Année 1976


ANNEXE B




Le lecteur trouvera ici un ensemble de rubriques consacrées chacune, soit à l'action d'un grand service public, partagée entre plusieurs ministères ou secrétariats d'Etat, soit à celle, plus facilement isolable, de tel ou tel département ministériel.

Pour chaque secteur, seront analysés les problèmes majeurs mis en lumière par l'examen des réclamations, qu'il s'agisse de questions de fond ou des conséquences d'un fonctionnement défectueux des services.

Les grands thèmes traités les années précédentes, découlant de l'examen des principales sources de mécontentement, seront à nouveau abordés cette année, sans toutefois faire l'objet d'un développement systématique.

Seront également analysées certaines des recommandations et des propositions de réforme du Médiateur.

Mais auparavant, il a semblé utile de donner quelques chiffres significatifs de l'activité des services concernés, ces chiffres étant en quelque sorte destinés à contrebalancer les constatations plus ou moins défavorables que le Médiateur est amené à faire sur l'organisation et le fonctionnement de l'administration.

En effet, le Médiateur, défenseur de l'administré, se doit de dénoncer les " bavures " qu'il rencontre dans l'action des services, pour essayer d'y remédier. Mais, pour être le défenseur de l'administré, le Médiateur ne peut pour autant se départir de son rôle d'arbitre. C'est la raison pour laquelle il a estimé qu'il serait bon de donner au lecteur une idée du volume des affaires traitées par les différents services publics et para-publics avec lesquels il est en relation. Les défauts signalés dans la suite du document se trouveront ainsi replacés dans leur contexte et ramenés à leur importance relative ; le jugement en sera plus objectif.

Les chiffres donnés portent sur une année.

TRAVAIL - SANTE

La caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés traite bon an, mal an, plus de 200 millions de dossiers de remboursements de frais.

De son côté, la caisse nationale d'assurance vieillesse gère plus de 4 millions de pensions et effectue à ce titre plus de 20 millions de paiements trimestriels. De plus, elle liquide ou révise, chaque année, environ 800 000 dossiers de pension.

Pour l'information des retraités, cette caisse a établi plus de 2000 points de contacts. Plus de 2 millions de personnes y sont accueillies chaque année dont 500 000 pour la seule région d'Ile-de-France.

SERVICES FINANCIERS

Les services fiscaux émettent plus de 50 millions de titres d'impositions.

Les services comptables effectuent 90 millions d'opérations d'encaissement et gèrent 17 millions de comptes de redevance de radiodiffusion.

15 millions d'articles de déclarations de douane ont été comptabilisés.

LE SERVICE DES PENSIONS

Est chargé de la gestion de 2 513 000 pensions qui se répartissent à peu près par moitié entre les pensions civiles et militaires de retraite et les pensions militaires d'invalidité et de victimes de la guerre.

Il liquide annuellement environ 80 000 pensions civiles ou militaires de retraite, et 83 000 pensions militaires d'invalidité ou de victimes civiles de la guerre.

CONSEIL D'ETAT

3 541 affaires contentieuses ont été jugées en 1975.

TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS

21 400 dossiers ont été ouverts dans ces tribunaux.

EQUIPEMENT

Le ministère de l'équipement a reçu 530 478 demandes de permis de construire et en a satisfait environ 480 000 (soit environ 89 p. 100).

AFFAIRES ETRANGERES

Ont été délivrés environ 500 000 actes d'état civil par le service central d'état civil ; 2 600 000 actes divers par les services des postes consulaires à l'étranger.

Environ 10 200 agents sont employés par le MINISTERE DE LA COOPERATION.

INTERIEUR

Le contrôle effectué par la police des frontières porte sur plus de 300 millions d'entrées de voyageurs.

3 000 demandes de documentation et de renseignements émanant du public adressées à la direction de la sécurité civile (action de prévention) ont été satisfaites.

Environ 25 000 associations ont été déclarées en un an (en 1976).

Les services centraux des rapatriés gèrent environ 1 500 000 dossiers depuis l'origine dont plus de 8 600 pour l'année 1976.

JUSTICE

886 439 affaires civiles, 4 170 513 affaires pénales ont été jugées, soit 5 056 952 décisions prises par les différentes cours et tribunaux.

160 000 requêtes ont été adressées par les usagers en matière de justice criminelle.

AGRICULTURE

L'activité du ministère de l'agriculture porte entre autres sur :

- versements de pensions d'invalidité et retraites : 3 738 000

- versements de prestations assurances maladie et accidents du travail : 13 000 000 ;

- attributions d'indemnités viagères de départ : 33 500 ;

- acquisition de 77 000 hectares par les S. A. F. E. R.

- opérations de remembrement effectuées : 380 ;

- agrément de 3 325 dotations d'installation de jeunes agriculteurs.

Nombre de bourses accordées (année scolaire 1975-1976) par la direction générale de l'enseignement et de la recherche : 71000.

INDUSTRIE ET RECHERCHE

Nombre de retraites liquidées en 1975 :

Par la C.A.N.C.A.V.A 52 721

Par l'O.R.G.A.N.I.C . 58 635

Soit au total (dossiers liquidés) 111 356

41 700 demandes d'aide spéciale compensatrice ont été reçues depuis 1973 (environ 11 000 en 1975).

460 000 inscriptions ont été reçues au registre national du commerce.

250 000 dépôts d'actes de sociétés ont été effectués.

Opérations d'Electricité et du Gaz de France :

accordement au réseau : 750 000 ;

Relevés de compteurs : 60 millions ;

Liquidation de retraites : 3 500 par an.

DEFENSE

Le service des pensions des armées entrepose et tient à jour environ 1 300 000 dossiers.

En 1975, les services chargés du recrutement ont constitué 586 972 dossiers destinés à être soumis aux commissions locales d'aptitude ou aux commissions de réforme.

Ils ont reçu 172 578 demandes d'attribution de la carte du combattant ou du titre de reconnaissance de la Nation.

En 1975, le bureau central d'archives administratives militaires a fourni près de 196 000 renseignements.

22 834 dossiers de réparation de dommages causés par les armées ont été ouverts. La part des " bangs " supersoniques est de 340 dossiers (il y en avait eu 2 900 en 1966).

ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE

12 000 subventions et prêts ont été alloués aux pupilles de la Nation.

67 000 cartes du combattant ont été délivrées en 1975.

Pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre :

Demandes reçues 89 381

Demandes concédées 56 363

Retraites du combattant :

Affaires traitées 97 638

Affaires concédées 96 165

Contentieux des pensions militaires d'invalidité :

13 529 dossiers ont été gérés par les tribunaux (tribunaux départementaux, cours régionales des pensions, commission spéciale de cassation des pensions).

Au total : 1 260 000 dossiers de pensionnés (militaires d'invalidité et victimes de la guerre) gérés.

QUALITE DE LA VIE

Nombre de dossiers ouverts concernant la lutte contre les nuisances et la pollution :

En 1974 1 600

En 1975 2 250

(4 p. 100 proviennent des associations, 96 p. 100 des particuliers).

EDUCATION

Les effectifs scolaires se composent de :

6 338 400 élèves dans l'enseignement public du premier degré ;

2 132 000 élèves dans l'enseignement technique.

Le nombre des boursiers de l'enseignement du second degré s'élève, pour une année, à environ 2 millions.



LES SECTEURS DU SERVICE PUBLIC

PRINCIPALEMENT CONCERNES PAR LES RECLAMATIONS



Action et prestations sociales.

Les questions sociales ont, comme les autres années, constitué le thème de la grande majorité des réclamations soumises au Médiateur, l'ensemble de la législation sociale continuant à être la source de multiples mécontentements. Dans cet ensemble, le Médiateur a constaté la même prédominance des problèmes de la vieillesse mais, aussi, l'ampleur des problèmes posés par l'assurance maladie. Les autres thèmes - invalidité, octroi des différentes aides possibles, etc. n'ont guère varié, eux non plus, quant à leur importance relative.

Le secteur social est aussi celui qui a continué à fournir la matière la plus importante à l'action réformatrice du Médiateur. En effet, si les problèmes classiques de fonctionnement défectueux des services sont souvent dénoncés dans les réclamations, les questions de fond l'emportent, et de beaucoup, sur les simples difficultés liées au comportement des diverses administrations concernées.

Les plus considérables de ces problèmes ont déjà été longuement traités ci-avant dans ce rapport, et il n'en sera plus maintenant question qu'incidemment, qu'il s'agisse des difficultés relatives à l'accès à la retraite, des problèmes des délais en matière de sécurité sociale et, surtout, de l'immense matière touchée par l'application du principe de non-rétroactivité de la règle de droit.

I. - LES PRINCIPAUX PROBLEMES MIS EN LUMIERE PAR L'EXAMEN DES RECLAMATIONS

Dans cet ensemble, les réclamations mettant en cause la législation et l'organisation de l'assurance vieillesse ont continué à se placer au premier plan, qu'il s'agisse des plaintes relatives aux pensions du régime général ou à celles qui concernaient les retraites servies par les différents régimes spéciaux.

Les pensions des agents publics, bien que posant de nombreux problèmes communs avec ceux qui seront abordés ici, méritent malgré tout une place à part et seront traitées plus loin.

Quant aux réclamations tendant à l'attribution d'une retraite complémentaire, elles ne feront pas, malgré leur fréquence, l'objet ici d'un développement particulier car, en ce qui les concerne, le Médiateur est en principe incompétent [cf. ci-après, La vie de l'institution (Annexe C, p. 253, 254) et son intervention est de ce fait très limitée (Il peut malgré tout s'assurer que le régime en vigueur a été correctement appliqué ; il réussit aussi, très souvent, à hâter la liquidation du dossier)].

Les contestations ont porté, essentiellement, sur la durée d'assurance prise en compte pour le calcul de la retraite. Nombreux sont en effet les réclamants qui se plaignent de ce que le montant de leur pension ne prend pas en considération toutes les activités qu'ils disent avoir effectuées dans le cours de leur carrière.

La non-validation des services en cause résulte bien, parfois, d'une simple erreur de l'administration, cette erreur étant alors corrigée dès l'intervention du Médiateur (n° III-602).

Mais le principe d'une validation n'est pas toujours acquis d'emblée et peut exiger une consultation préalable de l'autorité de tutelle : tel a été le cas d'un retraité des mines qui, pour obtenir la validation de deux années de scolarité effectuées dans une école nationale technique, a dû obtenir l'avis favorable du ministre du travail (n° III-1091).

Des difficultés se sont élevées, aussi, au sujet de la validation de services accomplis outre-mer ; la question s'est posée spécialement pour les rapatriés d'Afrique du Nord : en effet, si des mesures exceptionnelles ont permis la validation gratuite des services effectués entre 1938 et 1953 par des Français ayant servi en Algérie (n° II-2138), les rapatriés du Maroc (n° II-1749) ou de Tunisie (n° III-711) ne peuvent par contre obtenir la validation de leurs services qu'en rachetant les cotisations correspondantes.

Mais la plus grande source de litiges provient de la difficulté de faire la preuve, et que les services dont on demande la validation ont bien été effectués, et que des cotisations ont bien été versées à leur titre. Les réclamations sur ce problème ont continué à être très nombreuses.

Les intéressés peuvent apporter la preuve du travail effectué en produisant des fiches de paie ou des attestations patronales certifiées conformes aux livres de paie et mentionnant salaires et cotisations " assurances sociales " correspondantes. A défaut de ces pièces, seul un faisceau de " sérieuses présomptions " en faveur du réclamant permettra de lui donner satisfaction (nos I-843 et II-2189 par exemple).

Assez fréquemment, la preuve du travail accompli est bien apportée, mais il apparaît qu'aucune cotisation correspondante n'a été versée par l'employeur (n° II-2053). Un décret (n° 75-465) du 9 juin 1975 a prévu cette hypothèse en donnant à l'employeur défaillant la possibilité de régulariser la situation ; si, pour des raisons évidentes, le salarié ne peut reprendre contact avec son ancien employeur - ou si ce dernier refuse d'obtempérer - l'intéressé peut verser lui-même les cotisations arriérées (décret n° 75-109 du 24 février 1975 complété par l'arrêté du 31 décembre de la même année).

Les demandes de majoration de la durée d'assurance au titre des enfants élevés par le retraité constituent, elles aussi, une source importante de litiges. Le problème sera repris dans la rubrique consacrée aux propositions de réforme émises par le Médiateur.

Les contestations relatives au calcul du salaire de base pour la détermination de la retraite ou au mécanisme de la revalorisation des retraites n'ont pas posé de question véritablement nouvelle par rapport à ce qui a été dit les années précédentes (voir plus particulièrement, pour le premier de ces problèmes, le rapport de 1975, p. 66 et suivantes ; pour le second, les rapports de 1973, p. 81 et 82 et de 1975, p. 130 et suivantes). Quant au problème de la date d'entrée en jouissance de la pension, objet fréquent de litiges, il est longuement développé ailleurs [cf. la " synergie" relative à l'accès à la retraite et ses difficultés (Annexe A, p. lia et suivantes)].

Les pensions de réversion, enfin, ont continué à constituer le thème de nombreuses réclamations, celles-ci se rapportant toujours, pour l'essentiel, au même problème : celui des règles limitant le cumul d'une telle pension avec une pension personnelle.

Une réclamation sur ce sujet (n° III-1659) a permis de faire le point sur la question :

Le Gouvernement, conscient des difficultés auxquelles se heurtent les veuves qui, au décès de leur mari, doivent assumer seules les charges du ménage, a estimé devoir donner, dans la mesure des possibilités financières du régime général, une priorité à l'assouplissement de l'ensemble des conditions d'ouverture du droit à pension de réversion, afin de permettre aux veuves de condition modeste d'en obtenir le bénéfice.

C'est ainsi que le décret du 11 décembre 1972 a fixé à cinquante-cinq ans, au lieu de soixante-cinq ans ou soixante ans en cas d'inaptitude au travail, l'âge d'attribution de la pension de réversion.

De même, le décret du 24 février 1975 a apporté de nouveaux assouplissements à la condition de la durée du mariage et à celle des ressources personnelles du conjoint survivant.

