Gérer une entreprise, c'est effectuer en permanence une
multitude de choix, particulièrement au plan social, s'agissant
de la gestion des hommes et des femmes qui en constituent la ressource
et la richesse humaines.
A ce titre, l'embauche constitue une étape lourde de conséquences
pour la vie de l'entreprise. En effet, il s'agit de trouver les
personnes les plus compétentes , afin de "rentabiliser"
le coût important que représente la masse salariale.
Cette recherche d'adéquation entre le salarié et
l'entreprise va conduire l'employeur à faire certains choix:
qui engager, selon quels critères, selon quelles modalités,
pour combien de temps...?
Autant de questions qui se posent au chef d'entreprise tout au
long du processus d'embauche, c'est à dire à partir
du moment où il définit un poste à pourvoir
jusqu'à celui où il conclut le contrat de travail.
Dans ce domaine, le principe est que l'employeur jouit d'une totale
liberté: c'est lui qui définit le profil du poste
à pourvoir, opte pour une méthode de recrutement
ou encore prend la décision finale. En effet, le rôle
du chef d'entreprise, qui tire profit de l'activité mais
en assume aussi les risques, l'exige. Cette liberté a d'ailleurs
été constitutionnalisée en 1982 (Conseil
constitutionnel, décision "Nationalisations"
du 16 janvier 1982 relative à la liberté d'entreprendre
et décision du 20 juillet 1988 relative à la liberté
de choisir ses collaborateurs).
Mais même si le contrat de travail est conclu intuitu personae,
cette liberté ne saurait être absolue.
En effet, il existe des restrictions tant au niveau de la personne
même du salarié (Chapitre I) que des méthodes
mises en oeuvre pour le recruter (Chapitre II).De plus, à
ce stade, l'employeur verra son choix influencé par certaines
mesures d'incitation (Chapitre IV). En outre, certaines dispositions
s'imposent à lui quant au choix et au contenu du contrat
de travail (Chapitre III) et en ce qui concerne les promesses
d'embauche, les visites médicales et les périodes
d'essai (Chapitre VI). L'employeur devra aussi accomplir certaines
formalités administratives d'embauche (Chapitre V).
1. Le Conseil Constitutionnel dans une décision de 1988 (décision n.88-244 DC: JO 21 juillet 1988, p.9449) a déduit de la liberté d'entreprendre que l'employeur, responsable de l'entreprise, peut choisir librement ses collaborateurs.
Il est possible de dégager de ce principe deux corollaires:
- d'une part l'employeur peut librement décider de procéder à une embauche lorsqu'il l'estime nécessaire, il dispose donc, en théorie, d'une totale liberté de procéder à l'embauche;
- d'autre part, il peut choisir librement la personne qu'il
souhaite embaucher et qui deviendra son collaborateur.
Cependant la volonté de protéger les salariés est venue limiter ces deux manifestations de la liberté d'entreprendre.
L'employeur doit, avant de décider de pourvoir un poste
par un recrutement, vérifier que ce recrutement ne le mettra
pas dans l'impossibilité d'exécuter certaines obligations.
Ces obligations sont donc de nature à dissuader l'employeur
de procéder à l'embauche et constituent donc des
restrictions à la liberté de procéder à
l'embauche (Section I). Le législateur a également
édité des normes limitant la liberté de choix
de la personne embauchée (Section II) ou interdisant purement
et simplement certaines embauches (Section III).
La décision d'embaucher est nécessairement motivée
par les besoins de l'entreprise en personnel, ces besoins étant
appréciés en fonction des salariés qui travaillent
dans l'entreprise. L'employeur doit donc tout naturellement prendre
en considération l'ensemble des salariés, sans oublier
ceux dont le contrat de travail est suspendu. Ces salariés
font, en effet, partie intégrante de l'entreprise malgré
la suspension de leur contrat de travail; ils bénéficient
d'un droit de réintégration de plein droit dans
l'entreprise à l'issue de leur congé (congé
maternité L 122-26, congé parental d'éducation
L 122-28-3, congé pour création d'entreprise L 122-32-16,
congé sabbatique L 122-32-21, congé pour exercice
d'un mandat parlementaire L 122-24-2, détachement dans
une filiale étrangère L 122-14-18).
Cependant, la loi impose également de tenir compte de salariés qui ne font plus partie de l'entreprise, leur contrat de travail ayant été rompu. En effet, certains salariés dont le contrat de travail a été rompu bénéficient d'un droit de réintégration de plein droit dans l'entreprise. L'employeur doit, avant de décider d'embaucher , les recenser et éventuellement les réintégrés, afin d'éviter de se mettre dans l'impossibilité d'exécuter son obligation vis-à-vis d'eux.
La prise en considération, dans la décision de l'employeur, de ces salariés en principe étrangers à l'entreprise, constitue une restriction à la liberté de procéder à l'embauche.
Il convient dès lors de se pencher sur le droit de la réintégration
de ces salariés pour apprécier l'étendue
de cette limite à la liberté d'embauche. Ce droit
s'exerce: suite au service national (I), suite à un licenciement
sans cause réelle et sérieuse (II), suite au licenciement
irrégulier de salariés protégés (III).
L'article L 122-18 du code du travail prévoit que lorsqu'il
a manifesté son intention de reprendre son emploi, le travailleur
est réintégré dans l'entreprise à
l'issue de son service national.
2. Peuvent bénéficier de cette disposition les salariés qui ont accompli totalement leur service national ou ceux qui ont été réformés après leur incorporation.
Les salariés étrangers peuvent-ils bénéficier de ce droit? Il est admis que les ressortissants de l'Union Européenne, qui ont effectué leur service national dans leur pays, bénéficient de ce droit (Réponse ministérielle Croze, JO Sénat, 13 octobre 1988), solution justifiée au regard du principe de non discrimination des travailleurs ressortissants de l'Union Européenne.
En revanche, la solution est plus nuancée concernant les
salariés ressortissants d'Etats tiers. En effet, sauf convention
internationale contraire, le droit à réintégration
ne s'applique pas aux travailleurs de nationalité étrangère
ayant effectué leurs obligations militaires dans leur pays
(Cour de Cassation, Chambre Sociale, 25 mai 1992).
3. L'article L 122-18 exige que le salarié qui désire reprendre son emploi en fasse la demande à son employeur au plus tard dans le mois suivant sa libération. L'article R 122-7 énonce que cette demande doit être faite par lettre recommandée avec avis de réception.
Il résulte de l'article L 122-18 que le salarié qui n'a pas fait de demande ou ne l'a pas formulée dans les temps ne peut se prévaloir de ce droit (Cour d'Appel de Rouen, 29 juin 1988).
La Cour de Cassation ,dans un arrêt du 29 mars 1995, a estimé que la lettre recommandée avec avis de réception était un simple mode de preuve. L'employeur ne peut donc se dégager de son obligation de réintégration en invoquant le non respect de cette règle de forme.
Il a également été jugé que le salarié n'avait aucune obligation de prévenir son employeur d'une éventuelle prolongation de son service national (Cour de Cassation, chambre sociale,
17 décembre 1988).
4. L'article L 122-18 énonce que le salarié est "réintégré dans l'entreprise". Certains employeurs ont essayé de faire prévaloir une interprétation restrictive de cette expression, réduisant l'obligation de réintégration à l'établissement dans lequel le travailleur exerçait son activité.
La Cour de Cassation, par une interprétation littérale du texte, a jugé que cette obligation de réintégration s'exerçait dans le cadre de l'entreprise au sens large, et non dans le cadre du seul établissement. Ainsi, selon une jurisprudence ancienne, mais toujours d'actualité, la fermeture de l'établissement, dans lequel l'intéressé avait son emploi n'est pas un obstacle à la réintégration dès lors que l'entreprise a conservé son activité (Cour de Cassation, chambre sociale, 18 juillet 1962).
Cette obligation peut-elle être transmise au repreneur en
cas de cession de l'entreprise? Il est envisageable de transposer
la jurisprudence dégagée à propos de la priorité
de réembauchage suite à un licenciement économique.
En effet, l'obligation de réintégration est une
obligation légale qui s'exerce à l'encontre de l'entreprise.
Elle survit donc au changement de nature juridique de l'employeur
et est transmise au repreneur de l'entreprise (voir n° 25).
5. Il ressort de l'article L 122-18 du code du travail que l'obligation de réintégration porte sur l'emploi précédemment occupé par le travailleur ou un emploi ressortissant de la même catégorie professionnelle (réponse ministérielle, JOAN 28 juillet 1980).
L'employeur peut donc réintégrer l'intéressé
soit dans son ancien emploi, soit dans un emploi équivalent.
Il dispose ainsi d'une certaine marge de manoeuvre. En effet,
il lui est permis de recruter un salarié, pour le poste
précédemment occupé par le travailleur qui
effectue son service national. Il suffit qu'il reste en mesure
d'exécuter son obligation de réintégration,
en pouvant proposer à l'intéressé un poste
équivalent.
L'employeur ne saurait s'acquitter de cette obligation en proposant
au salarié antérieurement lié par un contrat
à durée indéterminée un emploi à
durée déterminée (Réponse ministérielle,
JO Sénat, 12 mars 1981, p. 366).
2/ Possibilités
d'exonération pour l'employeur
6. L'article L122-18 prévoit que la suppression
de l'emploi qu'occupait le salarié concerné ou d'un
emploi ressortissant de la même catégorie professionnelle
libère l'employeur.
La preuve de la suppression de l'emploi ou d'un emploi de même catégorie professionnelle incombe dans tous les cas à l'employeur ( Cour de Cassation, chambre sociale 7 mars 1985).
La Cour de Cassation a estimé que le remplacement du salarié
concerné ne justifie pas le refus de réintégration,
dès lors que son poste subsiste toujours (chambre sociale,
19 mars 1985).
7. En revanche, l'attribution des fonctions exercées par l'intéressé à un autre travailleur de l'entreprise, qui les cumule avec ses propres fonctions, dans le cadre d'une restructuration liée à la conjoncture économique constitue une suppression de poste au sens de l'article L 122-18
(Cour de Cassation, chambre sociale, 28 mars 1990). Cet arrêt
peut ouvrir une brèche dans le dispositif de l'article
L 122-18, si on l'interprète de façon extensive.
En effet, l'employeur peut embaucher un salarié et l'affecter
à la fois au poste du salarié parti pour le service
national et à un autre poste.
L'employeur qui a démontré une suppression de poste
au sens de l'article L 122-18 n'a pas à respecter un quelconque
délai de préavis ou verser des indemnités
de préavis. Le contrat de travail est, dans ce cas, considéré
comme rompu dès l'incorporation au service national du
travailleur (Cour de Cassation, chambre sociale, 17 octobre 1979).
Il résulte de l'article L 122-19 du code du travail que
si le salarié n'a pas pu être réintégré,
il dispose d'une priorité de réembauchage à
l'encontre de son ancien employeur pendant un an.
8. En cas d'inobservation de cette obligation, l'employeur encourt à la fois une sanction de nature civile et une sanction de nature pénale:
- Conformément à l'article L 122-23 du code du travail, des dommages-intérêts sont alloués à l'intéressé en fonction du préjudice qu'il a subi (Cour de Cassation, chambre sociale, 11 avril 1991).
Le juge ne peut en aucun cas prononcer une réintégration forcée sous astreinte (Cour de Cassation, chambre sociale, 4 février 1988).
- Les infractions aux dispositions de l'article L 122-18 du code
du travail sont punies d'une amende de cinquième classe
(article R 152-2 du code du travail).
L'article L 122-14-4 du code du travail, applicable aux entreprises
d'11 salariés et plus et aux salariés ayant au moins
2 ans d'ancienneté, dispose que si le licenciement survient
pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse,
le tribunal peut proposer la réintégration du salarié
dans l'entreprise.
9. Il s'agit d'une proposition qui est faite aux deux parties.
Dès lors, l'employeur est libre de refuser de réintégrer
le salarié concerné dans l'entreprise. Le juge ne
peut donc ordonner la réintégration forcée
malgré l'opposition de l'employeur (Cour de Cassation,
chambre Sociale, 8 juillet 1985).
10. L'employeur qui refuse de réintégrer
le salarié concerné est condamné à
verser une indemnité d'un montant minimum qui correspond
au salaire des six derniers mois (article L 122-14-4). Il s'agit
d'une amende civile, indépendante de toute recherche de
la réalité d'un préjudice et qui ne peut
être réduite du fait de la responsabilité
du salarié (Cour de Cassation, Chambre Sociale, 30 juin
1982). De même, le juge n'a pas à donner de motivation
particulière pour l'accorder (Cour de Cassation, Chambre
Sociale, 28 février 1985).
La Chambre Sociale de la Cour de Cassation a précisé
que le salaire de référence était le salaire
brut du salarié (22 juin 1993) auquel il convient d'ajouter
les primes et tous les avantages en nature (3 décembre
1992).
D'autre part, cette indemnité peut être cumulée
avec l'indemnité de licenciement, ou toute autre indemnité
réparant un préjudice distinct du licenciement (Cour
de Cassation, Chambre Sociale, 12 mars 1987).
11. Les représentants du personnel bénéficient
d'une protection très particulière au sein de l'entreprise.
L'employeur doit, avant de procéder à leur licenciement,
obtenir l'autorisation de l'inspecteur du travail. En cas d'inobservation
de cette procédure (B), ou d'annulation de l'autorisation
de l'inspecteur du travail (A), il est tenu de réintégrer
les salariés concernés.
12. La loi du 28 octobre 1982 a introduit dans le code
du travail des dispositions prévoyant la réintégration
des salariés protégés en cas d'annulation
de la décision administrative autorisant leur licenciement.
13.Sont concernés par ces dispositions :
- les délégués syndicaux (article L 412-19),
- les délégués du personnel (article L 425-3),
- les représentants du personnel au comité d'entreprise
(article L 436-3).
b) Une décision
d'annulation de l'autorisation
14. La loi impose cette obligation à l'employeur
en cas d'annulation de l'autorisation :
- par le ministre du travail suite à un recours hiérarchique,
- par le juge administratif saisi d'un recours contentieux .
Certains employeurs ont invoqué le caractère non
définitif de la décision d'annulation, pour refuser
de réintégrer les salariés concernés.
La Cour de Cassation a clairement posé le principe que
le droit à réintégration du salarié
protégé n'est pas subordonné au caractère
définitif de la décision d'annulation ( chambre
sociale 14 janvier 1988).
c) Une manifestation
expresse de la volonté de l'intéressé
15. Les articles L 412-19, L 425-3 et L 436-3 subordonnent
ce droit à une demande expresse de l'intéressé
formulée dans les deux mois suivant la notification de
la décision d'annulation.
