SOMMAIRE



NOUVEAU CONSEIL D'ADMINISTRATION
CONSULTATION SUR LA REFORME DES CPAL/SPIP
MISSION AU MEXIQUE SUR LE REGIME PENITENTIAIRE
LE JUGE ADMINISTRATIF EN PRISON
GRACES COLLECTIVES ET INDIVIDUALISATION DES PEINES
JURISPRUDENCE
INDEMNISATION DES AVOCATS DANS LE POSTSENTENCIEL
PRATIQUE JUDICIAIRE : ETUDE ET PRESENTATION D'UN DOSSIER DE PROBATION
INFORMATIONS RAPIDES



 

NOUVEAU CONSEIL D'ADMINISTRATION


BAILLET Jacques

1er JAP - PRA Marseille à/c 09/99

T.G.I. LYON - 69433 LYON CEDEX 03

standard 04 72 60 70 12

BENEDICTIO Anita

1er JAP

T.G.I. BORDEAUX - 33077 BORDEAUX CEDEX

Standard 05 56 01 35 10 - télécopie 05 56 01 34 06

BRUNET-LUDET Cécile

JAP

T.G.I. CRETEIL - 94011 CRETEIL CEDEX

secrétariat 01 49 81 17 17 - télécopie 01 43 28 63 52

CELLIER-GALMICHE Hélène

JAP

T.G.I. DIJON - 033 DIJON CEDEX

télécopie 03 80 66 61 92

FABRE Cécile

JAP

T.G.I. SARREGUEMINES - 57321 SARREGUEMINES CEDEX

standard 03 87 28 33 09 - télécopie 03 87 28 32 28

FAUCHER Pascal

JAP

T.G.I. POITIERS - 86020 POITIERS CEDEX

greffe 05 49 50 22 87 - télécopie 05 49 50 23 43

GAGNARD Sylvie

Juge des enfants

T.G.I. CRETEIL - 94011 CRETEIL CEDEX

secrétariat 01 49 81 17 10 - télécopie 01 49 81 19 22

GAULTIER Claude  T.G.I. BETHUNE - 62407 BETHUNE CEDEX

secrétariat 03 21 68 72 59 - télécopie 03 21 68 72 76

GIORDANI François

Juge des enfants

T.G.I. STRASBOURG - 67070 STRASBOURG CEDEX

greffe 03 88 75 27 56/29 81 - télécopie 03 88 75 29 65

GUICHAOUA Olivier

JAP

T.G.I VERSAILLES - VERSAILLES CEDEX

standard 01 39 07 39 09 - télécopie 01 39 07 35 51

MENGIN Laurence

JAP (Paris à/c 09/99)

T.G.I. BOBIGNY - 93008 BOBIGNY CEDEX

secrétariat 01 48 95 14 34 - télécopie 01 48 95 13 84

du MESNIL du BUISSON Godefroy

Maître de conférences

E.N.M. BORDEAUX - 33080 BORDEAUX CEDEX

standard 05 56 00 10 10 - télécopie 05 56 00 10 96

MOUTON-MICHAL Christine

Juge d'intance (JAP à Bobigny à/c 09/99)

T.G.I. BOBIGNY - 93008 BOBIGNY CEDEX

standard 01 48 95 13 93 - télécopie 01 43 56 63 65

PIERRARD Marie-Suzanne

1er JAP

T.G.I. CRETEIL - 94011 CRETEIL CEDEX

secrétariat 01 49 81 17 17 - télécopie 01 49 81 19 70

PORTA Véronique

JAP

T.G.I BOURG EN BRESSE - 01000 BOURG EN BRESSE

standard 04 74 45 05 76

TONDU Sylvie

JAP

T.G.I NANTERRE - 92020 NANTERRE CEDEX

standard 01 40 97 15 00 - télécopie 01 40 97 15 33

VANNIER Catherine

Substitut (JAP Thonon les Bains à/c 09/99)

T.G.I CRETEIL - 94011 CRETEIL CEDEX

standard 01 49 81 19 32


 

BUREAU
 
Présidente Marie-Suzanne PIERRARD
Vice-présidents Olivier GUICHAOUA, chargé des relations internes avec les adhérents et les JAP
  Godefroy du MESNIL du BUISSON, chargé des relations extérieures
  Véronique PORTA
Secrétaire générale Christine MOUTON-MICHAL
Secrétaire générale adjointe Laurence MENGIN
Trésorier Jacques BAILLET
Trésorier-adjoint François GIORDANI


 

CONSULTATION NATIONALE SUR LA REFORME DES CPAL
ET LA MISE EN PLACE DES SPIP


Au 22 avril 1999, 64 réponses ont été reçues.
 
Les réponses proviennent des JAP de : Nanterre, Alberville, Alès, Poitiers, Bayonne, Belley, Chambéry, Melun, Bordeaux, Aurillac, Vesoul, la Roche sur Yon, le Mans, Angouleme, Laval, Lille, Lure, Chalon sur Saone, Saint Brieuc, Marseille, Amiens, Lorient, Montbéliard, Clermont Ferrand, Limoges, Draguignan, Niort, Valenciennes, Péronne, Bastia, Soissons, Tours, Cusset, Alençon, Chartres, Saint Malo, Aix en Provence, Saint Omer, Pointe à Pitre, Saint Denis de la Réunion, Arras, Bar le Duc, Argentan, Saint Nazaire, Fort de France, Mende, Le Puy en Velay, Versailles, Troyes, Reims, Créteil, Lyon, Macon, Périgueux, Toulon, Besançon, Agen, Perpignan, Roanne, Coutances, Bordeaux, Bourg en Bresse.

Leur exploitation démontre que les situations sont inégales (1). De même, l'impact réel de la réforme, concrétisée par les déménagements, reste très variable (2).

 

1) PRESENTATION DE L’ETAT ACTUEL DES SERVICES


L'analyse des réponses reçues permet d'établir que 86 Juges de l’Application des Peines exercent leurs fonctions au sein de 63 Comités de probation.

Seuls 5 d'entre eux sont à temps plein.

En grande majorité, les Juges de l'application des Peines exercent leur fonction à temps partiel. Souvent, et tel est le cas, les JAP des grands TGI sont à 80 ou 90%, temps complété par des fonctions compatibles voire nécessaires comme celles d'assesseurs correctionnels ou de Cour d Assises.

Au contraire, dans les TGI de moindre importance, on constate le morcellement extrême des fonctions qui s'exercent de 10% à 80%.

La situation est identique concernant les secrétariats.

86 personnes y sont affectées, en grande majorité à temps partiel.