Enfin, la loi du 3 janvier 1975 permet désormais, dans certaines limites, le cumul de la pension de réversion et de la pension personnelle de vieillesse ou d'invalidité, alors que les dispositions antérieures privaient le conjoint survivant, titulaire de l'un des avantages personnels susvisés, de tout droit à pension de réversion : il est confirmé que le cumul est autorisé, selon la formule la plus avantageuse, jusqu'à concurrence soit de la moitié du total de ces avantages personnels et de la pension dont bénéficiait ou eût bénéficié l'assuré, soit d'une somme forfaitaire calculée par référence au minimum en vigueur à la date d'entrée en jouissance du deuxième avantage servi au conjoint survivant (8 500 F à compter du 11 juillet 1976).

Ces récentes réformes ont amélioré, de façon sensible, la situation d'un grand nombre de veuves et vont dans le sens des mesures souhaitées par le Médiateur.

Les pouvoirs publics continuent néanmoins à se préoccuper de l'ensemble des problèmes sociaux posés par le veuvage et s'efforcent de les résoudre par étapes, mais une nouvelle amélioration de la réglementation relative au cumul est cependant difficilement envisageable actuellement, en raison des charges financières importantes qui en résulteraient pour le régime général.

Dans la rubrique des affaires sociales, d'assurance maladie mérite une place à part, aussi bien par l'importance numérique des plaintes reçues par le Médiateur en ce domaine que par l'importance des questions de fond soulevées par ces réclamations. Outre les problèmes de remboursement des différents actes de prévention ou de conservation de la santé, plusieurs affaires ont permis de rappeler, là encore, que les administrés eux aussi ont un certain nombre d'obligations à remplir.

Le remboursement des actes de santé, outre le rappel de la nécessité, pour ces actes, de respecter la nomenclature établie par les administrations concernées et leur remboursement sur la base d'un tarif de responsabilité (n° II-2047), mérite, à trois égards, un développement particulier.

- En ce qui concerne, d'abord, le remboursement des actes de la médecine préventive.

Ce problème a déjà été évoqué dans les précédents rapports du Médiateur (Voir les rapports de 1973, p. 85 et 1974, p. 78).

Par la suite, le Médiateur a été saisi de plusieurs réclamations relatives au non remboursement des séro-diagnostics de la rubéole et de la toxoplasmose.

On connaît les conséquences graves qui peuvent résulter, pour une femme enceinte et son enfant, de ces deux affections et, dans ce domaine, une protection toute particulière et accessible à tous s'imposait.

Le Médiateur a été saisi à plusieurs reprises de ce problème :

- dossier III-835 : une femme récemment enceinte s'était trouvée en contact avec une personne atteinte de la rubéole et se plaignait de n'avoir pu obtenir le remboursement des frais d'analyse engagés ;

- le dossier d'une femme qui s'étonnait de ce que le remboursement de ces analyses ne soit pas de droit alors même que la loi autorise maintenant le remboursement de la pilule ;

- dossier n° II-2750 d'une femme enceinte ayant subi, sur prescription médicale, les tests de rubéole et de toxoplasmose non remboursés.

Aussi a-t-il jugé nécessaire d'intervenir auprès du ministère intéressé afin que des mesures soient prises en ce domaine.

Les pouvoirs publics, sensibles au problème soulevé, ont, en définitive, décidé de l'inscription, dans la liste des actes spécialisés soumis à entente préalable, des séro-diagnostics de la rubéole et de la toxoplasmose (loi du 11 août 1976).

Toutefois, et dans le but d'atténuer les charges financières de l'assurance maladie, des limites ont été fixées au remboursement de ces examens : la prise en charge peut intervenir pour les examens prescrits depuis le 2 septembre 1976 ; pour les examens prescrits antérieurement à cette date, les caisses conservent la faculté d'accorder aux intéressés une participation sur les fonds d'action sanitaire et sociale, à condition que les assurés justifient de la modicité de leurs ressources.

- La seconde catégorie de difficultés provient des contraintes créées par l'obligation de respecter les limites de la carte hospitalière.

Plusieurs réclamants se sont plaints en effet de ne pouvoir obtenir la prise en charge par l'Etat de frais d'hospitalisation ou de soins médicaux, ou même de frais de transport engagés pour se rendre dans un établissement de soins, lorsque les frais litigieux ont été engagés ailleurs que dans la région d'origine de l'intéressé.

Ainsi par exemple des affaires :

N° I-861 : le réclamant avait obtenu le remboursement de son séjour en clinique spécialisée sur la base du prix de journée d'un établissement similaire de sa ville d'origine, et celui des frais de transport avait été calculé sur la base de ceux engagés pour un séjour dans la région. Le médecin-conseil avait en effet estimé que le traitement était nécessaire, mais qu'il pourrait être dispensé avec autant d'efficacité dans un établissement similaire situé dans la région d'origine de l'intéressé, et avec un prix de journée moins élevé. Dans la mesure où l'intéressé avait été informé de ces décisions préalablement à son départ, aucun mauvais fonctionnement de l'administration ne pouvait être dénoncé.

N° II-2845 : la requérante, victime d'un accident, se plaignait de ne pouvoir obtenir le remboursement des frais de son transport en ambulance ainsi que des lenteurs apportées au remboursement de la facture qui lui était réclamée par l'hôpital qui l'avait reçue. Le refus de remboursement du transport en ambulance avait été opposé par la caisse après avis du contrôle médical, celui-ci ayant estimé que les soins auraient pu être dispensés sur place et que, par conséquent, ledit transport avait été effectué pour raisons de convenances personnelles.

De telles décisions sont conformes à la réglementation qui prévoit (cf. le décret n° 73-183 du 22 février 1973) que lorsqu'un assuré social choisit pour des raisons de convenances personnelles un établissement privé d'hospitalisation dont le tarif de responsabilité est supérieur à celui de l'établissement hospitalier soit public, soit privé, le plus proche, dans lequel il aurait, sous réserve de l'avis du médecin chargé du contrôle médical, pu recevoir les soins appropriés à son état, l'organisme d'assurance maladie auquel il est affilié ne participe aux frais de séjour exposés par l'assuré que dans la limite du tarif de responsabilité applicable à ce dernier établissement.

Cette règle se justifie dans la mesure où il est indispensable de tout mettre en oeuvre pour que les capacités médicales et hospitalières d'une région soient utilisées à plein ; permettre dans tous les cas aux assurés d'aller là où ils veulent risquerait d'entraîner une mauvaise utilisation des possibilités de certains établissements [cf, plus loin l'affaire n° II-861]. Elle peut cependant, dans certains cas, paraître bien sévère - ainsi lorsqu'il s'agit, comme dans l'affaire n° II-56, de l'opération " à coeur ouvert " d'un enfant (Le litige n'a pas été tranché définitivement car les frais restés à la charge de la famille avaient été couverts par une collecte publique ; le directeur régional de la sécurité sociale a toutefois donné des instructions pour que le problème soit tranché par la voie de l'expertise.) - ou, même, engendrer des conséquences injustes.

Dans la réclamation n° II-80, par exemple, l'intéressée se plaignait de ce que la caisse refuse de prendre totalement en charge les frais d'hospitalisation de sa mère, qu'elle avait fait transférer dans un établissement proche de son propre domicile ; elle faisait valoir en effet que si elle n'avait pas pris sa mère en charge, l'administration aurait été amenée à engager des frais autrement plus élevés que ceux dont elle demandait le remboursement.

Au vu de telles réclamations, le Médiateur se demande si certains aménagements susceptibles d'assouplir la règle de principe, telle qu'elle a été définie ci-dessus, ne seraient pas souhaitables.

- Une troisième source de litiges, enfin, est apparue de l'examen de nombreuses réclamations émanant de personnes âgées et relatives au remboursement des frais d'hospice.

Le Médiateur a en effet été saisi à plusieurs reprises (affaires n°b 1292, II-3055, II-2860, I-523, II-1129, II-103, II-2470, II-734) de réclamations émanant de personnes âgées, assurées sociales, qui, transférées d'un hôpital dans un hospice, ou, bien souvent, de la section hôpital à la section hospice d'un même établissement, se plaignaient de ne pouvoir obtenir le remboursement des frais alors mis à leur charge. Les hospices étant considérés comme des établissements d'hébergement et non de soins, la sécurité sociale n'assure pas la prise en charge des dépenses engagées pour les personnes qui y sont hébergées.

Ainsi, un pensionnaire d'une maison de retraite section " hospice valide ", bien que bénéficiant en sa qualité de pensionné de guerre de soins gratuits, avait dû, au titre de l'obligation alimentaire, faire participer ses enfants à la couverture des prix de journée, le total des pensions qu'il percevait n'atteignant pas le montant des frais de séjour.

Un autre réclamant s'étonnait de ce que les frais d'hospitalisation de son frère dans un hôpital rural fassent, après le décès de ce dernier, l'objet d'une récupération sur succession de la part de la direction de l'action sanitaire et sociale.

A l'occasion de l'instruction de multiples affaires similaires, les autorités compétentes, conscientes de la difficulté qu'ont les personnes âgées et leurs enfants à admettre que les frais de soins médicaux soient inclus dans les prix de journée des hospices et que de ce fait, elles doivent s'en acquitter sans avoir la possibilité de se les faire rembourser, avaient envisagé de mettre à l'étude une formule qui permettrait de rembourser les soins dispensés aux pensionnaires d'hospices dans des conditions comparables à celles qui seraient admises si les intéressés étaient soignés à leur domicile.

Dans un premier temps, il a donc été envisagé d'appliquer un double prix de journée, dont la fraction " hébergement " serait assurée par les intéressés ou par l'aide sociale et dont la fraction correspondant au coût des soins serait prise en charge par l'assurance maladie. Des expériences en ce sens ont d'ailleurs été tentées dans plusieurs départements.

Il semble cependant que l'on s'oriente actuellement vers une autre solution. Ce serait, d'après les informations que le Médiateur a recueillies à ce sujet, l'adoption d'un " forfait soins ", de préférence au double prix de journée " hébergement-soins ".

D'ailleurs, un décret prévu pour l'application de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 et plus particulièrement de son article 27, 2e alinéa, relative aux institutions sociales et médico-sociales est en cours de préparation. Ce décret devrait permettre de résoudre ce problème des conditions de prise en charge des dépenses afférentes aux soins médicaux par les organismes d'assurance maladie, mais le Médiateur déplore le retard apporté à son élaboration [cf. rapport de synthèse ]. Il faut reconnaître que son élaboration est rendue difficile en raison de la concertation et de la coordination des différents ministères concernés qu'elle nécessite.

On peut ajouter que, dès à présent, des études allant dans le sens de la politique de maintien à domicile des personnes âgées ont été faites en vue notamment d'une suppression de la référence à l'obligation alimentaire pour certaines prestations d'aide sociale. Elle concernerait entre autres les frais de foyer restaurant et l'aide ménagère.

Le Médiateur reste particulièrement attentif au développement de la question.

L'obligation pesant sur certains débiteurs d'aliments - et instituée par le code civil - est, précisément, un devoir souvent mal compris des administrés et bon nombre de réclamants s'en plaignent auprès du Médiateur. Il faut dire cependant que si certaines améliorations peuvent effectivement être apportées à la question, une suppression totale de la référence à l'obligation alimentaire ne semble certainement pas souhaitable.

Les administrés ont quelquefois tendance, aussi, à oublier une autre obligation qui leur incombe, et qui paraît pourtant évidente : c'est celle qui consiste à payer leurs cotisations sociales en temps voulu s'ils veulent pouvoir bénéficier des prestations correspondantes.

En effet, si un simple retard dans le versement des cotisations n'est sanctionné que par une majoration des sommes dues - cette majoration ne pouvant faire l'objet d'une remise gracieuse que si l'intéressé est de bonne foi -, le mauvais payeur se verra, lui, refuser le remboursement des soins qu'il se sera trouvé devoir engager (n° II-1882).

Dans un cas, l'intervention du Médiateur a permis de donner satisfaction au réclamant, mais la solution adoptée ne se justifiait que par des raisons d'humanité et doit très certainement rester exceptionnelle.

L'intéressé avait subi en 1970 une intervention chirurgicale suivie d'un traitement au cobalt. L'organisme débiteur des prestations dues avait réglé directement à la clinique les frais entraînés par l'intervention mais, après vérification du dossier, il était apparu que cet assuré n'était pas à jour de ses cotisations à l'égard du régime obligatoire de sécurité sociale des travailleurs non salariés. Aussi l'organisme en cause avait-il alors demandé le remboursement des sommes versées indûment.

Le réclamant qui, à la suite d'une décision de la commission de première instance, s'était trouvé obligé de régler les cotisations échues, demandait à être rétabli dans ses droits aux prestations.

Un texte, le décret n° 75-1109 du 2 décembre 1975, vient en effet assouplir les dispositions de la loi du 12 juillet 1966 - dont l'article 5 stipule que l'assuré doit être à jour de ses cotisations à la date des soins dont le remboursement est demandé -, en prévoyant que " l'assuré qui n'a pas acquitté la cotisation dont il est redevable dans le délai de trois mois suivant la date d'échéance peut, en cas de force majeure ou de bonne foi dûment prouvée, être rétabli dans ses droits aux prestations ".

Saisie de l'affaire, la commission de recours gracieux avait décidé de faire bénéficier le réclamant des dispositions de ce texte, mais l'autorité de tutelle, considérant que le dossier de l'assuré faisait apparaître plusieurs retards dans le versement des cotisations, avait annulé cette décision et obligé l'intéressé à rembourser les frais engagés. Elle a, par la suite, pour des raisons d'humanité, accepté que les sommes litigieuses soient reversées au plaignant (n° II-160).

Le problème de la mise en oeuvre de l'harmonisation clos régimes de sécurité sociale sera repris sous la rubrique des propositions de réforme du Médiateur [cf. la syn. n° 4].