Dès lors, le défaut ou la formulation hors délai
de cette demande vaut renonciation de la part des intéressés.
16. Cette obligation de réintégration est-elle transmise au repreneur de l'entreprise en cas de cession ?
L'annulation de l'autorisation de licencier un salarié protégé a nécessairement pour effet d'enlever sa validité au licenciement. Elle confère donc au salarié le droit de reprendre son emploi dans l'entreprise. Dans ces conditions, en effet, le licenciement est considéré comme nul, le contrat de travail est réputé n'avoir jamais été rompu.
Il résulte de ce constat que le contrat de travail du salarié
concerné, en cours au moment de la cession, est transféré
au repreneur sur le fondement de l'article L 122-12 du code du
travail. Le repreneur est donc tenu de réintégrer
l'intéressé ( Cour de Cassation, chambre sociale,
10 octobre 1990).
17. Diverses interrogations ont été soulevées
dès l'adoption de la loi de 1982.
- L'employeur peut-il être contraint de réintégrer l'intéressé ?
Une circulaire du ministre du Travail énonce que si l'employeur
refuse la réintégration elle peut être ordonnée
sous astreinte par le conseil des prud'hommes (circ. Min. DRT
n° 13, 25 octobre 1983).
- La réintégration doit-elle avoir lieu uniquement dans l'emploi initial ?
Il résulte de la loi de 1982 que la réintégration peut être faite soit dans son emploi initial soit dans un emploi équivalent.
Dès lors, l'employeur peut embaucher un nouveau salarié dans l'emploi de l'intéressé, s'il reste en mesure de proposer un emploi équivalent au salarié protégé.
Le Conseil d'Etat estime que s'il n'existe aucun emploi disponible dans l'entreprise, l'employeur peut demander l'autorisation de licencier le salarié pour motif économique à condition de démontrer que sa réintégration entraînerait des difficultés économiques (CE 3 octobre 1990).
La Cour de Cassation, quant à elle, se montre d'une extrême
rigueur. Ainsi, dans un arrêt du 2 juin 1993 elle estime,
qu'un délégué syndical est fondé à
demander sa réintégration dans l'entreprise 8 ans
après son licenciement illégitime. Dans ce cas,
l'employeur ne peut faire état d'une nouvelle organisation
du travail, ou d'un changement des réalités économiques
et financières.
18. Outre la condamnation à réparer le préjudice subi par le salarié, l'employeur qui refuse de le réintégrer, commet le délit d'entrave à l'exercice du droit syndical (Cour de Cassation, chambre criminelle 13 mars 1984).
Il encourt un emprisonnement de 2 mois à un an et une amende
de 2000 à 20000 francs. En cas de récidive, l'emprisonnement
peut être porté à 2 ans et l'amende à
40000 francs (Article L481-2 du code du Travail).
Selon une jurisprudence désormais traditionnelle le licenciement
d'un salarié protégé, prononcé en
violation des formes de la procédure protectrice, ou malgré
une décision administrative de refus est frappé
de nullité ( Cass. Soc. 3 juin 1948).
Sont concernés les salariés dont le licenciement
est soumis à une procédure particulière (voir
n°).
19. Contrairement à la règle posée
en matière de demande de réintégration suite
à l'annulation de l'autorisation de licenciement, aucun
délai n'est imposé au salarié protégé,
licencié irrégulièrement, pour demander sa
réintégration (Cass. Soc 26 février 1992).
20. L'employeur doit réintégrer le salarié soit dans l'emploi précédemment occupé soit dans un emploi équivalent (voir n° ).
Il a été admis que le refus de réintégration
constituait une voie de fait ; dans ce cas, la réintégration
peut être ordonnée sous astreinte par le juge des
référés (Cass. Soc. 10 janvier 1989).
La Cour de Cassation a cependant affirmé que la réintégration
ne peut être ordonnée si elle est matériellement
impossible (9 juillet 1986).
21. En cas de refus de réintégration, l'employeur est passible des sanctions applicables au délit d'entrave au droit syndical (voir n° 18). Il peut être en outre condamné à réparer le préjudice par l'intéressé.
Lorsque le licenciement, malgré son irrégularité
de forme, a été prononcé pour une cause réelle
et sérieuse, le salarié concerné a le droit
uniquement à une indemnité correspondant à
la sanction de la perte du statut protecteur (Cass. Soc. 21 novembre
1990 et 12 février 1991).
Deux types de mesures sont venues restreindre le libre choix de
la personne embauchée: les priorités de réembauchage
(I) et les priorités d'embauche des handicapés (II).
Le législateur a créé au profit de certains salariés dont le contrat de travail a été rompu, un droit, de priorité d'embauche dans leur ancienne entreprise. La liberté contractuelle de l'employeur se trouve ainsi légalement réduite puisque dans l'hypothèse où il entend recruter, il n'a plus le libre choix de son contractant. Il doit en effet préférer ces salariés à tout autre candidat.
Bénéficient de ce droit les salariés licenciés
pour raisons économiques (A), les salariés qui ont
rompu leur contrat de travail pour un congé postnatal (B),ou
pour exercer un second mandat parlementaire (C), les salariés
qui réclament un emploi à temps complet ou à
temps partiel dans l'entreprise (D), les salariés qui n'ont
pas pu être réintégrés à l'issue
de leur service national (E).
L'article 321-14 du code du travail prévoit que le salarié
qui a été licencié pour motif économique
ou qui a adhéré à une convention de conversion
bénéficie d'une priorité de réembauchage.
L'article 321-14 est applicable au salarié qui a été
licencié pour un motif économique (a), s'il a exprimé
sa volonté d'en bénéficier (b).
a) Une obligation
faisant suite à un licenciement économique ou à
une convention de conversion
22. Ce texte a une vocation générale à
s'appliquer; La priorité de réembauchage joue pour
les salariés licenciés individuellement ou collectivement,
pour les salariés licenciés purement et simplement
ou ayant adhéré à une convention de conversion.
En outre, aucune condition d'ancienneté n'est exigée.
La Cour de Cassation a cependant entendu faire prévaloir
une interprétation restrictive de cet article, en limitant
son application strictement aux cas de licenciements économiques.
Ainsi, l'employeur qui a licencié un salarié pour
motif économique alors qu'en réalité il s'agissait
d'un licenciement pour un motif inhérent à sa personne,
ne peut être condamné pour l'inexécution d'une
priorité de réembauchage. En effet, dans ces conditions
le licenciement est sans cause réelle et sérieuse;
il ne peut donc être qualifié de licenciement économique
(chambre sociale, 14 mai 1996).
b) Une manifestation
expresse de la volonté de l'intéressé
23. L'article L 321-14 subordonne l'application de ce droit
à une demande de l'intéressé formulée
dans les quatre mois suivant la rupture du contrat de travail
Il résulte donc de cette disposition que le silence du
travailleur concerné vaut renonciation à bénéficier
de ce droit. Le salarié, dans ce cas, ne peut reprocher
à son ancien employeur l'inexécution de son obligation
(Cour de Cassation, chambre sociale, 2 mars 1989).
24. Une fois expressément manifestée, cette
volonté peut-elle être remise en question par un
refus de l'intéressé aux propositions de son ancien
employeur? On peut douter de la volonté du travailleur
de retrouver un emploi s'il refuse les propositions qui lui sont
faites, et donc remettre en question la priorité de réembauchage.
Cependant, admettre cette solution conduirait à certains
abus. L'employeur souhaitant se libérer de cette obligation
pourrait proposer un emploi dont il sait qu'il ne sera pas accepté.
Il ressort des débats à l'Assemblée Nationale
lors de l'élaboration de cette disposition, que le législateur
a rejeté la possibilité pour l'employeur d'être
libéré suite à un refus de l'intéressé
(JOAN, 26 mai 1989, p. 1282).
Dans le même esprit, la Cour de Cassation a affirmé
dans un arrêt du 5 octobre 1995 que l'employeur n'est pas
libéré lorsque le salarié occupe un nouvel
emploi dans une autre entreprise.
Il convient en outre de préciser que la Cour de Cassation
considère que la date de rupture du contrat, date à
laquelle le délai de quatre mois pour manifester sa volonté
de bénéficier de ce droit commence à courir,
est la date de fin de préavis exécuté ou
non (chambre sociale, 21 juillet 1993).
2/ Mise en oeuvre
de la priorité de réembauchage
a) Cadre de la
priorité de réembauchage
La première solution serait de refuser la transmission
de cette obligation par application de la règle de l'intransmissibilité
des dettes aux ayants cause à titre particulier. La seconde
consisterait à admettre la transmission de cette obligation
par application de l'article L 122-12 du code du travail qui prévoit
la transmission des obligations liées aux contrats en cours
au jour de la modification dans la situation juridique de l'employeur.
La Cour de Cassation considère que cette obligation s'exerce vis à vis de l'entreprise et subsiste en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur (chambre sociale, 12 février 1992). Elle rejette ainsi la règle de l'intransmissibilité des dettes aux ayants cause à titre particulier, mais ne se fonde pas sur l'article L 122-12. En effet cet article s'applique pour les contrats en cours au jour de la modification; or le salarié licencié pour motif économique ne bénéficie pas d'un contrat en cours au jour de cette modification. La transmission de cette obligation au repreneur est justifiée par le fait qu'il s'agit d'une obligation légale qui s'exerce à l'encontre de l'entreprise, qui ne serait être tenue en échec par une simple cession. Cette jurisprudence peut être transposée pour toutes les obligations légales qui pèsent directement sur l'entreprise.
26. Une autre question se pose concernant le cadre de la
mise en oeuvre de cette obligation. Doit-on prendre en considération
la notion de groupe de sociétés pour savoir si cette
obligation a été respectée? La Cour de Cassation
considère que l'employeur qui embauche un salarié
d'une autre société du même groupe, méconnaît
son obligation; ce recrutement est assimilé à l'embauche
d'un salarié d'une autre société et donc
externe à l'entreprise (chambre sociale, 12 février
1992 et 7 novembre 1995).
Dans le même esprit, il paraît exclu de concevoir
que l'ancien salarié d'une société d'un groupe
puisse exercer son droit de priorité vis à vis de
l'ensemble des sociétés du groupe. Ainsi, l'ancien
salarié d'une société d'un groupe ne saurait
invoquer sa priorité de réembauchage qu'à
l'égard de la société qui l'employait. Les
dirigeants de sociétés membres d'un groupe, désirant
embaucher ne doivent donc pas prendre en considération
les obligations pesant sur les autres sociétés de
ce groupe. Admettre le contraire reviendrait à méconnaître
le principe de l'autonomie juridique et donc la personnalité
morale de chaque société.
b) Portée
de la priorité de réembauchage
27. Il résulte de l'article L 321-14 que l'employeur est tenu d'une double obligation:
- Une obligation d'information: il doit informer le salarié concerné par la priorité de réembauchage des emplois disponibles et compatibles avec ses qualifications; en outre, il doit informer les représentants du personnel des postes disponibles et afficher la liste de ces postes.
- Une obligation de "préférence": il doit
préférer le salarié qui bénéficie
de cette priorité par rapport aux autres candidats éventuels.
La priorité de réembauchage s'exerce à l'encontre
de l'employeur pendant un an à compter de la date de rupture
du contrat de travail (article L 321-14). Ce délai commence
à courir à la fin du préavis exécuté
ou non (Cour de Cassation, chambre sociale, 21 juillet 1993).
28. La Cour de Cassation a jugé que lorsque la nécessité de pourvoir un poste est apparue avant l'expiration du délai de un an, le salarié concerné peut bénéficier de la priorité de réembauchage. Il en est ainsi alors même que l'offre d'emploi correspondante est diffusée postérieurement à l'expiration de ce délai (chambre sociale, 6 avril 1994).
Cependant, les juges ont eu tendance à s'immiscer dans
la gestion du personnel et à nier totalement la capacité
de l'employeur à développer une gestion correspondant
aux objectifs économiques ou à la situation financière
d'une entreprise. Ainsi, l'employeur qui, en raison de la situation
financière et économique de l'entreprise, recourt
à un contrat emploi-adaptation ,ne pouvant être proposé
à un salarié prioritaire, méconnaît
cette obligation (Cour de Cassation, chambre sociale, 21 juillet
1993).
c) Critères
de mise en oeuvre de la priorité de réembauchage
L'article 321-14 énonce qu'une priorité de réembauchage
est accordée aux salariés concernés sur les
emplois disponibles et compatibles avec leurs qualifications.
Disponibilité de l'emploi :
29. Divers précisions concernant cette notion doivent être apportées. L'article 321-14 fait référence à l'expression "tout emploi disponible", sans formuler la moindre restriction.
La Cour de Cassation a néanmoins estimé que l'emploi d'un salarié parti en congé n'était pas disponible. Dès lors, l'employeur peut librement choisir la personne qu'il recrutera pour remplacer un salarié en congé maladie (chambre sociale, 12 décembre 1995) ou en congé payé (chambre sociale, 17 juin 1992), sans avoir à respecter une priorité de réembauchage.La liberté de choisir la personne recrutée est donc entière tant qu'il ne s'agit pas de pourvoir un poste totalement vacant.
La Cour suprême, ne pose aucune restriction quant à
la nature du contrat régissant l'emploi proposé.
Est considéré comme disponible l'emploi vacant pourvu
indifféremment par un contrat à durée déterminé
ou un contrat à durée indéterminée.
L'employeur est donc tenu de proposer tout emploi quelle que soit
la nature juridique du contrat qui doit être conclu (chambre
sociale, 26 janvier 1994).
Compatibilité de l'emploi :
30. La priorité de réembauchage porte sur les emplois disponibles compatibles non seulement avec la qualification du salarié au moment du licenciement mais également celle qu'il a acquise suite à une formation qualifiante (article L 321-14).
L'article L 321-14 subordonne néanmoins la prise en considération
des nouvelles qualifications acquises par l'intéressé
à une information préalable de l'employeur. Le salarié
ne saurait donc reprocher à l'employeur de ne pas lui avoir
proposé un emploi compatible avec ses nouvelles qualifications
s'il ne l'en avait pas informé.
31. En cas d'inobservation de ces dispositions, l'employeur peut être condamné à verser des dommages-intérêts au travailleur concerné, en fonction du préjudice qu'il a subi.