Souvent, plusieurs personnes à temps partiel se succèdent sur le même poste, probablement au détriment de la cohérence du Service.

27 personnes appartiennent à l'administration Pénitentiaire. Ces postes sont parfois occupés par des vacataires. 59 personnes appartiennent ou sont recrutés par les Services Judiciaires dont 11 greffiers. Ces personnes ont des statuts variables, emploi-jeune, CES (?).

En tout état de cause, elles sont rarement à temps plein. Enfin, on observe que 4 JAP sont dépourvus de tout secrétariat.
 

2) UNE REFORME A GEOMETRIE VARIABLE

· sur l'information et la concertation S'agissant de l'information préalable à la réforme, 41 des collègues se satisfont des éléments reçus encore que certains dénoncent le caractère tardif ou indirect (agents de probation, ANJAP...) des informations.

21 JAP se disent insuffisamment informés.

33 JAP déclarent avoir été associés à sa mise en oeuvre contre 27.

Il semble que l'on doive interpréter ces données en fonction de l'état des relations interpersonnelles entre les JAP et les Chefs de projets, de la politique de communication des Directions Régionales ou de la syndicalisation de certains magistrats leur permettant de recueillir des informations par d'autres voies.

· sur les déménagements Les réponses ont permis de déterminer que 14 déménagements sont terminés ou en voie de l'être. 23 déménagements seront réalisés à échéance variable, certaine ou incertaine. 26 services devraient, en l'état, demeurer au sein des TGI.

Là encore, la situation est très diverse.

Si l'on estime que l'impact de la réforme est beaucoup plus important en cas de séparation matérielle puisqu'il en découle des conséquences liées au fond du travail socio-éducatif (doubles dossiers, relations entre JAP et agents ...), il apparaît que la réforme a, dés à présent, des conséquences variables.

· situation des comités ayant déménagé ou dont le déménagement est en cours Sur les 14 sites concernés, la majorité des JAP soit 9 exercent ou vont exercer au TGI en disposant d'un bureau au SPIP, 5 d'entre eux exerçant totalement au TGI. En l'état, aucun JAP n'exerce ou n'exercera exclusivement ses fonctions au SPIP. Cependant, un seul d'entre eux avait émis un tel souhait.

14 postes de secrétariat ont été affectés ou vont l’être (il s'agit de personnes et non d'équivalent temps-plein).

Bien que l'hypothèse concerne des déménagements effectués ou en cours, beaucoup d'incertitude règne sur le matériel informatique mis à disposition.

En effet, seuls 5 JAP ont la certitude de disposer du matériel suffisant, 3 sont connectés au SPIP ou vont l’être et 4 disposent ou vont disposer de MOUVE.

Pour le reste, les réponses démontrent soit l'insuffisance ou l'inexistence de la dotation, soit son incertitude alors même que le déménagement est déjà réalisé.

On peut en conclure que l'activité de 9 JAP est paralysée par cette absence de moyens et ceci concerne non seulement des TGI de petite taille (Agen, Argentan ... ) mais aussi des TGI importants (Versailles, Lille, Toulon..).

Le paradoxe suivant est également dégagé : alors que selon le discours pénitentiaire ambiant, la réforme est univoque dans l'ensemble de ses aspects, la mise en place des services et la dotation des magistrats en matériel est tout à fait variable. L'exemple-type en est la mise à disposition du logiciel MOUVE, parfois acceptée et parfois refusée (seuls 4 JAP sur 14 en disposent).

Dans le même sens, il faut observer que malgré le départ des CPAL, seuls 7 services ont mis en place des doubles dossiers. Parfois, le dossier a été scindé en deux et réparti entre le TGI et le CPAL (pièces judiciaires, pièces éducatives). Pour l'un des services, il n'a pas été fait de double dossier, le SPIP ayant emmené l'entier dossier alors que faute de bureau, le JAP ne peut travailler au sein du SPIP.

Ainsi, il est d'évidence que, mise en application, la réforme est à géométrie très variable!

· situation des autres services - S'agissant des 23 sites pour lesquels les déménagements sont prévus ou prévisibles à brève échéance, tous les cas de figure sont réalisés : une partie des collègues n'exerceront leurs fonctions qu'au TGI ou seulement au SPIP, certains dans les deux lieux et enfin, les autres l'ignorent...

De même, si quelques-uns savent d'ores et déjà qu'ils disposeront d'un secrétariat, d'autres, la majorité, l'ignorent.

Parallèlement, 5 collègues estiment qu'ils seront dotés du matériel informatique suffisant mais deux seulement pensent être connectés avec le SPIP.

6 JAP pensent disposer de MOUVE...

Les réponses concernant la mise en place des doubles dossiers fait apparaître la même incertitude : 6 services vont s'organiser ainsi, 9 services resteront au dossier unique et 8 services sont dans l'inconnue.

- S'agissant des 26 sites dont le déménagement n'est ni prévu ni prévisible, on s'aperçoit avec quelque surprise que malgré la programmation ancienne de la réforme, les conséquences en sont majoritairement incertaines sur le terrain.

En effet, seulement un tiers des TGI a prévu la mise en place d'un secrétariat du JAP. Seuls 4 JAP estiment qu'ils seront dotés du matériel informatique suffisant, deux seront connectés au SPIP. Pour les deux tiers des JAP concernés, tout est incertain au point de vue matériel. On observe cependant que ces incertitudes concernent essentiellement les dotations émanant des TGI (personnel, matériel informatique) car 11 JAP sur 26 auraient reçu l'assurance de détenir MOUVE.

Quant aux souhaits exprimés, les JAP sont partagés entre le désir d'exercer au sein des TGI exclusivement ou dans le cadre des SPIP. Deux d'entre eux souhaitent travailler exclusivement dans le cadre des SPIP.

19 JAP sur 26 désirent que le dossier unique de probation soit maintenu.
 

Pour conclure,

il parait opportun de rappeler la genèse du processus ayant conduit à cette situation déplorable : après enquête et constat des Services Judiciaires, la réforme est initiée et pilotée par l'administration Pénitentiaire avec un grand luxe de "concertation" organisée au sein de divers comités de pilotage nationaux et locaux.

Sont associés tous les intéressés, qu'ils appartiennent aux Services Judiciaires ou à l'administration Pénitentiaire.

Les "projets" de Loi, Décret et circulaires sont soumis à avis de chacun.

Cette phase, qui dure depuis plus d'un an, se fait au détriment du travail socio-éducatif et Judiciaire puisqu'un important effort est demandé à tous sans aucune contrepartie.

Entre-temps, alors même qu'aucun texte légal ni réglementaire n'était paru, l'administration Pénitentiaire a imposé unilatéralement le déménagement de certains services (Toulouse, Versailles...).

