre le développement de l'Institution.

B - Le Médiateur et le Public



1° Déplacements du Médiateur

Au cours de l'année 1977 le Médiateur a terminé de visiter l'ensemble des métropoles régionales françaises à l'exception de Caen où il doit se rendre au début de 1978.

Il a été accueilli successivement à Limoges, Ajaccio et Nantes, villes dans lesquelles les contacts directs et fructueux avec les préfets, les hauts fonctionnaires et un grand nombre de représentants des forces vives de la région ont apporté chaque fois de précieux éléments de réflexion, sur les conditions d'une évolution efficace de l'Institution.

Celle-ci ne doit, en effet, en aucun cas perdre le contact avec la réalité des problèmes quotidiens des administrations départementales et régionales aux services desquelles elle fait couramment et directement appel à propos de tel ou tel litige relevant de leur compétence.

Ces journées d'information sont par ailleurs l'occasion pour le Médiateur de rencontrer les parlementaires de la région et de s'entretenir avec eux des problèmes les plus délicats au plan de l'équité, du droit ou de la jurisprudence, soulevés dans certains dossiers qu'ils lui transmettent.

2° Presse parlée et écrite

Au cours de l'année 1977 le Gouvernement a manifesté à plusieurs reprises son souci d'améliorer les rapports entre le public et l'administration et de donner de celle-ci à ses usagers une image plus accueillante.

Ce souci s'est d'une part manifesté à travers les articles de plusieurs journalistes qui ont naturellement rapproché ces préoccupations gouvernementales de celles du Médiateur, en donnant de ce fait à ses fonctions un relief particulier.

D'autre part, les conférences de presse organisées à l'occasion de la publication du dernier rapport annuel d'activité ont eu de façon générale un écho plus large que les années précédentes.

L'Institution a ainsi été l'objet de nombreux articles de fond et d'émissions télévisées ou radiodiffusées témoignant de l'efficacité de son action et illustrant aux yeux d'un public légitimement soucieux de ses droits, la volonté, modeste pour l'instant, mais tenace du Médiateur, de remédier à certaines injustices administratives dont le citoyen peut se trouver victime.

Il convient de noter à ce propos que la nature des activités de l'Institution fait qu'elles se prêtent bien davantage à des études approfondies, qu'à des articles à sensation retraçant par exemple les innombrables et vaines démarches d'un administré avant que celui-ci n'obtienne enfin gain de cause par le canal du Médiateur.

Dans ce dernier cas, l'intérêt des très nombreux lecteurs de la grande presse n'est naturellement que très peu éveillé même si l'enjeu de la bataille administrative menée par le simple administré a été pour lui d'une extrême importance.

Par voie de conséquence l'action du Médiateur, qui met fin à ces démêlés, attire peu les journalistes de la grande presse.

En revanche, certains journaux ou revues d'informations moins dépendants des impératifs de l'actualité, des périodiques spécialisés rattachés à des professions, des organismes juridiques, telle ou telle corporation, ordre ou association produisent fréquemment des articles commentant de façon pertinente les principes fondamentaux de l'Institution ainsi que certains cas de litiges type tout en illustrant l'action du Médiateur pour y apporter une solution.

La presse locale et régionale relatant généralement des faits beaucoup plus étroitement liés à la vie de ses lecteurs s'est fait toujours et très naturellement davantage l'écho de l'activité du Médiateur que la presse nationale, et davantage encore à l'occasion des visites du Médiateur en province.

Dans le cadre des rapports ponctuels que peut entretenir le Médiateur avec ses homologues étrangers, il convient d'insister sur l'incontestable valeur de modèle que représente l'institution française aux yeux d'un certain nombre de pays.

C'est ainsi que le Médiateur ou son Délégué général ont été sollicités à plusieurs reprises par des juristes canadiens et américains du Nord et du Sud pour participer, au vu de l'expérience française, à l'élaboration d'un projet de création d'une institution semblable.

Au cours de l'année 1977 le Médiateur s'est rendu à Bonn où il a été reçu officiellement par l'Ombudsman de la République fédérale allemande, membre de la Commission des Pétitions du Bundestag, en Israël, où il a eu également des contacts fructueux avec son homologue, Contrôleur d'Etat et Commissaire aux plaintes du public.

C'est aussi au cours de l'année 1977 que le Médiateur a eu l'occasion d'approfondir des relations professionnelles déjà étroites avec ses homologues d'Allemagne fédérale. En effet, la Présidente de la Commission des Pétitions du Parlement fédéral allemand (Petitionsausschuss des Bundestages) a demandé au Médiateur français d'intervenir dans des litiges qui opposaient des citoyens allemands, ayant travaillé en France, à divers organismes de retraites français ou aux caisses de Sécurité Sociale. Des succès notables ont pu être obtenus (S.N° - 331).