L'article L 122-14-2 du code du travail prévoit que dans
les entreprises de onze salariés ou plus et lorsque le
salarié concerné a plus de deux ans d'ancienneté,
cette indemnité ne peut être inférieure à
deux mois de salaire (sur le salaire à prendre en compte,
voir n° 10).
Si la loi prévoit un plancher, il appartient au juge d'apprécier
souverainement le montant du préjudice subi; La Cour d'Appel
de Poitiers a pu ainsi valablement accorder une indemnité
de 150 000 F, indemnité bien supérieure au plancher
institué par l'article L 122-14-4 (Cour de Cassation, chambre
sociale, 6 avril 1994).
L'article L 122-28 du code du travail énonce que la mère
qui a rompu son contrat de travail pour élever son enfant,
à la suite d'un congé maternité, dispose
d'une priorité de réembauchage pendant un an.
32. L'article L 122-28 subordonne ce droit à une
manifestation de volonté de l'intéressé sous
forme de lettre recommandée avec avis de réception
dans l'année suivant la rupture. (Sur le silence de l'intéressé
et la computation du délai, voir la jurisprudence concernant
la priorité de réembauchage suite à un licenciement
économique ).
L'article R 122-10 du code du travail prévoit la forme
dans laquelle le salarié doit manifester son refus d'une
proposition faite par l'employeur. Il est muet sur les conséquences
d'un tel refus. On peut donc valablement déduire qu'un
tel refus ne remet pas en cause la volonté de l'intéressé
de bénéficier de cette priorité de réembauchage.
Il en est de même quand la salariée concernée
a trouvé un emploi dans une autre entreprise (voir n°
4).
2/ Mise en oeuvre
de cette obligation
33. La priorité de réembauchage suite à un congé postnatal est une obligation légale qui pèse sur l'employeur. Elle s'impose donc alors même qu'un changement est intervenu dans la situation juridique de l'employeur (voir n° 25).
D'autre part, l'employeur qui embauche un salarié d'une
société soeur ou filiale méconnaît
cette obligation. En effet, la jurisprudence concernant l'appréciation
de cette obligation dans les groupes de sociétés
est applicable (voir n° 26).
34. Conformément à l'article L122-28, l'employeur
est tenu, pendant un an, d'embaucher la salariée concernée
par priorité, dans les emplois auxquels sa qualification
lui permet de prétendre.
Il résulte des travaux parlementaires nécessaires à l'élaboration de l'article L 122-28 qu'il ne s'agit pas d'un droit absolu à l'embauche, assimilable à un droit de réintégration. Le salarié ne peut donc revendiquer ce droit que lorsqu'un poste est disponible dans l'entreprise.
Dès lors, l'employeur est délié de cette
obligation lorsque l'année durant laquelle s'exerce la
priorité de réembauchage, aucun poste correspondant
à l'activité de l'intéressée n'était
vacant (Cour de Cassation, Chambre Sociale, 10 décembre
1985). L'employeur peut donc procéder à l'embauche
d'un salarié externe à l'entreprise l'année
suivante, sans méconnaître cette obligation (cependant
un risque existe s'il apparaît que le poste concerné
était déjà vacant l'année durant laquelle
la priorité s'exerçait, voir n° 28).
35. En revanche l'employeur viole cette obligation en embauchant
trois employées d'une compétence technique voisine
de l'intéressée et qui manifestement accomplissent
un travail qui était le sien (Cour d'Appel de Paris, 22
mai 1975).
D'autre part, le salarié ne peut valablement revendiquer
cette priorité que si le poste disponible correspond à
sa qualification. (sur la compatibilité d'un emploi avec
les qualifications du salarié, voir le n° 30).
En outre, l'employeur doit, dés lors qu'il envisage de
procéder à un recrutement, en informer le salarié
bénéficiant de cette priorité par lettre
recommandée avec avis de réception (article R 122-10).
36. L'inobservation par l'employeur de cette obligation
donne lieu à une double sanction:
D'une part, il peut être condamné, en application de l'article R 152-3 du code du travail, à une amende de cinquième classe.
D'autre part, il peut être contraint à l'attribution
de dommages-intérêts au profit du bénéficiaire
de cette priorité (article L122-30 al1).
L'article L 122-24-2 du code du travail énonce que le salarié
dont le contrat de travail a été rompu suite à
un renouvellement d'un mandat parlementaire ou à son élection
dans l'autre assemblée bénéficie d'une priorité
de réembauchage.
37. Le salarié doit, à l'issue de son mandat
parlementaire, informer l'employeur de sa volonté de bénéficier
de cette priorité par lettre recommandée avec avis
de réception adressée dans les deux mois qui suivent
l'expiration de son mandat (L 122-24-2).
Le silence de l'intéressé à l'issue de ce
délai vaut renonciation . La manifestation de sa volonté
de bénéficier de cette priorité n'est pas
remise en question par un refus de sa part , ou par son recrutement
dans une autre entreprise (voir n° 24).
a) Cadre de la
mise en oeuvre (voir n° 25)
38. L'employeur est tenu d'embaucher l'intéressé par priorité pendant un an dans les emplois auxquels sa qualification lui permet de prétendre (article 122-24-2).
Il doit s'agir nécessairement d'emplois vacants dans la mesure où le droit dont dispose le salarié n'est pas un droit de réintégration, mais seulement une priorité de réembauchage .
Les qualifications du salarié concerné doivent correspondre
à l'emploi vacant (compatibilité de l'emploi aux
qualifications de l'intéressé, voir n° 30).
39. La loi est totalement muette sur les sanctions applicables
en cas de méconnaissance de cette obligation par l'employeur.
Il peut donc uniquement être condamné à réparer
le préjudice subi par le salarié concerné.
Les salariés à temps partiel qui souhaitent occuper
ou reprendre un emploi à temps complet et les salariés
à temps complet qui souhaitent reprendre ou occuper un
emploi à temps partiel dans le même établissement
ou, à défaut, dans la même entreprise ont
priorité pour l'attribution d'un emploi ressortissant à
leur catégorie professionnelle ou un emploi équivalent
(article L 212-4-5 du code du travail).
40. La loi est silencieuse concernant d'éventuelles
conditions de délai ou de forme. Le salarié bénéficie
donc de cette priorité s'il en a informé son employeur,
peu important le procédé utilisé.
41. Cette obligation s'exerce à l'encontre de l'établissement
ou, à défaut, à l'encontre de l'entreprise.
Il résulte de cette formulation que le salarié peut
requérir tout poste à temps complet ou à
temps partiel, non seulement dans son établissement d'origine
mais également dans l'entreprise tout entière.
Sur les conséquences d'un changement dans la situation
juridique de l'employeur (voir n° 25).
Sur l'application de cette obligation dans le cadre de groupe
de sociétés.
Obligation de priorité d'attribution
:
42. Conformément à l'article L 212-4-5, l'employeur
a l'obligation d'accéder à la demande de l'intéressé
chaque fois qu'un emploi à temps complet ou qu'un emploi
à temps partiel, ressortissant de sa catégorie professionnelle
ou équivalent, est à pourvoir.
Cette disposition n'a pas pour effet d'imposer à l'employeur
de créer un emploi à temps complet ou un emploi
à temps partiel à la demande des intéressés.
Elle oblige uniquement l'employeur à les préférer
lorsqu'un poste vacant est à pourvoir. A titre d'exemple,
l'arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation
du 29 mars 1995 énonce.
Obligation d'information :
43. Conformément à l'article 212-4-5, la liste des emplois disponibles doit être portée à la connaissance des intéressés.
Le chef d'entreprise doit expliquer, au comité d'entreprise
ou aux délégués du personnel, les raisons
qui l'ont amené à refuser à des salariés
à temps complet de passer à temps partiel et à
des salariés à temps partiel de passer à
temps complet (article L 212-4-5 al 3).
44. En cas d'inobservation de cette obligation par l'employeur,
des dommages-intérêts peuvent être alloués
aux intéressés, en fonction du préjudice
qu'ils ont subi (Cour de Cassation, chambre sociale, 29 mars 1995).
Un droit de priorité à l'embauchage valable durant
une année à compter de sa libération est
réservé à tout travailleur qui n'aura pas
pu être réemployé à l'expiration du
service national dans l'établissement où il travaillait
avant son départ (article L 122-19 du code du travail).
45. L'article L 122-19 et L 122-18 du code du travail,
constituant un dispositif destiné à protéger
le salarié parti au service national, ont été
adoptés dans le même esprit par le législateur.
La priorité de réembauchage édictée
par l'article L 122-19 ne s'applique donc qu'aux salariés
concernés par les dispositions de l'article L 122-18: sauf
convention internationale contraire, en sont exclus les salariés
ressortissants d'un Etat tiers à l'Union Européenne
qui effectue son service militaire dans son pays.
46. L'article L 122 -19 du code du travail énonce
que cette priorité bénéficie "au salarié
de retour du service national qui n'a pas pu être réemployé
dans l'établissement où il travaillait au moment
de son départ". On peut, en retenant une interprétation
littérale et restrictive de ce texte, considérer
que bénéficient de cette priorité uniquement
les salariés qui n'ont pas pu être réintégrés
dans l'établissement. Seraient donc exclus tous les salariés
qui n'ont pas demandé à être réintégré,
dans les formes prescrites par l'article L 122-18 (notification
de la volonté de retrouver un emploi dans l'entreprise,
formulée au plus tard dans le mois suivant la libération).
Une telle interprétation est rejetée par la doctrine
(M. Rembaud, Juris-classeur droit social, fasc. 31-50). En effet,
il est admis que bénéficient de ce droit :
- les salariés qui ont fait une demande de réintégration (dans les formes prescrites par l'article L 122-18) qui n'a pas abouti,
- les salariés qui ont manifesté par écrit le désir de retrouver un emploi dans l'entreprise l'année suivant leur libération.
Dans tous les cas, il faut une demande expresse de la part de l'intéressé.
Sur une éventuelle remise en cause de la volonté
de bénéficier de cette priorité (voir n°
24).
47. La priorité de réembauchage à l'issue du service national est une obligation légale qui, à l'instar de la priorité de réembauchage suite à un licenciement économique, s'exerce à l'égard de l'entreprise; elle est donc transmise à tout repreneur éventuel (voir n°25).
Sur la prise en compte de la notion de groupe pour apprécier
si cette obligation a été respectée.
48. L'employeur est tenu d'embaucher le salarié concerné par priorité sur les autres candidats dans son ancien emploi ou un emploi ressortissant de la même catégorie professionnelle.
L'article L 122-19 énonce que bénéficie de cette priorité "tout travailleur qui n'a pas pu être réemployé à l'expiration du service national dans l'établissement où il travaillait au moment de son départ".
L'usage du terme "établissement" est de nature
à susciter quelques interrogations. En effet, si on interprète
strictement cette formule, l'employeur est tenu vis à vis
de salariés qui ont été réintégrés
dans l'entreprise, mais pas dans l'établissement dans lequel
ils travaillaient au moment de leur départ. Dans ce cas,
l'employeur devrait leur offrir la priorité d'emploi, alors
même qu'ils ont retrouvé un emploi dans l'entreprise,
afin de leur permettre de travailler à nouveau dans l'établissement
initial.
49. En cas d'inobservation de cette obligation, l'employeur peut être condamné à verser à l'intéressé des dommages-intérêts dont le montant est fixé par le juge (article L 122-23).
En outre, l'employeur qui a méconnu l'article L 122-19
peut être condamné à une amende de cinquième
classe (article R 152-2 du code du travail).
INTRODUCTION : GENERALITES ET TEXTES
APPLICABLES.
50. Dans un marché du travail particulièrement dégradé, l'insertion professionnelle des personnes handicapées soulève des difficultés considérables provenant soit d'une inadaptation au poste de travail compte tenu de la configuration des locaux et des moyens d'accès, soit d'une certaine non acceptation des personnes handicapées par l'environnement social.
Du fait de la vulnérabilité de cette catégorie
de salariés, le législateur a élaboré
une réglementation protectrice spécifique initialement
conçue au profit des seuls mutilés de guerre et
assimilés (Loi du 24.06.1924) puis élargie
à l'ensemble des travailleurs diminués quelle que
soit l'origine de leur handicap (Loi du 23.11.1957) .
51. Dans un premier temps protectrice, la législation a évolué afin d'assurer aux personnes handicapées leur réadaptation et réinsertion sur le marché du travail. Cette évolution a abouti à la Loi du 10 juillet 1987, qui tend à " créer une dynamique en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés en prenant en compte les contraintes économiques des employeurs et en les associant pleinement à la politique qui leur est proposée...".
Cette loi opère une fusion définitive entre l'obligation d'emploi des mutilés de guerre et la priorité d'emploi des travailleurs handicapés, ce qui se traduit essentiellement par l'adoption d'un seuil unique d'assujettissement pour les employeurs ainsi que d'un pourcentage unique d'emploi obligatoire.
La procédure liée à la réservation d'emploi a été supprimée, le contrôle de l'obligation ne s'opérant que dans le cadre de la déclaration annuelle.
Enfin, la loi a élargi le champ des bénéficiaires, a étendu l'obligation aux collectivités publiques et crée à la charge des employeurs assujettis une véritable obligation de résultat.
L'ensemble des dispositions relatives au statut des salariés
handicapés et aux mutilés de guerre est codifié
dans le code du travail: art. L 323-1 et s.; R 323-1 et
s. ; D 323-1 et s.
Il se définit d'une part au regard des bénéficiaires
et d'autre part des entreprises assujetties.
1/ BENEFICIAIRES
DE L'OBLIGATION D'EMPLOI
52. Bénéficient de l'obligation d'emploi en vertu
de l'art. L 323-3 c. travail :
- Les travailleurs reconnus par la COTOREP (Commission Technique d'Orientation et de Reclassement Professionnel) .
Il s'agit de toute personne dont les possibilités d'obtenir
ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par
la suite d'une insuffisance ou d'une diminution de ses capacités
physiques ou mentales.
- Les victimes d'accident du travail ou de maladies professionnelles
ayant entraîné une incapacité permanente au
moins égale à 10% et titulaire d'une rente attribuée
au titre du régime général de sécurité
sociale ou de tout autre régime de protection sociale obligatoire.
- Les titulaires d'une pension d'invalidité attribuée
au titre de régime général de sécurité
sociale ou de tout autre régime de protection sociale obligatoire
ou au titre des dispositions régissant les agents publics,
à condition que l'invalidité des intéressés
réduise au moins des 2/3 leur capacité de travail
ou de gain.