Le décret, qui vient de paraître courant avril 1999, n'a pas été précédé du nécessaire texte législatif.

Enfin, et surtout, malgré les vives assurances données lors des réunions organisées sous l'égide des Cours d’Appel, par la Direction des Services Judiciaires, aucun moyen en personnel ni en matériel n'a été dégagé au bénéfice des Juges de l’Application des Peines.

Bien au contraire, 60 postes de secrétariat ont été détachés, sans remplacement ce jour, de la Direction des Services Judiciaires à l'administration Pénitentiaire !

Dans le même temps, lors de déménagement, grande est la tentation des Chefs de juridiction de récupérer locaux, matériels voire Juges...

Et de s'interroger sur le sens d'une réforme, à l'origine souhaitable sur le plan théorique, si bien préparée sur le plan sémantique, débouchant sur de telles incohérences ?

Est-il de l'intérêt des personnes gracieusement dénommées PPMJ de voir l'activité des services chargés de maintenir leur insertion ou de favoriser leur réinsertion désorganisée ainsi ?

V.Porta, Juge de l'Application des Peines


RELATION DE MA MISSION AU MEXIQUE (20/27 février 1999)


J'ai effectué cette mission en compagnie de M. Yves TIGOULET, chargé de mission d'expertise et de coopération auprès des pays étrangers à la direction de l'administration pénitentiaire.

En préambule, il convient de préciser que le Mexique a une expérience de la démocratie que l'on peut qualifier d'insignifiante, ce qui n'est pas le cas de nombre de pays d'Amérique latine. A cet héritage s'ajoute aujourd'hui une rhétorique sécuritaire, en raison de la présence de la violence urbaine, notamment dans le district fédéral de Mexico, où la police est placée sous commandement militaire.

Autre difficulté pour l'Etat de droit : la guerre issue du trafic de drogue, qui condamne, pour l'heure, le Mexique à l'instabilité, en raison du pouvoir de corruption des narco-trafiquants et des pressions des Etats-Unis.

Ce paysage d'ensemble rend compte des caractéristiques du système pénitentiaire et de la gestion des peines au Mexique.

Pour l'essentiel, les établissements carcéraux ou assimilés visités relèvent du pouvoir exécutif : le pouvoir judiciaire apparaît subsidiaire, et ne joue pas un rôle de contrôle. La magistrature étant dépendante - notamment à la suite d'un recrutement à temps qui interdit toute carrière judiciaire- l'omnipotence administrative ne saurait surprendre. Il demeure que ce trait explique pour partie le flou observé dans l'exécution des peines, aussi bien pour les mesures provisoires que pour celles qui ont un caractère définitif. La procédure dite de l'amparo, présentée comme une garantie en matière de protection des libertés est, en réalité, une fiction, si l'on considère la rareté de sa mise en oeuvre et le fait qu'elle est utilisée surtout par des multinationales ou de grands propriétaires fonciers.

Le traitement pénitentiaire soumis à notre attention repose essentiellement sur une base comportementale d'inspiration béhavioriste -à savoir un courant de la psychologie cognitive en vogue aux U.S.A., particulièrement autour de l'oeuvre de SKINNER. Pour celui-ci, la fonction de la psychologie est de déterminer quelles doivent être chez l'homme les conduites "pertinentes" au regard de l'intérêt de la société, et de les imposer aux citoyens par des "programmes de renforcement". Ce système favorise le régime pénitentiaire dit "progressif", adapté à chaque sujet particulier, et permet au condamné d'évoluer, le cas échéant, vers un assouplissement des conditions de sa détention comme vers une érosion de sa peine.

Ce primat de la psychologie est renforcé par le poids de la criminologie clinique, laquelle autorise un traitement individuel du détenu, par une équipe pluridisciplinaire. Dans une première phase, chaque membre de l'équipe - médecin généraliste, psychiatre, psychologue, assistant social, éducateur- utilise sa propre technique d'investigation. Dans une seconde phase, les membres de l'équipe confrontent les données recueillies et leur interprétation particulière. ils s'efforcent alors d'arriver à une appréciation commune du sujet étudié et de son devenir. C'est à ce stade que le cas singulier est rapproché de l'instrument de travail qu'est la théorie comportementale.

Il apparaît, au total, que le système pénitentiaire et la gestion des peines mexicains sont en harmonie avec l'environnement local. Ainsi, la mission d'insertion dévolue à la prison française - avec les nombreuses structures sociales d'accompagnement disponibles- ne saurait être envisagée au Mexique. Il semblerait d'ailleurs que l'attente des responsables rencontrés porte d'abord sur les améliorations que pourrait suggérer notre code pénal, bien plus utile, à leurs yeux, que notre code de procédure pénale.

Perpignan, le 30 mars 1999.

Jean-Pierre MELENDEZ, juge de l'application des peines


 

LE JUGE ADMINISTRATIF EN PRISON

J. Raymond, président de tribunal administratif.
 
 

La doctrine fait remonter à la loi des 16/24 août 1790 l'existence de deux ordres de juridictions. La répartition des compétences entre ces deux ordres obéit à des règles nuancées.

Traditionnellement le juge judiciaire est le juge du service public judiciaire et le gardien des libertés individuelles. Aussi, pourrait-on ne pas s'attendre à trouver le juge administratif en milieu carcéral : pourtant plusieurs portes lui sont ouvertes.

En effet et tout aussi traditionnellement les tribunaux de l'ordre administratifs sont les gardiens de la légalité des décisions administratives et les juges de la responsabilité administrative. Or l'administration pénitentiaire prend des décisions administratives, lesquelles sont, parfois, de nature à engager sa responsabilité.

Les décisions administratives (Recours pour excès de pouvoir)

Distinction décisions judiciaires/administratives

Aussi, la jurisprudence s'est-elle attachée à distinguer les décisions prises par les autorités judiciaires des décisions administratives.

Exemples de décisions judiciaires (qui échappent au contrôle du juge administratif)

ÿ Les décisions des juridictions: demande d'un détenu tendant à ce qu'il soit libéré de prison: - C.E. 22 juin 1988, Torquet et Mme Fleury, n° 88057. ÿ Les décisions des autorités judiciaires dans le cadre d'une procédure pénale: Ex. la décision du juge d'instruction (confirmée par la Cour d'Appel) refusant une contre-expertise psychiatrique. - C.E. 26 octobre 1984, Faurie, n°57346: ÿ Les actes relevant de la police judiciaire sur la base desquels ces décisions sont intervenues. Ex: demande tendant à ce qu'il soit constaté que les plaintes sur la base desquelles la Cour d'Appel a condamné son concubin, ont fait l'objet de manoeuvres de la part des services de police : - C.E. 22 juin 1988, Torquet et Mme Fleury, n° 88057 ÿ actes pris dans le cadre d'une procédure pénale et non détachables de la procédure judiciaire : Ex. rapport établi par l'administrateur des affaires maritimes, à la demande du procureur de la République, au sujet des circonstances d'un accident nautique à la suite duquel l'auteur a été condamné à une peine de prison avec sursis et à des dommages-intérêts aux ayants-droit de la victime est intervenu dans le cadre d'une procédure pénale et n'est pas détachable de celle-ci: - C.E. 23 janvier 1991, Morvan, n°111255.