Dans les quelques affaires relatives à l'assurance invalidité, le réclamant :

- demandait à être classé dans une autre catégorie que celle qui avait été retenue (nos II-2914 et III-1151) ;

- aurait souhaité que son état d'invalidité soit reconnu imputable au service (n° II-2809) ;

- contestait le montant de la pension d'invalidité (n° II-1147) ;

- se plaignait de ce que son inaptitude n'ait pas été reconnue au moment de prendre sa retraite (n° II-2502) : il lui a été rappelé que l'inaptitude doit être totale et définitive, et reconnue après examen médical ; la décision de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés, qui relève d'une pure appréciation médicale, ne peut être contestée que devant la commission technique régionale.

Une dernière réclamation (n° II-3033) mérite d'être signalée, dans la mesure où elle a permis de rappeler que certaines règles limitent les possibilités de cumuler une pension d'invalidité avec d'autres avantages : en l'espèce, il était précisé que la pension d'invalidité ne peut se cumuler avec la pension acquise au titre d'un régime spécial que dans la limite du salaire perçu par un travailleur de la même catégorie.

Il y a peu à dire des réclamations, relativement rares, concernant les accidents du travail et les maladies professionnelles. Une seule (n° II-2861) mérite d'être signalée, dans la mesure où elle rappelle que les administrés, eux aussi, ont certaines obligations :

Atteinte d'un mal de Pott, l'intéressée a subi, en 1950, une intervention chirurgicale nécessitant une greffe. Le 12 mai 1967, elle est victime d'un accident du travail (chute) qui rompt cette greffe. Mais aucune déclaration réglementaire d'accident n'est alors établie, ni par elle, ni par son employeur, et le médecin traitant n'a pas non plus exigé la production des " feuillets jaunes ", indispensables, en cas d'accident, pour obtenir les soins et les médicaments gratuits prescrits par ce dernier. Or, après huit années de silence, l'intéressée vient pourtant solliciter le bénéfice d'une rente d'accident du travail.

Tout accident du travail doit être déclaré, même lorsque ses conséquences apparaissent tout d'abord bénignes. La cour de cassation a confirmé le caractère général et absolu de cette obligation dont l'inobservation est, en ce qui concerne l'employeur, sanctionnée par les peines prévues à l'article L. 504 du code du travail.

La victime, en ce qui la concerne, dispose d'un délai de deux ans pour faire elle-même la déclaration d'accident à la caisse. Ce délai paraît suffisant ; en effet, en permettre l'extension rendrait plus malaisées les constatations auxquelles la caisse de sécurité sociale est tenue de faire procéder dès qu'elle est avertie de l'accident et risquerait d'accroître les difficultés d'application de la loi et d'engendrer des abus.

En l'espèce, ce délai de deux ans étant largement dépassé, la réclamante se trouvait forclose. La seule solution à son problème pouvait consister à demander, sur le terrain du droit commun, réparation du préjudice subi en se fondant sur la faute de l'employeur qui n'avait pas procédé à la déclaration de l'accident en cause (ce droit a en effet été reconnu à la victime par la jurisprudence), mais le Médiateur, quant à lui, ne pouvait intervenir en sa faveur.

L'octroi des aides diverses dont les administrés sont en droit de bénéficier peut être, enfin, l'objet fréquent de litiges.

En matière de droits aux prestations familiales, les problèmes essentiels ont été soulevés :

- d'une part, par des travailleurs non salariés non agricoles qui s'étaient vus retirer le bénéfice de ces prestations en raison de l'insuffisance de leur activité professionnelle (affaires nos II-2183 et II-2938) ; cette question a fait l'objet d'une proposition de réforme de la part du Médiateur (n° STR. 76.21) ;

- d'autre part, par des administrés qui s'étonnaient de se voir refuser le bénéfice de ces allocations en raison du caractère de stricte territorialité de la législation sur les prestations familiales.

En effet, les prestations du régime français (allocations familiales, de salaire unique et prestations) ne peuvent être accordées qu'aux personnes résidant en France métropolitaine. Il ne peut être dérogé exceptionnellement à cette condition qu'en faveur des seuls travailleurs détachés par leur employeur dans un pays lié par une convention de sécurité sociale avec la France ; par contre, les travailleurs détachés dans un pays sans convention ne bénéficient pas des prestations familiales lorsque les familles les accompagnent dans le pays de détachement. Quant au Français qui travaille à l'étranger, sans être détaché, il ne peut prétendre qu'aux allocations servies dans le pays d'exercice de l'activité, si du moins celui-ci est lié par une convention de sécurité sociale avec la France ou accorde aux étrangers les mêmes droits qu'à ses nationaux en vertu de son droit interne (réclamation n° II-1923).

De même, lorsqu'un enfant effectue à l'étranger un séjour d'une durée supérieure à trois mois, est exigée la preuve que le séjour est rendu nécessaire par la nature des études poursuivies. Lorsque cette condition n'est pas remplie, les allocations familiales sont supprimées (affaire n° II-1784).

Les principales difficultés concernant l'aide aux handicapés sont résultées du retard intervenu dans la publication des textes d'application des mesures envisagées par la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 en faveur de cette catégorie d'administrés.

Il en est ainsi, par exemple, pour ce qui concerne la prise en charge, par les régimes d'assurance maladie, des frais d'hébergement et de traitement dans des établissements d'éducation spéciale et professionnelle, des enfants ou adolescents handicapés, ainsi que des frais du traitement concourant à cette éducation dispensée en dehors de ces établissements (affaire n° II-2899 ).

Le Médiateur souhaite que le bénéfice des dispositions prévues par cette loi puisse intervenir maintenant dans les meilleurs délais.

Une autre affaire (n° III-431) a permis de faire le point des aides susceptibles d'être versées aux handicapés :

Déficient visuel depuis sa naissance et invalide à 100 p. 100, l'intéressé se plaignait de ne percevoir que l'allocation de compensation.

La réglementation en matière d'aide sociale aux aveugles et grands infirmes, dont relève l'intéressé puisqu'il est titulaire de la carte d'invalidité prévue par cette réglementation, prévoit le versement d'une allocation principale assortie d'une majoration pour aide constante d'une tierce personne et d'une allocation de compensation réservée aux grands infirmes travailleurs. Mais le versement de ces allocations n'est toutefois pas fait automatiquement et est essentiellement fonction des ressources dont disposent les intéressés ; notamment, il est tenu compte de l'aide susceptible d'être apportée par les personnes tenues à la dette alimentaire envers le grand infirme. La situation des grands infirmes au regard de leurs ressources est appréciée par un magistrat et les allocations sont versées par l'intermédiaire de la direction départementale de l'action sanitaire et sociale.

En l'espèce, l'intéressé avait indiqué que la situation de ses parents s'était modifiée - ils avaient été mis à la retraite -, il s'agissait là d'un élément nouveau susceptible de justifier un réexamen de sa demande. Il a donc été conseillé à l'intéressé de s'adresser à la mairie de son domicile pour solliciter la révision de son dossier d'aide sociale.

En matière d'aide sociale, en dehors du problème de la récupération par l'Etat, après le décès du bénéficiaire, de certaines aides qui lui avaient été versées de son vivant (problème dont il sera question un peu plus loin), une affaire mérite d'être signalée, car elle illustre la collaboration qui s'établit dans bien des cas entre le Médiateur et les administrations concernées :

Le réclamant se plaignait de ce que les frais de séjour de sa mère, de nationalité portugaise, placée dans un centre héliomarin, se trouvent mis à sa charge au titre de l'obligation alimentaire. Il faisait valoir, en effet, qu'il n'avait jamais demandé cet hébergement et que c'était sur l'intervention d'une assistante sociale que sa mère avait été admise dans l'établissement en cause. Mais la prise en charge des frais était refusée par le service d'aide sociale du département concerné.

La position de l'administration ayant semblé très rigoureuse au Médiateur, ce dernier a demandé à l'inspection générale des affaires sociales de procéder à une enquête sur les conditions d'entrée au centre hélio-marin de la mère du réclamant et d'examiner les possibilités de lui accorder une remise de sa dette.

La situation examinée par l'inspection générale soulevait pour l'essentiel trois catégories de problèmes :

- une première difficulté provenait du fait qu'au moment de son hospitalisation (en 1972), l'intéressée, de nationalité portugaise, n'était titulaire que d'un récépissé provisoire de carte de séjour (datant de 1970). C'était d'ailleurs le motif qui, dans un premier temps, avait été invoqué pour lui refuser l'aide sociale.

Mais les dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 concernant l'entrée et le droit de séjour des étrangers, pourtant d'ordre public, peuvent ne pas être invoquées lorsque l'on se trouve, comme en l'espèce, en présence d'un cas social (personne très malade, illettrée, etc...). Aussi, après intervention de l'inspection générale, c'est une interprétation libérale des dispositions applicables qui, dans cette affaire, a pu prévaloir.

- se posait, ensuite, la question de la situation de la famille de l'intéressée au regard de l'aide sociale : il fallait savoir si, en l'espèce, l'octroi d'une telle aide était justifié.

L'enquête effectuée sur ce point a montré que la situation financière du réclamant - dont l'activité professionnelle était peu rentable et très aléatoire - était, en fait, des plus critiques. De plus, aucune autre ressource que ce revenu professionnel n'entrait dans le foyer. Quant à la mère de l'intéressé, elle ne bénéficiait d'aucune pension ni d'aucune aide particulière ;

- mais si, sans nul doute, la situation de cette famille justifiait l'octroi de l'aide sociale, restait le problème le plus difficile à régler : celui de la détermination de la collectivité publique à qui incombait la charge des dépenses en cause.

Les dépenses d'aide sociale au titre de l'hospitalisation et du séjour en maison de retraite sont partagées à raison de un tiers pour l'Etat, un tiers pour le département et un tiers pour la commune dans laquelle le demandeur a son domicile de secours. Ce domicile de secours s'acquiert notamment " par une résidence habituelle de trois mois postérieurement à la majorité... ".

La mère du réclamant était tombée malade et avait dû être hospitalisée (avant d'être dirigée vers le centre hélio-marin) alors qu'elle avait quitté - pour un séjour qui devait être bref - son département d'origine pour aller se recueillir sur la tombe d'un autre fils.

Bien que l'intéressée ait finalement du fait de sa maladie - séjourné plus de trois mois dans le département d'accueil, ce dernier refusait de prendre en charge les frais occasionnés par son séjour au centre hélio-marin. Craignant en effet que par son climat et la qualité de ses établissements, ce département n'attire de nombreux postulants et ne se voie obligé de supporter des dépenses très lourdes pour des personnes ayant toujours eu leur domicile dans une autre localité, le directeur de l'action sanitaire et sociale concerné avait décidé que les chefs d'établissement ne devraient plus désormais accepter de pensionnaires venant d'un autre département, à moins qu'ils ne soient porteurs d'une prise en charge illimitée de leur département d'origine. Cette décision était d'ailleurs conforme aux circulaires prises par le ministre de la santé en ce qui concerne l'aide sociale .

Le département d'origine, quant lui, considérant que le départ de l'intéressé était volontaire, avait bien donné son accord pour une prise en charge de trois mois, mais refusait une prise en charge illimitée.

Il était, en l'espèce, difficile de reprocher à une personne très âgée, malade, parlant à peine le français et pratiquement illettrée, d'avoir négligé d'accomplir les formalités nécessaires à sa prise en charge illimitée avant d'être admise au centre héliomarin. La faute initiale incombait en fait à cet établissement qui n'aurait pas dû accepter l'intéressée sans connaître les conditions de prise en charge de son séjour.

Mais il était encore plus difficile de considérer que la réclamante avait délibérément choisi de quitter son département d'origine pour aller élire domicile ailleurs. Aussi a-t-il finalement paru équitable de maintenir le domicile de secours de l'intéressée dans son département d'attache et de faire supporter les frais litigieux au service des personnes âgées de ce département. C'est la solution qui a été retenue (affaire n° II-861).

L'objet fréquent des litiges soumis au Médiateur et relatifs à l'aide sociale ou, plus encore, aux aides aux personnes âgées - et plus spécialement à l'allocation du fonds national de solidarité - concerne la possibilité pour l'Etat de récupérer, après le décès du bénéficiaire et sur sa succession, le montant des aides qui lui ont été versées de son vivant.

Très nombreux sont les héritiers qui, à la mort de l'intéressé, viennent faire part de leur surprise... (nos II-1635, III-186, III-503, etc.).

Mais il est arrivé, même, que ce soit la personne susceptible de recevoir l'aide en cause qui la refuse, pour ce motif :

La réclamante avait saisi le Médiateur pour demander que soient prises en compte, dans le calcul de sa retraite, les activités salariales qu'elle avait effectuées de 1941 à 1948 comme femme de ménage chez des particuliers. Mais l'administration concernée ne pouvait accéder à cette demande, l'intéressée n'étant pas en mesure d'apporter la preuve que des cotisations avaient été versées au titre de l'emploi en cause. De plus, aucune présomption sérieuse ne pouvait, en l'espèce, être prise en considération. Le refus de la caisse avait d'ailleurs été confirmé par des décisions juridictionnelles.

Le Médiateur a toutefois recherché, avec l'aide de l'administration, s'il n'existait aucune possibilité d'améliorer la situation de la réclamante ; celle-ci a notamment été invitée à demander l'allocation supplémentaire du fonds national de solidarité.

L'affaire a pris, alors, un tour un peu inattendu : le Médiateur a en effet été informé que la réclamante s'insurgeait contre les diverses demandes de renseignements - notamment sur le montant de ses ressources - que lui avait adressées l'administration pour permettre l'examen de ses droits éventuels : elle estimait que la caisse incriminée " n'avait pas à l'obliger à accepter l'allocation supplémentaire ".

En fait, la réclamante avait été informée par la caisse que, conformément aux dispositions du code de la sécurité sociale, lorsque la valeur des biens immobiliers est au moins égale à 100 000 F, il peut être pris une inscription hypothécaire destinée à garantir la récupération des sommes servies au titre de l'allocation du fonds national de solidarité sur la succession de son bénéficiaire, et elle ne voulait en aucun cas que l'attribution de cette allocation conduise l'administration à récupérer, après son décès, " sa petite propriété ", au détriment de la personne qui la soignerait pendant sa vieillesse. Le Médiateur, dès lors, ne pouvait que s'incliner (affaire n° II-2772).

