LE MEDIATEUR ET LES DROITS DE L'HOMME




L'année 1993 marque le bicentenaire de l'une des Déclarations des Droits de l'Homme : celle inscrite en tête de la Constitution, jamais appliquée, du 24 juin 1793. Cette déclaration, si elle reprend nombre des principes exprimés dès 1789, revêt un caractère original, du fait de l'importance donnée à la souveraineté populaire et de l'évocation de droits sociaux.

Cependant, comme les institutions qui lui sont contemporaines, cette déclaration apparaît en marge de la tradition française des droits de l'homme et des libertés. Cette tradition s'est longtemps bornée aux principes proclamés en 1789, jusqu'à l'intervention de la Constitution du 27 octobre 1946, dont le préambule en a consacré de nouveaux, considérés comme " particulièrement nécessaires à notre temps ".

Aujourd'hui, le droit positif français accorde une valeur constitutionnelle à l'ensemble de ces principes, puisque la Constitution de la Vème République fait référence aux droits de l'homme tels qu'ils ont été définis en 1789, puis en 1946. De plus, dans le cadre de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la France s'est engagée à respecter d'autres principes qui s'imposent à toutes les autorités publiques.

Lorsque, par la loi du 3 janvier 1973, le Médiateur a été institué, le législateur ne lui a pas confié la responsabilité de veiller au respect des droits de l'homme, contrairement au souhait d'un certain nombre de parlementaires. Le Médiateur a été chargé, plus modestement, d'examiner les difficultés que rencontrent les administrés dans leurs rapports avec les services publics, de tenter de les résoudre et, plus généralement, d'émettre des propositions tendant à améliorer le fonctionnement des administrations ou à amender les textes législatifs ou réglementaires.

Il est vrai que le respect des droits et la défense des libertés sont assurés en France par l'ensemble des autorités publiques et particulièrement par les juridictions administratives et judiciaires. Le Conseil constitutionnel a, quant à lui, pris une place considérable dans ce domaine, en donnant une ampleur particulière au contrôle de constitutionnalité des lois, lequel permet, de manière inédite dans notre tradition juridique, de vérifier que ces textes sont en conformité avec la lettre et l'esprit de notre loi fondamentale.

De même, l'accomplissement de la mission du Médiateur de la République a révélé que l'institution est amenée à jouer, en matière de droits de l'homme, un rôle qu'il a paru intéressant d'analyser.

Si les personnes qui adressent des réclamations au Médiateur ne se prévalent pas toujours des libertés consacrées par les textes de valeur constitutionnelle, il apparaît que les difficultés dont elles se plaignent mettent en cause l'exercice de leurs droits. Le Médiateur a aussi l'occasion de constater les conditions dans lesquelles les libertés individuelles sont assurées. C'est souvent dans le but de favoriser le respect de certains principes qu'il présente des propositions de réforme aux autorités publiques.

Ses actions sur le plan international - notamment dans les pays en en voie développement - s'inscrivent, elles aussi, dans le cadre de la promotion des droits de l'homme et de l'État de droit.

Les principes qui inspirèrent les auteurs de la déclaration de 1789 avaient longuement mûri dans la pensée des philosophes du XVIIIe siècle. Ils jetèrent les bases éthiques et juridiques de notre démocratie. Légalement, ils n'ont pas vieilli et notre Constitution, dans son " Préambule ", continue d'y faire référence. Chacun a donc le droit, mais aussi le devoir de les prendre en compte.

Le Médiateur de la République n'entend pas faire une étude globale de notre société à cet égard, ni même envisager de manière exhaustive les droits et libertés reconnus par le droit positif.

Il souhaite seulement, à partir des réclamations qui lui ont été soumises, aborder certaines situations que les citoyens ont portées à sa connaissance et qui intéressent l'exercice de quelques-uns des droits et principes fondamentaux (sûreté des personnes, libertés politiques, droit de propriété).

Ces réflexions pourront être complétées, à l'avenir, par l'évocation d'autres de ces principes, proclamés en 1789 et en 1946, et toujours réaffirmés depuis.

I. LA SÛRETÉ DES PERSONNES

La sûreté constitue, suivant la formule de Jean RIVERO, " la protection la plus avancée de toutes les libertés ". L'article 2 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 l'a fait figurer en bonne place, entre la propriété et la résistance à l'oppression. Sous son aspect le plus connu, la sûreté qui exprime le souci de l'homme libre de se protéger contre l'arbitraire, intéresse le système répressif et notamment la procédure pénale ainsi que le montrent les articles 7, 8 et 9 de la Déclaration. Mais au-delà, la sûreté couvre les garanties susceptibles d'assurer la sécurité juridique de l'individu. Le débat engagé, il y a maintenant quelques années, sur l'informatique et les libertés, a illustré cet aspect du concept. Au-delà de la menace pour la vie privée, l'abus de fichiers informatisés peut compromettre la sécurité juridique des personnes concernées.

En retenant ce dernier volet de la notion lié à la sécurité juridique, on peut évoquer plusieurs interventions du Médiateur de la République relatives à la sûreté des personnes.

A. LA DÉLIVRANCE DE LA CARTE NATIONALE D'IDENTITÉ


La carte nationale d'identité (décret du 22 octobre 1955) permet à tout citoyen de justifier de son identité et de sa nationalité française. Il n'est nul besoin d'insister sur le fait que la possession de ce titre déclaratif, même si la carte n'est pas obligatoire, contribue à la sécurité juridique des personnes, dans la mesure où un certain nombre de démarches - telle l'inscription sur les listes électorales ou la recherche d'un emploi - sont rendues plus difficiles, voire impossibles pour qui ne la possède pas.

C'est ainsi que l'attention du Médiateur de la République a été appelée sur les difficultés rencontrées par certaines personnes sans domicile fixe pour obtenir la délivrance d'une carte nationale d'identité (proposition de réforme INT 93-01).

Les perspectives d'une réforme de la réglementation seraient de s'orienter, non vers des documents portant la mention " sans domicile " (cette solution présentant des inconvénients administratifs et humains), mais vers un dispositif analogue à celui adopté par la loi du 29 juillet 1992 sur le RMI. Une personne sans domicile fixe pourrait

ainsi se voir délivrer une carte nationale d'identité mentionnant élection de domicile auprès d'une association agréée à cette fin.

A plusieurs reprises, le ministre de l'Intérieur a donné des instructions pour la délivrance d'une carte nationale d'identité au bénéfice de certaines personnes en possession d'une attestation mentionnant un domicile élu dans un organisme (cf. Q.E. no 64712, JO 18.1.93, p. 227).

Toutefois, des difficultés d'ordre juridique, quant à la nature du texte à éditer en la matière, feraient encore obstacle à l'aboutissement de la réforme proposée.

D'une façon plus quotidienne, l'attention du Médiateur de la République est régulièrement appelée sur les difficultés que rencontrent les titulaires d'une carte nationale d'identité qui, lors d'une demande de renouvellement de celle-ci, sont obligés de faire la preuve de leur nationalité et dont certains découvrent, à cette occasion, qu'ils sont étrangers sans le savoir parce que leurs parents n'ont pas opté pour la nationalité française ou bien encore qu'une erreur a été commise dans l'appréciation de leur statut.

B. LA PREUVE DE LA NATIONALITÉ

1. La délivrance du certificat de nationalité


Les cas dans lesquels la justification de la nationalité est nécessaire sont de plus en plus nombreux : qu'il s'agisse du droit de vote et de celui d'être éligible, du droit d'accéder à certains emplois ou de s'établir sur le territoire national, de n'être ni extradé, ni expulsé. Bien entendu, les ressortissants des États de la Communauté européenne étant à part.

Les difficultés pour réunir les éléments justifiant de la nationalité française, en raison des divers critères permettant son attribution et leur combinaison avec les conventions internationales, ont été à l'origine de la création d'un document attestant de la possession de la nationalité de l'intéressé, appelé certificat de nationalité.

À l'expérience, la procédure permettant la délivrance de ce document se révèle être également un parcours semé d'obstacles, ce qui avait en 1991 conduit M. LEGATTE, précédent Médiateur, à préconiser des mesures de simplification (cf. Rapport 1991, pp. 128 à 132).

Plusieurs réclamations illustrent ces difficultés et la lenteur des procédures en cause.

À ce sujet, on rappellera la situation d'un ressortissant palestinien, né en Syrie et marié à une syrienne, dont il a trois enfants, nés en France en 1984, 1990 et 1991 (réclamation no 93-2770).

L'intéressé sollicite en 1991 la délivrance de certificats de nationalité française pour ses trois enfants en se fondant sur l'article 2-1 du Code de la nationalité française, selon lequel

" Est français :

1°) l'enfant né en France de parents apatrides;

2°) l'enfant né en France de parents étrangers et à qui n'est attribuée par les lois étrangères la nationalité d'aucun des deux parents. "

Il est en effet ressortissant palestinien et ses enfants ne peuvent, selon la loi syrienne, acquérir la nationalité syrienne du fait de leur mère.

Le 26 octobre 1992, après avoir consulté les services de la Chancellerie, le juge d'instance refuse la délivrance des certificats sollicités au motif que " le père des enfants doit être considéré comme syrien ".

N'ayant aucune possibilité de solliciter des autorités syriennes qui lui refusent la nationalité, le bénéfice de celle-ci pour ses enfants, il décide de saisir l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) qui lui délivre, le 6 janvier 1993, un certificat d'apatride d'origine palestinienne.

Muni de ce document, l'intéressé a sollicité à nouveau la délivrance de certificats de nationalité française pour ses enfants auprès du juge d'instance de son nouveau domicile.