- Les anciens militaires et assimilés titulaires d'une
pension militaire d'invalidité au titre du code des pensions
militaires d'invalidité et des victimes de guerre.
- Les veuves de guerre non remariées, titulaires d'une
pension au titre du même code dont le conjoint militaire
est décédé des suites d'une blessure ou d'une
maladie imputable à un service de guerre ou alors qu'il
était en possession d'un droit à pension militaire
d'invalidité d'un taux au moins égal à 85%.
- Les orphelins de guerre âgés de moins de 21 ans
et les mères veuves non remariées ou les mères
célibataires, dont respectivement le père ou l'enfant,
militaire ou assimilé, est décédé
des suites d'une blessure ou d'une maladie imputable à
un service de guerre ou alors qu'il était en possession
d'un droit à pension d'invalidité d'un taux au moins
égal à 85%.
- Les veuves de guerre remariées ayant au moins un enfant
à charge issu du mariage avec le militaire ou assimilé
décédé, lorsque ces veuves ont obtenu ou
auraient été en droit d'obtenir, avant leur remariage,
une pension dans les mêmes conditions que ci-dessus.
- Les femmes d'invalides internés pour aliénation
mentale imputable à un service de guerre, si elles bénéficient
de l'art. L 124 du code des pensions militaires d'invalidité
et des victimes de guerre.
53. Deux nouvelles catégories sont introduites:
- les victimes d'accident du travail ou de maladie professionnelle titulaires d'une rente correspondant à une incapacité permanente d'au moins 10%
- Les titulaires d'une pension d'invalidité correspondant à une invalidité de 2/3.
Les intéressés n'ont plus à passer devant la COTOREP pour obtenir la qualité de travailleur handicapé.
54. En application de l'art. L 323-10 du c.trav., la qualité de salarié handicapé ne peut être reconnue qu'à des personnes atteintes d'un handicap générant une insuffisance ou une diminution physique ou mentale et susceptible de réduire, de façon durable, leurs possibilités d'obtenir ou de conserver un emploi.
Les séquelles transitoires ne sont donc pas prises en compte (C.E 22.01.1991)
Seule la COTOREP est habilitée à reconnaître la qualité de handicapé à une personne, peu importe si apparemment le handicap est ou non partiellement visible. (Cass. Soc.19.06.1991).
Sa décision s'impose aux décisions contraires ou
différentes émanant d'autres organismes telles les
caisses primaires d'assurance maladie. (C.E 18.01.1991).
2/ Etablissements
assujettis à l'obligation d'emploi
55. Tout employeur occupant au moins 20 salariés est tenu d'occuper à temps plein ou à temps partiel des bénéficiaires de la loi, dans la proportion de 6% de l'effectif.(art. l323-1)
Dans les entreprises à établissements multiples, l'obligation s'apprécie établissement par établissement.
La circulaire n° 19-88 du 23.03.1988 retient comme définition
de l'établissement celle précisée par l'INSEE
: l'établissement est une unité productrice située
en un lieu topographiquement distinct et dans laquelle une ou
plusieurs personnes travaillent pour le compte d'une même
entreprise.
56. La loi ne procède plus par énumération des activités concernées.
Toutes les entreprises sont donc concernées, qu'elles relèvent du secteur privé ou public.
Toutefois:
- les entreprises de travail temporaire ne sont astreintes à l'obligation d'emploi que pour leur personnel permanent ;
- les EPIC sont soumis au régime de droit commun, tandis
que les collectivités publiques et organismes publics sont
assujettis selon des modalités particulières.
57. Les employeurs susvisés ne sont assujettis à
cette obligation que s'ils occupent au moins 20 salariés.
cadre d'appréciation de cet effectif.
Cet effectif s'apprécie au 31 décembre de chaque
année au niveau de chaque établissement envisagé
isolément et non au niveau de l'entreprise.
calcul du seuil de 20 salariés
58. Le décompte des effectifs à prendre en compte pour l'obligation d'emploi doit se faire selon les modalités applicables à la mise en place des comités d'entreprise.
Sont pris en compte intégralement dans l'effectif
:
- les salariés sous CDI si leur contrat de travail est en cours au 31 décembre de l'année.
- les travailleurs à domicile.
- les travailleurs handicapés employés dans l'entreprise,
dans les ateliers protégés et dans les centres de
distribution de travail à domicile.
En revanche sont pris en compte dans l'effectif au prorata
de leur temps de présence au cours des 12 mois, sauf s'ils
remplacent un salarié absent ou dont le contrat de travail
est suspendu :
- les salariés sous CDD.
- les salariés sous contrat de travail intermittent.
- les salariés mis à la disposition de l'entreprise
par une entreprise extérieure y compris les travailleurs
temporaires.
Il y a lieu d'intégrer ces salariés dans l'effectif
s ils ont été occupés pendant la période
du 01 janvier au 31 décembre de l'année de référence
même s'ils ne font plus partie de l'effectif.
EXEMPLE : Au cours d'une année, un établissement a occupé
- 3 salariés sous CDD de 3 mois (mars à mai)
- 1 salarié sous CDD de 6 mois (juillet à décembre)
- 1 salarié sous CDD de 9 mois (janvier à septembre)
Ces salariés seront pris en compte dans l'effectif au 31 déc. de l'année dans les conditions suivantes:
3x3+(1x6)+(1x9) = 24 = 2 unités
12 12
N.B.: les salariés à temps partiel, quelque soit la nature de leur contrat de travail, comptent pour un effectif calculé en divisant la somme totale des horaires inscrits dans leur contrat de travail par la durée légale ou conventionnelle de travail.
L'arrondissement se fait au chiffre inférieur.
N.B.: les salariés à temps partiel annualisé
doivent être décomptés au prorata de leur
temps de présence dans l'entreprise au cours de l'année.
59. Se trouvent exclus de l'assiette de calcul des effectifs
:
- les apprentis.
- les remplaçants des salariés déjà inscrits à l'effectif.
- les titulaires d'un contrat de travail de formation alternée ou d'un contrat de qualification en alternance.
- les stagiaires de formation professionnelle et d'insertion professionnelle
et les SIVP.
60. Par ailleurs, il convient enfin de remarquer que la loi du 10 juillet 1987 prévoit que les salariés occupant certaines catégories d'emplois exigeant des conditions d'aptitudes particulières, ne sont pas décomptés dans cet effectif. (emplois dans le gros oeuvre du bâtiment et des travaux publics, les vendeurs de grands magasins, les conducteurs, les livreurs, les coursiers salariés.).
Cette exclusion n'entraîne aucune interdiction d'emploi.
Si, du fait de la déduction de ces emplois, l'effectif
descend au dessous de 20,l' entreprise ou l'établissement
n'est pas assujetti à l'obligation d'emploi; elle reste
tenue de la déclaration annuelle.
délai de mise en conformité avec la loi.
61. Dès lors qu'une entreprise entre dans le champ d'application de la loi soit en raison de sa création soit en raison de l'accroissement de son effectif, elle dispose à compter de cette date, de 3 ans pour se mettre en conformité avec cette obligation d'emploi.
Ce délai est inapplicable en cas de fusion.
1/ Détermination
du nombre de bénéficiaires dont l'emploi est obligatoire
62. La loi du 10 juillet 1987 a fixé à un pourcentage unique de 6% de l'effectif le niveau de l'obligation d'emploi.
Ce pourcentage est intangible et d'ordre public, ainsi une disposition d'ordre réglementaire interne ne peut faire obstacle à cette obligation. (CE 28.10.1991).
La détermination du nombre d'unités de bénéficiaires
qu'un établissement est tenu d'occuper donne lieu à
l'arrondissement à l'unité inférieure dès
lors que les calculs aboutissent à un chiffre décimal.
63. Il obéit aux mêmes règles que celles régissant la détermination de l'effectif total.
Toutefois, il est tenu compte des particularités suivantes:
les apprentis sont pris en compte, ainsi que les contrats d'adaptation,
de qualification, d'emploi solidarité, de retour à
l'emploi, les contrats d'orientation et contrats d'initiative
emploi.
Les catégories de bénéficiaires visées
à l'art. L 323-3 comptent pour au moins une unité.
Ils comptent pour au moins 2 unités l'année de leur embauche et l'année suivante, quel que soit leur handicap.
Un décompte particulier est effectué dans les conditions
suivantes sans qu'un bénéficiaire puisse compter
pour plus de 3 unités:
en fonction de l'importance du handicap.
64. Les travailleurs handicapés classés par la COTOREP comptent, en catégorie B pour 1,5
unités, en catégorie C pour 2,5 unités.
Les victimes d'accident du travail ou de maladie professionnelle
comptent pour 1,5 unités si le taux d'incapacité
permanente est compris entre 66,66% et 85% et pour 2,5 unités
au delà.
Lorsqu'une personne relève des deux alinéas susvisés,
les demi-unités ou unités supplémentaires
ne se cumulent pas.
en fonction de l'âge.
65. Les travailleurs handicapés reconnus par la
COTOREP âgés de moins de 25 ans ou de plus de 50
ans comptent pour une demi-unité supplémentaire.
en fonction d'une formation en entreprise.
Les travailleurs handicapés reconnus par la COTOREP suivant une formation professionnelle au sein de l'entreprise sont comptés pour une ° unité supplémentaire dans la mesure où le cycle de formation est d'au moins 500 heures pour l'année pendant laquelle la formation est effectuée.
en fonction du placement antérieur.
66. Les travailleurs handicapés embauchés
à leur sortie d'un atelier protégé, d'un
centre d'aide par le travail, d'un centre de formation professionnel
y compris d'un institut médico-professionnel sont comptés
pour une unité supplémentaire pendant l'année
de leur embauche et l'année suivante.
Il est tenu compte des apprentis dans le décompte des bénéficiaires.
N.B. : Les calculs se rapportant aux bénéficiaires
occupés dans l'entreprise peuvent se traduire par des fractions
d'unités ; de même les équivalences obtenues
par le biais des contrats de sous-traitance, des prestations de
services et fournitures avec des établissements de travail
protégés peuvent se traduire par des fractions ;
dans ces cas ne pas arrondir les résultats des différents
calculs qui sont retenus intégralement.
Exemple de la note de service du 10.02.89.
Soit un établissement de 180 salariés, mais dont l'assiette de calcul est de 175 (5 postes nécessitent une aptitude particulière).
Le nombre de bénéficiaire à occuper est donc
de 175*6% = 10,2 arrondi à 10.
L'établissement a occupé à temps plein :
- 2 travailleurs handicapés classés en catégorie A comptant chacun pour une unité.
- 1 salarié handicapé catégorie B comptant
pour 1,5 unité.
Un salarié handicapé catégorie B a été embauché pendant 3 mois : il sera comptabilisé pour :1,5*3 = 0,375 unité
12
Au total, l'entreprise a occupé :
2+1,5+0,375 = 3,875 unités-bénéficiaires (dans ce cas, il n'a pas lieu à arrondissement).
Dans les entreprises assujetties, les titulaires d'un emploi réservé
en application du code des pensions militaires sont pris en compte
pour le calcul du nombre de bénéficiaires.
Les employeurs assujettis à l'obligation d'emploi peuvent s'acquitter autrement que par l'embauche directe des travailleurs handicapés :la loi du 10 juillet 1987 leur offre 3 autres possibilité.
Ce système d'alternatives à l'embauche directe permet
ainsi aux entreprises de s'adapter en fonction de leurs possibilités.
1/ Conclusion de
contrats de sous-traitance avec le secteur protégé
67. En application de l'art. L 323-8 c.trav., les entreprises
pourront s'acquitter de leur obligation en passant des contrats
de fourniture, de sous-traitance ou de prestation de service
avec des ateliers protégés, des centres de distribution
de travail à domicile ou des centres d'aide par le travail.
b) Conditions d'application
de l'exonération
68. Les contrats doivent avoir été conclu avec des établissements de travail protégés agréés comme tel par l'autorité administrative conformément aux dispositions prévues à cet effet art. R 323-41 c.trav.).
Il appartient donc aux employeurs désirant obtenir l'exonération de l'obligation d'emploi de vérifier préalablement l'existence de l'agrément en se procurant la liste de ceux-ci.
Ils doivent être écrits et conformes aux modèles fixés par arrêté du 17 mars 1988.
Ils doivent notamment indiquer le prix des produits ou services
fournis. Ces prix doivent être établis sur la base
des prix de revient constatés dans l'établissement
donneur d'ouvrage ou à défaut, dans la profession
pour la réalisation des travaux prévus aux dits
contrats, déduction faite des frais de commercialisation
et le cas échéant, du coût des éléments
fournis par le donneur d'ouvrage.
c) Caractère
partiel de cette exonération
69. Contrairement aux autres branches de l'alternative, l'exonération n'est que partielle. L'employeur se verra ainsi dispensé d'embaucher un certain nombre de travailleurs handicapés.
Pour atteindre le pourcentage légal de 6% il aura la possibilité :
- soit d'embaucher le nombre complémentaire de travailleurs handicapés.
- soit de recourir à l'une ou l'autre des facultés
d'exonération.(c.f. infra)
Cette exonération est limitée à un certain
plafond : elle ne peut être supérieure à
la moitié du pourcentage de 6%,soit 3%, apprécié
sur la base de la durée légale du travail.
d) Calcul de cette
exonération partielle
70. Elle est proportionnelle au volume de travail fourni
à ces ateliers et centres.
L'équivalence d'emplois est égale au quotient obtenu
en divisant le prix hors taxe des fournitures, travaux
ou prestations de services figurant au contrat, déduction
faite des coûts de matières premières, produits,
matériaux de consommation et des frais de vente par
3000 fois le SMIC en vigueur au 31 décembre de l'année
d'assujettissement à l'obligation d'emploi.
Le Décret du 22 janvier 1988 prévoit que "
le nombre de bénéficiaires que l'employeur est dispensé
d'employer est égal, sous réserve de la limite de
3% ci-dessus au nombre de salariés ayant un rendement
normal et accomplissant une durée normale de travail qui
serait nécessaire pour exécuter les tâches
confiées à un atelier protégé, centre
de distribution, etc. ou à défaut, dans une entreprise
où ces tâches sont habituellement exécutées. "
71. L'exonération partielle est prononcée
par le préfet du département où est situé
le siège de l'entreprise ou lorsqu'il s'agit d'une entreprise
à établissements multiples situés dans plusieurs
départements, par le préfet du département
où chaque établissement concerné est situé.