Sur un plan général, le Médiateur ne pense pas, malgré la fréquence des réclamations sur ce thème, devoir remettre en cause la possibilité ainsi laissée à l'administration.

Les réclamations mettant directement en cause le département de la santé (demandes de création d'officines, d'ouverture d'établissements de soins, plaintes concernant l'organisation des études médicales ou pharmaceutiques, etc.) n'ont rien apporté de bien nouveau par rapport aux années antérieures.

II. - LES PRINCIPAUX DEFAUTS MIS EN LUMIERE PAR L'EXAMEN DE CES RECLAMATIONS

Dans toutes ces matières, les principales bavures qui ont été dénoncées, concernant le strict comportement des services, ont consisté, essentiellement, en des problèmes de mauvaise coordination de l'action administrative et, surtout, de lenteur de cette action.

Quelques exemples de mauvaise coordination de l'action des services valent la peine d'être retracés ici.

N° I-416. - Directeur général d'un laboratoire, l'intéressé avait, dans un premier temps, cotisé aux assurances sociales en tant que salarié. Mais un inspecteur de la sécurité sociale l'ayant considéré comme le " gérant de fait " de la société, il avait dû, à partir de 1946, payer des cotisations en tant que patron. Il avait d'ailleurs obtenu à ce titre son immatriculation à une caisse patronale de retraite ; mais cet organisme avait, en 1953, annulé rétroactivement son affiliation au motif qu'il n'était pas " le gérant légal " de la société, et lui avait remboursé les cotisations versées.

Victime de ces décisions contradictoires, le réclamant perdait non seulement le bénéfice d'une retraite complète de la sécurité sociale, mais aussi et surtout celui de la retraite des cadres pour laquelle il aurait normalement dû cotiser s'il avait gardé sa qualité de salarié. Dans la mesure où l'intéressé avait toujours travaillé régulièrement, cette situation était tout à fait anormale.

Saisie de l'affaire par le Médiateur, la direction régionale de la sécurité sociale a, au vu du rapport d'enquête établi par un agent de contrôle, demandé à la caisse primaire d'assurance maladie de se prononcer sur l'assujettissement du réclamant au régime général pour la période litigieuse. L'accord de la caisse a été notifié à l'intéressé lui-même, ainsi qu'à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales.

En même temps, il a été conseillé au réclamant de régulariser sa situation en rachetant ses cotisations assurance vieillesse, cette formule pouvant lui permettre de voir ses cotisations imputées sur les arrérages de sa pension et, également, de bénéficier de délais de paiement.

N° III-139. - Le réclamant, titulaire d'une pension de vieillesse établie en coordination avec le régime général et le régime artisanal, se plaignait de ne pouvoir obtenir la prise en compte, pour le calcul de sa retraite, de la période d'août 1939 à novembre 1942, pendant laquelle il était mobilisé.

La caisse du régime général rejetait la demande de l'intéressé au motif qu'il était artisan à la date de sa mobilisation ; la caisse de prévoyance artisanale fondait son refus sur le fait qu'il était devenu salarié juste après sa démobilisation.

En fait, la prise en compte de la période considérée (cette période représentant un supplément de cinquante-deux points de retraite) incombait à la caisse interprofessionnelle de prévoyance artisanale.

Une fois de plus, un administré se trouvait placé dans une situation bloquée alors que son affaire ne présentait en réalité aucune difficulté particulière.

Ce type de bavures est, en réalité, quasi inévitable ; tandis que le manque d'organisation qui apparaît dans l'organisation des services est sans doute plus grave, mais en même temps plus facilement remédiable.

Dans le rapport de 1975, le Médiateur avait dénoncé la pratique fréquemment suivie par les directeurs départementaux ou régionaux du travail en matière de transmission au parquet des procès-verbaux dressés par les inspecteurs du travail et susceptibles de motiver des poursuites pénales (cf. p. 120 et 121).

L'examen d'une réclamation n° II-1686 soumise en 1975 au Médiateur a mis en lumière l'insuffisance de la coordination de l'action administrative en ce domaine.

Dans l'affaire en cause, le réclamant se plaignait des poursuites que l'inspecteur du travail avait engagées à son encontre à la suite du licenciement de l'un de ses employés et au motif que ce licenciement " pour cause économique " n'avait pas été, comme l'exigeait la réglementation en vigueur, précédé de l'autorisation de cette administration.

Lorsque le Médiateur, saisi du litige, s'est informé auprès de l'inspection du travail, il lui a été répondu que dès lors que l'infraction constatée avait fait l'objet d'un procès-verbal, seuls les tribunaux pouvaient trancher le différend.

Il est apparu par la suite que les services ignoraient qu'au moment où ils faisaient cette réponse, l'intéressé avait été déjà condamné à une amende par un jugement rendu six mois auparavant par le tribunal correctionnel.

Déplorant le retard apporté par les parquets à informer le ministère du travail des décisions juridictionnelles rendues en la matière et constatant, par là même un manque évident de liaison entre les différents services concernés, le Médiateur a signalé cette lacune au ministre de la justice : ce dernier a assuré que la question a été examinée lors de la préparation du projet de loi relative à la prévention des accidents du travail.

Cette loi est maintenant publiée (dans le Journal officiel du 7 décembre 1976, sous le n° 76-1106). Dès lors devrait être établie une circulaire comportant de nouvelles instructions sur cette question. Le Médiateur suit le problème.

En réalité, le reproche essentiel fait, au travers des réclamations relatives au secteur social, aux administrations concernées, est, très certainement, la lenteur avec laquelle sont examinés et réglés les dossiers. Et il est certain qu'il ne sera pas égal à un retraité que sa pension soit liquidée quelques mois plus tôt ou plus tard - c'est en ce domaine que les intéressés ont le plus souvent l'impression que l'administration manque de diligence à leur égard ; les exemples pourraient être, ici, multipliés - ; qu'il ne sera pas non plus indifférent à une personne dont les ressources sont limitées de voir l'aide à laquelle elle peut prétendre lui être versée un peu plus tôt ou un peu plus tard ; qu'il est fondamental, pour un accidenté du travail, que la rente qui lui sera due soit déterminée au plus tôt...

Les causes des retards peuvent être diverses : complexité du dossier, surcharge des services, parfois aussi, il faut le reconnaître, manque de diligence du fonctionnaire chargé d'examiner la question. Dans la plupart des cas, l'action du Médiateur permet de " débloquer " l'affaire et, sinon de donner satisfaction à l'intéressé, du moins de l'informer de sa situation. Cette tâche constitue l'action quotidienne du Médiateur et toutes les constatations faites précédemment sont demeurées valables (Voir spécialement, le rapport de 1975, p. 39 et suivantes : L'Action quotidienne du Médiateur).

III. - LES RECOMMANDATIONS DU MEDIATEUR

Trois recommandations seront citées ici :

- Une recommandation était relative au délai de paiement imparti aux entreprises pour verser les cotisations de sécurité sociale qui leur incombent (affaire n° II-2446).

Le réclamant, petit entrepreneur de maçonnerie - il employait dix salariés - était en litige avec l'U. R. S. S. A. F. en raison d'un versement de cotisations réputé tardif et de l'application - abusive aux yeux de l'intéressé - de la majoration de retard de 10 p. 100.

L'intéressé avait fait son chèque de virement postal le samedi 13 octobre 1973 mais, au lieu de l'adresser directement à l'union de recouvrement avec son bordereau, il l'avait envoyé à son C. C. P. Il avait été débité le 17 octobre. Mais le compte de l'U. R. S. S. A. F., tenu par le C. C. P. d'une autre ville, ne fut crédité que le 18 (en fait, dans toute la procédure, l'U. R. S. S. A. F. indiquera qu'elle avait été créditée le 17).

L'intéressé refusant de payer les pénalités, l'administration engagea une procédure contentieuse : le réclamant se vit, le 6 janvier 1975, assigné devant le tribunal d'instance ; puis le directeur de l'U. R. S. S. A. F. rejeta sa demande de remise de pénalité, formulée le 28 janvier 1975.

Après un examen approfondi de l'affaire, le Médiateur estima que la décision de l'U. R. S. S. A. F. était en contradiction avec les termes mêmes d'une lettre-circulaire du 5 avril 1968 du ministre des affaires sociales relative à la détermination de la date de versement des cotisations. Cette circulaire indiquait, en effet, que " compte tenu des délais d'exécution entre deux centres de chèques postaux différents, doit être considéré comme effectué dans le délai légal de paiement de l'impôt, le versement du contribuable qui a été porté au crédit du compte du percepteur le surlendemain de la date limite de paiement".

Le président de l'U.R.S.S.A.F. rétorqua que cette lettre-circulaire n'avait pas force de loi et rappela que, conformément au décret n° 72-230 du 24 mars 1972, " les cotisations devaient être versées dans les quinze premiers jours du mois ".

Diverses interventions du Médiateur amenèrent cependant l'U. R. S. S. A. F. à abandonner les pénalités précédemment exigées, laissant toutefois les frais de procédure à la charge du réclamant.

Mais le Médiateur, estimant que ce compromis ne pouvait constituer une solution acceptable, adressa une recommandation au directeur de l'U. R. S. S. A. F., lui demandant d'indemniser l'intéressé pour le préjudice qui lui avait été causé, du fait notamment de son exclusion - consécutive à cette affaire - des marchés publics.

Cette recommandation fut rejetée. Mais le Médiateur, ne pouvant laisser subsister une divergence d'appréciation sur le caractère juridique de la lettre circulaire évoquée - ambiguïté sur laquelle le directeur de l'U.R.S.S.A.F. se fondait pour s'opposer à l'avis du Médiateur - celui-ci s'est alors adressé au Conseil d'Etat en lui demandant de procéder à une étude tendant à déterminer la nature juridique de ce texte, ainsi que d'une lettre ministérielle du 27 octobre 1975 destinée au directeur de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale, traitant d'un même objet.

Les conclusions de cette étude devraient permettre au Médiateur d'orienter de manière efficace sa démarche auprès des pouvoirs publics, en vue de porter remède à la situation dénoncée.

Le Médiateur a en outre proposé une réforme (n° STR 76-29) susceptible d'éviter à l'avenir ce type de litiges.

- Une autre recommandation, destinée à réparer les fautes commises par les responsables d'une caisse de sécurité sociale et d'un hôpital psychiatrique (affaire n° 771) a été déjà longuement analysée dans le rapport de synthèse, comme affaire témoin (P. 5 et 6).

La dernière recommandation, enfin, tend à réparer le préjudice subi par une réclamante qui, admissible à un concours, n'a pu se présenter aux épreuves orales, sa convocation ne lui étant pas parvenue en temps utile (n° II. 229).

Admissible aux épreuves écrites du concours de recrutement des inspecteurs de la sécurité sociale, ouvert pour 1974, l'intéressée n'a pu participer aux épreuves orales d'admission, sa convocation, bien qu'envoyée en temps utile, lui étant parvenue après la date fixée pour les oraux - et ce, en raison sans doute des perturbations engendrées par une grève des postes et télécommunications de peu antérieure à l'affaire.

En saisissant le Médiateur, la candidate espérait pouvoir conserver le bénéfice de l'admissibilité pour le concours de l'année suivante. Mais une telle solution n'était pas envisageable.

En effet, les mérites des différents candidats à un même concours ne peuvent être appréciés que d'après des épreuves subies dans des conditions rigoureusement identiques et, notamment, sur des sujets communs choisis par un jury unique, celui-là même qui est par ailleurs seul qualifié pour faire subir les épreuves orales aux candidats dont il a prononcé l'admissibilité. De nature impérative, ces règles, qui visent à assurer une stricte égalité entre les candidats, ne peuvent faire l'objet d'aucune dérogation ; le juge administratif veille attentivement à leur application et en sanctionne strictement la violation.

Cela étant acquis, il a cependant semblé au Médiateur qu'une autre issue au litige pouvait être trouvée, grâce au versement à l'intéressée d'une indemnité destinée à réparer le préjudice qu'elle avait subi. Il a estimé, en effet, que la responsabilité de l'administration pouvait être engagée dans cette affaire, et ce, du fait que les perturbations dans la distribution du courrier étaient, pour l'époque où le litige est né, parfaitement prévisibles.

Le Médiateur a adressé au ministre du travail, compétent en l'espèce, une recommandation tendant à l'octroi d'une indemnité en faveur de la réclamante. La toute récente réponse du ministre conteste l'argumentation du Médiateur ; elle fait actuellement l'objet d'une étude.

IV. - LES PROPOSITIONS DE REFORME

Les plus importantes ont été les quatre synergies - déjà signalées - concernant tout spécialement le secteur social, mais dont la mise en oeuvre dépend de l'ensemble des départements ministériels.

Deux - " l'accès à la retraite et ses difficultés " et l'" application du principe de non-rétroactivité de la règle de droit en matière de législation sociale " - ont été analysées ci-avant dans ce rapport ; une troisième tend à la " mise en oeuvre de l'harmonisation des divers régimes de sécurité sociale " ; la dernière, enfin, à la " proratisation en matière de pensions de vieillesse et de pensions complémentaires dans les régimes spéciaux ".

- La mise en oeuvre de l'harmonisation des régimes de sécurité sociale ; examen de quelques dysharmonies subsistantes ou nouvellement introduites (syn. n° 4).

Cette proposition a été adressée : au Premier Ministre, au ministre du travail, au ministre de l'agriculture, au ministre du commerce et de l'artisanat, au ministre de l'industrie et de la recherche, au secrétaire d'Etat aux transports, au ministre de la justice, au ministre de l'économie et des finances.

La loi n° 74-1094 du 24 décembre 1974 dispose qu'un système de protection sociale commun à tous les Français sera institué, au plus tard le 11 janvier 1978, dans les trois branches : assurance maladie-maternité, vieillesse, prestations familiales. Cet objectif doit être atteint par l'harmonisation progressive des régimes de base obligatoires légaux, et par l'admission au bénéfice d'une protection sociale de tous les Français non encore affiliés à l'un de ces régimes.