A cet égard peu importe l'auteur de la décision, qui peut être un fonctionnaire, par exemple, un préfet ou le directeur d'une maison d'arrêts :

décisions par lesquelles le préfet du Val-de-Marne et le directeur de la maison d'arrêt de Fresnes ont fait procéder à la prise d'une photographie de l'intéressé et au relevé de ses empreintes digitales : il n'appartient pas à la juridiction administrative de connaître des recours dirigés contre ces décisions:

- C.E. 10 juillet 1996, M. SELLI et autres, n° 155377.

Exemples d'actes administratifs

Il s'agit des décisions relatives à l'organisation et au fonctionnement du service pénitentiaire chargé d'accueillir, d'assurer la vie du détenu.

Exemples :

ÿ La décision d'un directeur de prison refusant la restitution de sommes bloquées sur les comptes nominatifs d'un détenu : - C.E. 3 novembre 1989, Pitalugue, n°85424, T. ÿ La décision par laquelle l'administration pénitentiaire a ordonné que l'entrée de la maison d'arrêt de Loos-lez-Lille soit munie d'un portique de télédétection électronique et que toute personne pénétrant dans l'établissement soit tenue d'emprunter ce portique : - C.E. 21 octobre 1988, Syndicat des avocats de France, n° 70066, L.

Le contrôle du juge administratif sur ces décisions (nature et étendue)

Deux problèmes seront abordés ci-dessous: un aspect de la recevabilité du recours pour excès de pouvoir et l'étendue du contrôle du juge.

Recevabilité et décision faisant grief.

Il ne suffit pas qu'une décision soit administrative pour que le juge administratif accepte d'en contrôler la légalité. D'une manière générale le recours pour excès de pouvoir n'est ouvert qu'à l'encontre d'un acte qui a pour effet de modifier la situation juridique. Nous disons que l'acte fait grief. Aussi, s'agissant du fonctionnement d'une institution faut-il distinguer les décisions susceptibles de faire l'objet d'un recours administratif des mesures d'ordre intérieur.

Par exemple, aux termes de l'article D. 171 du code de procédure pénale : "La mise à l'isolement d'un détenu ne constitue pas une mesure disciplinaire. Les détenus qui en font l'objet sont soumis au régime ordinaire de détention." ; une telle mesure qui n'a pas pour effet d'aggraver les conditions de détention n'est pas, par nature, susceptible d'exercer une influence sur la situation juridique de la personne qui en est l'objet ; elle constitue ainsi une mesure d'ordre intérieur qui n'est pas susceptible d'être déférée au juge administratif par la voie du recours pour excès de pouvoir:

- C.E. 22 septembre 1997, Trebutien, n°170750.

En revanche les sanctions disciplinaires infligées aux détenus sont, depuis 1995, regardées comme des actes faisant grief:

- C.E. Ass. 17 février 1995, Marie,n° 97754, L.

La punition de cellule est une sanction grave : elle entraîne, en vertu de l'article D.169 du code de procédure pénale, la privation de cantine et de visites; des restrictions à la correspondance; elle peut limiter les réductions de peine accordées aux détenus en vertu de l'article 721 du même code. Aussi, cette sanction constitue une décision faisant grief susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir.

La nature du contrôle

D'une manière générale le juge, selon la nature de l'acte qui lui est soumis, pousse plus ou moins son contrôle. Nous distinguons le contrôle minimum, le contrôle normal et le contrôle de la proportionnalité.

Dans l'espèce Marie, précitée, la lettre adressée par le détenu au chef du service de l'inspection générale des affaires sociales, pour se plaindre du fonctionnement du service médical de l'établissement, énonce des critiques dans des termes peu mesurés, elle ne contient ni outrage, ni menace, ni imputation pouvant être qualifiés de calomnieux. En prenant la décision de mise en cellule de punition, le directeur de la maison d'arrêt s'est fondé sur des faits qui ne sont pas de nature à justifier une sanction.
 

La responsabilité de l'Etat

D'une manière générale, lorsque l'administration, par son fait, cause un dommage, elle est tenue de réparer le préjudice qui en est résulté. Deux aspects du contentieux de pleine juridiction seront ici abordés: la cause juridique et le lien de causalité.

Les causes juridiques

Il existe plusieurs causes juridiques à la mise en œuvre de la responsabilité administrative. Les deux principales sont : la responsabilité pour faute et la responsabilité sans faute.

Dans le cadre de cette première, selon la difficulté de la mission confiée à l'administration, le juge engagera la responsabilité administrative à la suite d'une faute simple ou exigera l'accomplissement d'une faute lourde.

Réparation des dommages subis par les détenus

L'administration pénitentiaire est responsable de la sécurité des détenus.

Cette exigence a deux volets. Le détenu doit recevoir les soins que son état exige; il doit être protégé des actions violentes de ses codétenus.

ÿ Exemple de faute lourde en l'absence de soins adéquats: Un détenu qui était incarcéré à la prison des Baumettes pour y purger une peine d'emprisonnement de trois ans, a été trouvé, un matin, mort, dans la cellule de sécurité où son agitation avait conduit les autorités responsables à le placer. Or, deux surveillants l'avaient aperçu, au cours d'une ronde, la veille au soir, étendu, inanimé à même le sol de sa cellule. Ils ont, selon leurs dires, vainement tenté de le réveiller et, après cet échec, se sont bornés à le replacer sur son matelas sans prendre aucune mesure de surveillance complémentaire et, notamment, sans aviser de ces circonstances leurs supérieurs hiérarchiques ou le service médical.

Ce comportement révèle une faute lourde du service pénitentiaire, compte tenu des affections psychiques que présentait M. Robert D. et pour lesquelles il faisait l'objet d'une surveillance et de soins particuliers de la part du service médico-psychologique de l'établissement:

- C.E. 16 novembre 1988, Epoux Deviller , n°68224, L.

