Année 1986

LE STATUT DU MEDIATEUR




Comme il vient d'être écrit dans l'introduction à ce rapport, le législateur a voulu, en créant le Médiateur, compléter les institutions de l'Etat par un organisme qui contribuât à sécuriser les citoyens face au pouvoir des administrations ; qui aidât aussi à adapter le comportement des administrateurs, ainsi que les lois et les règlements à l'évolution permanente de la société.

Dès lors, le législateur était conduit à inventer une institution qui constituât un lien entre le Citoyen, le Parlement et l'Administration. Ainsi s'explique le particularisme très accentué du Médiateur quant à son statut, ses pouvoirs et les modalités de son action.

Le statut du Médiateur a été fixé par la loi n°73-6 du 3 janvier 1973 (Le texte de cette loi, votée sous la présidence de M. Georges Pompidou, M. Pierre Messmer étant Premier ministre, est publié intégralement en annexe). C'est celui d'une autorité personnalisée et indépendante de tous les autres organismes de l'Etat.

1 -Personnalisation de l'institution

Le législateur a attaché beaucoup de soin à faire du Médiateur une autorité personnalisée.

La loi, en effet, parle uniquement du Médiateur et non d'un organisme qu'il aurait seulement pour mission de diriger. Elle a voulu que le Médiateur soit à lui seul l'organisme qu'elle créait. La loi du 3 janvier 1973 s'intitule d'ailleurs " Loi instituant un Médiateur ". Elle s'est bien gardée de faire la moindre allusion à ce qui aurait pu laisser croire que le Médiateur était un organisme dépendant du Gouvernement ou qu'il faisait partie de la fonction publique. Au sujet des collaborateurs du Médiateur, la loi précise seulement que " les collaborateurs du Médiateur sont nommés par celui-ci pour la durée de sa mission ". Autrement dit, les collaborateurs du Médiateur sont dans la situation des membres d'un cabinet ministériel. Dans un cas, comme dans l'autre, il existe un lien personnel entre le Médiateur et ses collaborateurs. L'équipe est recrutée par le titulaire de la charge et elle cesse d'avoir une existence légale dès son départ. De même, la personnalisation de la charge du Médiateur ressort de ce qu'il bénéficie d'une ligne budgétaire globale pour ses crédits et qu'il n'est pas soumis au contrôle financier.

Cette volonté de personnalisation ressort aussi des dispositions de la loi prises pour assurer l'indépendance du Médiateur.

2 -Indépendance

La loi du 3 janvier 1973 ne comporte pas moins de sept dispositions destinées à assurer la parfaite indépendance du Médiateur.

" Le Médiateur est nommé pour six ans par décret en Conseil des ministres. Il ne peut être mis fin à ses fonctions avant l'expiration du délai qu'en cas d'empêchement constaté dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Son mandat n'est pas renouvelable ".

Le décret dont il s'agit est celui du 9 mars 1973 qui précise : le Président de la République doit saisir un collège de la question de savoir si le Médiateur doit être considéré comme empêché d'exercer ses fonctions. C'est une première garantie. Le collège est composé du Vice-Président du Conseil d'Etat qui le préside ; du Premier président de la Cour de Cassation ; du Premier Président de la Cour des Comptes. L'indépendance de ces hautes personnalités est une seconde garantie. La décision constatant l'empêchement du Médiateur est prise à l'unanimité des membres du collège.

" Le Médiateur ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion des opinions qu'il émet ou des actes qu'il accomplit dans l'exercice de ses fonctions ". Il s'agit là d'une immunité complète, non prévue par le statut de la Fonction Publique et qui situe clairement le Médiateur en dehors de l'administration.

Le législateur a voulu protéger le Médiateur de l'ambition politique, puisqu'il est inéligible à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Surtout, le législateur a décidé que le Médiateur " dans la limite de ses attributions,... ne reçoit d'instruction d'aucune autorité ".

Toujours avec le même souci d'assurer l'indépendance du Médiateur la loi a simplement prévu que " les crédits nécessaires à l'accomplissement de la mission du Médiateur sont inscrits au budget du Premier ministre ". Cela signifie que le Médiateur dispose d'une somme globale dont il peut user librement dès lors que la dépense est faite pour l'accomplissement de sa mission. Son budget, il est vrai très modeste, se présente en une seule ligne budgétaire, sans chapitre ni article. Les crédits figurent par commodité sur le budget du Premier ministre.

Le Médiateur n'est pas soumis au contrôle financier pour la gestion de ses crédits budgétaires. C'est la situation que connaît aussi le Conseil Constitutionnel.

De plus, le Médiateur ne bénéficie d'aucun des avantages liés au statut de la fonction publique. Il n'a ni retraite ni traitement. Son indemnité est seulement calculée par référence à un emploi public comme celle des membres du Conseil Constitutionnel. Le Médiateur est hors toute hiérarchie de l'administration contrairement par exemple aux ministres, chefs de l'administration de leur département ministériel.

Cette spécificité apparaît aussi dans les pouvoirs du Médiateur.

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