Le Médiateur n'a pas eu connaissance du calendrier qui a pu être établi pour réaliser cette harmonisation. Il faut remarquer, d'ailleurs, que la loi ne comporte de dispositions planificatrices qu'en ce qui concerne l'appareil de mesures financières qui doit sous-tendre le processus d'harmonisation.

Le Médiateur ne peut donc que signaler, au gré des réclamations qui lui parviennent, les dysharmonies que l'on peut encore constater dans notre système de sécurité sociale et que l'équité, compte tenu du bref délai imparti par le législateur à l'opération d'harmonisation, commanderait de faire disparaître au plus vite.

Ces dysharmonies sont d'ailleurs de plusieurs espèces :

1° Les plus explicables, sinon les plus justifiables, se rencontrent dans le domaine légalement assigné à l'harmonisation : les régimes de base obligatoire légaux. Il y aura disparité, par exemple, entre le traitement d'une même situation dans le régime général, et dans le ou les régimes applicables aux travailleurs non salariés ;

2° Mais il existe aussi des dysharmonies que l'on peut appeler " de répercussion " : lorsqu'un avantage nouveau, par exemple, est accordé aux ressortissants d'un régime de base obligatoire légal, sans être étendu aux tributaires des régimes " spéciaux ", ne réalise-t-on pas par là une remise en cause des avantages acquis par ces derniers régimes, opération pourtant expressément prohibée par la loi de 1974 ?

3° Enfin, bien que le champ de l'harmonisation ait été limité, comme on l'a rappelé, aux régimes de base (art. 1, alinéa 2, de la loi), il ne paraît pas possible de laisser à l'écart les disparités constatées en matière de droits au bénéfice d'un régime complémentaire de retraite - surtout si l'on remarque que les " régimes spéciaux " à certaines catégories socio-professionnelles sont à eux-mêmes leur propre régime complémentaire, et que dans certains régimes de base les risques d'invalidité et de décès n'ont pu être couverts que par l'institution d'un régime complémentaire - qui est en réalité un régime de base...

C'est pour cette dernière raison qu'en dépit du silence gardé par le législateur de 1974 sur les risques invalidité et décès, il ne paraît pas non plus possible d'ignorer les problèmes que pose, d'un régime à l'autre, la couverture de ces risques.

Le rapport du Médiateur pour 1975 (p. 108 à 115) traite d'un certain nombre de ces dysharmonies. La présente synergie les a reprise, en leur ajoutant d'autres situations, qu'il est apparu nécessaire d'englober dans l'ensemble des problèmes posés par la mise en oeuvre de l'harmonisation.

Chaque dysharmonie constatée par le Médiateur a donné lieu à des propositions concrètes. Mais il semble prématuré d'en faire état ici : la question d'ensemble devra en effet, lorsqu'elle aura suffisamment évolué, faire l'objet d'un développement dans un rapport ultérieur.

Les mêmes observations valent en ce qui concerne la synergie n° 6, relative à la " proratisation " en matière de pensions de vieillesse et de pensions complémentaires dans les régimes spéciaux, l'étude de ces deux dernières synergies ne pouvant d'ailleurs être dissociée.

La " proratisation " se définit comme la prise en charge, par chaque organisme gestionnaire d'un régime de protection sociale, de la part de la pension de vieillesse correspondant aux cotisations versées par un assuré de ce régime, et calculée au prorata de son temps d'affiliation.

Pour les régimes de base obligatoires légaux, cette proratisation est assurée, depuis la loi n° 75-3 du 3 janvier 1975, dans le régime général de la sécurité sociale et dans le régime applicable aux salariés agricoles. Le Médiateur estime sa mise en oeuvre souhaitable aussi bien pour tous les régimes de base obligatoires légaux qu'à l'intérieur de chaque régime spécial.

Les propositions ponctuelles.

Un certain nombre d'entre elles ont déjà été signalées dans le cours de ce rapport ; il n'en sera plus question sous cette rubrique.

- Proposition n° STR 76-23 : relative aux majorations des pensions de retraite au titre des enfants issus du ménage ou élevés par le titulaire.

L'article L. 338 du code de la sécurité sociale prévoit que la pension de retraite est augmentée d'un dixième pour tout assuré de l'un ou de l'autre sexe ayant eu au moins trois enfants. Il est précisé au deuxième alinéa du même article qu'" ouvrent également droit à cette bonification les enfants élevés dans les conditions prévues à l'article L. 327, deuxième alinéa ", c'est-à-dire, selon ce dernier texte, " ayant été, pendant au moins neuf ans avant leur seizième anniversaire, élevés par le titulaire de la pension et à sa charge ou à celle de son conjoint ".

Ainsi, en ce qui concerne ses propres enfants, l'assuré peut prétendre à la majoration d'un dixième dès le moment où trois de ceux-ci sont nés viables. Mais s'il s'agit d'enfants adoptés ou à charge, par suite, notamment, du mariage avec une veuve mère de famille, une condition est exigée : à savoir que ces enfants aient été élevés par le titulaire de la pension pendant au moins neuf ans avant leur seizième anniversaire. C'est dire qu'il faut, en pratique, que l'adoption ou le mariage avec la veuve mère de famille intervienne alors que trois enfants ont encore moins de sept ans.

Cette législation soulève deux critiques :

- la première concerne la limite de seize ans. En effet, il est exigé des jeunes, au moment de l'entrée dans la vie active, une formation de plus en plus complète, laquelle implique que ceux-ci restent à la charge de leur famille pendant de nombreuses années encore, au-delà de leur seizième anniversaire.

Il a d'ailleurs déjà été tenu compte de cet état de choses dans la partie " prestations familiales " du code de la sécurité sociale. Ainsi, selon les dispositions de l'article L. 527 dudit code et de ses textes d'application, les enfants sont considérés comme étant à charge et ouvrent droit au versement des allocations familiales :

a) Tant que dure l'obligation scolaire, et six mois au-delà s'ils ne sont pas salariés, ou un an au-delà s'ils recherchent une première activité professionnelle et sont inscrits comme demandeurs d'emploi à l'agence nationale pour l'emploi ;

b) Jusqu'à l'âge de dix-huit ans s'ils sont placés en apprentissage ;

c) Jusqu'à l'âge de vingt ans s'ils poursuivent des études ou s'ils sont, par suite d'infirmité ou de maladie chronique, dans l'impossibilité constatée de se livrer à une activité professionnelle, ou s'ils ouvrent droit à l'allocation d'éducation spéciale.

Il serait donc plus conforme à la réalité économique et sociale de remplacer la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 327 du code de la sécurité sociale par le texte suivant : " ouvrent droit également à cette bonification les enfants ayant été, pendant au moins neuf ans avant leur seizième anniversaire ou avant l'âge où ils ont cessé d'être à charge au sens de l'article L. 527, élevés par le titulaire de la pension et à sa charge ou à celle de son conjoint ".

- la deuxième critique montre combien il est inéquitable que soit refusée la majoration d'un dixième dans certains cas illustrés par l'exemple suivant :

Le titulaire d'une pension ayant adopté cinq enfants (ou ayant épousé une veuve mère de cinq enfants) âgés respectivement de trois ans, cinq ans, huit ans, dix ans, douze ans, n'a droit à aucune majoration, puisque deux seulement de ces enfants (les deux premiers) ont été à charge pendant neuf ans avant leur seizième anniversaire, le temps total (8 + 6 + 4 = 18 ans) pendant lequel les trois autres ont été à charge avant leur seizième anniversaire ne pouvant être pris en compte. Il aurait, par contre, bénéficié de la majoration du dixième s'il avait adopté trois enfants (ou épousé une veuve mère de trois enfants) âgés de moins de sept ans.

Une situation semblable apparaît également lorsque plusieurs enfants à charge décèdent en bas âge.

Pour permettre, dans de tels cas, l'octroi de la majoration d'un dixième, il faudrait compléter le deuxième alinéa de l'article 327 du code de la sécurité sociale par la disposition suivante : " lorsque cette condition de durée n'est pas remplie pour plusieurs enfants, ceux-ci comptent pour autant d'unités que le nombre neuf est contenu de fois dans le total des années pendant lesquelles ces enfants ont été à charge ".

Il est proposé en conséquence :

1° D'étendre aux pensions de retraite les dispositions de l'article 527 du code de la sécurité sociale, conformément aux dispositions de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires. Cette harmonisation permettrait que, pour les polypensionnés, les droits nés de charges d'enfants soient appréciés différemment selon les régimes " de base " ;

2° De compléter comme suit la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 327 du code de la sécurité sociale : " Ouvrent droit également à cette bonification les enfants ayant été, pendant au moins neuf ans avant leur seizième anniversaire, ou avant l'âge où ils ont cessé d'être à charge au sens de l'article L .527, élevés par le titulaire de la pension et à sa charge ou à celle de son conjoint ; lorsque cette condition de durée n'est pas remplie par plusieurs enfants, ceux-ci comptent pour autant d'unités que le nombre neuf est contenu de fois dans le total des années pendant lesquelles ces enfants ont été à charge ".

Cette proposition est à rapprocher de plusieurs autres sur le même thème et qui seront analysés plus loin [cf. n° FIN 75-13, n° FIN 76-15, n° FIN 76-16 ].

- Proposition n° STR 76-24 : modalités de l'exonération des cotisations patronales pour les personnes seules, obligées, pour accomplir les actes ordinaires de la vie, à l'assistance d'une tierce personne.

Les personnes seules, bénéficiaires d'un avantage de vieillesse servi en application du code de la sécurité sociale, et se trouvant dans l'obligation, pour accomplir les actes ordinaires de la vie, d'avoir recours à l'assistance d'une tierce personne salariée, peuvent être exonérées, sur leur demande, du versement des cotisations patronales d'assurance maladie, maternité, invalidité, décès, vieillesse, accidents du travail, et des allocations familiales, au titre de l'emploi de ladite personne.

Ces dispositions sont également applicables aux bénéficiaires de l'aide sociale, aux personnes âgées et aux grands infirmes vivant seuls, titulaires de la majoration pour tierce personne.

Les avantages de vieillesse ouvrant droit à l'exonération ont fait l'objet d'une énumération précise - et limitative - dans le code de la sécurité sociale.

Le Médiateur a été saisi d'une affaire (n° III-563) dans laquelle la réclamante se plaignait de ne pouvoir bénéficier de cette possibilité parce qu'elle n'était titulaire que d'une rente viagère constituée à titre onéreux auprès de la Caisse des dépôts - cet avantage ne figure pas en effet sur la liste susvisée.

Ainsi, effectivement malade, et effectivement dépourvue de ressources, l'intéressée ne peut jouir des aménagements que d'autres ont eu meilleure chance d'obtenir, parce qu'ils faisaient partie du système d'aides aux personnes âgées réglé par les pouvoirs publics. De telles situations blessent évidemment l'équité. Elles choquent aussi la logique, car comment admettre, en des temps où l'on promet à tous les Français une protection sociale " de droit ", et qui ne soit pas une aumône, que de tels cas marginaux puissent être encore tolérés ?

Tout en étant conscient de la difficulté du problème, le Médiateur estime qu'il convient d'ajouter à la liste des personnes énumérables au titre des prestations diverses qu'elles perçoivent de notre système entier de protection sociale, les personnes dont les ressources n'atteindraient pas un minimum fixé annuellement. Le Médiateur ne peut naturellement que laisser au ministère du, travail, la détermination de ce plafond,

- Proposition n° STR 76-30 : forme d'aide aux personnes dont l'état de santé nécessite l'assistance d'une tierce personne (dossiers I-1534, I-1617, III-563, III-1998, II-2839, et la proposition n° STR 76-24 qui vient d'être analysée).

L'état actuel de la réglementation ne permet pas de tenir compte de façon graduée de la diversité des situations des personnes âgées et impotentes ou handicapées actives, qui ont besoin de l'assistance d'une tierce personne pour l'accomplissement quotidien des actes élémentaires de la vie.

Si, du fait de leur état physique, elles entrent dans la catégorie prévue à l'article L. 130-3° du code de la sécurité sociale, les personnes âgées sont soumises selon l'origine de leur incapacité physique à trois régimes différents :

- accidentées du travail : elles peuvent faire valoir leur droit à tout moment à partir de l'attribution de la rente, même après la soixante-cinquième année ;

- titulaires d'une pension de vieillesse révisée pour inaptitude au travail (article L. 345) et titulaires d'une pension de vieillesse attribuée pour inaptitude au travail (article L. 332) : elles peuvent bénéficier du supplément de la pension à condition de le demander, soit au moment de la liquidation de leur droit, soit postérieurement, mais avant le soixante-cinquième anniversaire ;

- dans tous les autres cas : aucun droit à majoration ne leur est accordé.

Dans l'état actuel des textes, l'alternative est brutale :

- ou bien, on se trouve dans les deux premiers groupes ci-dessus, et pour le second, la demande est présentée avant l'âge de soixante-cinq ans : la majoration est de droit, le handicapé ne supporte pas les charges sociales afférentes au salaire de la tierce personne et les coûts correspondants ne s'imputent pas sur ses revenus ;

- ou bien ces conditions ne sont pas remplies et l'on ne peut prétendre à rien, c'est-à-dire ni à la majoration pour tierce personne, ni à l'exonération des charges sociales patronales pour l'aide salariée, ni à la déduction du revenu imposable des frais exposés pour survivre hors du milieu hospitalier, ou pour travailler de façon à n'être pas un assisté à la charge de la collectivité.

L'expérience montre que cette dichotomie ne tient pas un compte suffisant de la diversité des situations individuelles. Certes, on peut, à juste titre, considérer que toute extension des aides aux tierces personnes, quelles qu'en soient les modalités, est coûteuse.