Un détenu sort de prison avec la tuberculose; sans doute ne l'avait-il pas contractée au cours de son séjour en prison. Mais il n'avait subi aucun examen médical non plus qu'aucun examen de dépistage systématique pendant son incarcération; cette absence d'examens a été à l'origine du retard apporté au diagnostic et a été en relation de cause à effet avec l'évolution ultérieure de la maladie; elle a donc été constitutive de fautes susceptibles d'engager la responsabilité de l'Etat:

- C.E. 12 décembre 1979, Lévêque, n°5826.

ÿ Exemple de faute lourde : ne pas empêcher un détenu de nuire: Avant de mettre le feu à la cellule qu'il partageait avec deux codétenus à la maison d'arrêt de Metz, un détenu s'était déjà signalé à l'administration pénitentiaire comme un individu particulièrement dangereux par son comportement au cours de son emprisonnement, par les agressions auxquelles il s'était livré sur d'autres détenus, par les menaces de diverses natures qu'il avait déjà proférées . Dans l'état des informations dont elle disposait sur la personnalité de ce détenu, l'administration pénitentiaire, responsable de la sécurité des prisonniers, a commis une grave négligence en s'abstenant de prendre les mesures particulières de surveillance qui s'imposaient à son égard en vue de prévenir les initiatives dangereuses qu'il pouvait prendre; cette faute lourde est de nature à engager la responsabilité de l'Etat pour le décès du codétenu, qui a succombé à la suite de l'incendie provoqué ainsi qu'il est dit ci-dessus.

- C.E. 26 mai 1978 Garde des Sceaux ministre de la Justice c/ Consorts Wachter, n¡02605, L.

Réparation des dommages subis par des tiers

ÿ Exemple de responsabilité pour faute lourde: les dommages causés par un détenu évadé engagent la responsabilité de l'administration pénitentiaire si celle-ci a commis une faute lourde dans l'exercice de sa mission de surveillance des détenus. - C.E. 10 mai 1985, Mme Ramade, n°48517, L. ÿ Exemple de responsabilité sans faute: permission de sortie Le régime des permissions de sortie prévu par l'article 722 du code de procédure pénale crée un risque spacial pour les tiers. Pourtant l'administration en laissant sortir un détenu ne commet pas de faute. Si le risque se réalise, la victime est quand même dédommagée: un détenu qui, à l'issue d'une permission de sortie, n'avait pas regagné la maison d'arrêt dans laquelle il était incarcéré commet un meurtre; la responsabilité de l'Etat peut être engagée, même sans faute:

- C.E. 27 mars 1987, Garde des Sceaux ministre de la Justice c/ Mme Henry, n°49928, L.

Le lien de causalité entre le fonctionnement du service public pénitentiaire et le dommage

La responsabilité de l'Etat ne peut être engagée que si trois éléments sont réunis: un acte (fautif ou non) de l'administration, un préjudice certain et actuel, un lien de causalité entre l'acte et le préjudice.

Ce lien n'est pas reconnu par le Conseil d'Etat lorsqu'un délai trop long sépare l'acte de l'administration (qui a autorisé la sortie, ou ne l'a pas efficacement empêchée) du nouveau forfait réalisé par un ancien détenu.

Ex. : Un détenu profite de son transfert pour des soins médicaux de la prison à un centre hospitalier pour s'évader. Quarante-huit jours après son évasion, il commet des meurtres pour lesquels il est condamné à la peine capitale et au versement de diverses indemnités aux ayants-droit des victimes. Ceux-ci ont parallèlement demandé au juge administratif de condamner l'Etat, sur le terrain de la faute lourde, à leur verser une indemnité égale au montant de celle mise à la charge des condamnés, insolvables. Le Conseil d'Etat a rejeté cette demande en l'absence d'un lien de causalité entre l'évasion et les faits incriminés.

- C.E. 10 mai 1985, Mme Ramade, n°48517, L., précité.

Même solution dans l'affaire précitée Henry: compte tenu du délai écoulé entre la date à laquelle le détenu aurait dû regagner la maison d'arrêt et celle du meurtre, le juge administratif ne voit pas de lien direct de causalité entre le fonctionnement du service public pénitentiaire et le dommage.

Le juge administratif contrôle donc la régularité du fonctionnement des établissements pénitentiaires. Ce contrôle ne va pas sans réticences. Il faut regretter que le pouvoir accordé à l'administration de prononcer les sanctions les plus faibles reste entièrement discrètionnaire. Cependant la jurisprudence évolue vers un accroissement du nombre des décisions susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Elle contribue ainsi à faire de la prison un lieu de droit
 



 
GRACES COLLECTIVES ET INDIVIDUALISATION DES PEINES


Relancer une politique volontariste d'aménagement des peines privatives de liberté, qui repose sur une véritable individualisation des décisions de libération anticipée et qui soit une politique compréhensible par nos concitoyens, nécessitera, à terme, d'abandonner la pratique de la grâce collective, devenue annuelle depuis 1991. C'est du moins l'une des positions prises par l'Association "Recherches, Confrontations et Projets" dans son texte de février 1999. La nécessité de définir des modalités transitoires est évidente.

Dans cette perspective, ne devrait-on pas s'inspirer, dans l'avenir, des modalités de la grâce collective de 1980 qui conjuguait " procédure collective " et " individualisation " en donnant au juge de l’application des peines la possibilité de moduler la remise de peine ? On pourrait imaginer un processus par étape dans lequel on augmenterait progressivement, d'année en année, la part de la remise dépendant de la décision du juge de l'application des peines, le temps de réformer l'ensemble des modalités d'exécution des peines et de rendre le recours à la libération conditionnelle pratique courante de libération anticipée.

En 1980, à l'occasion du 100ème anniversaire de la proclamation du 14 juillet comme jour de fête nationale de la France, le Président de la République accordait une mesure exceptionnelle de grâces collectives aux détenus condamnés à une courte peine d'emprisonnement.

Le décret prévoyait que tous les condamnés détenus le 14 juillet 1980 pour l’exécution d'une ou plusieurs peines privatives de liberté dont le total n'excèdait pas un an bénéficiaient de plein droit et immédiatement d'une remise de peine d'une durée de quinze jours. Cette durée pouvait être portée à un mois par le juge de l'application des peines statuant après avis de la commission de l'application des peines.

Fin 1980, nous avions réalisé une enquête statistique, sur l’ensemble de la population des condamnés détenus en métropole, au 14 juillet et susceptibles d'avoir bénéficié de la grâce collective. Nous n'entrerons pas ici dans les détails de la méthode de collecte assez complexe que nous avions utilisée. Mais elle nous avait permis de connaître, pour chaque détenu concerné, le nombre de jours de grâce dont il avait bénéficié du fait de la grâce collective ainsi que le nombre de jours de grâce dont il avait bénéficié du fait de la latitude laissée au juge de l'application des peines de porter cette durée à un mois.