2/ Accord prévoyant
un programme en faveur des travailleurs handicapés
72. Les employeurs peuvent s'acquitter de l'obligation d'emploi en faisant application d'un accord de branche, d'un accord d'entreprise ou d'établissement qui prévoit la mise en úuvre d'un programme annuel ou pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés (art. L 323-8-1).
Ces accords permettent aux entreprises de prévoir dans le cadre d'un programme comportant des plans, une gamme d'actions diversifiées, ils peuvent être conclu au niveau de la branche d'activité, de l'entreprise ou de l'établissement à condition qu'ils ne comportent pas de dispositions moins favorables que l'accord de branche, s'il en existe un.
Une limite contractuelle est cependant posée par
l'art. L 323-8-1 :ces accords doivent comporter deux au moins
des actions suivantes :
Plan d'embauche en milieu ordinaire de travail.
Plan d'insertion et formation.
Plan d'adaptation aux mutations technologiques.
Plan de maintien dans l'entreprise en cas de licenciement.
73. La circulaire de la délégation à l'emploi CDE n° 93-13 du 25 Mars 1993 précise qu'en ce qui concerne le contenu même des accords ces derniers ne doivent pas être " un catalogue de mesures juxtaposées mais doivent, au contraire, être précédées d'un état des lieux, comprenant les flux d'embauche, l'évolution générale de l'emploi et conclu par une pesée financière afin de mesurer la valeur des engagements ".
Ces accords de branche et d'entreprise ou d'établissement sont transmis pour agrément à l'autorité administrative compétente par la partie la plus diligente après avis de la commission départementale des travailleurs handicapés, des mutilés de guerre et assimilés, ou du conseil supérieur pour le reclassement professionnel et social des travailleurs handicapés.
Enfin, l'accord peut prévoir une péréquation
entre établissements d'une même entreprise de l'obligation
d'emploi, même pour ceux qui emploient moins de 20 salariés.
Caractère exonératoire : ces accords
sous réserve de l'appréciation de l'administration
compétente peuvent donc être totalement exonératoires
de l'obligation d'embauche contrairement à l'hypothèse
précédente.
74. La loi du 10 Juillet 1987 a créé un Fonds de Développement pour l'Insertion Professionnelle ayant pour objet d'accroître les moyens consacrés à l'insertion des travailleurs handicapés en milieu ordinaire.
Les employeurs assujettis à l'obligation d'emploi peuvent
également s'acquitter en versant à ce fonds une
contribution annuelle pour chacun des bénéficiaires
qu'ils auraient dû employer. (art. L323-8-2 c.trav.).
75. Ce sont ceux mentionnés à l'article L323-1,
à l'exception de l'Etat et des personnes public autres
que les EPIC.
76. Le montant, qui peut être modulé en fonction de l'effectif de l'entreprise (et non de l'établissement) est fixé dans la limite de 500 fois le SMIC par bénéficiaire non employé.
Un arrêté du 17 mars 1988 fixe le montant de la contribution annuelle à :
500 fois le SMIC pour les entreprises comprenant 750 salariés et plus.
400 fois le SMIC pour les entreprises comprenant 200 à 750 salariés.
300 fois le SMIC pour les entreprises dont l'effectif est compris entre 20 et 200 salariés.
Le SMIC à retenir étant celui en vigueur au moment
du versement par l'employeur au fonds.
c) Caractéristique
de cette contribution
77. Le versement est laissé à la seule initiative de l'employeur : aucun avis ou contrôle préalable du représentant du personnel n'est requis, ce dernier étant déjà habilité la politique générale de l'emploi de l'entreprise.
Cette redevance n'a aucunement le caractère de sanction, il s'agit d'une option entre l'embauche, les contacts avec le milieu protégé, l'application d'un accord ou le payement de cette redevance.
L'employeur a la possibilité de verser la contribution :
- soit pour la totalité de l'obligation
- soit partiellement en recourant à tout autre moyen (embauche,
contrat de sous-traitance).
d) Versement de
la contribution
78. Les employeurs ayant opté pour ce type de versement doivent adresser leur règlement à l'AGEFIPH ( 14, rue de Delambre 75682 Paris Cedex 14), au plus tard le 15 février de chaque année pour l'année civile de référence au titre de laquelle la contribution est due.
Ce versement doit être effectué par chèque
bancaire ou postal ou par virement bancaire et donnera lieu à
reçu de la part de l'association.
1/ Déclaration
annuelle de l'employeur
79. A des fins de contrôle, l'article L323-8-5 c.trav. prévoit que tout employeur du secteur privé occupant au moins 20 salariés doit adresser, chaque année, à l'administration une déclaration relative aux emplois occupés par les personnes handicapées par rapport à l'ensemble des emplois existants, accompagnée de la justification d'une des possibilités légales d'exonération de l'obligation d'emploi.
Date d'exigibilité : au plus tard le 15 février de chaque année.
L'employeur doit porter cette déclaration à la connaissance du comité d'entreprise, à défaut des délégués du personnel.
Si celle-ci n'est pas fournie, l'employeur est réputé totalement défaillant.
N.B. : Lorsque l'entreprise comprend des établissements multiples et qu'elle fait application d'un accord d'entreprise concernant plusieurs établissements, situés dans des départements différents, une déclaration globale est envoyée au préfet du département du siège de l'entreprise.
Cette déclaration globale comprend la copie des déclarations
concernant chacun des établissements et une déclaration
comprenant les mêmes éléments d'information
agrégés au niveau de l'entreprise.
2/ Pénalités
en cas de non respect de l'obligation d'emploi
80. Les employeurs qui ne respecteraient pas leur obligation
d'emploi, soit en n'employant pas le nombre requis de travailleurs
handicapés, soit en ne faisant pas usage des solutions
alternatives, sont soumis au versement d'une pénalité
dont le montant est égal, pour chaque bénéficiaire
manquant, à celui de la contribution versée au Fonds
de Développement majoré de 25 %.
Soit 625 fois le SMIC ou 500 fois le SMIC ou 375 fois le SMIC en fonction du nombre de salariés dans l'entreprise.
Les associations ayant pour objet la défense des intérêts
des handicapés peuvent exercer l'action civile contre les
employeurs, en réparation du préjudice causé
à l'intérêt collectif qu'elles représentent.
81. Notre
société est exigeante à l'égard de
ses travailleurs : on constate en effet un accroissement constant
du niveau de compétence requis dans un nombre de plus en
plus important d'emplois ou de fonctions. Ainsi se multiplient
les activités professionnelles pour lesquelles des qualifications
particulières sont requises.
La loi et les règlements conditionnent l'accès à de nombreuses professions à la possession de diplômes. S'agissant d'autres professions, il suffit d'avoir, ou il faut en plus du diplôme, un certificat d'aptitude (C.A.P. de coiffeur,...). Les C.A.P. sont délivrés par des organisations professionnelles en application des textes réglementaires.
Cependant, pour la grande majorité des activités du secteur privé, des diplômes ou certificats d'aptitude ne sont pas imposés par des textes réglementaires mais demandés par le chef d'entreprise.
La formation " sur le tas " sera
pourtant souvent acceptée en équivalence (ingénieur
diplômé ou ingénieur " maison ").
La qualification professionnelle, lorsqu'elle est obtenue par
la pratique, sera prouvée par un " certificat de travail
" indiquant le ou les postes précédemment tenus
et/ou par un essai de l'employeur. Néanmoins, l'employeur
n'est pas obligé d'en tenir compte lors de l'engagement
.
Il n'y a ici aucune difficulté particulière,
les employeurs devant juste se tenir au fait des exigences de
diplôme attachées à la profession de leurs
salariés afin de ne violer aucun texte législatif
ou réglementaire. La situation est nettement plus compliquée
lorsqu'est en cause un ressortissant de l'Union Européenne.
82. L'article 57 du traité de l'Union Européenne a donné pour mission au Conseil de l'U.E. d'arrêter les directives tendant à la reconnaissance mutuelle des diplômes et des titres, et à la coordination des dispositions législatives , réglementaires ou administratives concernant l'accès aux activités non salariées et leur exercice.
Sur cette base, plusieurs directives furent adoptées , chacune portant sur des professions déterminées. Elles prévoient leur application, par extension, à l'exercice à titre salarié des activités concernées.
Ces directives sont:
- la directive 78/686 sur les dentistes;
- la directives 77/452 sur les infirmiers;
- la directive 78/1027 sur les vétérinaires;
- la directive 80/154 sur les sage-femme;
- la directive 85/384 sur les architectes;
- la directive 85/432 sur les activités du domaine de la pharmacie;
- la directive 85/433 sur les pharmaciens;
- la directive 93/16 sur les diplômes de la médecine;
- la directive 77/796 sur les métiers du transport routier;
- la directive 87/540 sur les métiers du transport navigable;
- la directive 91/670 sur les métiers
du transport aérien.
83. Mais devant l'ampleur de la tâche, le Conseil décida d'instaurer un système général de reconnaissance mutuelle des diplômes et des formations et pour ce faire, adopta deux directives: la directive 89/48 du 21 décembre 1988 sur la reconnaissance des diplômes de l'enseignement supérieur et la directive 92/51 du 18 juin 1992 sur la formation professionnelle.
Toutefois, ces directives ne modifient aucunement la portée des directives antérieures concernant certaines professions spécifiques.
Nous nous attacherons ici plus particulièrement
à l'étude de ces deux directives puisqu'elles concernent
la majorité des activités.
84. Elle est fondée sur le principe de la reconnaissance mutuelle, c'est-à-dire que le ressortissant communautaire formé pour exercer une activité qui suppose la détention d'un titre de formation d'enseignement supérieur ne peut se voir interdire l'exercice de cette activité dans un autre tat membre pour défaut de qualification.
Cette reconnaissance n'intervient qu'entre
des qualifications obtenues après trois années au
minimum d'enseignement supérieur, mais en bénéficient
également par assimilation, les diplômes ou titres
de formation délivrés dans un Etat membre qui, ne
répondant pas à ces caractéristiques, sont
considérés comme étant de niveau équivalent
par cet
tat.
Deux situations sont envisageables :
- le demandeur possède le diplôme qui est prescrit dans un autre tat membre pour accéder à cette même profession et qui a été obtenu dans un tat membre: cela est suffisant pour que ne puisse pas lui être opposé un défaut de qualification;
- aucune réglementation nationale ne requiert la possession des qualifications qu'il a obtenues, le demandeur doit alors satisfaire à une autre condition : détenteur d'un titre le préparant à la profession concernée délivré par une autorité compétente dans un tat membre après trois années au moins d'étude, il doit en outre avoir exercé cette profession dans un tat membre à temps plein pendant deux ans au cours des dix dernières années précédant la demande.
85. Toutefois, si des différences importantes peuvent être constatées entre les qualifications professionnelles dans l'Etat de provenance du demandeur et celles que prescrit l'Etat d'accueil, celui-ci peut recourir à des mesures correctrices, ainsi:
- si la durée de la formation est inférieure d'un an au moins dans l'Etat d'origine du diplôme par rapport à celle de l'Etat d'accueil, ce dernier peut exiger du migrant qu'il fasse la preuve d'une expérience professionnelle;
- si le contenu de la formation ou même
de la profession est différent, l'Etat d'accueil peut imposer
un stage d'adaptation ou une épreuve d'aptitude au travailleur.
En règle générale, le choix entre le contrôle
par examen ou par stage doit être laissé au demandeur
(c'est la garantie qui lui est accordée au cas où
l'épreuve d'aptitude serait conçue comme une véritable
barrière infranchissable).
86. Cette directive est venue compléter la directive 89/48. Elle instaure en effet la reconnaissance par les Etats Membres de tous les diplômes, certificats ou titres de formation équivalents obtenus dans un autre tat membre dans le cadre d'études supérieures, autres que ceux visés par la directive 89/48.
Elle prévoit, tout comme cette dernière , la possibilité pour l'Etat d'accueil de demander:
- soit que le demandeur prouve qu'il possède une expérience professionnelle lorsque la durée de sa formation est inférieure d'au moins un an à celle requise dans l'Etat membre d'accueil;
- soit qu'il accomplisse un stage d'adaptation ou qu'il se soumette à une épreuve d'aptitude si la formation ou la profession de l'Etat d'origine diffère de celle de l'Etat d'accueil.
De manière générale et
sauf exception, c'est, comme cela est déjà prévu
dans la première directive, au demandeur de choisir entre
le stage et l'épreuve.
Avec ces deux directives, les institutions
communautaires sont parvenues à une synthèse qui,
pour complexe qu'elle soit, a réalisé une interchangeabilité
des diplômes et des titres dont devront à présent
tenir compte les employeurs français.
Le code du travail édicte un certain nombre d'interdictions d'emploi dans le but de protéger certaines catégories de salariés.
Ces interdictions concernent : - l'âge minimum d'admission au travail
- les femmes
- les périodes et horaires de travail
87. L'article L 211-1 du code du travail pose le principe selon lequel les enfants ne peuvent être admis au travail avant d'être régulièrement libérés de l'obligation scolaire qui a été prolongée jusqu'à 16 ans par l'ordonnance du 6 janvier 1959.
Mais il existe des dérogations.
88. Cette
interdiction ne s'applique pas aux établissements où
ne sont employés que les membres de la famille sous l'autorité
soit du père, soit de la mère, soit du tuteur (article
L 211-1 al 6).
Elle ne s'applique pas non plus aux enfants
en apprentissage ou en formation alternée dont le travail
en milieu professionnel s'effectue conformément à
la réglementation (article L 211-1).
Les adolescents de plus de 14 ans peuvent effectuer des travaux légers pendant leurs vacances scolaires à condition qu'ils bénéficient d'un repos effectif au moins égal à la moitié de chaque congé.
Dans ce cas, le chef d'entreprise doit formuler
une demande auprès de l'inspecteur du travail dans un délai
de 15 jours avant la date prévue pour l'embauchage. Cette
demande doit porter l'accord écrit du représentant
légal de l'enfant.
89. En ce
qui concerne l'emploi des enfants dans le spectacle, les articles
L 211-6s. prévoient que l'emploi des enfants de moins de
16 ans dans les entreprises du spectacle, du cinéma, de
radiophonie, d'enregistrements sonores, de télévision
ne peut intervenir que sur autorisation individuelle donnée
par le préfet sur avis conforme d'une commission spéciale
qui fixe la part de rémunération perçue par
l'enfant qui sera laissée à la disposition des représentants
légaux.
En dehors de ces dérogations, certains
emplois sont interdits.