Mais il faut déduire du coût supplémentaire l'intérêt évident des finances publiques :

- de favoriser la réinsertion économique et sociale des handicapés qui avec l'aide d'une tierce personne peut redevenir actifs ;

- d'assurer le succès de la politique du ministère de la santé en matière de maintien à domicile des personnes âgées et de la sectorisation de la médecine : le coût annuel du traitement de ces handicapés en milieu hospitalier est, en effet, très supérieur aux aides qui pourraient leur être accordées.

Le fait que la charge ne pèserait pas sur les mêmes budgets ne dispense pas d'examiner un problème qui en intéresse plusieurs et affecte, en définitive, les mêmes finances publiques.

Les critères d'attribution des différentes aides doivent être objectifs. Ils peuvent s'inspirer de deux préoccupations :

- le besoin ; il peut être apprécié objectivement selon les critères retenus par le droit et la jurisprudence du régime général de sécurité sociale des travailleurs salariés ;

- les ressources, dont la prise en considération doit permettre de sélectionner les modalités de l'aide.

Sur ces bases, trois mesures peuvent être envisagées pour aider - de façon graduée - les personnes âgées handicapées :

- au-dessous du plafond de ressources, l'allocation " tierce personne " qui couvre le salaire de " l'aide ménagère " et les cotisations de sécurité sociale et n'ampute pas les revenus ;

- dans une plage intermédiaire de revenus, l'allocation est refusée, mais le vieillard handicapé est dispensé du paiement des charges sociales sur le salaire dans certaines limites ;

- dans la tranche supérieure et en dessous d'un certain plafond de revenus, le vieillard handicapé paie salaires et charges sociales, mais il est autorisé à déduire de ses revenus imposables tout ou partie des frais exposés. Une telle déduction peut elle-même être plafonnée mais il conviendrait alors, pour que l'objectif d'équité ne risque pas d'être perdu de vue, que ce plafonnement - aussi bien que le plafond de ressources - soit exprimé dans des termes assurant l'ajustement automatique, c'est-à-dire en nombre d'heures de S.M.I.C. par année.

En ce qui concerne les handicapés actifs (et selon les mêmes critères objectifs du régime général de la sécurité sociale), ils pourraient être admis à déduire de leurs revenus professionnels la rémunération et les charges sociales de la tierce personne reconnue nécessaire à l'exercice de leur activité.

Ce système souple et gradué permettrait d'éviter les iniquités de la réglementation actuelle et d'assurer une plus juste adaptation des aides de la collectivité aux besoins d'une catégorie sociale à l'égard de laquelle a été posé le principe d'une solidarité nationale.

Proposition n° STR 76-21 : attribution des prestations familiales à des travailleurs non salariés non agricoles ayant une activité professionnelle insuffisante.

L'article 1er du décret du 10 décembre 1946, modifié par le décret du 17 avril 1972 dispose : " Est considérée comme exerçant une activité professionnelle toute personne qui consacre à cette activité le temps moyen qu'elle requiert et en tire des moyens normaux d'existence ".

Depuis le 1er janvier 1957, est considéré comme tirant des moyens normaux d'existence de son activité, le travailleur non salarié dont le revenu professionnel atteint au moins le montant minimum donnant lieu à application de la cotisation d'allocations familiales des employeurs et travailleurs indépendants.

Les employeurs et travailleurs indépendants justifiant d'un revenu professionnel inférieur au salaire annuel de base servant au calcul des prestations familiales sont exonérés de leur cotisation. Il en résulte que, ne cotisant pas en raison de la faiblesse de leurs revenus professionnels, ils ne peuvent bénéficier des prestations familiales.

or, en raison des circonstances économiques actuelles, nombreux sont les employeurs et travailleurs indépendants qui ont des revenus professionnels inférieurs au minimum fixé par l'arrêté du 17 juillet 1969 (douze fois le salaire de base servant au calcul des prestations familiales). Il en résulte pour eux que c'est au moment où ils éprouvent les plus graves difficultés financières que les prestations familiales leur sont supprimées.

Certes, l'article 16 de la loi n° 75-574 du 4 juillet 1975 dispose : " Les trois premiers alinéas de l'article L. 513 dû code de la sécurité sociale sont abrogés ", ce qui conduit à la suppression de toute référence à l'activité professionnelle pour l'attribution des prestations familiales.

Toutefois, l'article 20 de la même loi a prévu que " les dispositions du présent titre (et parmi elles l'article 16 mentionné ci-dessus) entreront en application à une date qui sera fixée par décret en Conseil d'Etat et au plus tard le 1er janvier 1978 ".

Le Médiateur estime souhaitable que, par anticipation sur l'ensemble des mesures d'harmonisation et à défaut de la publication du décret qui doit fixer la date d'effet de cet ensemble, un texte spécial mette fin rapidement au traitement discriminatoire des travailleurs non salariés que la crise atteint autant que les cotisants du régime général.

- Proposition n° STR 76-22 : conditions de placement dans les établissements psychiatriques (affaire n° 771, déjà citée ci-avant).

Dans l'affaire citée en référence, le réclamant avait fait l'objet, sur suggestion du médecin en chef de l'hôpital psychiatrique où il était interné, d'une expertise médicale ordonnée par le tribunal. Or aucune mention de cette expertise ne figurait sur le registre tenu en application des articles L. 337 et L. 343 du code de la santé publique, sur lequel doivent être consignés non seulement le certificat médical d'admission mais également " tous ceux que le médecin de l'établissement devra adresser à l'autorité " et " les changements survenus dans l'état mental de chaque malade ". Si une telle formule englobe implicitement un rapport d'expertise, l'absence d'une obligation explicite peut avoir pour effet, comme en l'espèce, de permettre certaines négligences.

Si l'on ajoute que, dans l'affaire en cause, le médecin-chef de l'hôpital psychiatrique n'a jamais eu connaissance du résultat de l'expertise qui devait décider de la sortie du malade de l'hôpital, on saisit l'importance du problème sur le plan de la protection de l'individu.

L'intéressé s'est évadé de l'hôpital psychiatrique le 10 septembre 1967. L'arrêté préfectoral ordonnant sa sortie est intervenu le 24 mai 1971 sans qu'aucun examen médical ait constaté le caractère non dangereux du malade, contrevenant par là même à l'article L. 348 qui dispose que le préfet " statuera sans délai " lorsque " les médecins déclarent... que la sortie peut être ordonnée ".

En procédant à la régularisation de la situation d'un interné évadé qui n'avait pas fait parler de lui pendant un certain laps de temps, le préfet paraît avoir suivi une pratique assez générale mais qui n'en est pas moins illégale.

Le Médiateur ne méconnaît cependant pas l'intérêt qui s'attache - tant sur le plan de la liberté des individus que sur celui de la gestion des biens des internés - à ce qu'une régularisation intervienne ; il n'ignore pas non plus combien il serait peu réaliste d'exiger d'un évadé - à supposer que son adresse soit connue - qu'il se soumette à un contrôle médical qui pourrait avoir pour effet de le faire réintégrer l'hôpital psychiatrique.

A l'heure actuelle cependant, la formule pratiquée a le double inconvénient de rendre officiellement sa liberté à un malade qui peut être encore dangereux et de contrevenir directement à la loi. Sur le second point au moins, une solution doit pouvoir être apportée.

Au vu du dossier ci-dessus visé, le Médiateur a estimé souhaitable d'apporter quelques modifications à la rédaction des dispositions - régissant la question - du code de la santé publique :

- en incluant, dans le premier alinéa de l'article L. 337, une adjonction qui pourrait être ainsi rédigée : " 3° Tous les documents (rapports d'expertise ou autres) ayant trait à l'état mental du malade " ;

- en adjoignant à l'article L. 348 un second alinéa qui pourrait être conçu de la manière suivante : " Si un malade évadé depuis plus de ... ans n'a pas porté atteinte à la sécurité des personnes ni troublé l'ordre public, le préfet prononcera l'arrêté de sortie après avis d'une commission composée de ... qui appréciera l'opportunité de cette mesure compte tenu des antécédents du malade ".

Le Médiateur pense qu'une étude préalable doit être menée par les autorités administratives et médicales compétentes en vue de déterminer l'importance du délai au-delà duquel il est possible de conclure au caractère non dangereux du malade et la composition qu'il convient de donner à ladite commission. Ainsi pourra-t-on pallier, au moins en partie et dans certains cas, l'inconvénient signalé plus haut qui consiste à rendre sa liberté à un malade sans contrôle médical préalable.

Action des services économiques et financiers.

En 1976 comme les années précédentes, les réclamations mettant en cause l'action des services économiques et financiers ont constitué l'un des principaux domaines d'activité du Médiateur. Les thèmes de mécontentement n'ont guère varié, qu'il s'agisse de problèmes de fond (mise en cause de la législation) ou de plaintes relatives au comportement des services (lenteur, désinvolture ... ). Mais il est parfois difficile de distinguer problèmes de fond et problèmes de forme, les uns et les autres étant fréquemment liés : c'est le cas chaque fois que le litige résulte de l'application erronée ou trop stricte - ou jugée telle par l'administré - de la réglementation en vigueur.

I. - LES PRINCIPAUX PROBLEMES MIS EN LUMIERE PAR L'EXAMEN DES RECLAMATIONS

Seront essentiellement traités cette année des problèmes de fiscalité, les autres secteurs d'activité des services économiques et financiers n'ayant donné lieu qu'à peu d'affaires notables - mis à part le cadastre, dont le Médiateur aura l'occasion de reparler ci-après ; la législation économique et la réglementation des prix ont aussi été à l'origine de plusieurs réclamations mais qui, dans la plupart des cas, n'étaient pas justifiées.

Une première source de litiges réside dans les problèmes d'établissement de l'impôt.

Les difficultés de cerner et déterminer exactement le revenu imposable en constituent le premier volet.

Plusieurs réclamations ont en effet porté sur le caractère imposable ou non de certains revenus et sur la possibilité de déduire certains éléments du revenu imposable (n° II-2205 : possibilité de déduire, au titre des frais professionnels, les frais d'études qui ont été engagés par un salarié en vue d'acquérir une nouvelle qualification professionnelle ; n° II-1567 : les pensions mixtes servies par l'Etat ne sont soumises à l'impôt que pour la fraction correspondant à la durée des services, la fraction invalidité étant exonérée).

Ce n'est pas toujours le régime fiscal applicable qui se trouve mis en cause ; la contestation peut aussi porter sur l'appréciation faite par les services de la nature de tel élément du patrimoine du contribuable.

Ainsi, dans l'affaire n° II-219, le réclamant, gérant d'affaires, se plaignait de ce que les emprunts qu'il avait dû faire aient été considérés comme des revenus imposables ; sa plainte a été rejetée.

L'instruction d'une affaire analogue (n° II-2409) a au contraire abouti à un résultat positif : à la suite d'une vérification de comptabilité, la réclamante avait fait l'objet de redressements fiscaux dont elle contestait le bien-fondé : elle faisait valoir en effet que les sommes qui avaient été réintégrées dans les résultats de son entreprise ne constituaient pas des commissions, comme le prétendait le contrôleur des impôts, mais sa part dans la communauté (dissoute par divorce) que son ex-époux lui remboursait selon un échéancier sur lequel ils s'étaient mis d'accord, Après enquête, il est apparu que les dires de la plaignante étaient exacts et l'administration fiscale a prononcé le dégrèvement de l'impôt supplémentaire correspondant aux réintégrations litigieuses.

Le calcul du revenu imposable peut également être à l'origine de certaines réclamations : c'est le cas, par exemple, lorsque ce revenu est évalué forfaitairement (le réclamant conteste alors les bases retenues pour l'établissement du forfait : ainsi, dans l'affaire n° II-1188, l'intéressé affirmait que les éléments retenus pour les années 1970, 1971 et 1972 avaient été acquis par lui antérieurement à la période litigieuse) ou lorsque le contribuable se voit taxé d'après les éléments de son train de vie (n° I-273).

En ce qui concerne l'établissement de l'impôt, les contestations portent enfin fréquemment sur l'application du principe de l'annualité de l'impôt et les conséquences qui en résultent pour la détermination de la personne imposable et l'exercice de rattachement des revenus.

Les contrôles fiscaux sont à l'origine d'un assez grand nombre de plaintes auprès du Médiateur. Dans ces affaires, les réclamants mettent en cause :

- soit les conditions mêmes dans lesquelles s'est déroulé le contrôle (n° II-323 : l'intéressé, mettant en cause le comportement des agents vérificateurs, affirmait que ceux-ci s'étaient introduits chez lui sans présenter de mandat de perquisition, et avaient fouillé sa propre maison et celle de sa mère, âgée de quatre-vingts ans ; l'enquête a révélé que la vérification s'était déroulée dans des conditions normales, en présence d'un officier de police judiciaire) ;

- soit, bien sûr, les suppléments d'impôt qu'ils se sont vu réclamer à la suite de ces contrôles.

Il faut reconnaître que dans ces affaires, les intéressés ne sont pas toujours d'une bonne foi évidente ; les réclamations ne peuvent, alors, qu'être rejetées. Certaines cependant ont pu, après intervention du Médiateur, être reconnues justifiées, au moins partiellement (nos I-484 et I-1549) et les intéressés ont obtenu les dégrèvements correspondants.

Dans un cas (n° II-2095), le redressement d'impôt décidé à l'encontre d'un réclamant, bien que justifié en droit, s'est révélé être irrégulier : en effet, alors que le redressement portait sur l'impôt sur le revenu établi au titre de l'année 1969, le contribuable n'en avait eu connaissance qu'au début de l'année 1975, soit après l'expiration du délai légal de " répétition ". En fait, la notification du redressement avait bien été effectuée à temps, mais, en raison d'une erreur dans l'adresse du destinataire, elle n'était pas parvenue dans les délais. Les services ont reconnu que le dégrèvement d'imposition devait être prononcé. La forclusion avait, ici, joué en faveur de l'administré.

Certains problèmes, plus particuliers à différents impôts et taxes ont, cette année encore, été mis en lumière par l'instruction des dossiers.