Le juge décide alors à nouveau de consulter les services de la Chancellerie, le 2 février 1993.

Après dix mois de démarches, la question a fini par aboutir à une solution. La Chancellerie a en effet donné au tribunal d'instance compétent les instructions nécessaires à la délivrance des certificats demandés.

La procédure de délivrance des certificats de nationalité présente des difficultés, tant en ce qui concerne la détermination de l'autorité compétente, que la fourniture des documents exigés des demandeurs. S'agissant de l'autorité compétente, l'importance que revêt le certificat de nationalité a conduit à en confier la délivrance au juge d'instance. Cette autorité, pour délivrer le document, doit fonder sa décision sur tout élément justifiant que le demandeur possède bien la nationalité qu'il revendique.

Aucune disposition législative ou réglementaire n'indique quel est le juge territorialement compétent, mais l'instruction du 20 avril 1959 désigne en priorité celui de la résidence ou de la dernière résidence de l'intéressé.

Pour les personnes domiciliées à l'étranger, un usage très ancien donne compétence au juge d'instance du 1er arrondissement de Paris. Mais, afin d'alléger la charge représentée par la délivrance des certificats de nationalité des Français résidant en Algérie, en Tunisie et au Maroc, des mesures ont été prises, répartissant entre cinq tribunaux d'instance la compétence de la délivrance de ces certificats. Le juge d'instance d'Aix-en-Provence pour les personnes résidant à Alger, celui de Nîmes pour celles qui résident à Constantine, celui de Montpellier pour celles

qui résident à Oran, celui de Marseille pour celles qui résident en Tunisie, et celui de Bordeaux pour les résidants au Maroc.

Ces juges ont progressivement été à leur tour surchargés. Actuellement un délai de plus de deux ans est nécessaire pour obtenir un certificat de nationalité du juge d'instance d'Aix-en-Provence ainsi que cela a été précisé oralement à un réclamant ; le délai nécessaire au juge d'instance du 1er arrondissement de Paris s'est lui aussi allongé et il atteint également deux ans.

L'instruction de 1959 qui a précisé le juge d'instance territorialement compétent a également ouvert la possibilité pour le requérant de solliciter ce document du juge d'instance de sa dernière résidence, d'un domicile momentané en cas d'urgence, ou du lieu d'origine de ses ascendants.

Ces " facilités " ne sont pas sans risques d'erreurs ou d'abus. Dans le dessein de les éviter, les juges d'instance ont été invités à convoquer les intéressés afin de s'assurer notamment qu'ils relèvent de leur compétence territoriale.

Ces instructions, par définition, ne pouvaient pas tout résoudre. L'exemple de la situation des Français résidant à l'étranger fait que la possibilité de s'adresser aux juges d'instance ayant une compétence territoriale subsidiaire est illusoire.

La détermination du juge compétent n'est pas la seule difficulté à surmonter. L'obtention du certificat de nationalité est subordonnée à la production de documents parfois difficiles à réunir.

Par exemple, pour délivrer un certificat de nationalité à un requérant qui n'est pas né en France, le juge d'instance devra vérifier la nationalité française d'au moins l'un de ses parents. S'il est acquis que celui-ci n'est pas français, la recherche se porte sur l'origine de l'autre parent, ce qui nécessite la réunion des documents établissant la nationalité française de ce dernier. Pour peu que les documents nécessitent vérification, la délivrance du certificat peut se révéler difficile et longue, créant ainsi une situation préjudiciable pour l'intéressé (réclamation no 93-2308).

Ainsi, une fille née à l'étranger de mère française mais de père étranger, entrée en France en 1987, a obtenu un certificat de nationalité valable jusqu'à sa majorité (septembre 1991). Devenue majeure, elle demande la confirmation de son appartenance à la nationalité française.

Une multitude de documents, en originaux et en photocopies, remontant jusqu'à la naissance de ses grands-parents, lui sont alors demandés. Matériellement, la constitution d'un tel dossier nécessite des recherches pouvant durer des mois, sinon des années.

Le juge d'instance est aussi tenu de s'assurer que les conventions internationales susceptibles de s'appliquer à l'un des parents n'ont pas

privé ce dernier de la nationalité française que la loi française lui aurait attribuée (réclamation no 93-0850).

C'est ainsi que, née au Vietnam en 1954, de parents eux-mêmes nés au Vietnam, une femme résidant en France depuis plusieurs années se considère comme française et demande la délivrance d'un certificat de nationalité.

Ne parvenant pas à obtenir du juge d'instance compétent ce document, elle sollicite l'intervention du Médiateur de la République.

Peu après, l'intéressée apprend que le certificat de nationalité lui est refusé. Elle manifeste son intention de former un recours gracieux auprès du Garde des sceaux, estimant en effet que, son père ayant obtenu par décret la naturalisation française, elle est française par filiation.

Ce recours gracieux ne permet pas la poursuite de l'intervention du Médiateur de la République qui ne peut se substituer au Garde des sceaux dans l'appréciation du bien-fondé de la demande qui lui a été soumise.

Le Médiateur a toutefois estimé opportun d'indiquer à la réclamante que la référence qu'elle fait au statut de son père pour revendiquer la nationalité française est aléatoire, au regard de la convention franco-vietnamienne conclue le 16 août 1955, qui prévoit en son article 4 que pour conserver la nationalité française obtenue par un décret postérieur au 8 mars 1949, il fallait opter en ce sens dans un délai déterminé.

L'intéressée était alors invitée à rechercher si son père avait bien effectué une telle démarche, seule chance pour elle de voir son recours aboutir.

Enfin, la complexité de la combinaison des règles applicables conduit parfois à une appréciation inexacte de la situation du requérant.

Certes, un service du ministère de la Justice est à la disposition des juges d'instance pour le cas où la nationalité française de l'intéressé serait incertaine, mais la consultation de ce service, qui est également surchargé, nécessite un délai qui peut être regrettable.

En cas de refus du juge de délivrer le certificat, la loi prévoit un recours gracieux devant le Garde des sceaux. Si celui-ci refuse à son tour le certificat, l'intéressé devra s'adresser au tribunal de grande instance.

Un cas, soumis au Médiateur, illustre les " cafouillages " auxquels peut donner lieu la détermination de la nationalité (réclamation no 93-1688).

Une jeune femme, née en Algérie en 1958, a épousé en 1979, en Belgique, un ressortissant français d'origine algérienne. Au mois de décembre 1991, en instance de divorce, elle rentre en France et s'installe chez un oncle demeurant à Toulouse.

Là, elle entreprend des démarches pour obtenir un certificat de nationalité et la carte d'identité. Elle fournit les documents justificatifs de ses antécédents. Pendant l'instruction de sa demande, elle obtient de la préfecture la carte d'identité, avec mention de sa nationalité française.

Au mois de juillet 1992, elle part s'installer chez son frère, à Dijon. Etant sans nouvelles de la demande de certificat de nationalité déposée à Toulouse, elle se présente, avec les documents nécessaires, au juge d'instance du lieu pour obtenir le certificat de nationalité française qu'on lui accorde sans difficulté.

Sur ces entrefaites, le ministre de la Justice notifie au tribunal d'instance de Toulouse que la jeune femme, née française, a perdu cette nationalité à la suite de l'accession de l'Algérie à l'indépendance.

Cette information est aussitôt diffusée à travers le réseau administratif. L'intéressée s'est trouvée dans l'obligation de restituer la carte d'identité et le certificat de nationalité. Souhaitant être rétablie dans ses droits, elle saisit le Médiateur de la République.

Après un examen du dossier, le Médiateur demande au bureau de la nationalité du ministère de la Justice de procéder à une étude approfondie de la situation de l'intéressée. En effet, il apparaissait que celle-ci pouvait être de nationalité française par filiation, comme née d'un père français de statut de droit commun. Elle avait nécessairement conservé de plein droit cette nationalité lors de l'autodétermination.

Moins d'un mois après cette intervention, le tribunal d'instance qui avait refusé le certificat de nationalité sur instructions du bureau de la nationalité du ministère de la Justice, reçoit de celui-ci une dépêche lui précisant que l'intéressée était de nationalité française et qu'aucun obstacle ne s'opposait désormais à la délivrance du certificat de nationalité et à la restitution de la carte d'identité.

S'il est de l'intérêt du requérant lui-même qu'une grande sécurité juridique puisse être attachée au certificat de nationalité, cet objectif de sécurité juridique, dont le Médiateur de la République ne peut que se féliciter, ne rend pas pour autant acceptables les délais anormalement longs de délivrance des certificats de nationalité (réclamation no 93-1995).

À l'âge de dix-huit ans, souhaitant faire renouveler sa carte d'identité, un jeune homme, résidant en France, mais né en 1974 aux États-Unis, d'un père né aux États-Unis et d'une mère née en France, mariés aux États-Unis en 1972, s'est vu réclamer un certificat de nationalité française.

Il s'est alors adressé au tribunal d'instance de son domicile, lequel lui a demandé de prouver que sa mère n'avait pas acquis

la nationalité américaine lors de son mariage. En effet, s'étant mariée avant 1973, date à partir de laquelle a été instituée la possession de la double nationalité, l'acquisition par la mère de la nationalité américaine par mariage lui aurait fait perdre la nationalité française. Par voie de conséquence, ses enfants, nés d'un père et d'une mère américains, n'auraient pas été français.

Devant les difficultés d'obtenir des autorités américaines l'acte attestant qu'elle n'avait pas acquis la nationalité américaine par mariage, la mère a sollicité l'intervention du Médiateur de la République.