On a pu estimer la population carcérale au 14 juillet 1980, en métropole, à 38 300 détenus dont 21 100 condamnés. Notre enquête a conduit au nombre de 6 207 d_tenus ayant bénéficié de la grâce présidentielle. Cela représente 16 % de l'ensemble des détenus et 29 % des condamnés. Près des deux tiers des détenus graciés avaient, initialement, été condamnés à une ou plusieurs peines dont le total était inférieur ou égal à six mois.

La répartition des détenus selon les modalités effectives de la grâce de 1980, présentée ci-dessous, montre que 50 % des détenus graciés ont bénéficié d'une remise supplémentaire du juge de l'application des peines.

 
Modalités effectives de la mesure
Nombre de détenus
%
Détenus ayant bénéficié d'une remise de moins de 15 jours (condamnés n'ayant plus à subir qu'une peine de moins de 15 jours)
1172
18,9
Détenus ayant bénéficié d'une remise de 15 jours exactement
1934
31,2
Détenus ayant bénéficié d'une remise supplémentaire du juge de l'application des peines de moins de 15 jours
753
12,1
Détenus ayant bénéficié d'une remise supplémentaire du juge de l’application des peines de 15 jours exactement
2348
37,8
Ensemble des détenus graciés
6207
100,0

Si l'on veut estimer la façon dont les JAP ont utilisé la latitude qui leur était laissée de porter la durée de remise de peine à un mois, il est plus significatif de rapporter le nombre de détenus bénéficiaires de cette possibilité au nombre de détenus réellement concernés. Aussi convenait-il de prendre comme dénominateur le nombre des détenus graciés ayant encore à subir une peine de plus de quinze jours au moment de la décision du JAP. Ce "taux d'octroi" est alors de 62 %.

Les variations de ce taux d'octroi selon l'établissement étaient considérables : de 0 % à 97 %. Différences dans les caractéristiques des condamnés, dans le climat de l'établissement, l'attitude de la commission de l'application des peines, celle du juge ? sans doute un peu de tout cela. L'enquête réalisée en 1981 ne permettait pas d'en dire plus sur les raisons des écarts.

Revenir au principe de la grâce collective de 1980 - remise modulable par le JAP - ne serait pas une grande révolution dans l'aménagement des peines. Mais ce serait le signe de la volonté politique de changer la logique de la gestion des peines privatives de liberté, transformation profonde qui, elle, exigera des réformes d'une toute autre ampleur.
Pierre Tournier

JURISPRUDENCE

S'il est vrai qu'en vertu des dispositions des articles 132-6 et 133-7 du code pénal, les remises gracieuses portant sur une peine ultérieurement absorbée ne peuvent s'imputer sur la durée de la peine absorbante, ces dispositions plus sévères ne sauraient s'appliquer, conformément à l'article 371 de la loi du 16ÊdécembreÊ1992, aux personnes reconnues coupables de crimes ou de délits en concours commis avant le 1er mars 1994. Ces personnes demeurant soumises aux dispositions plus favorables de l'article 5 ancien du code pénal qui, en ce qui concerne les remises gracieuses, ne déroge pas au principe général du droit alors applicable selon lequel la grâce vaut exécution de la peine.

(Chambre criminelle 16 mars 1999. Pourvoi no 98-84-292 sur Cour d'appel d'Aix en Provence du 26 mars 1998).


INDEMNISATION DES AVOCATS DANS LE POSTSENTENCIEL


 

SENAT

GROUPE DU RASSEMBLEMENT

DEMOCRATIQUE ET SOCIAL

EUROPEEN

LE PRESIDENT

Paris, le 27 avril 1999

 
 

Cher Monsieur le Président,
 
 

Par lettre en date du 29 mars, vous m'avez fait part des préoccupations de l'Association nationale des juges de l'application des peines sur le problème de l'indemnisation des avocats intervenant dans le cadre des procédures postsentencielles.

Je tiens à vous informer que j'ai déjà interrogé Madame la Ministre de la Justice sur ce point, à l'occasion de l'examen par le Sénat du budget de son ministère, en décembre 1998. Une réponse m'a été adressée par courrier dont je vous joins copie.

Comme vous le savez, le décret général d'application de la loi du 18 décembre 1998 sur l'accès au droit et la résolution amiable des conflits est en cours d'élaboration. Celui-ci doit modifier le décret du 19 décembre 1991 concernant l'aide juridictionnelle et notamment inclure la rétribution des avocats intervenant dans certaines procédures postsentencielles prévues par la loi relative au placement sous surveillance électronique et celle relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs.

Par ailleurs, un groupe de travail chargé par Madame la ministre d'une réflexion sur la judiciarisation de l'application des peines devait déposer ses conclusions à la fin du premier trimestre 1999. Je ne manquerai pas de vous tenir informé des propositions qui auront été formulées, dès que j'en aurai pris connaissance.

Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l'assurance de mes sentiments les meilleurs et bien dévoués.

Guy-Pierre CABANEL


REPONSE
Paris, le 18 janvier 1999

 

Monsieur le Sénateur,
 

Lors du débat, au Sénat, du projet de loi relatif à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits, vous. avez posé la question de la détermination de l'indemnisation des avocats intervenant dans le cadre des procédures postsentencielles.

J'ai l'honneur de vous indiquer que l'article 10 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique réserve le domaine de l'aide juridictionnelle aux instances devant les juridictions.

Jusqu'à la loi du 19 décembre 1997 consacrant le placement sous surveillance électronique comme modalité d'exécution des peines privatives de liberté, le régime général des décisions du Juge de l'application des peines était exclusivement fixé par l'article 733-1 du code de procédure pénale qui assimile le contentieux postsentenciel à des mesures d'administration judiciaire.

Dès lors, la procédure devant le Juge de l'application des peines qui ne revêtait pas un caractère juridictionnel, ne donnait pas lieu à une rétribution de l'avocat au titre de l'aide juridictionnelle. En conséquence, l'article 90 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ne prévoyait aucune rubrique de ce chef.

Cette exclusion textuelle a été partiellement remise en cause par l'adoption de la loi du 19 décembre 1997 précitée et par celle du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs.

En effet, ces deux textes prévoient expressément qu'un certain nombre de décisions du Juge de l'application des peines sont prises en audience de cabinet, l'avocat entendu.

En conséquence, ces procédures nouvelles entrent dans le champ d'application de l'aide juridictionnelle et dans cette optique une barémisation de la rétribution des avocats intervenant devra être prévue à l'article 90 du décret du 19 décembre 1991.