Le Médiateur de Rhénanie-Palatinat (Bürgerbeauftragte) de son côté, a été saisi par le Médiateur français dans une affaire L. (S.N° - 9). La requérante, polonaise d'origine, souhaitait se voir valider pour une pension de vieillesse par une caisse allemande d'assurance, les années d'avant-guerre pendant lesquelles elle avait travaillé dans l'agriculture. Cette affaire complexe faisant appel aussi bien au droit social propre des deux pays qu'aux conventions communautaires est significative de l'excellence des relations entre les Médiateurs français et rhénan.

A son tour, le Médiateur de Rhénanie-Palatinat a transmis au Médiateur français la requête d'une administrée allemande (S.N.° - 99) qui souhaitait savoir si son époux était encore en vie et obtenir les preuves qu'il avait cotisé pendant près de vingt ans à l'assurance vieillesse française.

Après enquête du Médiateur, des renseignements précis ont pu être fournis à la requérante.

Enfin, un citoyen allemand a saisi directement le Médiateur français, pour se plaindre de la situation qui lui était faite sur le plan social dans son pays. Le Médiateur français n'a pu que décliner sa compétence et a transmis la requête de l'intéressé à son homologue allemand, Présidente de la commission des pétitions.

Ces liens étroits qui s'inscrivent dans le cadre de la coopération franco-allemande sont le témoignage d'une collaboration sans cesse plus fructueuse entre des institutions qui ont le même objectif : le service des administrés.

Sur le plan intérieur :

Affirmant de plus en plus son souci de promouvoir l'Institution par des contacts directs avec les administrés ou des fonctionnaires de tous niveaux, le Médiateur s'est fait représenter par son Délégué général pour animer plusieurs conférences qui lui avaient été demandées sur ses activités.

Au cours des mois de mai et juin 1977 celui-ci s'est rendu à la Faculté de sciences juridiques, politiques et sociales de Lille pour discuter et répondre aux questions des étudiants se rapportant à la vie de l'Institution et aux problèmes juridiques qui peuvent y être abordés.

C'est également devant de nombreux chefs d'entreprises et dirigeants de diverses organisations professionnelles réunies à l'occasion d'un important colloque à Paris, que le Délégué général du Médiateur a fait le point des activités de l'Institution et exprimé son désir de voir s'établir entre eux et le Médiateur des contacts plus fréquents surtout depuis que celui-ci peut être saisi par une personne morale en conflit avec l'administration.

Un débat organisé au Sénat par France Forum sur le thème de " La Justice en question " et ses garanties a également été l'occasion pour le Délégué général de situer les fonctions et le rôle du Médiateur par rapport au système judiciaire français et de définir sa place au sein de l'arsenal juridique mis à la disposition du citoyen français pour assurer la défense de ses droits.

L'information des nouveaux ou futurs hauts fonctionnaires a également trouvé place parmi les activités de la Médiation.

Les auditeurs au Conseil d'Etat récemment sortis de l'E.N.A. ont été reçus à la Médiation où leur a été présenté de manière concrète le fonctionnement de l'Institution notamment dans ses rapports avec la Haute Assemblée.

Pour clôturer la scolarité des auditeurs de justice de la promotion 1977, l'Ecole nationale de la magistrature de Bordeaux a organisé plusieurs débats sur le thème " Justice et Justiciable " auxquels participait parmi d'autres intervenants le Délégué général du Médiateur qui a pu initier les futurs magistrats aux rapports qu'ils seront appelés à avoir avec le Médiateur.

A l'occasion de sa visite à Nantes le Médiateur a fait un exposé sur ses fonctions et son domaine d'activité devant les élèves de dernière année de l'Institut régional d'administration en présence d'une délégation d'étudiants britanniques en stage à la Faculté.

De même, un séminaire a été organisé à la Faculté de droit de Paris Dauphine sur le thème : " le Médiateur dans le système représentatif français ". Il a donné lieu à un débat animé tant sur le plan juridique que sociologique.

Il convient de noter enfin que le besoin d'un organisme de Médiation, générale ou particulière, se fait de plus en plus sentir au sein des différents services publics.

C'est ainsi qu'un Médiateur a été créé pour la ville de Paris, au printemps dernier. Il a pour rôle essentiel de hâter ou de faciliter le règlement des litiges opposant les Parisiens à l'administration. Ceux-ci peuvent le saisir directement.