Rien de bien marquant, pour 1976, n'est à noter pour ce qui concerne la taxe à la valeur ajoutée ou la taxation des plus-values, étant mis à part, pour cette dernière taxe, les problèmes posés par le régime fiscal des plus-values réalisées à la suite d'une expropriation pour cause d'utilité publique : cette question, bien que de nature fiscale, sera traitée sous la rubrique relative aux services de l'équipement, car elle ne peut être dissociée du problème d'ensemble que constitue pour l'administré l'expropriation pour cause d'utilité publique (cf. " synergie n° 1 " déjà citée).

Les impôts locaux ont, par contre, été la source de nombreuses réclamations soumises au Médiateur. La fréquence des réclamations sur ce thème s'explique, bien sûr, par la réforme d'ensemble de la fiscalité directe locale, intervenue au début de l'année 1974 ; elles portaient, pour la plupart, sur les modalités d'application de cette réforme.

Ainsi de nombreux réclamants, s'étonnant de l'augmentation brutale de leurs impôts locaux, en contestaient le montant.

Dans certains cas, aucune erreur n'avait été commise dans l'évaluation de l'imposition due et l'augmentation ne faisait que résulter de la révision des évaluations foncières, établies désormais en tenant compte de la valeur réelle des biens soumis à imposition (n° II-530). Un certain nombre d'enquêtes effectuées à cet égard ont toutefois permis de constater que des erreurs avaient été commises dans l'établissement de l'impôt (n° II-2333 et II-2993 par exemple : le loyer matriciel servant de base à l'imposition était exagéré) et les plaignants ont alors pu obtenir des dégrèvements à leur profit.

Les intéressés admettent mal en général l'accroissement des impôts mis à leur charge. L'un d'eux (n° II-1951) faisait valoir que les nouveaux textes ne tiennent pas compte des situations particulières de certaines communes. Il lui a été fait remarquer qu'une atténuation de la valeur locative des propriétés - cette valeur locative devant précisément être mise à jour chaque année pour enregistrer, notamment, les changements de caractéristiques physiques ou d'environnement - serait compensée, à budget communal constant, par une majoration du taux d'imposition.

En réalité, si une meilleure progressivité dans la mise en place de la réforme aurait effectivement été souhaitable, il est indéniable que les nouvelles bases retenues permettent une plus grande justice et ne doivent pas être remises en cause.

En fait, les problèmes essentiels mis en lumière par les plaintes adressées au Médiateur et relatives à la fiscalité directe locale découlent de l'application du principe de l'annualité de l'impôt (cf. la proposition de réforme n° FIN 76-23, analysée plus haut, relative à la charge des impôts locaux en cas d'expropriation ou d'acquisition par une collectivité publique), et aux difficultés résultant de la procédure actuelle des mutations cadastrales et mutations de cote foncière. Le problème du cadastre a déjà été évoqué partiellement en 1975 (cf. le rapport, " les opérations de rénovation du cadastre "). La question d'ensemble a finalement fait l'objet, de la part du Médiateur, d'une proposition de réforme (n° FIN 76-20) adressée au ministre de l'économie et des finances. Cette proposition de réforme n'ayant été définitivement mise en forme que dans les tout derniers jours de l'année (cf. rapport de synthèse) (p. 43), le problème sera traité dans un rapport ultérieur.

Le paiement des droits de mutation, enfin, mérite qu'on en dise quelques mots.

En ce qui concerne les mutations à titre gratuit, les plaintes en général ne mettent pas en cause la réglementation en vigueur, mais l'application qui en est faite par les services fiscaux ; les difficultés dans la liquidation des successions peuvent être également la source de litiges.

N° II-1975 : la réclamante contestait l'évaluation retenue comme base d'imposition foncière d'une maison qu'elle avait reçue de ses parents ; les services ont admis ses dires.

N° II-2387 : des héritiers avaient obtenu en 1966 le paiement différé des droits de mutation ; ils s'étonnaient de s'être vu imposer par la suite des pénalités de retard. L'enquête a révélé que les pénalités en cause n'étaient pas motivées par un quelconque retard dans le dépôt de déclaration, mais par les insuffisances constatées dans les évaluations faites. Une remise de pénalités peut être admise lorsque, par suite de difficultés dans la liquidation de la succession, les redevables se trouvent dans l'impossibilité d'effectuer la déclaration de succession, mais une décision bienveillante ne se serait certainement pas justifiée en l'espèce.

Les affaires relatives au paiement des droits de mutation à titre onéreux, quant à elles, ont concerné, pour l'essentiel, la possibilité de bénéficier de l'exemption des droits d'enregistrement édictée par l'article 691 du code général des impôts en faveur des acheteurs de terrains à bâtir. Nombreuses ont été les réclamations sur ce thème.

Selon la doctrine administrative relative à l'application de l'article 691 du code général des impôts, la " force majeure ", qui seule peut permettre la prorogation de l'exonération des droits d'enregistrement à défaut de construction dans les quatre ans est d'interprétation stricte : d'une manière générale, l'empêchement de construire doit être absolu et définitif. La cause de l'empêchement doit être insurmontable et permanente.

Ainsi par exemple, si le décès du chef de famille peut être pris en considération, une maladie grave ou le décès de l'épouse de ce chef de famille ne sont pas, eux, constitutifs d'un cas de force majeure.

C'est ce qui a été rappelé à un réclamant dans l'affaire n° I-1417.

En effet, d'après la jurisprudence, les difficultés financières rencontrées par celui qui a pris un engagement, ou les événements qui en rendent l'exécution plus onéreuse, ne peuvent être pris en considération dès lors qu'ils ne constituent pas des obstacles insurmontables. En matière de mutations de terrains à bâtir, de tels événements sont de nature à motiver uniquement une prorogation du délai légal, ce qui implique que l'acquéreur a toujours l'intention de construire.

Certes, il a été admis par ailleurs qu'il ne serait pas procédé au recouvrement des droits complémentaires et supplémentaires exigibles lorsque, après le décès de l'acquéreur, la construction n'est pas poursuivie par ses héritiers. Mais cette mesure ne s'applique qu'en cas de disparition de la personne qui avait pris l'engagement de construire et qui devait en supporter toutes les conséquences, notamment du point de vue financier. Il n'en est pas de même en cas de décès du conjoint de l'acquéreur.

En l'espèce, les services ont estimé en outre qu'en dépit du caractère particulièrement pénible de la situation de l'intéressé, les difficultés financières qu'il avait rencontrées du fait des soins nécessités par l'état de santé de son épouse ne pouvaient être considérées comme ayant empêché toute construction de façon absolue et définitive. Il résultait en effet des renseignements recueillis que cet administré se trouvait toujours en mesure de faire face aux dépenses de construction.

Mais comme l'a montré l'instruction de plusieurs affaires (nos III-550 et II-2426), cette interprétation stricte peut aboutir à des résultats particulièrement injustes lorsqu'une décision administrative totalement indépendante de la volonté ou du comportement de l'administré interdit temporairement l'exercice du droit de construire.

C'est le cas notamment du refus de permis de construire opposé à un propriétaire au motif que le P. O. S. n'est pas encore arrêté. Or, un tel empêchement n'est pas considéré par les services fiscaux comme un cas de force majeure.

Dans l'affaire n° III-550, le réclamant, père d'une famille nombreuse, avait acquis en 1970 un terrain pour y faire construire une maison d'habitation - il avait, alors, reçu l'assurance qu'il aurait la possibilité de construire. Mais l'élaboration du plan d'occupation des sols avait occasionné le " gel " du terrain pendant plusieurs années et il était apparu d'autre part que l'intéressé ne pourrait bénéficier de l'adduction d'eau potable, le volume de captage étant insuffisant.

Devant ces difficultés insurmontables, et parce qu'il ne lui était pas possible d'attendre encore plusieurs années - son logement étant beaucoup trop exigu pour sa nombreuse famille - l'intéressé avait revendu son terrain deux ans après son acquisition ; il se voyait dès lors refuser le bénéfice de l'exemption des droits d'enregistrement.

Et pourtant l'on pouvait considérer que l'empêchement de construire, bien que résultant d'une décision administrative, n'en était pas moins insurmontable.

Il était de plus, imprévisible, puisqu'il résultait de la constatation (postérieure à l'achat) d'un volume de captage insuffisant.

Quant à la " permanence " de l'empêchement (non-adduction d'eau et P. O. S. en cours d'élaboration), elle devait naturellement s'apprécier en fonction de la durée d'exonération.

Après intervention du Médiateur, les services ont accepté de faire, exceptionnellement, droit à la réclamation en cause.

L'empêchement administratif peut être aussi indirect.

Dans l'affaire n° II-2426, l'intéressé avait acquis en 1970 un terrain dépendant d'un lotissement et sur lequel il avait pris l'engagement de faire construire une maison d'habitation dans le délai de quatre ans. Ne pouvant justifier de la réalisation d'aucune construction à l'issue de ces quatre années, il avait sollicité une prorogation d'un an du délai légal. Sa demande avait été rejetée, en même temps qu'une notification de redressement lui était adressée.

Mais l'intéressé, alléguant que c'était le changement de la réglementation d'urbanisme intervenu depuis l'acquisition de son terrain qui l'avait empêché de réaliser la construction projetée, s'insurgeait contre la décision des services fiscaux : en effet, alors qu'au moment de l'acquisition du terrain, les possibilités de construction étaient exclusivement fixées parle cahier des charges du lotissement, le nouveau plan d'occupation des sols avait modifié les normes applicables et, en particulier, limité considérablement la superficie de plancher constructible ; le réclamant faisait valoir que cette limitation ne lui permettrait pas de construire une maison suffisamment vaste pour loger sa famille.

En outre, il estimait injuste de se trouver, du fait de cette brusque modification des normes à respecter, dans l'obligation de refaire entièrement ses plans et son dossier d'appel à la concurrence, car le non-respect de ces normes lui interdirait l'octroi des prêts privilégiés dont l'obtention conditionnait le financement de l'investissement.

L'intéressé ajoutait que la situation en cause avait été jugée à ce point paradoxale que la municipalité avait émis le vœu que le nouveau plan d'occupation des sols soit écarté dans les lotissements réalisés partiellement, et que le préfet se proposait de prévoir cette exception dans les arrêtés destinés à rendre légal le nouveau plan ; il demandait en conséquence qu'aucune décision définitive ne soit prise à son encontre avant l'adoption des mesures prévues.

Mais l'administration, refusant de considérer qu'il s'agissait là d'un cas de force majeure et estimant qu'en tout état de cause, toute construction sur le terrain du réclamant devrait respecter les nouvelles règles en vigueur, n'a admis un réexamen de sa position qu'à la condition que le réclamant prenne, dans un délai de trois mois, l'engagement de déposer un permis de construire conforme à la nouvelle réglementation, et de construire la maison correspondante.

On ne doit pas oublier que pour l'administré, l'administration est " une ". Les décisions prises par une collectivité publique ou un service s'imposant au citoyen, celui-ci doit pouvoir les opposer aux autres services puisqu'il lui est impossible de s'y soustraire. Inversement, ces services ne peuvent ignorer ces décisions.

Aussi, ces deux dernières affaires ont-elles été à la base d'une proposition de réforme (n° FIN 76-21).

Certaines réclamations, relatives aux modalités du paiement de l'impôt, méritent d'être signalées.

Dans une affaire (n° III-376), le réclamant aurait souhaité que l'administration fiscale prenne en considération la baisse tangible des revenus consécutive à la mise à la retraite pour moduler, sur les deux années qui suivent, l'imposition sur les revenus de la dernière année d'activité.

Les services ont estimé qu'une mesure d'ordre général ne se justifiait pas, car elle tendrait à accorder des avantages injustifiés à certains contribuables sans remédier nécessairement à d'autres situations également dignes d'intérêt ; il leur a semblé que des mesures d'étalement de paiement, examinées avec bienveillance, apportaient une solution plus satisfaisante au problème.

Dans une autre affaire (n° II-2349), le réclamant demandait que la créance dont il disposait à l'encontre de l'A. N. I. F. O. M. soit acceptée en garantie du paiement de sa dette fiscale. Il était en fait ici impossible de lui donner satisfaction, car sa créance sur l'A. N. I. F. O. M. n'était, au jour de sa demande, ni certaine, ni liquidée, contrairement à sa dette fiscale.

Dans ces affaires, la position de l'administration était fondée. Moins normales sont les situations - dénoncées à plusieurs reprises auprès du Médiateur - où l'administration, pour recouvrer à tout prix sa créance, adopte une solution de facilité pour le moins critiquable (voir à ce sujet le rapport de synthèse, chapitre III, L'administration et le public).

Le Médiateur a eu, avec l'affaire n° II-1820, un exemple particulièrement marquant de cette attitude :

Par suite de difficultés financières, l'intéressé avait obtenu de son percepteur que le règlement de ses impôts soit effectué par voie d'opposition sur salaire.

L'employeur, qui s'était alors vu notifier un avis à tiers détenteur, avait bien retenu les quotités saisissables des salaires mais n'avait pas reversé ces retenues au Trésor - et ce, malgré les demandes répétées du comptable. Il avait, par la suite, été mis en faillite, si bien que le réclamant se trouvait dans l'impossibilité de récupérer les sommes ainsi détournées et se trouvait menacé de saisie pour le paiement de ses impôts, dont il était toujours redevable à l'égard du Trésor.

En effet, l'avis à tiers détenteur est une procédure spécifique du Trésor qui produit des résultats identiques à ceux d'un jugement de validité de saisie-arrêt. Or, dans les rapports entre le saisissant et le débiteur saisi, un tel jugement ne libère pas ce dernier qui demeure exposé à toutes mesures d'exécution de la part du créancier, mais il donne au saisissant un débiteur supplémentaire en la personne du tiers saisi. Seul, le paiement du tiers saisi au saisissant est libératoire à concurrence des sommes versées. A défaut de paiement par le tiers, ou de paiement insuffisant, le débiteur saisi demeure tenu de payer tout ou partie des sommes dues.

En l'espèce, le Trésor n'ayant pas recouvré sa créance dans les délais prévus, le trésorier principal avait fait procéder à une saisie conservatoire.