Après examen du dossier, le tribunal d'instance (en liaison avec le ministère de la Justice consulté sur ce dossier) a tenu compte de l'impossibilité pour la mère d'obtenir des autorités américaines l'attestation demandée. Il a invité l'intéressée à lui communiquer tous les documents en sa possession permettant d'établir qu'elle n'avait pas pu acquérir la nationalité américaine, compte tenu des règles en vigueur dans ce pays.

Quelque temps plus tard, le tribunal d'instance était avisé par la Chancellerie qu'un certificat de nationalité pouvait être délivré à ce jeune homme.

Il est probable que ces délais puissent s'expliquer par une insuffisance de moyens en personnel et en matériel ; or, à cet égard, le Médiateur de la République n'a pas compétence pour demander aux pouvoirs publics la mise en  uvre de moyens matériels de nature à remédier à cette situation. Mais il se doit d'attirer l'attention sur le mauvais fonctionnement du service public, tel qu'il l'a constaté, occasionnant de regrettables retards dans la délivrance des certificats de nationalité.

2.La demande de réintégration dans la nationalité française


A défaut d'obtenir un certificat de nationalité, les intéressés peuvent être conduits à présenter une demande de réintégration dans la nationalité française, procédure longue. Le Médiateur de la République ne peut qu'insister sur la nécessité de traiter ces demandes dans les délais les plus courts compte tenu de la situation précaire dans laquelle se trouvent les demandeurs. Ni français, ni étrangers, démunis de leurs titres, ils sont plus que tout autre exposés aux difficultés quotidiennes : emploi, liberté d'aller et venir à l'extérieur du territoire peuvent ainsi être compromis, sans omettre l'accès aux droits civiques ou encore la garantie protégeant la présence sur le territoire national.

On peut évoquer à cet égard le cas de cette jeune femme, née en 1953 en France de parents d'origine algérienne qui n'ont pas opté pour la nationalité française avant le 1er janvier 1963, comme ils en avaient la possibilité en application des accords d'Evian (réclamation no 93-0755).

Ignorant la procédure à suivre pour solliciter sa réintégration dans la nationalité française, l'intéressée s'adresse au tribunal d'instance de Paris, le 5 janvier 1992.

Quatorze mois plus tard, elle saisit le Médiateur faute d'avoir une idée claire des démarches qu'elle doit entreprendre pour avoir un statut reconnu.

L'enquête à laquelle procèdera le Médiateur sera l'occasion de mesurer la complexité des cheminements que peut traverser un dossier mal engagé par le réclamant lorsqu'il s'abstient de s'informer complètement sur la nature des démarches à effectuer.

Le greffier du tribunal saisi a immédiatement indiqué que le tribunal était incompétent et a réorienté l'intéressée vers la préfecture.

Mais, devant l'insistance de l'intéressée qui, revendiquant la nationalité française, demandait que la Chancellerie se prononce, il a néanmoins engagé une procédure de consultation, le 11 mars 1992.

Peu de temps après, le 1er avril 1992, l'intéressée dépose à la mairie de son nouveau domicile, à Paris, une demande de carte d'identité française, qui lui est délivrée le 10 avril.

Cependant, le 22 juillet suivant, la préfecture de police réclame la restitution de ce document, établi par erreur, et conseille à l'intéressée de déposer un dossier de réintégration dans la nationalité française.

Après plusieurs rappels, l'intéressée remet sa carte le 24 décembre, sans toutefois demander sa réintégration, en raison de la procédure de consultation engagée qui avait suivi son cours.

Après avoir saisi le Médiateur, elle a, en définitive, accepté d'accomplir cette démarche qui lui avait été conseillée dès janvier 1992 et dépose un dossier de réintégration le 19 mars 1993.

Par ailleurs, elle devait être informée le 1er avril 1993, par l'intermédiaire du Médiateur de la République, que la Chancellerie avait émis un avis négatif et ne lui reconnaissait pas la nationalité française.

Le Médiateur de la République est alors intervenu auprès de la préfecture pour s'assurer de l'instruction du dossier de demande de réintégration. Le dossier de l'intéressée a été transmis le 1er juillet au ministère des Affaires sociales chargé de proposer le décret de réintégration.

La réforme du Code de la nationalité étant aujourd'hui achevée, il n'apparaît pas inutile, à la lumière des réclamations des particuliers, de reprendre certaines des réflexions formulées dans le passé non seulement pour simplifier les modalités de la délivrance des documents sur la possession de la nationalité française, mais aussi pour raccourcir les délais de traitement des procédures engagées qui compromettent la sécurité juridique des personnes en cause qui, démunies de toute pièce d'identité, ne pouvaient se rendre à l'étranger sans encourir le risque

important de se voir refuser l'accès au territoire national à l'occasion de leur retour.

Plus grave encore, n'étant pas en mesure de justifier de leur nationalité française, elles sont exposées au risque de se voir expulsées du territoire national à la suite d'un banal contrôle d'identité.

Le Médiateur de la République ne peut qu'insister sur l'importance du respect du droit à la nationalité au demeurant consacré par l'article 15 de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme : " 1.Tout individu a droit à une nationalité; 2. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité ni du droit de changer de nationalité ".

C. L'INSCRIPTION SUR LES FICHIERS INFORMATISÉS


L'informatique touche tous les domaines d'activité de l'administration et du secteur public et son développement conduit à toujours renforcer l'efficacité des systèmes de protection mis en place. En France, la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés constitue le texte de base. Mais, il faut également rappeler l'existence de la Convention 108, Convention du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel du 20 janvier 1981, ratifiée par la France en 1985. Dans le cadre communautaire, le principe de libre circulation qui a naturellement des répercussions en matière d'informatique, a conduit la Commission a élaborer une réglementation. Un projet de directive dont de nombreuses dispositions s'inspirent de la législation française, est actuellement en cours de préparation pour assurer la protection des personnes à l'égard du traitement des données à caractère personnel.

Dans une circulaire du 12 mars 1993, le Premier ministre a tout particulièrement insisté sur la vigilance nécessaire à apporter à la commercialisation des fichiers, à la transmission de données à l'étranger, en raison notamment des risques que peuvent courir les particuliers.

Dans le cadre de son activité quotidienne, le Médiateur de la République n'a pas souvent à connaître de réclamations relatives aux fichiers informatisés, dans la mesure où le législateur a confié une mission de surveillance à la Commission nationale Informatique et Libertés (CNIL), mais il peut être sollicité, comme le montre la réclamation no 92-5385.

Une jeune femme dépose un dossier auprès de la commission départementale de surendettement et obtient la mise en place d'un plan conventionnel de règlement de ses dettes.

Ayant soldé ses dettes avant l'échéance du plan, elle demande la suppression de son inscription au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP).

Le secrétaire de la commission de surendettement l'informe alors que " l'inscription prévue par la loi porte sur une durée minimum de 36 mois, bien que le plan ait été totalement honoré ".

Estimant que le maintien de son inscription au FICP portait atteinte à son crédit et compromettait sa liberté d'engager des négociations à incidences financières, l'intéressée sollicite l'intervention du Médiateur de la République.

L'analyse de ce dossier conduit le Médiateur de la République à émettre quelques réserves quant à l'interprétation qui a été faite des textes applicables.

Le règlement du comité de la réglementation bancaire pris le 11 avril 1990, en application de l'article 23 de la loi no 89-1010 relative au surendettement, prévoit, en effet en son article 8, alinéa 2, que les " informations visées à l'article 5 ci-dessus (relatif au contenu des informations à communiquer par les établissements de crédit pour les incidents de paiement caractérisés devenus déclarables) sont conservées dans le fichier (FICP) pendant trois ans, et sont radiées dès la date d'enregistrement dans le fichier du paiement intégral des sommes dues ".

Par ailleurs, le dernier alinéa du même article prévoit que " les informations concernant les mesures conventionnelles ou judiciaires mentionnées au titre 1er de la loi du 31 décembre 1989 (relative au surendettement) sont communiquées à la Banque de France et conservées pendant la durée du plan conventionnel ou la durée d'application des mesures de redressement judiciaire, sans que la durée de conservation puisse excéder trois ans ".

S'il est vrai que la radiation avant la fin du délai de trois ans n'est pas expressément prévue par le texte, elle n'en semble pas moins possible au Médiateur de la République : la durée de trois ans étant une durée maximale, elle autorise implicitement une radiation anticipée.

Par ailleurs, en cas de paiement anticipé des échéanciers du plan de redressement, celui-ci devient sans objet et le " fichage " apparaît contraire aux dispositions prévoyant le maintien de l'inscription pendant la durée du plan.

Enfin, sur le plan de l'équité, le Médiateur de la République estime totalement injustifié le maintien de l'inscription au FICP, des informations concernant les débiteurs ayant réglé leurs dettes.

Ce maintien revêt, en effet, un caractère de sanction et pénalise le débiteur qui a fait l'effort d'apurer ses dettes de façon anticipée, alors même que le FICP n'est qu'un outil d'information au service des organismes prêteurs.

Au terme de cette analyse et par une recommandation en équité, le Médiateur de la République obtient du Gouverneur de la Banque de France la radiation de la réclamante du FICP.

Par ailleurs, et d'un point de vue général, les observations du Médiateur de la République ont été prises en compte dans le cadre de la réforme du règlement du 11 avril 1990 du comité de la réglementation

bancaire qui fixe les conditions de collecte, d'enregistrement, de conservation et de consultation de ces informations.

Le règlement, modifié le 21 avril 1993 et entré en vigueur le 1er mai 1993, prévoit que les informations concernant le débiteur sont radiées dès que celui-ci a justifié auprès de la Banque de France du paiement intégral de ses dettes auprès de tous les créanciers figurant au plan ou au jugement. Cette disposition est également applicable aux personnes qui auraient, avant cette date, procédé au remboursement intégral de leurs dettes.