90. Il convient de signaler l'existence de la directive européenne relative à la protection des jeunes au travail (Dir CE n°94/33, 22 juin 1994 Art 17-1 a) devant être transposée dans les droits nationaux au plus tard le 22 juin 1996, qui pose un principe général: le travail des adolescents (15-18ans) doit être strictement réglementé afin de garantir aux jeunes des conditions de travail adaptées à leur âge et de permettre la protection de ces derniers contre l'exploitation économique et tout travail susceptible de nuire à leur sécurité, à leur santé ou à leur développement physique, psychologique, moral ou social ou de compromettre leur éducation.
Ceci est de nature à interpréter
plus largement les règles de droit interne relatives à
la protection de la moralité, de l'hygiène et de
la sécurité qui, compte tenu de leurs extrêmes
précisions, s'avèrent plus restrictives que les
normes européennes qui utilisent des critères plus
larges que les interdictions par des réglementations spécifiques
à certains travaux et à certaines situations de
travail de notre droit interne.
91. Ces
dispositions de notre droit interne concernent:
- l'hygiène et la santé des mineurs:
C' est ainsi que l'emploi aux étalages
extérieurs des magasins et boutiques de jeunes de moins
de 16 ans est interdit, celui des jeunes de moins de 18 ans est
strictement réglementé (articles R 243-3s.).
- le respect d'une certaine moralité:
L'article L 234-1 du code du travail pose le principe que les chefs d'établissements industriels et commerciaux dans lesquels sont employés des jeunes travailleurs de moins de 18 ans doivent veiller au maintien des bonnes moeurs et de la décence publique.
92. Par ailleurs, l'article R 234-2 interdit:
- d'employer des jeunes travailleurs de moins de 18 ans à la confection, à la manutention et à la vente d'écrits, imprimés, affiches, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou autres objets dont la vente, l'offre, l'exposition, l'affiche ou la distribution sont réprimés par les lois pénales comme contraires aux bonnes moeurs
- d'employer à aucun genre de travail des jeunes travailleurs de moins de 16 ans dans les locaux où sont confectionnés, manutentionnés, ou vendus des écrits, imprimés, affiches, gravures, peintures, emblèmes, images ou autres objets qui, même s'ils ne tombent pas sous l'action des lois pénales, sont de nature à blesser leur moralité.
- certaines dispositions sont relatives à la limitation des charges.
Les jeunes travailleurs ne peuvent porter, traîner ou pousser, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des établissements mentionnés, des charges d'un poids supérieur aux poids énoncés.
- D'autres interdictions visent les travaux nécessitant l'utilisation de machines présentant un danger.
- Certaines interdictions concernent les chantiers de travaux publics et les chantiers souterrains des mines et carrières.
- Enfin, d'autres interdictions visent à exclure les jeunes travailleurs du contact avec des produits dangereux ou des situations dangereuses.
Le code du travail a prévu des dispositions
protectrices non seulement à l'égard des mineurs,
mais également à l'égard des femmes.
93. Certains travaux sont interdits aux femmes parce qu'ils excèdent leurs forces ou peuvent être préjudiciables à leur santé ou à leur moralité (article L 234-2).
D'autres ne peuvent être effectués que dans des conditions spéciales en raison des risques d'insalubrité qu'ils entraînent (article L 234-3).
Dans les deux cas, la loi renvoie à
des règlements d'administration publique (articles R 234-9s.
du code du travail).
- En ce qui concerne les débits de
boissons, l'article L 211-5 prévoit qu'il est interdit
d'employer dans les débits de boissons à consommer
sur place, des femmes mineures, à l'exception de celles
qui appartiennent à la famille du débitant.
- L'article L 711-3 du code du travail interdit
l'emploi des femmes dans les travaux souterrains des mines et
carrières.
- La période entourant l'accouchement fait également l'objet de dispositions particulières:
La femme enceinte a la possibilité de suspendre son travail pendant 16 semaines. Mais il est absolument interdit d'employer une femme pendant une période de 8 semaines au total avant et après l'accouchement et en aucun cas pendant les 6 semaines qui suivent l'accouchement. Par ce biais, la période globale d'interdiction peut se trouver légèrement allongée si l'accouchement a lieu après la date présumée. En revanche, elle ne peut être réduite si l'accouchement a lieu avant.
Les infractions à ces dispositions sont réprimées pénalement à l'article R 262-7: amende de 10000 F au plus, portée à 20000F en cas de récidive dans le délai d'un an.
Mais la sanction pénale ne s'applique que si l'employeur a agi sciemment. La connaissance de l'accouchement peut évidemment faire difficulté lorsqu'il s'agit d'un embauchage postérieur à l'accouchement.
En principe, la visite médicale d'embauche permet de déceler les tentatives d'embauchage prématuré.
Enfin, d'autres interdictions concernent les
périodes et horaires de travail.
94. Certaines
interdictions qui sont au sen strict relatives à la durée
du travail, et dont la finalité est de protéger
certaines catégories de main d'oeuvre (femmes, jeunes travailleurs),
peuvent se traduire par une interdiction d'embauche si les caractéristiques
de l'emploi à pourvoir ne permettent pas le respect de
ces interdictions.
- Durée quotidienne du travail
95. Les mineurs ne peuvent travailler plus de 8 heures par jour et 39 heures par semaine dans les établissements industriels et commerciaux et même dans les ateliers familiaux. Des dérogations peuvent être accordées par l'inspecteur du travail dans la limite de 5 heures par semaine.
La durée du travail des intéressés ne peut en aucun cas être supérieure à la durée quotidienne ou hebdomadaire normale de travail des travailleurs adultes dans l'établissement.
Les infractions à la limitation de
la durée du travail sont punies d'une amende de 5000F au
plus (article R 261-6).
- Travail de nuit
96. Pour les jeunes travailleurs de moins de 18 ans, garçons ou filles, l'article L 213-7 du code du travail interdit dans les établissements industriels et commerciaux le travail de nuit, le travail de nuit s'entendant du travail entre 22 heures et 6 heures.
Des dérogations peuvent à titre exceptionnel, être accordées par l'inspecteur du travail dans les établissements commerciaux et ceux du spectacle.
La durée minimale du repos de nuit des jeunes travailleurs ne peut être inférieure à 12 heures.
Les infractions sont sanctionnées par
une amende de 10000F ou plus, portée à 20000F en
cas de récidive dans le délai d'un an.
Pour les femmes adultes, la CJCE a déclaré en 1991 contraire à la directive n°76-207 du 9 février 1976 les dispositions du code du travail relatives à l'interdiction du travail de nuit des femmes.
En effet, cette directive crée à la charge des Etats l'obligation de ne pas poser en principe législatif l'interdiction du travail de nuit des femmes, même si celle ci comporte des dérogations, dans la mesure où il n'existe dans la législation nationale aucune interdiction corrélative pour le travail de nuit des hommes.
Il incombe donc aux partenaires sociaux d'engager une nouvelle concertation afin de permettre le travail de nuit ou l'interdire à tous.
Toujours est-il que depuis cette décision
de la CJCE, compte tenu de la primauté du droit communautaire,
les juridictions répressives refusent de sanctionner les
employeurs qui ne respectent pas l'article L 213-1 relatif à
l'interdiction du travail de nuit des femmes.
97. Le traité de Rome, par son article 48, a instauré sur le territoire de ce qu'il convient maintenant d'appeler l'Union européenne, la libre circulation des travailleurs. Or, cet article est depuis le 1er janvier 1970, directement applicable dans l'ordre juridique national. Il confère donc aux particuliers des droits que les juridictions nationales ont l'obligation de sauvegarder. Cet article a été complété par un règlement du Conseil du 15 octobre 1968 n° 1612 /68.
Dans un premier temps, il conviendra de déterminer
le champ d'application de l'article 48, pour ensuite pouvoir examiner
les discriminations et restrictions prohibées par le droit
communautaire.
98. La Cour de Justice de l'Union Européenne a dû préciser le champ d'application, tant rationae materiae, que rationae loci, de cet article.
Celle-ci, après avoir observé
que la notion de travailleur à laquelle se réfère
spécifiquement l'article 48, a une portée communautaire
et ne saurait relever du droit interne, l'a définie, dans
un arrêt Lawrie-Blum du 3 juillet 1986 (aff. 66/85,
rec.1986, p 2121). Il s'agit de toute personne ressortissant d'un
tat membre, quel que soit le lieu de sa résidence,
qui accomplit des prestations en faveur d'une tierce personne,
et sous sa direction, et reçoit de celle-ci en contrepartie
une rémunération.
Dès lors que l'activité exercée
par le travailleur communautaire est réelle et effective,
elle tombera sous le coup de l'article 48 indépendamment
:
- du secteur d'activité dans lequel elle est exercée (bâtiment, transport, sport professionnel ou semi-professionnel...);
- du niveau de la fonction (de l'ouvrier au P.D.G);
- du caractère réduit des prestations (activités à temps partiel ou à temps plein);
- de la rémunération perçue (même s'il s'agit d'une rémunération inférieure au minimum garanti);
- du caractère d'apprentissage de l'activité (stages de formation, cycles de perfectionnement...);
- de la faible productivité des prestations fournies;
- de l'origine publique, voire charitable, des fonds utilisés pour les rémunérations;
- de la nature de l'activité (religieuse, sportive...);
- de la nature du lien juridique existant entre le travailleur et l'employeur, même s'il s'agit d'un lien sui generis au regard du droit national);
- du caractère occasionnel d'un contrat
de travail, n'offrant aucune garantie quant aux heures à
effectuer, et alors que l'employeur n'est redevable du salaire
et des avantages sociaux que dans la mesure où le travailleur
a réellement travaillé.
99. Néanmoins, seules les activités à caractère économique sont visées par l'article 48. Ainsi dans un arrêt Bettray du 31 mai 1989 (aff. 344/87, rec. 89, p 1621), la Cour de Justice a exclu du champ d'application de l'article 48 des activités qui ne constituent qu'un moyen de réinsertion et/ou de rééducation des personnes qui les exercent , et ce alors même qu'elles seraient rémunérées. La Cour a estimé que le caractère social et rééducatif de ces activités l'emportait sur le caractère économique: il s'agit donc d'une appréciation des faits par les juges.
Pour ce qui est de son champ d'application
géographique, l'article 48 est applicable aussi bien aux
activités salariées exercées sur le territoire
de l'Union Européenne (peu importe que le rapport juridique
de travail ait été établi à l'intérieur
de celui-ci ou à l'extérieur), qu'aux activités
exercées hors du territoire communautaire (dans un pays
tiers ou sur un bateau) dès lors que le rapport juridique
de travail peut être localisé, ou garde un lien de
rattachement avec ce territoire.
100. Le lien de rattachement est apprécié en fonction de plusieurs facteurs tels que:
- les droits auxquels sont soumis les relations de travail entre l'employeur et l'employé;
- le régime de sécurité social et le régime fiscal de l'employé;
- ou encore, selon les situations, l'enregistrement
dans un
tat membre du navire où travaille l'employé...
101. Dans cet article est prohibée "toute discrimination fondée sur la nationalité", sans autre précision. Il découle de la généralité des termes que:
- aucune limitation ne saurait être fixée quant à la forme juridique dans laquelle pourrait se matérialiser une discrimination;
- les actes juridiques émanant des
personnes physiques ou morales de droit privé ne sont pas
exclus.
La Cour de Justice a confirmé cette
interprétation dans les arrêts Walrave du
12 décembre 1974 (aff. 36/74, rec.1974.1405) et Donà
du 14 juillet 1976 (aff. 13/76 rec. 1976.1333). Dans ces arrêts,
elle recourt à des termes aussi vagues et illimités
que: "actions"; "actes de l'autorité";
"réglementations ou pratiques nationales"; "mesures
étatiques".
Pour les actes juridiques n'émanant
pas de l'autorité publique, c'est-à-dire les actes
qui nous intéressent ici, il convient de distinguer:
102. En
premier lieu, le règlement n° 1612/68, en son article
7, édicte l'interdiction de "toute clause de convention
collective ou individuelle ou d'autres réglementations
collectives portant sur l'accès à l'emploi, la rémunération
et les autres conditions de travail et de licenciement".
Il prévoit une sanction en cas de violation: la nullité
de plein droit des clauses de ce genre.
En second lieu, dans les arrêts Walrave et Donà précités, la Cour a confirmé l'applicabilité de l'article 48 aux actes émanant de personnes privées. Cependant dans ces deux affaires, il s'agissait de "réglementations visant à régler, de façon collective, le travail salarié et les prestations de service" (attendu n°17 de l'arrêt Walrave ). Les organismes privés en cause agissaient donc en tant que détenteurs de pouvoirs réglementaires, et non en tant que simples personnes privées effectuant des actes individuels. Se pose donc la question de savoir si un acte individuel (et particulièrement un contrat) comprenant des "discriminations" ou des "restrictions" pourra être sanctionné au titre de l'article 48. A priori, selon le Professeur Mattera et une partie de la doctrine, rien ne s'y oppose. Mais, aucune jurisprudence communautaire n'étant intervenue sur ce point, le doute subsiste. Il est par conséquent préférable pour tout employeur d'éviter de mentionner et/ou de pratiquer des restrictions et des discriminations contraires à la Libre Circulation des Travailleurs, d'autant plus que la Cour de Justice a une vision expansionniste du droit communautaire et est très sourcilleuse quant à la protection des libertés fondamentales qu'il a instauré.
Encore faut-il savoir quelles sont les restrictions et discriminations visées par l'article 48.
103. Sont
concernées tout d'abord les discriminations formelles,
c'est-à-dire les mesures applicables aux seuls ressortissants
des autres Etats Membres et consistant en traitement discriminatoire
à leur égard par rapport au traitement réservé
aux nationaux. En matière d'embauche, l'article 48 apparaît
en l'espèce comme superfétatoire puisque le droit
pénal français prévoit et sanctionne déjà,
par l'article 416 du code pénal, un tel comportement.
Il s'agit ensuite des discriminations déguisées.
Sont visées ici les mesures qui, tout en s'appliquant indistinctement
aux travailleurs nationaux et aux travailleurs communautaires,
constituent un désavantage vis à vis de ces derniers.
Relèvent notamment de cette catégorie les clauses
:
- imposant un niveau de connaissance de la
langue française que seuls les ressortissants nationaux
sont généralement en mesure d'atteindre, alors même
qu'une telle exigence n'est pas justifiée par les prestations
à accomplir;
- requérant la possession de certaines
qualifications techniques, professionnelles ou de certains diplômes
nationaux.