Ce travail sera accompli dans le cadre de l'élaboration des textes réglementaires nécessaires à l'application de la loi du 18 décembre 1998 sur l'accès au droit et la résolution amiable des conflits.

Par ailleurs, en octobre 1998, j'ai sollicité une réflexion conjointe de la Direction de l'Administration Pénitentiaire, de la Direction des Affaires Criminelles et des Grâces et de la Direction des Services Judiciaires sur la " judiciarisation de l'application des peines ".

Un groupe de travail déposera ses conclusions courant février 1999. Je ne manquerai pas de vous en faire part et de vous indiquer le dispositif qui sera alors mis en place dans le cadre de l'aide juridictionnelle.

Je vous prie de croire, Monsieur le Sénateur, à mes sentiments les meilleurs.
Elisabeth GUIGOU


PRATIQUE JUDICIAIRE

"Il est souhaitable que l'association des juges de l'application des peines tienne davantage compte des conditions dans lesquelles travaillent ceux-ci et se rapproche de leurs préoccupations quotidiennes". C'est à la suite de cette réaction plusieurs fois entendue que nous vous proposons cette rubrique qui se fera l'écho des réalisations entreprises susceptibles d'améliorer le travail des magistrats de l'application des peines.
 
 

ÉTUDE ET PRÉSENTATION

D'UN DOSSIER DE PROBATION



Innombrables sont les dossiers présentés chaque année à chaque juge de l'application des peines par les travailleurs sociaux des comités de probation / s.p.i.p.

Bien plus nombreux encore les dossiers étudiés par les juges de l'application des peines.

Peut-on envisager de systématiser les dossiers présentés, afin que chaque travailleur social de justice puisse indiquer au juge de l'application des peines, rapidement et de manière claire, les raisons du signalement ?

C'est dans cette intention qu'est proposé le document ci-joint qui n'a d'autre but que de lister les différents motifs d'incident lors d'une période d'épreuve (le terme d' "incident" étant pris ici dans son acception la plus large désignant tout évènement survenant au cours de la période d'épreuve et en lien avec elle). Il est proposé pour accompagner voire dans les cas simples constituer le rapport dont le juge a besoin avant de décider.

Nous espérons qu'il simplifiera l'appréhension de dossiers signalés dès lors de manière plus claire et immédiatement accessible.

Godefroy du MESNIL
Maître de conférences

à l'Ecole nationale de la magistrature,
20 juillet 1999
document disponible sous Wordperfect 5.2.

ÉTUDE / PRÉSENTATION DE DOSSIER

- Fiche d'évaluation intermédiaire -

(audience d'incident, rapport, revue de secteur)

Caractéristiques générales

- Prénom et NOM du condamné

évent. âge, profession et emploi

- Nature des FAITS et date (cf. décision de justice au dossier)

(et, le cas échéant, résumé des faits en joignant: réquisitoire définitif, p-v. de synthèse, compte-rendu d'enquête ou compte-rendu d'infraction)

- Déjà condamné (évent date): cf. B. 1 < 2 mois (à joindre)

- PEINE ?

Date de notification ? de fin de délai d'épreuve ?

- Observation des OBLIGATIONS ?

Objet de l'étude / de la présentation:

Inobservation d'obligation portée à la connaissance du condamné

O absence à une convocation

O défaut de remise de justificatifs

O changement irrégulier de domicile

O changement irrégulier d'emploi

O déplacement irrégulier > 15 jours

O déplacement non autorisé à l'étranger

O disparition: retour de convocation par a.f.p.

O nouveau délit: à quel date ? nature ? condamné libre ou détenu ?

- prévenu: date d'audience ? tribunal (évent. chambre) ?

- condamné: quel jugement rendu ? (recevoir une expédition)

O ...

==>> avis du travailleur social de justice concerné

Proposition motivée

O d'affectation t.i.g.

O d'audition par le juge de l'application des peines

O de suppression d'obligation initiale

O de modification d'obligation particulière

O d'ajout d'obligation supplémentaire

O d'incarcération et de révocation (ou de poursuites nouvelles t.i.g.)

O de classement administratif

O ...

Problème humain grave (prévention de la récidive)

O familial

O professionnel

O relationnel

O ...

==>> action déjà menée par le travailleur social de justice et propositions de solution

Requête du condamné

O d'autorisation de changement de résidence

O d'autorisation de changement d'emploi

O d'autorisation de déplacement à l'étranger

O de suspension de délai d'exécution t.i.g.

O en modification d'obligation

O en suppression d'obligation

O en dispense de mention au B. 2 du casier judiciaire<

O ...

==>> avis du travailleur social de justice
 


INFORMATIONS RAPIDES

Le décret instituant les s.p.i.p. est paru - Le décret n° 99-276 du 13 avril 1999 modifiant le code de procédure pénale (troisième partie: Décrets) et portant création des services pénitentiaires d'insertion et de probation à été publié au Journal officiel du 14 avril 1999 pp. 5478 à 5481).Ainsi, sans tenir compte de la loi qui institue les comités de probation ni des règlements d'administration publique, est mis en place un décret non seulement dépourvu de toute base légale mais bien plus qui va à l'encontre de la loi puisqu'il supprime ce que la loi institue. Aussi l'administration envisage-t-elle de faire changer la loi ensuite, mettant le législateur devant le fait accompli.

Annuler le décret instituant les s.p.i.p. ? - C'est la très sérieuse question que se sont posée les membres du conseil d'administration de l'Association nationale des juges de l'application des peines. En envisageant un recours devant le Conseil d'Etat qui aurait annulé ledit décret comme allant à l'encontre des dispositions législatives. Recours très disputé et finalement écarté après ample réflexion dont il ne peut être rendu compte dans ces colonnes. L'association a-t-elle eu raison ? En tout état de cause, on peut légitimement s'étonner qu'il n'y ait pas davantage de réactions des magistrats (et de leurs organisations professionnelles), juristes, professeurs d'université, et autres praticiens professionnels pour s'indigner que la hiérarchie des règles de droit ne soit pas respectée. "Ce n'est pas grave, on régularisera ensuite", et on laisse entendre que l'on fera un ce modificatif dans les dispositions diverses d'un texte de loi ultérieur. Est-ce donc cette administration qui ferait désormais la loi qu'elle juge utile ? (et utile à quels intérêts ?)
 
Mise en place des  services d'insertion et de probation: la circulaire - Communiquée tout récemment au cabinet, celle-ci doit être signée très prochainement par la ministre de la justice. Sa teneur devrait être assez semblable au projet diffusé dans les juridictions.
 