II. L'EXERCICE DES LIBERTÉS POLITIQUES



Bien que l'exercice du droit de vote ne soit directement mentionné ni par la déclaration de 1789, ni par celle de 1946, il va sans dire qu'il s'agit d'un droit fondamental de valeur constitutionnelle. Selon la formule du Conseil Constitutionnel, " la qualité de citoyen ouvre le droit de vote dans des conditions identiques à tous ceux qui n'en sont pas exclus pour une raison d'âge, d'incapacité ou de nationalité ou pour une raison tendant à préserver la liberté de l'électeur " (décision 82-146 DC, 18 novembre 1982).

A. L'INSCRIPTION SUR UNE LISTE ÉLECTORALE


L'une des formalités substantielles qui conditionne la reconnaissance au bénéfice du citoyen de sa qualité d'électeur, réside dans l'inscription sur une liste électorale.

Dans les développements précédents relatifs à la délivrance de la carte nationale d'identité, il a été signalé les difficultés que rencontrent les personnes sans domicile fixe qui, faute de ce titre, sont de facto privées de la possibilité de s'inscrire sur une liste électorale et, par voie de conséquence, privées de leur droit de participer à la vie politique. La proposition de réforme INT. 93-01 est de nature à lever cette difficulté et à faire disparaître une des discriminations encore existantes pour l'accès à la citoyenneté.

Dans le même ordre d'idée, l'attention du Médiateur de la République a été appelée sur la situation des majeurs sous tutelle qui, en application des dispositions légales, ne sont pas admis à exercer le droit de vote.

En effet, aux termes de l'article L.5 du Code électoral, " ne doivent pas être inscrits sur la liste électorale : (...) 6o les interdits ". La notion d'interdit correspond aujourd'hui, à la catégorie des majeurs sous tutelle.

Eu égard aux situations individuelles dont a eu à connaître le Médiateur, ce régime apparaît manquer de nuances.

Les causes de mise en tutelle sont très diverses. Ainsi, le majeur peut être protégé à sa demande. Le régime de la tutelle est également susceptible de s'appliquer aussi bien au jeune handicapé physique qu'à la personne âgée, en passant par les malades atteints d'une psychose limitée.

C'est la volonté d'adapter la règle de droit à cette multiplicité de cas individuels qui a présidé à l'adoption de la loi du 3 janvier 1968 sur les incapables majeurs. L'article 501 du Code civil, qui en résulte, permet au juge, lors de l'ouverture de la tutelle ou par un jugement postérieur, pris sur l'avis du médecin traitant, d'énumérer les actes que la personne en tutelle aura la possibilité d'accomplir seule ou avec l'assistance de son tuteur.

Cependant, la combinaison de cette disposition avec l'article L.5-6 du Code électoral pose problème, ces deux textes ayant chacun un champ d'application général. L'un, de droit public, ne distingue pas entre les différentes catégories de majeurs en tutelle, et l'autre, de droit privé, ne précise pas les types d'actes pour lesquels une dérogation est possible.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 9 novembre 1982, a jugé que l'article 501 du Code civil ne permettait pas au juge de déroger à la règle de droit public posée par le Code électoral. L'analyse juridique à laquelle la Cour a procédé n'est évidemment pas en cause, cependant, tels qu'ils sont interprétés, les textes conduisent à une situation peu satisfaisante.

Aussi, semble-t-il nécessaire d'individualiser les mesures de protection au sein de la tutelle et de ne pas recourir à des régimes par trop rigides s'appliquant uniformément à des citoyens capables de remplir leur devoir civique. Le Médiateur suggère donc que soit étudiée la possibilité de confier au juge le soin de se prononcer sur l'exercice du droit de vote par l'incapable majeur placé sous tutelle (proposition de réforme INT 93-04).

Indépendamment de ces questions de fond, le Médiateur de la République a été à plusieurs reprises conduit à intervenir à la demande de personnes ne parvenant pas à obtenir leur réinscription sur la liste électorale.

Le rapport 1992 mentionnait ainsi la réclamation d'une personne rayée à tort par suite d'une transcription erronée de condamnations sur son casier judiciaire (cf. réclamation no 92-3263, citée dans le rapport de 1992, p. 209).

Cette année encore, le Médiateur de la République a été sollicité par une personne privée de ses droits civiques à la suite d'une faillite personnelle.

En application de l'article 171 du décret no 85-1388 du 27 décembre 1985, relatif au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises qui prévoit que " toute demande ou relevé des déchéances, interdictions et incapacités, est adressée par requête au tribunal qui a prononcé le redressement judi

ciaire ", l'intéressé, qui a apuré son passif, a demandé par une

lettre du 6 décembre 1988 au président du tribunal de commerce compétent, à recouvrer l'exercice de son droit de vote.

Il a renouvelé sa demande le 11 février 1989, puis le 12 avril 1989 et enfin le 16 mars 1992.

Dans cette affaire, le Médiateur est intervenu à plusieurs reprises en rappelant l'obligation faite par le législateur d'instruire les demandes de réhabilitation.

B. LE VOTE PAR PROCURATION


L'année 1993 a permis de clore le récent débat engagé sur les modalités du vote par procuration. L'attention du Médiateur a en effet été appelée à l'occasion de la consultation référendaire de septembre 1992, sur les difficultés rencontrées par les personnes retraitées pour participer au vote. La situation qui lui a été signalée est celle de retraités qui, étant en vacances, absents de leur domicile le jour du référendum de mars 1992, ne pouvaient pas voter par procuration.

Après avoir saisi en décembre 1992 le Conseil d'État sur la possibilité d'une réforme du Code électoral sur ce point, le Médiateur de la République devait adresser au ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, une proposition de réforme tendant à l'assouplissement des dispositions de l'article L.71-I du code. L'adoption de la loi no 93-894 du 6 juillet 1993 répond aux préoccupations formulées par le Médiateur de la République dans la proposition de réforme INT 93-02.

III. LE DROIT DE PROPRIÉTÉ


L'article 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen de 1789 consacre le droit de propriété comme inviolable et sacré.

" La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment et sous la condition d'une juste et préalable indemnité. "

Comme l'a relevé le Conseil Constitutionnel dans sa décision no 89-256 DC du 25 juillet 1989, " les finalités et les conditions d'exercice du droit de propriété ont subi une évolution caractérisée par une extension de son champ d'application à des domaines nouveaux et par des limitations exigées au nom de l'intérêt général ".

En dépit de la lettre du premier alinéa de l'article 17, le droit de propriété protégé par la Constitution intègre donc les limitations rendues nécessaires par l'intérêt général. Parmi les garanties constitutionnelles dont bénéficie le droit de propriété, figure l'exigence de recourir au législateur pour décider des conditions dans lesquelles il peut être

porté atteinte à ce droit. Cette assurance n'écarte cependant pas le risque d'un conflit lié également à la prolifération législative.

Cela est si vrai que les notaires, officiers ministériels chargés de conseiller le titulaire actuel ou futur du droit de propriété, ont exprimé au cours de leur 89ème congrès leur inquiétude concernant l'insécurité juridique affectant les contours du droit de propriété immobilière.

A. LE DROIT DE CONSTRUIRE


Nombreuses sont les affaires liées à la difficulté d'exercer concrètement le droit à construire, qui est un accessoire du droit de propriété. L'exemple le plus caractéristique est donné par la contradiction qui se produit lorsqu'un certificat d'urbanisme positif est suivi d'un refus de permis de construire.

Cette contradiction peut naître de considérations légitimes, conformes au droit, mais non perçues lors de la délivrance du certificat d'urbanisme. Elles sous-tendent alors le fait accidentel, l'erreur. Les deux documents émanant de la même autorité, il incombe naturellement à celle-ci d'en réparer les effets. Le principe de compensation énoncé par l'article 17 trouverait alors à s'appliquer.

M. I... a acquis un terrain pour y faire construire une maison. Un certificat d'urbanisme positif délivré le 14 novembre 1991 lui a été présenté par le vendeur. Le 8 août 1992, M. I... dépose une demande de permis de construire. Un refus lui est notifié le 8 octobre 1992 (réclamation no 92-5511).

Les informations que le Médiateur de la République a recueillies localement confirment en l'espèce le caractère totalement objectif du refus au regard de la situation du terrain en cause.

Ce terrain est situé en zone naturelle et boisée qui présente incontestablement des risques d'incendie mettant en danger la sécurité des riverains. Par ailleurs, ne jouxtant aucune partie urbanisée de la commune, les équipements collectifs existants ne peuvent pas lui être étendus. Enfin, il ne peut être rattaché à un secteur d'aménagement futur.

Cependant, la contradiction entre les deux décisions crée un préjudice financier important pour M. I... qui, en vue d'y édifier sa maison, a acheté ce terrain sur la base du droit à construire qui y était attaché.

En l'espèce, le maire a admis la responsabilité de la commune et envisagé une indemnisation des frais engagés dans cette opération par le réclamant.

Ainsi ce dernier a-t-il obtenu une compensation. On peut se demander si elle va couvrir tous les frais engagés. Par ailleurs, ce terrain devenu inutile est impossible à revendre.

Enfin, le bénéficiaire caché mais véritable reste le vendeur qui a encaissé le prix d'un terrain constructible pour la vente d'un terrain qui ne l'était pas.

Outre les atteintes portées au droit de construire, le droit de propriété en matière d'urbanisme est aussi menacé par plusieurs procédures, comme l'expropriation, le régime des emplacements réservés et le remembrement.

B. L'EXPROPRIATION ET LES EMPLACEMENTS RÉSERVÉS


L'expropriation " pour cause d'utilité publique " aboutit à priver légalement une personne de son bien.