De même, la faculté d'Aix Marseille vient d'instituer un Médiateur qui établira désormais la liaison entre les étudiants et les services administratifs de l'Université de droit, d'économie et des sciences. Ce poste, créé à l'initiative du Président de cette Université et confié à un enseignant, veut rendre l'administration universitaire " plus accessible et plus humaine ".

Le Médiateur universitaire aura pour tâche d'examiner les difficultés que rencontrent les étudiants avec les bureaux et de prendre les mesures nécessaires pour y apporter une solution. En outre, il établira périodiquement un rapport pour signaler les points litigieux ou défectueux et pour provoquer les mesures qui les feront disparaître.

Le Médiateur et le Parlement :

Les meilleurs rapports continuent d'exister entre le Médiateur et le Parlement en raison de la confiance que veulent bien lui accorder les membres des deux Assemblées, quelle que soit leur appartenance politique.

Chacun d'entre eux a pu constater que les dossiers étaient instruits de la même façon, qu'ils appartiennent à l'opposition ou à la majorité.

Etant eux-mêmes des médiateurs naturels, ils prennent à coeur leur rôle d'intermédiaire entre l'administration et les administrés et ne saisissent le Médiateur que des cas relevant strictement de sa compétence.

Au mois de novembre dernier, le Médiateur a eu l'occasion de faire part de ses réflexions concernant la création éventuelle en France d'un médiateur militaire, devant la Commission de la Défense Nationale et des forces armées de l'Assemblée Nationale, celle-ci ayant demandé à l'entendre.

Cette Commission avait été chargée d'examiner la proposition de loi que Monsieur Louis Longequeue, alors député maire de Limoges, avait déposé, en ce sens, quelques semaines auparavant.

Après avoir rappelé sa mission générale et ses pouvoirs, le Médiateur a indiqué qu'il existait dans le monde une cinquantaine d'institutions de médiation prouvant bien par là-même que celles-ci répondent à un réel besoin.

Citant les exemples les plus importants de médiation militaire (Suède, Norvège, Allemagne Fédérale et Israël) il s'est interrogé sur la transposition de cette institution en France, sans qu'il soit porté atteinte à la discipline et à la hiérarchie des armées.

Bien que l'on ait constaté une amélioration du climat dans l'armée française, de nombreux problèmes existent encore, si bien que les jeunes de 18-20 ans éprouvent un sentiment de frustration qu'ils n'ont pas à l'heure actuelle la possibilité d'exprimer.

Le Médiateur a énoncé les insuffisances du système actuel :

- Le recours hiérarchique, ainsi que l'Inspection générale, son très rarement utilisés ;

- Le Conseil supérieur de la fonction militaire et le Conseil permanent du service militaire ne connaissent pas les recours individuels ;

- Les tribunaux n'interviennent que pour des cas très graves.

Aussi a-t-il insisté sur le fait qu'il serait souhaitable de créer en France un Médiateur militaire en raison de l'absence de dispositions permettant aux militaires de base de bénéficier d'une voie de recours à titre individuel simple et direct.

La décision finale et les modalités de fonctionnement d'une telle Institution appartiennent bien sûr au Parlement.

Il est certain que si celle-ci était ainsi mise en place :

- Elle assouplirait les relations entre officiers, sous-officiers et hommes du rang ;

- Elle améliorerait le climat dans l'armée ;

- Elle contribuerait à éviter le retour à des situations de tension et de malaise que la France a pu connaître ces dernières années.

Le Médiateur a, ensuite, en premier lieu, répondu aux très nombreuses interventions des députés présents, que si, au lieu de créer un Médiateur militaire on élargissait les compétences du Médiateur actuel, il conviendrait, bien entendu, d'augmenter les moyens dont dispose actuellement la Médiation.

Il a souligné, en second lieu, que si la saisine indirecte était excellente dans le domaine civil, il était souhaitable qu'il en soit autrement dans le domaine militaire ; dans ce dernier cas, la saisine doit être directe car la décision doit être rapide ; toutefois, la réponse doit bien entendu suivre la voie hiérarchique.

Le Médiateur a abordé, enfin, le problème de l'indépendance du Médiateur civil en faisant remarquer les avantages pour l'Institution actuelle de l'inamovibilité pendant six ans et le non-renouvellement de ses fonctions à l'issue de cette période.

Il a conclu en assimilant l'éventuelle création en France d'une médiation militaire à une sorte de " soupape de sécurité " tout en rappelant que celle-ci n'existait que dans des pays démocratiques et libéraux.

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