De manière plus synthétique,
le but recherché par le droit communautaire est l'égalité
de traitement : le travailleur communautaire doit pouvoir bénéficier
de tous les droits, avantages et libertés dont jouit le
travailleur national. Le règlement n° 1612/68 apporte
de nombreuses précisions à ce sujet.
Tout d'abord, le ressortissant d'un autre
état membre bénéficie sur le territoire français
de la même priorité d'accès aux emplois disponibles
que les ressortissants français.
104. Ensuite,
les relations de travail qui se nouent entre un employeur français
et le travailleur communautaire (notamment dans la phase de pré-embauche)
doivent s'établir dans les mêmes conditions que celles
s'établissant entre l'employeur et le travailleur national.
Pour finir sont interdites les dispositions et pratiques nationales
qui limitent l'emploi des ressortissants communautaires, en nombre
ou en pourcentage, par entreprise, branche d'activité,
par région ou à l'échelon national. Il en
est de même pour les mesures subordonnant l'octroi d'avantages
quelconques en faveur de certaines entreprises (régimes
préférentiels, aides étatiques ...) à
la condition que celles-ci emploient un pourcentage minimum de
travailleurs nationaux.
105. Le principe est posé par l'article L 122-45 du code du travail.
En effet, "aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement, aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de sa situation de famille, de son appartenance à une ethnie, une nation, ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses ou, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du TITRE IV du LIVRE III du présent code, en raison de son état de santé ou de son handicap.
Toute disposition ou tout acte contraire
à l'égard d'un salarié est nul de plein
droit."
La loi du 13 juillet 1983 a introduit dans le code du travail un nouveau droit: le droit à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, notamment en matière d'embauche (A).
Toutefois, par dérogation à ce principe, la loi prévoit la possibilité de prendre des mesures provisoires au seul bénéfice des femmes visant à remédier aux inégalités des chances(B).
De même, dans le cadre de la politique
sociale européenne, les Etats Membres sont invités
à adopter des actions positives afin d'éliminer
les inégalités de fait (C).
1/ le principe
d'interdiction des discriminations: Art. L 123-1 c.trav.
106. La
loi du 13 juillet 1983 qui met en oeuvre la Directive Européenne
du 9 février 1976 (Directive CEE n° 76/207) prohibe
dans la relation salariale toute discrimination fondée
sur le sexe et la situation de famille: Art. L123-1 c.w.
Cette prohibition porte notamment sur:
- la mention du sexe ou de la situation de famille recherchée du candidat dans les offres d'emploi.
- la prise en considération du sexe en matière de rémunération, de formation, d'affectation, de classification, de promotion, de mutation.
- du refus d'embauche en raison du
sexe ou de la situation de famille ou par l'application de critères
de choix différenciés.
Pour certaines professions,
la prise en considération du sexe est nécessairement
liée et donc prise en compte (mannequins, artistes, modèles).Toutefois,
le Décret du 25 Mai 1984 détermine de manière
restrictives ces secteurs particuliers.
107. La conséquence du principe
posé par l'art. L 321-1
c.w. est l'interdiction d'introduire, à peine de nullité,
dans le statut collectif du personnel ainsi que dans les contrats
individuels de travail, des dispositions discriminatoires selon
le sexe, sauf celles tendant à la mise en oeuvre des dispositions
législatives relatives à la protection de la maternité.
(Art. L 321-2).
Les dispositions collectives ou des contrats individuels qui prévoyaient des droits particuliers pour les femmes et qui ne sont pas des mesures dérogatoires au sens de l'art. L 323-3 c.w, en vigueur au jour de la promulgation de la Loi, restent en vigueur. Toutefois, un délai de deux ans est prévu pour procéder à une négociation collective en vue d'une harmonisation de ces dispositions avec les principes de l'art. L 321-1 et L 321-2.
Les organisations liées par une convention
de branche ou un accord professionnel ont l'obligation d'engager
une négociation sur les mesures à prendre pour réaliser
l'égalité professionnelle et sur les mesures de
rattrapage à adopter.
108. Les infractions aux dispositions de l'art. L 321 -1 c.w. sont punies d'un emprisonnement d'un an et (ou) d'une amende de 25000 F. (Art. L 152-1 c.w.).
Le tribunal peut ordonner l'affichage du jugement et son insertion.
L'employeur peut bénéficier de l'ajournement du prononcé de la peine, dans ce cas, il lui appartient de définir et de prendre les mesures propres à établir l'égalité professionnelle dans l'entreprise et ce, dans un délai déterminé.
Ces sanctions ne font pas obstacle à
l'application de l'Art.225-1 du C.P. qui punit d'un emprisonnement
de deux ans et d'une amende de 200000 F, le fait pour un employeur
d'éliminer d'un emploi toute personne en raison notamment
de son sexe et de sa situation de famille.
N.B.: Les
organisations syndicales représentatives dans l'entreprise
peuvent exercer en justice toutes actions fondées
sur le non respect de l'égalité professionnelle
en faveur d'un salarié de l'entreprise, sans mandat,
à condition que le salarié ait été
averti par écrit et qu'il ne s'y soit pas opposé
dans les 15 jours suivant la date à laquelle l'organisation
syndicale lui a notifié son intention.
Une des pièces maîtresses de la Loi du 13 Juillet 1983 réside dans l'adoption ì de mesures temporaires, prises au seul bénéfice des femmes, visant à établir l'égalité des chances, en particulier, en remédiant aux inégalités de fait qui affectent les chances des femmesî.
Ce principe posé à l'art. L
123-3 c.w. trouve plusieurs applications de nature et d'importance
différentes.
1/ Mesures provisoires
remédiant aux inégalités des chances
109. Par dérogation au principe d'égalité professionnelle, des mesures de rattrapage peuvent être prises, elles se caractérisent par leur objet et par leur durée.
La Circulaire du 2 Mai 1984
les définit ainsi:
- elles doivent avoir pour objet de supprimer les causes directes ou indirectes des inégalités qui pèsent sur les salariés.
Il s'agit d'une part, d'éliminer les
facteurs qui limitent la promotion des femmes et d'autre part,
de définir les actions positives destinées à
assurer le plus large accès des salariés à
tous les emplois.
- les mesures sont temporaires, si leur efficacité
est liée à leur application durable dans le temps,
elles ne peuvent cependant être appliquées pendant
un délai indéterminé. Cette règle
n'empêche pas l'adoption de mesures ultérieures en
fonction des résultats de la première série
de mesures de rattrapage.
Ces mesures peuvent être instaurées
par les conventions collectives et si ces dernières sont
susceptibles d'extension, les mesures de rattrapage sont alors
des clauses obligatoires.
2/ Les plans pour
l'égalité professionnelle
110. Pour assurer l'égalité
professionnelle entre les hommes et les femmes les mesures visées
à l'art. L 123-3 peuvent faire l'objet d'un plan pour
l'égalité professionnelle négocié
dans la forme d'un accord d'entreprise.(Art. L 123-4).
La négociation n'est pas obligatoire. Si celle-ci n'aboutit pas, l'employeur peut mettre le plan en oeuvre après consultation des représentants du personnel.
L'employeur saisira obligatoirement le directeur
départemental du travail, qui disposera d'un délai
de deux mois pour s'opposer ou non, totalement ou partiellement,
à l'exécution du plan. Si aucune opposition n'est
notifiée, le plan pourra être mis en oeuvre.
Les mesures faisant l'objet d'un plan pour
l'égalité professionnelle peuvent être prises
dans les domaines de:
- de l'embauche, qui pour certains postes de travail, pourra être réservée aux femmes. Ainsi, dans ce cas, l'offre peut valablement mentionner que des femmes sont recherchées.
- de la formation, en effet, certaines formations pourront être proposées aux seules femmes.
- de la promotion: des objectifs de nomination de femmes à tel ou tel poste pourront être fixés.
- de l'organisation et des conditions
de travail afin de faciliter l'accès des femmes.
Ces plans doivent donc permettre une planification sur le court terme et le long terme, d'une action transformatrice susceptible de modifier tant la structure même de l'emploi dans l'entreprise que les conditions générales de cet emploi.
Toutes ces actions pourront bénéficier, afin de favoriser leur mise en oeuvre, d'une aide de l'Etat, subordonnée à la conclusion d'un contrat avec l'Etat, dit: ìcontrat pour l'égalité professionnelle dans l'entrepriseî
Celle-ci est calculée en pourcentage
des dépenses imputables à la réalisation
du plan dans la limite de 30% des coûts d'investissements
en matériel et des dépenses de rémunérations
exposées pour les salariés bénéficiant
d'actions de formation, et de 50% des autres coûts.
3/ Convention passée
avec l'Etat
111. Les entreprises de moins de 300 salariés peuvent bénéficier d'une aide financière de l'Etat en passant avec celui-ci une convention.
Cette aide financière est attribuée
afin de procéder à une étude d'ensemble sur
la situation de l'entreprise en matière d'égalité
professionnelle et des mesures de l'art. L123-3 c.w. susceptibles
d'être mises en oeuvre.
Procédure:
Préalablement à la conclusion de la convention, l'employeur doit soumettre l'étude au comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, pour avis sur les suites à donner au projet.
Elle doit être également communiquée
aux délégués syndicaux, puis transmise au
directeur départemental du travail avec l'avis du comité
d'entreprise.
112. L'égalité de traitement entre travailleurs masculins et féminins en matière de condition d'emploi constitue un droit fondamental ainsi que l'a reconnu la Cour de Justice Européenne: Arrêt du 15 Juin 1978, Affaire Defrenne III.
La Cour a affirmé sur le fondement
du principe général interdisant la discrimination
fondée sur le sexe en matière d'emploi et de travail
que, l'élimination de cette discrimination faisait partie
des droits fondamentaux constituant l'un des principes du droit
communautaire dont elle a pour mission d'assurer le respect.
Depuis cette décision, la Commission Européenne réaffirme la nécessité de recourir à " des mesures d'actions positives pour assurer le respect de ce principe".
En 1984, elle a ainsi présenté
une proposition de recommandation relative à la promotion
des actions positives, adoptée par le Conseil, laquelle
invite les Etats Membres à adopter une politique d'action
positive destinée à éliminer les inégalités
de fait entre hommes et femmes et à promouvoir la mixité
de l'emploi.
113. Le concept d'action positive est large,
il n'existe d'ailleurs pas de définition officielle au
niveau communautaire: il est cependant
admis qu'il englobe toutes les mesures visant à compenser
les effets de la discrimination passée, à éliminer
la discrimination actuelle et à promouvoir l'égalité
des chances entre les hommes et les femmes, notamment en ce qui
concerne les secteurs ou niveaux d'emplois dans lesquels les membres
d'un sexe sont largement sous représentés...
La Directive 76/207/CEE du 9 Février 1976 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes fait appel à ce concept dans son Art. 2 Paragraphe 4: il est prévu en effet que la directive ne fait pas obstacle aux mesures dont le but est de remédier aux inégalités de fait affectant les chances des femmes.
Or, dans un Arrêt de la CJCE du 17 Octobre 1995, Kalanke, s'est posée la question de la légitimité des quotas et autres formes d'actions positives destinées à accroître le nombre des femmes dans des secteurs ou niveaux d'emplois.
En l'espèce, une Loi Allemande prévoyait que lors d'une promotion, les femmes ayant une qualification égale à celle de leurs concurrents masculins, doivent avoir la préférence dans les secteurs dans lesquels elles sont sous représentées.
Or l'objectif de la Directive étant (Art. 1), la mise en oeuvre dans les Etats Membres du principe d'égalité concernant l'accès à l'emploi y compris la promotion, cela implique: ìl'absence de toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement ou indirectement.î
La Loi Allemande entraînait donc une discrimination fondée sur le sexe mais il convenait dès lors d'examiner si une telle disposition était autorisée par l'art. 2 Paragraphe 4 de la Directive.
C'est à cet examen que la Cour a procédé; si elle a affirmé que l'ART.2 P. 4 avait pour but d'autoriser les mesures discriminatoires visant à réduire les inégalités de fait pouvant exister dans la réalité de la vie sociale ainsi que d'autoriser les mesures nationales dans le domaine de l'accès à l'emploi favorisant spécialement les femmes, elle a précisé qu'une réglementation nationale qui garantit la priorité absolue et inconditionnelle aux femmes lors d'une nomination ou promotion va au delà d'une promotion de l'égalité des chances et dépasse les limites de l'exception prévue à l'art. 2 Paragraphe 4 de la Directive.
Il ressort donc clairement de l'Arrêt que cette disposition ne couvre pas le type de système de quota en vertu duquel les femmes se voient automatiquement accorder la priorité par rapport aux hommes dans l'attribution de postes ou d'une promotion.
114. L'employeur a l'obligation de soumettre pour avis au C.E. un rapport annuel sur la situation comparée des conditions générales d'emploi et de formation des femmes et des hommes dans l'entreprise.(art.L 432-3-1 c.w.).
Ce rapport est communiqué aux Délégués Syndicaux et également à l'inspecteur du travail dans un délai de 15 jours.
Il doit être mis à la disposition
de tout salarié qui en fait la demande.
Dans les entreprises de moins de 300 salariés, les informations relatives à la situation comparée figurent dans le rapport annuel unique.
Ces rapports comportent une analyse chiffrée permettant d'apprécier pour chacune des catégories professionnelles de l'entreprise la situation respective des femmes et des hommes en matière d'embauche, de formation professionnelle, de qualification, de classification, de condition de travail, de rémunération.
Il recense les mesures prises au cours de
l'année écoulée en vue d'assurer l'égalité
professionnelle, les objectifs de l'année à venir
et la définition qualitative et quantitative des actions
à mener ainsi que l'évaluation de leur coût.
115. Distinct du délit d'entrave, qui vise à protéger les délégués syndicaux dans l'exercice de leurs fonctions, le délit de prise en considération de l'appartenance syndicale protège tous les salariés.
En vertu de l'alinéa 1 de l'article L 412-2 du code du travail, il est en effet interdit à tout employeur "de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter sa décision en ce qui concerne notamment l'embauchage".
C' est ainsi que dans un arrêt de la cour de cassation du 21 avril 1983, a été considéré comme abusif le refus d'un employeur d'intégrer à l'intérieur de l'entreprise une employée, trieuse de fils à domicile, étant donné que, postérieurement à ce refus réitéré, d'autres trieuses de fils avaient été intégrées, l'appartenance syndicale et les fonctions représentatives de l'intéressée étant la seule explication de ces réticentes.
Les manquements à cette prescription
sont sanctionnés d'une amende de 25000F; en cas de récidive,
l'amende est portée à 50000F et une peine de prison
d'un an peut être prononcée (article L 481-3).