L'article 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen en prévoit la possibilité. L'application de l'expropriation est entourée d'une procédure complexe formant un ensemble de mesures associant, dans leurs rôles respectifs, l'autorité judiciaire et la juridiction administrative.

La notion " d'utilité publique " est, dans la pratique, entendue très largement. Elle concerne, depuis le terrain destiné à l'installation d'un bureau de poste jusqu'à la défense nationale, les centrales nucléaires, en passant par l'implantation d'une administration, l'aménagement du territoire, la création de logements, l'aménagement routier, le boisement, la conservation des forêts, etc.

Mais l'expropriation est aujourd'hui soumise au contrôle du juge. Si les atteintes à la propriété privée ou le coût financier sont excessifs, eu égard à l'utilité publique du projet, le juge, saisi d'un recours, peut annuler l'opération.

Cependant, le contrôle juridictionnel ne permet pas toujours de régler les situations individuelles. C'est l'exemple d'une expropriation au profit d'une collectivité pour la construction d'immeubles d'habitation. Le propriétaire exproprié ayant obtenu un jugement d'annulation, au terme d'un long procès, se trouve dépourvu de tous moyens de récupérer ses biens, sauf à racheter les immeubles construits (cas cité au rapport de 1991, p. 137). Cet exemple n'est pas unique, comme en témoignent les réclamations 93-0488 et 93-2350.

- M. G... possède une propriété dans le Sud-Est de la France. Un projet autoroutier, établi dans les formes requises, englobe une partie de son terrain. Par jugement du tribunal de grande instance, cette partie a fait l'objet d'une expropriation. L'intéressé ne conteste pas l'utilité publique de l'opération et accepte de céder à l'amiable le reste de sa propriété.

Quelque temps plus tard, le projet d'autoroute est abandonné. Cependant, la propriété continue à être utilisée dans le cadre des activités de l'administration.

Devant ces faits, se référant à l'article L.12-6 du Code de l'expropriation, M. G... décide d'exercer son droit de rétrocession. Il engage à cet effet une procédure devant le tribunal de grande instance et obtient satisfaction. Par une nouvelle ordonnance, le montant de la rétrocession a été fixé à la somme de 741 000 F. L'administration, voulant un prix de 1 193 000 F, s'est pourvue en appel. L'affaire est toujours en instance.

Depuis son expropriation, en 1972, cette propriété est restée occupée. L'administration, pour régulariser sa situation, engage une seconde procédure d'expropriation au motif d'utiliser la propriété comme laboratoire de chantier. L'utilité publique de l'opération lui a été accordée.

M. G..., estimant que son droit de propriétaire a été bafoué, demande l'intervention du Médiateur de la République. Il se déclare prêt à renoncer à son droit contre une indemnisation convenable par voie amiable. Le Médiateur est intervenu auprès de l'administration sur ces bases de façon à nouer le dialogue.

Au dernier moment, l'administration a renoncé à cette propriété pour implanter le laboratoire en un lieu, selon ses dires, mieux adapté à ses besoins. M. G... a ainsi été rétabli dans son droit de propriétaire, sous réserve du prix de rétrocession qui résultera de la décision du juge de l'expropriation.

En l'occurrence, on est en droit de s'interroger sur la véritable motivation de l'administration. En effet, ayant affirmé constamment que la propriété de M. G... correspondait idéalement à son besoin, il est surprenant d'apprendre qu'inopinément, elle a pu trouver une implantation du laboratoire mieux adaptée.

- Dans le second cas, la création d'une voie routière conduit à l'expropriation d'une partie d'un terrain. Le jugement d'expropriation prévoyait pour la partie restante du terrain l'aménagement de voies d'accès à la charge de l'administration expropriante.

Celle-ci, pour des raisons techniques l'empêchant de réaliser les aménagements, a proposé au propriétaire le rachat amiable du reste de la propriété.

Le prix offert, correspondant aux tarifs du terrain en zone naturelle, ne satisfaisait pas le propriétaire, qui demande alors que soit exécuté, dans son ensemble, le jugement d'expropriation.

Pour des raisons tenant au refus de créer un précédent, l'administration projette d'engager une nouvelle procédure d'expropriation pour le reste du terrain.

L'attention du Médiateur de la République est souvent appelée sur les difficultés à concilier le droit de propriété avec les procédures engagées à l'initiative des collectivités publiques pour satisfaire des politiques d'intérêt général. Une commune doit en effet pouvoir acquérir les terrains destinés à la satisfaction des besoins publics et les aménager.

Elle détermine, à l'occasion de l'élaboration du plan d'occupation des sols, des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics, aux installations d'intérêt général, ainsi qu'aux espaces verts. Mais elle porte atteinte à la libre disposition des biens si, alors qu'elle ne se porte pas acquéreur du bien situé dans le périmètre d'un emplacement réservé au plan d'occupation des sols, elle refuse dans le même temps au propriétaire toute possibilité d'aménagement.

Ainsi, Mme X... (réclamation no 92-5104) possède un terrain destiné à un ouvrage public, figurant donc au plan d'occupation des sols (P.O.S.) comme emplacement réservé.

Sollicitée par un aménageur privé, Mme X... établit une déclaration d'intention d'aliéner.

La commune l'informe qu'elle renonce à son droit de préemption sur ce terrain. Cependant, elle refuse de lui délivrer le certificat d'urbanisme indispensable à la vente du terrain.

Devant ces atermoiements, l'acquéreur décide d'abandonner son projet.

Mme X..., se prévalant de l'article L.123-9 du Code de l'urbanisme, met alors la commune en demeure d'acheter le terrain.

Après avoir accepté d'acquérir ce terrain, puis renoncé à le faire, la commune a levé la réserve qui pesait sur le terrain et pris l'engagement de renoncer à l'exercice de son droit de préemption lorsque la propriétaire lui présenterait une déclaration d'intention d'aliéner.

C. LE REMEMBREMENT


En dehors de ces différends, la procédure de remembrement fournit également une bonne illustration des atteintes possibles au droit de propriété, comme le montre la réclamation no 93-0240.

Le réclamant était propriétaire à Cuisia (Jura) de 3 parcelles qui étaient séparées du reste de sa propriété par une parcelle équivalente appartenant à un propriétaire indivis.

Lors des opérations de remembrement, la commission départementale a prescrit un échange de ces parcelles entre les propriétaires, échange qui a été contesté par le propriétaire indivis.

Le tribunal administratif, par un jugement rendu le 4 mai 1988, a annulé la décision de la commission, au motif exclusif que celle-ci avait statué dans une composition irrégulière.

La commission départementale d'aménagement foncier a réexaminé le sort de la parcelle et maintenu l'attribution initiale, par décision du 15 septembre 1988.

L'indivis a alors intenté un second recours devant le tribunal administratif et ce dernier, considérant la nature de terrain à

bâtir de la parcelle en cause, a, en application de l'article 20, 4o du Code rural, annulé la décision de la commission. Celle-ci s'est à nouveau réunie et a, le 31 juillet 1991, attribué la parcelle au propriétaire indivis.

Or, le réclamant, qui exploite une station service limitrophe de la parcelle qui lui avait été attribuée par la commission de remembrement, avait installé sur celle-ci, fin 1989, une cuve desservant deux pompes à carburant.

Cet investissement lui a coûté 102 150 F mais le réclamant n'est plus propriétaire du terrain qui lui sert d'assise, la commission s'étant finalement conformée à la décision du tribunal.

Lors de l'instruction de cette réclamation, il est apparu au Médiateur que la commission de remembrement avait, à l'origine, commis une faute, au détriment de l'indivision, en attribuant sa parcelle au réclamant malgré les termes de l'article 20-4 du Code rural, en se fondant sur les dimensions du terrain qu'elle estimait impropres à la construction.

Cette analyse, liée à l'appréciation des possibilités matérielles de construction, s'avère en effet contraire à la jurisprudence. Au regard de celle-ci, la qualification de terrain à bâtir est réservée aux terrains qui sont tout à la fois effectivement desservis et équipés, et situés en zone constructible.

Tirant les conséquences du jugement rendu par le tribunal administratif, la commission départementale de l'aménagement foncier, a, en outre, demandé aux propriétaires de rendre les parcelles en cause dans leur état d'origine, sans toutefois trancher la demande du réclamant tendant à être indemnisé du préjudice subi.

La commission l'a renvoyé devant le ministre de l'Agriculture qui, dans un courrier du 21 mai 1992, devait rejeter la demande en lui indiquant qu'il ne pouvait ignorer l'instance engagée par l'indivision et le risque encouru à installer des cuves à carburants.

Lors de la saisine, le Médiateur a contesté l'analyse du ministre de l'Agriculture sur deux points.

1°) Dès que le transfert de propriété est intervenu, l'attributaire avait la libre disposition de sa parcelle et il pouvait donc installer la cuve.

Décider le contraire serait apporter une restriction au droit de propriété, qui n'est prévue par aucun texte.

2°) Aucun document ne semble établir que le réclamant ait eu connaissance d'un recours contentieux.

Indépendamment de la réponse qui sera faite par le ministre de l'Agriculture sur la demande de réparation présentée, ce dossier fournit l'occasion d'une réflexion de fond sur les effets des procédures de remembrement sur la propriété.

En l'état actuel du Code rural, il existe une procédure d'indemnisation prévue à l'article 2-9, qui est confiée à la commission nationale d'aménagement foncier.