Quelle communication entre les juges de l'application des peines et les s.p.i.p. ? Le ministère de la justice étudie actuellement la mise en place du logiciel Outlook pour faciliter la communication entre les juges de l'application des peines et les services d'insertion et de probation. Le principe est d'installer progressivement une communication par intranet entre le juge et le s.p.i.p. avec un logiciel spécifique, en envisageant peut-être ultérieurement un dossier virtuel. Coordonné par M. Jean Berbinau, délégué de la Commission de l'informatique, des réseaux et de la communication électronique au ministère de la justice, ce projet est inspiré des relations entre les médecins et les caisses d'assurance-maladie. Il a été envisagé que le logiciel concerne toutes les relations professionnelles du juge de l'application des peines, mais même à titre pilote, cela semble trop coûteux. Aussi ce mode de communication ne devrait concerner que la relation j.a.p.-s.p.i.p.
Un projet pour pallier les effets désastreux de la réforme, comme le soutiennent certains ? Ou une expérimentation intéressante à l'image de l'Internet ?
Avec une interrogation: avec l'externalisation des services de probation hors des tribunaux, ce programme ne risque-t-il pas de réduire considérablement les contacts directs entre le juge mandant et ses mandataires ?
 
Les quarante ans du juge de l'application des peines - C'était le sujet de la journée d'études proposée par l'Association nationale des juges de l'application des peines -le sujet précis en était: "Quarante ans après sa création, le juge de l'application des peines est-il soluble dans les réformes ?". La journée d'études s'est tenue à l'Assemblée nationale, salle Colbert, vendredi 28 mai 1999. Au cours de celle-ci, après l'accueil de M. Jacques Floch, député de Loire-Atlantique et membre de la Commission des lois, des intervenants de qualité ont pris la parole :
- sur l'histoire de l'institution du juge de l'application des peines (Mme Claude Faugeron, directrice de recherche au C.N.R.S.),
- sur sa place originale au regard du droit public (M. Eric Péchillon, auteur de "Sécurité et droit du service public pénitentiaire" (L.G.D.J. 1998), maître de conférences à la Faculté de droit de Rennes),
- sur la complexité excessive du droit de l'application des peines au travers d'un exemple remarquable que l'on croirait un cas d'école et l'avenir du juge de l'application des peines (M. Pascal Faucher, président de l'Association nationale des juges de l'application des peines),
- et sur les propositions en relation avec l'application des peines présentées par l'association Recherches, confrontations et projets sur les mesures et sanctions pénales (M. Pierre Tournier, ingénieur de recherches au Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales - CESDIP, et Mme Charlotte Trabut, magistrate, pour l'association R.C.P.),
- la synthèse de cette journée étant faite par M. Michel Massé, maître de conférences à la Faculté de droit de Poitiers.
Les communications devraient être publiées progressivement dans la présente revue même si elles ne reflèteront que partiellement la teneur des débats.
A l'occasion de cette manifestation a également été présenté "Le livre noir de l'application des peines", recueil d'une dizaine de pages qui recense les nombreuses imprécisions, incohérences, étrangetés et contradictions du droit de l'application des peines.
La journée d'études a été suivie de l'assemblée générale de l'Association nationale des juges de l'application des peines.
 
Un nouveau président pour l'association des juges de l'application des peines-Lors de son dernier conseil d'administration, le 19 juin 1999, le conseil d'administration de l'Association nationale des juges de l'application des peines a choisi un nouveau président en remplacement de M. Pascal Faucher qui après six ans de présidence appréciée par tous a souhaité que d'autres prennent sa suite pour présider aux destinées de l'association.
C'est ici l'occasion de le remercier pour la qualité des relations qu'il aura su développer tant à l'égard des institutions publiques (parlement, ministère de la justice...) que des médias et autres associations professionnelles ou non afin de mieux faire connaître et comprendre l'idéal de justice que partagent les juges de l'application des peines et l'association qui les représente.
Mme Marie-Suzanne Pierrard, juge de l'application des peines au Tribunal de grande instance de Créteil, assure désormais la présidence de l'association avec l'appui et le soutien du nouveau conseil d'administration (cf page 2)
 
Un nouveau maître de conférences à l'E.N.M. pour enseigner la fonction de juge de l'application des peines  - Après cinq années d'excellents services à l'Ecole nationale de la magistrature, M. Jean-Marie Picquart est nommé à sa demande premier substitut au Tribunal de grande instance de Nanterre. Il est remplacé par M. Bruno Lavielle, précédemment juge de l'application des peines à Lorient, qui, en collaboration avec Godefroy du Mesnil, enseignera cette fonction tant aux auditeurs de justice (initiation et perfectionnement au mois de mars) qu'aux magistrats en formation continue (formation au changement de fonction, regroupement fonctionnel) et aux magistrats recrutés latéraux, du concours exceptionnel et du département international.
 
Prochains conseils d'administration - Prévus à l'avance pour permettre à chacun de prendre ses dispositions, ils auront lieu les samedi 11 septembre, vendredi 29 octobre et samedi 11 décembre 1999 au Palais de justice de Paris (métro: Cité) à 9 heures 30 et à 14 heures 30 dans la Salle du Cercle, face au cabinet du président du tribunal de grande instance comme à l'accoutumée (meilleur lieu de convergence pour des adhérents venant de toutes origines géographiques: Poitiers, Lyon, Strasbourg, Evreux, Chaumont, Bordeaux, Sarreguemines ...etc... et, bien sûr, Paris et sa région).
Tous les membres de l'association et juges de l'application des peines intéressés sont les bienvenus. Membre du conseil d'administration ou adhérent de l'association apportant votre contribution aux travaux, vous pourrez être remboursé de vos frais de déplacement sur production des justificatifs.
Pour toutes précisions utiles ou prévenir de votre venue, contactez Mme Marie-Suzanne Pierrard, présidente de l'Association et juge de l'application des peines au Tribunal de grande instance de Créteil, au 01 49 81 16 99 (ligne directe réservée aux professionnels - à défaut, on peut écrire au Tribunal de grande instance de Créteil).
Pour nous joindre le jour-même (ex. information urgente de l'association), T. 01 44 32 61 05.

Cette rubrique est réservée à la communication d'informations condensées intéressant le domaine de l'application des peines: manifestations nationales ou régionales, projets de réforme en cours, initiatives intéressantes ...etc...
Vous pouvez communiquer les documents utiles, originaux ou synthétiques que vous avez élaborés, et transmettre vos annonces ou recherches professionnelles.
Contact: Godefroy du Mesnil, T. 05 56 00 10 66 - Fax. 05 56 00 10 96.