116. L'alinéa 3 de l'article L 412-2 du code du travail dispose: "Le chef d'entreprise ou ses représentants ne doivent employer aucun moyen de pression en faveur ou à l'encontre d'une organisation syndicale quelconque."
Ce texte interdit l'insertion dans les conventions ou accords d'entreprise de clauses aux termes desquelles l'employeur ne pourrait embaucher que des candidats affiliés à tel syndicat (closed shop) ou s'engageant à y adhérer dés leur embauche (union shop). Peu importe qu'il s'agisse d'un syndicat appartenant à une confédération nationale ou d'un syndicat maison.
De même, la mise à l'index d'un salarié, qu'elle soit utilisée par des organisations ouvrières ou patronales est illicite.
Bien qu'elle ne soit plus un délit
pénal en tant que tel, elle peut soit constituer le délit
d'atteinte à la liberté du travail, soit engager
la responsabilité civile de l'organisation qui l'a prononcée
et ouvrir droit à dommages et intérêts pour
le travailleur qui en a été la victime.
Les conventions de l'OIT n'interdisent pas les discriminations fondées sur l'âge.
En droit interne, l'article L 311-4 du code
du travail interdit, dans une insertion d'offre d'emploi, la mention
d'une limite d'âge supérieure exigée du postulant,
sauf si cette limite d'âge est imposée par un texte
législatif ou réglementaire.
L'employeur, lorsqu'il va vouloir embaucher un salarié, va être confronté à deux séries de problèmes:
- soit que le salarié est encore lié par un contrat de travail;
- soit qu'il ait été antérieurement lié par un contrat de travail à un ancien employeur.
Il va devoir composer avec ces données...
117. La règle est qu'une même personne peut être simultanément au service de plusieurs employeurs. Un second employeur peut donc embaucher un salarié qui continue d'être lié par un contrat de travail à son premier employeur.
Il existe cependant des exceptions à ce principe:
- des dispositions particulières limitent certains cumuls d'emplois (Livre III, Titre II, Chapitre IV du Code du travail)
- le salarié peut s'être engagé à être
au service exclusif d'un seul employeur
1/ Cumul d'un emploi
public et d'un emploi privé
118. L'article L324-1 du Code du travail pose le principe de l'interdiction du cumul d'un emploi public et d'une activité privée à caractère lucratif.
Un employeur privé qui méconnaîtrait une telle interdiction en embauchant un salarié du secteur privé commet une infraction punie d'une contravention de cinquième classe.
La réglementation vise les personnels de l'Etat, des départements, des communes, des établissements publics, des collectivités, le personnel titulaire de la SNCF, le personnel des compagnies de navigation subventionné, le personnel des organismes de sécurité sociale.
Des exceptions sont prévues pour les travaux scientifiques,
littéraires ou artistiques. D'autre part, les membres du
personnel enseignant, technique ou scientifique relevant des établissements
d'enseignement et de l'administration des Beaux-Arts peuvent exercer
les professions libérales qui découlent de la nature
de leur fonctions.
119. L'article L324-3 du Code du travail interdit l'emploi d'un salarié exerçant une profession industrielle, commerciale ou artisanale pour effectuer des travaux relevant de ces professions, au-delà de la durée maximum du travail en vigueur dans sa profession.
Dans l'état actuel de la réglementation de la durée
de travail, la référence à la durée
maximale du travail doit s'entendre de la durée de 48 heures
hebdomadaire fixée par l'article L212-7 du Code
du travail. En fait, l'incompatibilité entre
deux contrats de travail conclus par une même personne découlera
non pas de la conclusion du second contrat de travail, mais par
l'accomplissement de travaux au-delà de la durée
maximale du travail autorisé (Cass. soc., 13 mai 1992).
Donc, le second employeur devra juste faire attention au moment
de l'embauche à ce que le salarié des professions
susmentionnées n'ait pas déjà effectué
la durée maximum de travail. Les sanctions pénales
sont les mêmes qu'en matière de cumul d'emplois publics
et privés, à savoir une contravention de cinquième
classe.
120. Le salarié est tenu pendant la durée de son contrat de travail par une obligation générale de fidélité et de loyauté. Cette obligation lui impose une règle de discrétion et lui interdit d'avoir une activité ou de se livrer à des actes qui constitueraient une concurrence à l'égard de son employeur. Relèvent ainsi de la concurrence:
- l'exercice par le salarié d'une activité professionnelle au service d'une entreprise concurrente de celle de son employeur, en la faisant bénéficier des connaissances spécifiques acquises chez ce dernier (Cass. soc., 2 juin 1977)
- le détournement de clientèle au profit d'une autre entreprise (Cass. soc., 12 décembre 1984)
- l'utilisation de moyens de commercialisation de l'entreprise pour la vente des produits d'une autre société (Cass. soc., 18 avril 1980)
En outre, son employeur peut insérer dans le contrat de
travail une clause d'exclusivité, clause par laquelle le
salarié s'interdit l'exercice d'une activité professionnelle.
Cette clause peut avoir une portée générale
et interdire au salarié l'exercice d'une quelconque activité
professionnelle salariée dans une autre entreprise. Dans
ce cas, le second employeur peut voir sa responsabilité
engagée pour concurrence déloyale, en vertu de l'article
1382 du Code Civil. Il pourra aussi être poursuivi
pour corruption active, en vertu de l'article 179 du Code
Pénal (voir partie suivante pour ces deux cas de responsabilité).
Le double principe de la liberté du travail et de la libre concurrence fait que la responsabilité de l'employeur qui fait appel aux services d'un salarié libre de tout engagement vis-à-vis de son ancien employeur pour l'utiliser au mieux de ses propres intérêts, seraient-ils concurrentiels de ceux de l'ancien employeur, n'est pas engagée (Cass. com., 24 mars 1969).
Certaines circonstances peuvent toutefois engager cette responsabilité.
121. L'article L122-15 du Code du travail rend le second employeur responsable solidairement avec le salarié du dommage causé au premier employeur par la rupture abusive imputable au salarié, ceci dans trois cas:
- il est intervenu dans le débauchage
- il a embauché un salarié qu'il savait déjà lié par un contrat de travail
(- il a continué à employer un salarié après avoir appris qu'il était encore lié à un autre employeur)
Mais le fait pour un éventuel employeur de discuter et d'arrêter les clauses du contrat de travail qu'il offrira à un salarié, après que celui-ci se sera régulièrement dégagé de tout lien contractuel avec son employeur en titre, ne tombe pas sous le coup de l'article L122-15 du Code du travail (Cass. com., 24 mars 1965).
Il faut souligner que la solidarité introduite par l'article L122-15 entre le nouvel employeur et le salarié n'exclut pas une action exercée distinctement contre ce nouvel employeur (Cass. soc., 8 novembre 1972).
Ont été jugées abusives les démissions intervenues dans les circonstances suivantes:
- non accomplissement du préavis accompagné du débauchage du personnel avec lequel le salarié travaillait (Cass. soc., 9 novembre 1965)
- non accomplissement du préavis et désorganisation due à la rétention durant plusieurs mois de documents appartenant à l'entreprise (Cass. soc., 6 décembre 1967)
- cessation brutale d'activité et création quelques jours plus tard d'une entreprise dont les activités pouvaient constituer des infractions à la clause de non-concurrence stipulée au contrat de travail (Cass. soc., 12 janvier 1972)
- départ prémédité et sans préavis,
et reprise d'un travail chez un autre employeur le lendemain (Cass.
soc., 12 mars 1980)
122.
1/ A côté des dispositions de l'article L122-15 du
Code du travail, d'application restreinte, c'est habituellement
sur le terrain de la concurrence déloyale,
et sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil,
qu'est recherchée la sanction du débauchage du personnel.
Pour être répréhensible, le débauchage
doit avoir été causé par des manoeuvres frauduleuses
et dans un but précis: détournement de clientèle,
connaissance de secrets de fabrication, utilisation des connaissances
acquises par le salarié (Cass. soc., 7 juillet 1960).
L'offre d'un salaire anormalement élevé peut caractériser
une manoeuvre frauduleuse (Cass. soc., 12 mars 1959).
2/ En outre, une clause de non-concurrence
peut avoir été insérée dans le contrat
de travail conclu entre le salarié et son ancien employeur,
clause visant à interdire au salarié d'ouvrir un
établissement similaire ou de passer au service d'une maison
concurrente à l'expiration de ce contrat.
a) La mise en cause de la responsabilité
du nouvel employeur dépend de sa connaissance ou non de
l'existence de cette clause lors de l'embauche du salarié.
123. Si l'employeur ne connaît pas l'existence de la clause de non-concurrence, la violation de cette clause par le salarié ne peut en aucun cas engager sa responsabilité vis-à-vis de l'employeur cosignataire de la clause. Il ne peut être condamné à des dommages-intérêts (Cass. soc., 7 juillet 1978).
En revanche, dès que l'employeur apprend l'existence de
la clause, il doit immédiatement licencier le salarié
intéressé. S'il décide de conserver le salarié
à son service, il risque de voir sa responsabilité
engagée même si au moment de l'embauche il était
totalement de bonne foi (Cass. soc., 10 mai 1983, Deneumoustier
/ Société Les Pompes funèbres générales).
La Cour de cassation considère en effet qu'en ne licenciant
pas le salarié qui lui avait dissimulé la clause
de non-concurrence, le nouvel employeur "s'était rendu
complice de la violation par le salarié de la clause de
non-concurrence" (Cass. com., 19 octobre 1983, Bodiou
/ Alexandre).
124. Si le nouvel employeur connaissait l'existence de
la clause lors de l'embauche, il se rend complice de la violation
de l'obligation de non-concurrence et commet ainsi une faute délictuelle
engageant sa responsabilité vis-à-vis de l'ancien
employeur (Cass. com., 5 février 1991). Ainsi, le
nouvel employeur peut être condamné solidairement
au paiement des dommages et intérêts dû en
violation de cette clause, s'il connaissait son existence et qu'il
a sciemment employé le salarié (Cass.soc., 14
mars 1995). La jurisprudence n'exige pas de manoeuvres
frauduleuses de la part du nouvel employeur. La seule connaissance
de la clause de non-concurrence implique ipso facto complicité
du nouvel employeur. Ici, ce n'est plus seulement le recours à
des procédés de concurrence déloyale qui
est sanctionné, mais la concurrence elle-même. La
prohibition est donc renforcée par rapport à l'obligation
générale de non-concurrence. La jurisprudence est
en ce domaine abondante et constante (Cass. com., 13 mars 1979;
Cass. com., 23 octobre 1984; Cass. com., 23 avril 1985). Les
juges appliquent ici le principe selon lequel: toute personne
qui, sciemment, aide autrui à enfreindre ses obligations
contractuelles, commet une faute engageant sa responsabilité
délictuelle à l'égard de la victime de l'infraction
(Cass. soc., 13 mars 1979 précité).
Exemple: en embauchant un salarié lié par une clause
de non-concurrence, l'employeur se rend complice de la violation
de celle-ci, même si l'interprétation de la clause
figurant dans le contrat de travail et aboutissant à inclure
l'activité du nouvel employeur dans son champ d'application
est ambiguë (Cass. com., 23 avril 1985, SA Flunch &
autre / Etab. économique du Casino).
b) Comment l'employeur peut-il être
au courant de l'existence de la clause ?
125. Le nouvel employeur peut avoir été informé,
notamment, par :
- le salarié lui-même qui, à défaut
de le faire, prend le risque d'être licencié
- la mention de la clause de non-concurrence sur le certificat de travail (Cass. soc., 23 avril 1985 précité). Il faut rappeler cependant que la mention " libre de tout engagement " figurant sur le certificat de travail n'exonère pas le nouvel employeur de sa responsabilité (Cass. soc., 5 janvier 1967). Elle est en effet insuffisante pour prouver la renonciation de l'ancien employeur à la clause de non-concurrence (Cass. soc., 24 octobre 1979).
- l'ancien employeur. Si ce dernier souhaite engager une action
en concurrence déloyale à l'encontre du nouvel employeur,
il aura d'ailleurs tout intérêt à l'informer
par lettre recommandée avec accusé de réception
pour des raisons évidentes de preuve. La connaissance de
la clause par le nouvel employeur peut même être présumée.
Tel pourrait être le cas d'un ancien salarié (lui-même
non lié par une clause de non-concurrence) qui crée
une entreprise concurrente et qui embauche des salariés
de l'entreprise initiale. Dans un arrêt, la Cour d'appel
a retenu la responsabilité d'un ancien directeur commercial
qui avait ainsi embauché quatre VRP de son ancienne société,
aux motifs qu'en sa qualité d'ancien directeur commercial
il ne pouvait ignorer que ceux-ci étaient liés par
une clause de non-concurrence (Cour d'appel de Paris, 4°
Ch. section A, 7 janvier 1985).
c) Sanctions
126. Le nouvel employeur complice de la violation de la
clause peut être condamné à des dommages-intérêts
destinés à réparer le préjudice subi
par l'ancien employeur. L'évaluation de ce préjudice
et le montant des dommages-intérêts correspondants
sont évalués par les juges du fond de la même
façon qu'à l'égard du salarié ne respectant
pas la clause. De plus, si le nouvel employeur a commis un acte
de corruption, il peut être condamné pénalement
en application de l'article 179 du Code Pénal.
127. Le futur employeur peut être pénalement poursuivi pour corruption. En effet, celui qui aura fait des promesses peut être poursuivi pour corruption active sur le fondement de l'article 179 du Code Pénal.
La corruption active consiste dans le fait d'user de voies de fait ou menaces, offres de promesses, offres, dons ou présents afin d'obtenir soit l'accomplissement ou l'abstention d'un acte, soit une des faveurs ou avantages prévus aux articles 177 et 178 du Code Pénal.
L'employeur poursuivi pénalement pour corruption active encourt les mêmes peines que le salarié corrompu, à savoir:
- un emprisonnement d'une à trois années
- et / ou une amende de 900 à 20000 F (art 177 et 179 du CP)
Le délit de corruption active de l'article 179 du Code
Pénal a été ainsi retenu à l'encontre
d'une entreprise qui avait offert à plusieurs salariés
d'un concurrent des emplois plus rémunérateurs.
Cette offre avait abouti à la démission simultanée
de plusieurs salariés et à leur départ prématuré
sans respect du préavis, faisant ainsi subir à l'employeur
initial une perte sensible de clientèle (Cass. crim.,
8 décembre 1966).