" Lorsque la commission nationale d'aménagement foncier est saisie, dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article 2-8, d'un litige en matière de remembrement rural et qu'elle constate que la modification du parcellaire qui serait nécessaire pour assurer intégralement par des attributions en nature le rétablissement dans ses droits du propriétaire intéressé aurait des conséquences excessives sur la situation d'autres exploitations et compromettrait la finalité du remembrement, elle peut, à titre exceptionnel et par décision motivée, prévoir que ce rétablissement sera assuré par le versement d'une indemnité à la charge de l'État dont elle détermine le montant. Les contestations relatives aux indemnités sont jugées comme en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique ."

Cette procédure est formulée en termes restrictifs.

D'abord, elle suppose soit une carence de la commission départementale, soit une double annulation successive par le juge administratif de la décision de la commission départementale, prononcée pour le même motif. Ces dispositions s'interprètent plutôt comme une volonté du législateur de sanctionner la méconnaissance de la chose jugée, que comme le souci de protéger le propriétaire lésé.

La saisine de la commission nationale relève soit du ministre de l'Agriculture, soit des intéressés mais il n'est pas certain que ces derniers soient exactement informés de leurs droits.

Ensuite, la commission nationale ne peut envisager l'indemnisation que si elle constate que la modification du parcellaire qui serait nécessaire pour assurer intégralement par des attributions en nature le rétablissement du propriétaire intéressé dans ses droits, a des conséquences excessives pour la situation des autres exploitants, risquant ainsi de compromettre la finalité du remembrement.

La procédure prévue n'envisage que les terrains agricoles qui sont directement l'objet des opérations de remembrement.

L'insuffisance du dispositif actuel d'indemnisation est perçue par le ministère et a été évoquée dans le cadre du groupe de travail, réuni par le conseil général du Génie rural, des Eaux et des Forêts.

Plusieurs suggestions semblent devoir être formulées :

1°) Les premières conditions de saisine devraient être assouplies en ce qui concerne le dispositif de l'article L.2-9 du Code rural. Les commissions départementales d'aménagement foncier devraient pouvoir se dessaisir d'office au profit de la commission nationale lorsqu'une demande d'indemnisation leur est présentée à la suite d'une annulation contentieuse.

2°) Le dispositif devrait être élargi à l'ensemble des parcelles comprises dans le périmètre du remembrement, y compris les parcelles réattribuables de plein droit.

Plus généralement, on peut s'interroger sur les modalités de la procédure contentieuse devant les juridictions administratives. Il est en effet permis de penser, au vu de la réclamation no 93-0240, que si le réclamant avait été informé de l'existence d'un contentieux, il n'aurait pas installé sa cuve.

Mais, il n'a pas été appelé à l'instance, ni informé du recours de l'indivision.

La question se pose de savoir s'il ne conviendrait pas de mieux protéger les tiers bénéficiaires d'une décision administrative, notamment en leur reconnaissant un droit à être informé des procédures qui sont engagées contre cette décision.

Dans son rapport consacré à l'urbanisme (" l'urbanisme, pour un droit plus efficace "), le Conseil d'État s'est interrogé sur cette question à travers l'exemple du permis de construire. Soucieux de renforcer la sécurité juridique du titulaire du permis de construire et de " responsabiliser " les requérants, le Conseil a suggéré que " tout recours contentieux ou gracieux dirigé contre une autorisation individuelle délivrée en application du Code de l'urbanisme soit, avant l'expiration des délais de recours, signifié par le requérant tant au titulaire de l'autorisation qu'à l'auteur de la décision ".

Dans sa forme actuelle, la suggestion proposée a l'inconvénient de présenter un caractère ponctuel qui ne permet pas de résoudre de manière satisfaisante les problèmes auxquels se heurtent les bénéficiaires d'une décision administrative. La protection des tiers bénéficiaires d'une décision administrative intéresse certes les propriétaires, pétitionnaires d'un permis de construire, mais, elle intéresse aussi, comme l'illustre la réclamation 93-0240 évoquée, le propriétaire soumis aux procédures de remembrement. D'une manière plus générale, les contentieux relatifs aux structures agricoles révèlent des difficultés analogues.

Il est sans doute illusoire d'envisager un recensement exhaustif des situations concernées, ce qui rend difficile la généralisation de la suggestion proposée par le Conseil d'État à propos des autorisations d'urbanisme. Une réforme au coup par coup présenterait par ailleurs l'inconvénient de rompre l'unité et la cohérence des règles procédurales qui doivent être appliquées devant un ordre de juridiction.

Le souci de ne pas multiplier les règles dérogatoires conduit à s'interroger sur la pratique actuelle du juge administratif.

Dans sa rédaction actuelle, le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ne fait pas obligation au juge d'appeler à l'instance la personne qu'il estime intéressée.

Mais le juge administratif peut d'office, par la communication de la requête dont il est saisi, appeler à l'instance toute personne qu'il estime intéressée. Celle-ci, bien qu'elle puisse produire ses observations, n'a cependant pas la qualité de partie à l'instance (cf. CE 6 janvier 1961 FOURCAUD, Rec p. 1151).

En matière de permis de construire, les tribunaux administratifs usent quasi systématiquement de cette procédure. Une décision du Conseil d'État paraît d'ailleurs en faire une véritable obligation (17 novembre 1982 - synd. copropr. de l'immeuble " les Cassettes ").

Il est donc permis de se demander s'il n'y a pas lieu de renforcer et de généraliser cet usage jurisprudentiel en faisant obligation pour le juge d'appeler à l'instance toute personne bénéficiaire de l'acte administratif individuel contesté. Reconnaissons toutefois que cette proposition a l'inconvénient de gommer l'aspect novateur de la suggestion du Conseil d'État qui était de " responsabiliser " les requérants.

D. LES SERVITUDES ADMINISTRATIVES


Voisine de l'expropriation, mais parfois plus insidieuse, l'institution de servitudes administratives, qui ne fait pas l'objet d'un statut ou d'une réglementation aussi développée que le droit de l'expropriation, peut entraîner de graves atteintes au droit de propriété.

Le fondement juridique de ces servitudes est essentiellement contenu dans des textes spécifiques, édictés en vue d'assurer certains besoins d'intérêt général : la protection du patrimoine national et du patrimoine culturel, l'environnement, la défense nationale, l'équipement électrique ou les télécommunications.

En revanche, une jurisprudence a été établie par les juridictions civiles et administratives définissant des critères dont la stabilité n'est pas aussi garantie que dans le droit d'expropriation.

Ce domaine d'intervention de la puissance publique est assez complexe et réunit souvent plusieurs parties prenantes : il arrive fréquemment que le bénéficiaire de la servitude ne soit pas l'auteur de l'opération.

Dans la pratique, le Médiateur de la République a eu, à plusieurs reprises, à connaître de réclamations présentées par des propriétaires qui se plaignent de ce qu'une collectivité publique a, sans leur accord, empiété sur leur propriété en instituant de facto une servitude et recherchent une solution amiable leur épargnant le recours aux voies juridictionnelles (cf. en ce sens, la réclamation no 90-0311 citée au rapport 1991, p. 175).

Cette année encore, le Médiateur de la République a ainsi été sollicité sur l'atteinte apportée par l'État en tant qu'exploitant d'un réseau de câblage lors de l'installation du câble dans un immeuble (réclamation no 91-3535).

Une SCI a acquis, le 20 septembre 1990, les murs d'un local commercial et d'une cave, dans un immeuble situé à Paris. La cave, formant le lot no 41 de la copropriété, se situe à la verticale du commerce, la communication entre les deux s'effectuant au moyen d'une trappe.

Les occupants du local commercial exerçant la profession de bijoutier, ont engagé des travaux de sécurité pour renforcer d'une part, le sol du local (réalisation d'une dalle), pour supprimer d'autre part, l'accès à la cave (réalisation d'un mur, condamnation de l'accès, etc.).

Lors de ces travaux, les intéressés ont découvert que les services du ministère des Postes et Télécommunications avaient procédé en 1988 à l'installation d'ouvrages destinés au fonctionnement d'un réseau de vidéocommunication, à l'intérieur du lot no 41, rendant ainsi impossible la réalisation complète des travaux de sécurité envisagés.

Dans un premier temps, la démarche des propriétaires a été de solliciter le retrait des câbles traversant la propriété. Les services, bien qu'ouverts sur le principe à un règlement amiable du litige par la mise en  uvre de solutions pratiques dont les modalités restaient cependant à définir, ont néanmoins justifié le maintien de l'implantation de l'ouvrage litigieux dans les lieux actuels.

A l'appui de leur position, les services ont fait référence à un arrêté municipal prévoyant l'implantation de l'accès au branchement dans une partie commune de l'immeuble non affectée à l'habitation. L'administration se prévalait également de l'accord du syndic et du conseil syndical, intervenu le 30 mars 1988, avant la réalisation des travaux de câblage.

Faute de pouvoir trouver un terrain d'entente, les propriétaires ont saisi le Médiateur de la République pour tenter de trouver une issue amiable à ce litige tout en saisissant les tribunaux judiciaires.

Cette réclamation illustre les difficultés que l'on rencontre en pratique pour concilier les droits des particuliers.

Le préjudice pour les propriétaires n'est guère contestable dans la mesure où le lot no 41 qui est en cause constitue une partie privative de l'immeuble. Le règlement modifié de la copropriété prévoit bien une servitude de libre accès, mais celle-ci ne grève matériellement les lieux que de la seule implantation du compteur général des eaux.

De plus, l'article L.48-3 du Code des postes et télécommunications sur lequel se fonde l'administration ne prévoit le droit pour l'État d'établir des conduits ou supports que dans les parties communes des propriétés bâties à usage collectif.

Sur un plan plus général, on peut d'ailleurs s'interroger sur le bien-fondé de cette référence à l'article L.48 du Code des postes et télécommunications comme fondement légal de la servitude ainsi revendiquée.

Cet article est issu de la codification de la loi du 28 juillet 1885. Or, l'article 1er de cette loi, introductif (et non codifié), précise que la servitude est destinée à permettre le passage de lignes téléphoniques à usage de correspondance. Le contenu des messages (radio, télévision)

transmis par le réseau câblé à l'usage d'un public n'est pas à usage de correspondance, cette notion présupposant l'existence de correspondants individuellement déterminés.

On ajoutera que selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel (décision no 85-198 DC du 13 décembre 1985) à propos de " l'amendement Tour Eiffel " qui concernait les servitudes dans le domaine de l'audiovisuel, la loi doit fixer avec précision les garanties que suppose la mise en  uvre de la servitude afin qu'il ne soit pas porté atteinte au droit de propriété qui est un des droits fondamentaux garantis par la Constitution.

Dans cette affaire, le Médiateur de la République a pu cependant mener à bien sa négociation dans la mesure où France-Télécom a accepté de retirer ses installations de la cave de l'intéressée.

Pour l'avenir, l'article 4 de la loi du 13 juillet 1992 règle en effet la question en instituant au bénéfice des communes, des groupements de communes, ou des personnes autorisées, en application du premier alinéa de l'article 34 de la loi de 1986, une servitude leur permettant d'installer et d'entretenir, à leurs frais, dans les parties des immeubles collectifs et des lotissements affectés à un usage commun, les câbles et les équipements annexes nécessaires à la desserte de locaux à usage privatif.

La servitude devra être établie par la commune ou le groupement de communes. L'organisme chargé de la mise en place du réseau ne pourra donc pas l'établir.

Le maire ou le président du groupement de communes doit notifier au propriétaire ou au syndic de copropriété, la désignation du bénéficiaire de la servitude, les modalités de sa mise en  uvre, et le délai (qui ne peut être inférieur à 3 mois) dont il dispose pour présenter ses observations.

En cas de contestation, les modalités de mise en úuvre de la servitude sont fixées par le président du tribunal de grande instance statuant en référé.

En outre, l'installation de ces câbles et équipements doit être réalisée dans le respect de la qualité esthétique des lieux et, dans les conditions les moins dommageables possibles pour les propriétés, la servitude ne peut faire obstacle au droit des propriétaires et copropriétaires de démolir, réparer, entretenir ou modifier leurs immeubles.

Les propriétaires peuvent demander au juge de veiller à l'application de ces dispositions et, au cas où ils auraient subi un préjudice, demander à être indemnisés.

E. LE LOGEMENT


À l'occasion de ce développement consacré au droit de propriété, il convient enfin d'évoquer les réclamations qui sont adressées au Médiateur de la République par des propriétaires qui se heurtent au refus de l'administration de leur accorder le concours de la force publique pour mettre en  uvre la décision d'expulsion locative dont ils sont bénéficiaires.

Indépendamment des problèmes particuliers liés à la procédure d'indemnisation qui mériteraient une étude plus approfondie, il convient de rappeler qu'à l'occasion de l'examen de ces réclamations, le Médiateur de la République doit concilier le droit des propriétaires et le droit au logement reconnu par la loi " Besson " du 31 mai 1990. La question est inévitablement posée dans les réclamations soumises au Médiateur de la République et souvent difficiles à résoudre, compte tenu de la situation d'impécuniosité que connaissent, dans la plupart des cas, les occupants des logements.

A l'inverse, le Médiateur de la République a, à plusieurs reprises, été conduit à instruire des réclamations présentées par les occupants de logement menacés d'expulsion ou victimes de propriétaires indélicats.

A l'occasion de la réclamation no 92-5331, le Médiateur de la République est ainsi intervenu auprès des autorités préfectorales, en faveur d'un particulier menacé d'expulsion à la suite d'une vente par adjudication de l'appartement qu'il occupait. Le concours de la force publique a été suspendu le temps nécessaire au relogement de l'intéressé.

Dans une démarche analogue, le Médiateur de la République est intervenu en faveur de familles qui logeaient dans un hôtel et, malgré leurs faibles ressources, réglaient régulièrement les sommes dues à l'hôtelier (réclamation no 93-0967).

Ce dernier, dans le but de vendre l'immeuble, avait obtenu leur expulsion en faisant état de la vétusté des murs et des risques courus. Mais, les familles avaient cependant obtenu du juge un délai pour quitter les lieux.

L'hôtelier, voulant forcer leur départ, s'est abstenu de régler les factures d'EDF qui, en l'absence de paiement, suspend la fourniture d'électricité, privant ainsi les occupants d'un confort et d'une sécurité minimum.

Compte tenu du risque pesant sur la sécurité des personnes (utilisation d'énergie de substitution primaire, telle que bougies, poêle au fuel, etc.) et soucieux de venir en aide à ces personnes, le Médiateur a alors saisi l'OPAC, acquéreur du bâtiment et a obtenu, en l'absence de toute obligation juridique de l'office, que celui-ci prenne à sa charge l'arriéré des factures et souscrive un contrat d'abonnement d'électricité auprès d'EDF.

Trois jours plus tard, les habitants de l'immeuble ont eu à nouveau la possibilité d'utiliser l'électricité, indispensable à leur vie quotidienne.

IV. L'ACTION EXTÉRIEURE DU MÉDIATEUR DANS LE DOMAINE DES DROITS DE L'HOMME



Encourager le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales partout dans le monde a toujours été l'un des soucis majeurs de la communauté internationale, et particulièrement de la France.

C'est cette volonté qu'a affirmée une fois encore notre Parlement en 1973, en instituant un Médiateur de la République.

C'est dans cet esprit que Jacques PELLETIER a souhaité en 1993, au niveau national et international, accentuer son rôle, eu égard à la promotion des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels.

Ainsi, le Médiateur a commencé à tisser, faciliter ou resserrer les liens avec les institutions ou organismes compétents en matière de droits de l'homme. Il a engagé des contacts avec les associations humanitaires, a poursuivi l'action de promotion de l'institution dans les pays en voie de développement, où s'installe la démocratie et se renforce l'État de droit. Il a souhaité faire mieux entendre sa voix dans les instances internationales de promotion des droits de l'homme, afin de participer, avec ses collègues Ombudsmen du monde entier, à une meilleure compréhension du rôle des institutions nationales en matière de défense des libertés publiques.

A. LES LIENS AVEC LES AUTRES INSTITUTIONS NATIONALES


Conscient de l'importance de toutes les institutions nationales dans la protection des libertés, la promotion de la démocratie et le renforcement du dialogue entre l'État et la société civile, le Médiateur a poursuivi cette année la collaboration engagée en 1992 avec la Commission nationale consultative des Droits de l'Homme.

Plusieurs réunions avec le Président Paul BOUCHET et ses collaborateurs ont conforté l'idée que les actions des deux institutions étaient complémentaires.

La Commission nationale consultative des Droits de l'Homme n'est pas habilitée à traiter des cas particuliers, mais elle reçoit néanmoins de nombreuses requêtes individuelles. Il a donc été décidé de mettre en place un système afin d'informer les réclamants de leur possibilité éventuelle de saisir le Médiateur par l'intermédiaire d'un parlementaire.

Convaincu de l'intérêt, pour les deux institutions, d'agir en commun au bénéfice de la protection des droits des citoyens et pour la promotion des droits de l'homme à l'extérieur de nos frontières, le Président BOUCHET a proposé au Premier ministre de nommer le Médiateur de la République à la Commission nationale consultative des Droits de l'Homme ; ce qui a été entériné par l'arrêté du 18 mars 1993.

Sachant que les représentants du Gouvernement ont une voix consultative dans cet organisme, le Médiateur a ainsi rejoint au sein de cette

commission indépendante les représentants des grandes associations oeuvrant en France dans le domaine des droits de l'homme, les représentants des principales confédérations syndicales, les personnalités qualifiées, les experts français siégeant dans les instances internationales des droits de l'homme et les représentants du Parlement. Le conseiller pour les relations extérieures qui assure la suppléance du Médiateur à la Commission nationale consultative des Droits de l'Homme, participe chaque semaine aux sous-commissions qui préparent les avis discutés et adoptés en assemblées plénières.

Ainsi, à l'occasion des réunions plénières de 1993, a-t-on évoqué des thèmes dont relèvent certaines réclamations présentées au Médiateur et adopté différents avis sur " l'enseignement de l'éducation civique dans les établissements scolaires ", " les relations entre la police et le public ", " le droit de la nationalité ", " l'harmonisation des politiques d'asile en Europe "... La formalisation des relations entre les deux institutions permet un enrichissement mutuel. La commission pourra se saisir dans l'avenir de problèmes mis en évidence par un nombre important de saisines du Médiateur sur les sujets liés aux droits de l'homme. Certaines propositions de réforme pourront être soutenues par la commission.

Enfin, les activités extérieures de la Médiature, au titre des institutions nationales, seront mieux coordonnées, qu'il s'agisse des contacts bilatéraux avec les pays souhaitant mettre en place un Médiateur ou une Commission nationale des Droits de l'Homme, ou de la participation aux instances internationales, comme cela a été fait, par exemple, à Vienne, en juin 1993, pour la Conférence mondiale des Droits de l'Homme, où les deux institutions étaient représentées.

Dans le même ordre d'idées, le Médiateur a poursuivi la collaboration avec le Conseil économique et social qui, sur le plan de l'avancée et de la protection des droits économiques, sociaux et culturels, joue dans notre pays un rôle fondamental et qui, sur la scène internationale, fait valoir l'intérêt pour les jeunes démocraties du " concept " de Conseil économique et social. Il a rencontré à plusieurs reprises le Président Jean MATTEOLI, et est intervenu le 30 juin devant le Conseil sur le bilan de la charte des services publics. Ils sont convenus d'engager une réflexion commune et, le cas échéant, de travailler à l'élaboration de propositions de réformes.

Dans le domaine des relations internationales, le conseiller pour les relations extérieures a participé à Ouagadougou (Burkina-Faso), à la 3e Rencontre internationale des conseils économiques et sociaux. Cela a permis de faire connaître aux participants, et notamment aux jeunes démocraties africaines, l'esprit commun en matière de droits de l'homme et la disponibilité commune pour faciliter la création de Conseils économiques et sociaux ou de Médiateurs, chaque fois qu'une demande nous est adressée.

Le Médiateur tient à remercier, à cette occasion, les ministères des Affaires étrangères et de la Coopération pour le soutien accordé à son action dans ce domaine, et pour l'aide logistique et technique souvent consentie.

Dans le même esprit, mais sur un autre registre, il a pensé qu'il serait opportun de se rapprocher des associations humanitaires, pour convenir avec elles d'une collaboration dans les domaines de sa compétence.

Il a en effet souvent constaté que de nombreuses personnes sont complètement démunies pour affronter une administration dès qu'elles rencontrent une difficulté, surtout lorsqu'elles sont déjà dans une situation sociale délicate.

Certes, des mesures sont intervenues, ces dernières années, notamment en matière de revenu minimum, de logement, de surendettement, mais il reste beaucoup à faire pour que les pouvoirs publics et tous les organismes qui ont une mission de service public demeurent accessibles et réceptifs aux interrogations et aux besoins des citoyens les plus défavorisés. Les associations ont, dans ce cadre, un rôle prépondérant et irremplaçable, et le Médiateur a donc établi des contacts avec les associations caritatives les plus importantes pour agir ensemble.

Plusieurs ont déjà répondu à cet appel (ATD Quart-Monde, Secours Catholique, Secours Populaire, Médecins Sans Frontières, Restos du Cúur, Fondation Abbé Pierre) le Médiateur a commencé à travailler de concert pour venir en aide aux plus défavorisés (demande de la carte d'identité pour les " sans domicile fixe ", actions en matière d'aide au logement, recours à l'aide médicale gratuite).

Les maillons de cette chaîne de solidarité qu'il paraît très souhaitable de développer sont en place, les sillons sont tracés, l'action peut continuer et s'amplifier.

Institutions nationales, assemblées consultatives, ministères, associations humanitaires, c'est par la mobilisation de toutes les forces politiques, économiques et sociales du pays que nous pouvons sans cesse contribuer au recul de la misère et de la pauvreté dans nos sociétés.

B. LA PROMOTION DU PRINCIPE DE MÉDIATION DANS LES PAYS EN VOIE DE DÉVELOPPEMENT


Le devoir des pays du Nord en direction du Sud, en dehors des solidarités d'urgence toujours nécessaires pour pallier les difficultés conjoncturelles, est de favoriser le " développement humain " comme processus permettant d'élargir l'éventail des choix offerts aux individus. C'est la possibilité d'améliorer l'accès à l'éducation et aux soins de santé, d'accroître les revenus et les créations d'emploi...

L'action des pays industrialisés a, en effet, consisté et consiste encore aujourd'hui à favoriser l'émergence et l'installation d'États démocratiques, seuls capables de favoriser un développement durable parce que respectueux de l'identité et de la souveraineté de chaque nation.

Si les grands principes existent, si les droits de l'homme progressent, ils sont dépendants du développement et de la démocratisation.

En ce sens, dans tous les pays, les institutions nationales, les Ombudsmen ont un rôle important à jouer pour favoriser le respect des droits de l'homme, car leur action implique une protection du citoyen face à l'administration, face à l'État, au demeurant indispensable.

Les institutions nationales émanant généralement de la volonté des États ou en étant dépendantes, il est insuffisant de compter sur l'État, et spécialement sur le pouvoir exécutif, pour promouvoir et protéger les droits de l'homme.

Dans une large mesure, le principe d'autorité, qui caractérise les États, limite plus qu'il ne favorise le principe de liberté ou encore les droits de l'homme.

Certes, dans les démocraties, le " contrat social " passé entre l'État et les citoyens tend à limiter et contrôler les prérogatives de l'État, tant par l'intermédiaire de Parlements représentatifs " délégués de la liberté face au pouvoir ", selon l'expression du philosophe ALAIN, que par le pouvoir judiciaire, ou encore par le biais des institutions nationales indépendantes.

En corollaire, autorité de l'État et droits de l'homme ne sont heureusement pas antinomiques, dès lors que l'on veut bien admettre, au-delà des différences philosophiques ou politiques de chaque pays, que c'est l'État qui doit être au service de l'homme et non l'inverse. C'est d'ailleurs cette volonté qui fut à l'origine de l'adoption à Paris, place du Trocadéro (devenue aujourd'hui " place des Droits de l'Homme "), de la Déclaration universelle de 1948, fondée sur l'idée que " la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ".

Le principal instigateur de cette déclaration, René CASSIN, présida la Commission consultative pour la codification du droit international et la défense des droits et devoirs des États et des droits de l'homme créée par la France en 1947. Vingt ans plus tard, ce texte définit " les limites que la toute puissante machine de l'État doit se garder de franchir dans ses relations avec ceux qui lui sont soumis ".

A l'égard des " puissances administratives ", l'indépendance des institutions nationales de promotion et de protection des droits de l'homme peut se manifester tant à travers leurs statuts juridiques qui leur confèrent une réelle indépendance, que leur composition et par leurs modalités concrètes de fonctionnement.

La relation étroite entre le Médiateur et le citoyen fait qu'il apparaît comme un des meilleurs instruments de conciliation et de protection des droits économiques et sociaux du citoyen.

Il ne suffit pas, en effet, d'énoncer de grands principes : il faut disposer des moyens de les appliquer et, en particulier, assurer un bon fonctionnement de l'administration de la justice.

Pour ces raisons et compte tenu des résultats de l'institution française de la Médiature de la République au bénéfice des droits du citoyen et en faveur des droits de l'homme, Jacques PELLETIER a souhaité appuyer la dynamique et la création d'Ombudsmen ou de Médiateurs et consolider leur rôle d'acteurs prééminents dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de l'homme.

Dans le cadre de leur développement institutionnel, c'est assurément l'intérêt des jeunes démocraties de mettre en place de tels instruments de conciliation, car aucune institution ne paraît plus apte que celle du Médiateur à s'inscrire par exemple dans la tradition africaine, avec son souci permanent de réduire les tensions entre administrations et administrés, et de préférer les solutions humaines sagement négociées à la froide application des règles juridiques.

Ainsi, compte tenu des contacts établis en 1993 avec les Chefs d'État du Burkina-Faso et du Bénin qui ont affirmé tous les deux leur désir de mettre en place un Médiateur dans le cadre de leur processus de démocratisation, il est désormais probable qu'à court terme, une telle institution verra le jour dans ces deux pays.

Concernant plus spécialement le Burkina-Faso, la visite de notre institution par le Président Blaise COMPAORE, le 8 juin, a donné une impulsion décisive à la création d'un Médiateur dans ce pays. D'ailleurs, les conseillers juridiques du Président et du Premier ministre du Burkina ont séjourné une semaine à la Médiature pour y étudier l'institution.

C. LA PARTICIPATION AUX INSTANCES INTERNATIONALES


Il a paru utile d'accentuer la participation de la Médiature de la République aux instances internationales de promotion des droits de l'homme.

Les rencontres internationales permettent d'examiner les formes de coopération existantes ou susceptibles d'être établies entre les institutions indépendantes et les organisations intergouvernementales telles que les Nations Unies, le Parlement européen, ou les Communautés européennes.

Ces rencontres, par les recommandations qui sont entérinées et la publicité des débats, favorisent généralement la création d'institutions indépendantes dans les pays qui n'en disposent pas encore.

Ainsi le Médiateur a-t-il pu constater à Vienne, en juin 1993, à l'occasion de la Conférence mondiale des Droits de l'Homme, que les organismes indépendants de protection des droits de l'homme empruntent soit une forme collégiale (commissions nationales des droits de l'homme), soit personnalisée (Ombudsmen ou Médiateurs).

A cet égard, il est intéressant de remarquer que la France était le seul pays doublement représenté dans le groupe des institutions nationales par le Médiateur et la Commission nationale consultative des Droits de l'Homme.

C'est cette importante mission des Ombudsmen que le Médiateur a souhaité rappeler à l'occasion de la réunion informelle des Médiateurs européens et institutions similaires qui s'est tenue du 15 au 17 septembre à Helsinki, à l'invitation de son homologue finlandais.

C'est dans le même esprit que le Délégué général a participé en janvier de cette année à la Rencontre interrégionale sur les Droits de l'Homme, organisée à Strasbourg par le Conseil de l'Europe.

Dans le même sens, la concertation a été poursuivie au sein des instances européennes, afin d'améliorer le texte relatif au statut du Médiateur européen qui sera vraisemblablement installé en 1994. Les discussions engagées sur ce sujet par la section des affaires sociales du Comité économique et social des Communautés européennes et auxquelles nous avons été associés, par la désignation du conseiller pour les relations extérieures en qualité d'expert du Président Jean MATTEOLI, Rapporteur de la question du " Médiateur européen ", auront permis de mieux faire entendre la voix des acteurs économiques pour la mise en place d'un instrument de conciliation européen qui, compte tenu de l'ampleur et de l'hétérogénéité de l'administration communautaire, sera bien utile aux citoyens dans un avenir aussi plus proche que possible.

Retour au sommaire de l'année 1993
Retour au sommaire des rapports