Les poursuites, bien que parfaitement justifiées en droit, pouvaient paraître rigoureuses compte tenu du fait que l'intéressé était privé de tout moyen de recours contre son ex-employeur.

Saisis de l'affaire par le Médiateur, les services fiscaux ont considéré que cette intervention valait demande en remise gracieuse présentée au nom du réclamant (cf. La vie de l'institution ci-après) et ils ont accepté de prononcer, à titre exceptionnel, le dégrèvement gracieux du solde des impositions.

C'est cette même tendance à la facilité qui est en cause lorsque l'administration interprète avec trop de laxisme la notion de solidarité entre codébiteurs (cf. également le rapport de synthèse).

L'affaire n° II-2696, déjà analysée sous le titre " La solidarité entre codébiteurs est, pour le créancier, une garantie et non une facilité : l'administration, elle aussi, devrait s'en souvenir ", en est un exemple caractéristique.

Une autre affaire (n° I-1085), déjà évoquée au rapport de synthèse, mérite également d'être analysée :

Mariée sous le régime de la communauté, l'intéressée avait vu son mari quitter le domicile conjugal en 1965 et une ordonnance de résidence séparée avait été prononcée en 1968. Elle se voyait cependant réclamer le paiement des impôts dus par son mari pour les années 1965 à 1967, soit une somme de 8 900 F. Sa demande en décharge gracieuse avait été rejetée et elle était sous la menace d'une saisie.

La décision prise par les services fiscaux ne violait pas la législation en vigueur mais elle constituait une solution d'autant plus rigoureuse que l'intéressée se trouvait démunie de ressources alors que son ex-mari avait seul disposé des revenus imposables. Aussi, après intervention du Médiateur, les services fiscaux ont-ils accepté de donner satisfaction à la réclamante.

La mise en jeu de la solidarité n'est malgré tout pas toujours injustifiée ou trop, sévère ; c'est ce qu'a montré l'instruction d'une réclamation n° II-2178 qui, bien que ne concernant pas le

paiement d'une quelconque imposition, trouve, compte tenu du, problème posé, sa place dans cette rubrique.

Dans l'espèce, le réclamant protestait contre le recouvrement dont il était l'objet de la part de, l'agent judiciaire du Trésor public au titre d'un prêt consenti par le Comptoir des entrepreneurs pour l'exécution de travaux dans un immeuble ayant appartenu à son ex-femme. L'intéressé affirmait même qu'il n'avait jamais eu connaissance du contrat de prêt.

L'instruction a montré que, contrairement à ce que le réclamant affirmait, ses obligations ne prêtaient à aucune discussion car le prêt contesté avait, par contrat, été accordé solidairement aux deux époux. Quant à l'agent judiciaire, il ne pouvait être mis en cause puisqu'il avait d'abord procédé à la saisie-exécution des biens meubles de l'ex-épouse du plaignant ; ce n'était qu'après qu'il eût constaté que les possibilités de paiement de cette dernière étaient en fait très limitées qu'il s'était retourné contre le plaignant.

Dans ces conditions, la requête de l'intéressé ne pouvait qu'être rejetée.

II. - QUELQUES AFFAIRES SIGNIFICATIVES DE L'ACTION DU MEDIATEUR

Avec les problèmes relatifs aux modalités de paiement des impôts (ou autres dettes à l'égard des services fiscaux), ont été mises en lumière certaines attitudes critiquables de l'administration. Seront analysées ici quelques autres affaires qui, en même temps qu'elles constituent des exemples de mauvais fonctionnement des services concernés, sont significatives de l'action du Médiateur.

Toujours en matière de solidarité, l'intervention du Médiateur a permis, dans un cas, de déceler que la notion de solidarité avait été interprétée de manière trop large (n° II-2193) :

Dans cette affaire, la plaignante demandait à être personnellement déchargée de toute responsabilité pour les fraudes fiscales perpétrées par son mari sous le régime de la communauté et qui avaient fait l'objet d'un important redressement d'impôt. Elle avait en effet été mise en cause pour le paiement des impôts dus au titre des années 1965 et 1966 en application de l'article 1685 du code général des impôts, qui dispose que " chacun des époux, lorsqu'ils vivent sous le même toit, est solidairement responsable des impositions assises au nom de son conjoint au titre de la taxe d'habitation et de l'impôt sur le revenu ".

Le trésorier-payeur général avait décidé de surseoir à l'instruction de la demande de l'intéressée car l'ex-mari de cette dernière, contestant les rappels d'impôts exigés, avait saisi la juridiction administrative ; il convenait donc d'attendre que le tribunal ait statué.

L'intervention du Médiateur a cependant permis de constater que la mise en cause de la réclamante devait être limitée : en effet, la mise en jeu de la solidarité fiscale établie par l'article 1685 précité du code général des impôts implique d'une part, que le contribuable porté au rôle et son conjoint aient été mariés au 1er janvier de l'année de réalisation des revenus imposés et, d'autre part, que les époux aient vécu habituellement sous le même toit pendant la période de réalisation des revenus qui ont donné lieu à l'établissement de l'impôt dont le recouvrement est poursuivi. Or, il était établi que la cohabitation des époux avait cessé le 27 janvier 1966, date de l'ordonnance de non-conciliation rendue par le président du tribunal de grande instance. Les impôts dus au titre de l'année 1966 ne pouvaient donc légalement être mis à la charge de la réclamante, dont la mise en cause devait être limitée au paiement des impôts dus pour l'année 1965.

Le silence des services est toujours interprété par l'administré comme une marque de désinvolture à son égard. L'intervention du Médiateur permet, à tout le moins, de le renseigner sur son affaire.

N° III-895 : ainsi que l'y invitaient les indications figurant sur les avertissements d'impôts locaux, un contribuable avait, par lettre adressée au directeur du centre des impôts concerné, demandé des précisions sur les évaluations cadastrales nouvellement attribuées à son immeuble. Il signalait en même temps plusieurs erreurs commises dans la rédaction de ces avertissements.

Or, plus d'un an après la formulation de ces demandes, il n'avait reçu, pour toute réponse, qu'une lettre l'invitant à s'adresser au service compétent du cadastre.

A la suite de l'intervention du Médiateur, les services fiscaux ont reconnu que les faits exposés par l'intéressé dans sa réclamation étaient exacts mais que, surchargés de travail, ils n'avaient pu répondre rapidement à cette demande et effectuer, pour cette année-là, les rectifications nécessaires. Un effectif important de fonctionnaires des impôts et du cadastre ayant dû participer à l'informatisation des données foncières, avait, en effet, été détourné de ses tâches permanentes.

Cette affaire illustre le grief le plus fréquemment fait par les contribuables aux services fiscaux. Cette année, il a été formulé essentiellement à l'occasion de réclamations relatives aux problèmes de la fiscalité directe locale. Il faut dire, à la décharge des services mis en cause, qu'ils ont eu à faire face à un nombre considérable de demandes de renseignements.

Il n'en reste pas moins que, dans certains cas, le silence observé par les services est le signe d'une certaine désinvolture à l'égard des administrés.

Dans une affaire n° II-2409 déjà citée ci-avant, les services des impôts, qui n'avaient pas répondu à la réclamation dans le délai de six mois prévu par l'article 1938 du code général des impôts, ont fait valoir auprès du Médiateur qu'à défaut de cette réponse, le contribuable pouvait soumettre le litige au tribunal administratif. Il n'en reste pas moins, et ce malgré la surcharge des services, que ce " silence " devrait être exceptionnel et que les administrations devraient avoir le souci de régler les litiges en évitant, au moins pour les problèmes mineurs, de pousser les réclamants vers les procédures juridictionnelles.

Une mauvaise coordination des services aboutit à des litiges, certes souvent mineurs, mais de toute façon regrettables. L'intervention du Médiateur permet de " débloquer " l'affaire.

N° III-304 : alors qu'il avait demandé que pour 1975 son prélèvement d'impôt mensuel se fasse par compte chèque postal, l'intéressé avait continué à voir ce prélèvement s'effectuer sur son livret de caisse d'épargne, ce qui l'avait empêché, pendant six mois, de changer de caisse d'épargne.

C'était en effet à cause d'un enregistrement incomplet des coordonnées du C.C.P. de l'intéressé que les cinq prélèvements de 1975 n'avaient pu être effectués conformément au souhait de ce dernier.

N° III-980 : le réclamant se plaignait d'être poursuivi pour le paiement d'impôts déjà acquittés.

Sa requête était justifiée : en effet, par suite d'une erreur dans l'adresse du contribuable, les mêmes impôts avaient fait l'objet d'un double recouvrement.

N° II-2192 : l'intéressée avait été nommée subrogée tutrice de la fille de sa soeur, malade mentale. Après la mort de cette dernière, elle s'était vu réclamer, en qualité d'héritière, le paiement de l'impôt foncier afférent à un logement que sa soeur possédait, alors que la succession n'avait été acceptée par le conseil de famille que sous bénéfice d'inventaire. Elle demandait l'arrêt des poursuites engagées à son encontre jusqu'au règlement de la succession.

L'instruction a montré que la réclamante n'était pas héritière et qu'elle ne pouvait donc être poursuivie pour le recouvrement d'une imposition grevant une succession à laquelle elle était étrangère. La cause du malentendu était due à une mauvaise transmission d'information entre deux services fiscaux concernés.

Plus grave est le préjudice subi par l'administré lorsqu'une administration, oubliant qu'elle est " une ", fait subir à celui-ci les conséquences d'une décision (ou de l'absence de décision) d'un autre service administratif. Deux affaires déjà analysées ci-avant sont caractéristiques de cette attitude. Le Médiateur en a eu d'autres exemples.

III. - LES RECOMMANDATIONS DU MEDIATEUR

Bien qu'une proportion importante des recommandations émises par le Médiateur aient été adressées au ministre de l'économie et des finances, elles ne seront pas retracées ici car elles concernaient pour l'essentiel des problèmes de pension et trouveront donc leur place sous la rubrique correspondante.

Une seule (affaire n° II-2696, déjà analysée ci-avant), relative à la mise en jeu de la solidarité entre codébiteurs, mérite d'être rappelée ici car sa solution dépend uniquement du département ministériel en question.

La recommandation faite sur l'affaire n° III-484, relative à un problème de succession, dont l'issue dépend et du ministre de l'économie et des finances, et du ministre de la justice, sera analysée sous la rubrique de ce dernier département ministériel [cf. ci-après ].

IV. - LES PROPOSITIONS DE REFORME

Comme pour les recommandations, ne seront pas analysées sous cette rubrique les propositions de réforme concernant des problèmes de pension.

Pour atténuer la rigueur du principe de l'annualité de l'impôt, le Médiateur a proposé au ministre de l'économie et des finances deux réformes :

- La proposition de réforme n° FIN 75-14, émise dès 1975 et relancée en 1976, concerne la possibilité d'étaler sur plusieurs années fiscales les salaires de congédiement.

Le Médiateur a observé en effet que la règle de l'annualité de l'impôt, dont le principe est juste, peut cependant en cas de licenciement engendrer des conséquences inéquitables. En effet, si le licenciement intervient au dernier trimestre, et si le préavis de trois mois (cadres) n'est pas exécuté, il n'est pas rare que toutes les sommes dues soient versées avant le 31 décembre, alors que leur versement aurait dû déborder sur les premiers mois de l'année suivante. Le salarié licencié se voit ainsi imposé pour des revenus supérieurs à ses revenus normaux et dans l'année N + 2, il devra acquitter les acomptes sur cette imposition artificiellement majorée ; or, pendant ces deux années, il risque précisément d'avoir des revenus sensiblement diminués.

Aussi le Médiateur a-t-il suggéré que soit prévue pour les intéressés la possibilité de reporter ces sommes sur la déclaration de l'année suivant celle de leur perception.

Le ministre de l'économie et des finances, principalement concerné par la question, ne s'est pas montré favorable à une telle réforme.

Il a fait observer en effet que l'article 163 du code général des impôts apporte une dérogation au principe de l'annualité de l'impôt en faveur des contribuables qui réalisent un revenu exceptionnel ou perçoivent des revenus différés.

En vertu de ce texte en effet, les revenus différés et les revenus exceptionnels peuvent être répartis sur l'année de leur réalisation et les quatre années antérieures. En ce qui concerne les revenus exceptionnels, l'échelonnement n'est possible que si leur montant excède la moyenne des revenus nets déclarés par le contribuable au titre des trois dernières années ; en outre, ces revenus ne peuvent être répartis sur la période antérieure à la date à laquelle le contribuable a entrepris l'exercice de la profession ou a acquis les biens ou exploitation, générateurs de la plus-value.

Dans la situation évoquée par le Médiateur, l'application de ces dispositions conduit à considérer comme revenus exceptionnels et, par suite, à échelonner suivant les règles qui leur sont propres :

- la partie de l'indemnité de licenciement qui, n'ayant pas le caractère de dommages-intérêts, constitue un revenu imposable ;

- l'indemnité de non-concurrence.

Le salaire afférent au délai de préavis - ainsi que les sommes accessoires qui s'y ajoutent : congés payés, gratifications de fin d'année - ne peut faire l'objet d'aucun étalement dès lors que, par nature, il ne constitue ni un revenu exceptionnel, ni un revenu différé.

Le ministre ajoutait qu'il ne lui semblait pas envisageable à l'heure actuelle d'étendre davantage la portée de l'article 163 déjà cité car toute mesure libérale nouvelle :

- alourdirait sensiblement la gestion de l'impôt, l'application de l'actuel article 1163 étant déjà une source sérieuse de complications, non seulement pour les services d'assiette, mais aussi pour les contribuables. Les services d'assiette assument déjà un volume de tâches tel que l'obligation qui leur serait faite de devoir remettre sans cesse en cause les calculs et les impositions déjà effectués pourrait conduire à une situation de blocage, alors que le contribuable quant à lui ne tirerait pas à coup sûr un avantage du report sur l'année suivante de son revenu exceptionnel, sa situation financière pouvant évoluer aussi bien en baisse qu'en hausse ;

- présenterait un grave danger d'extension et, par suite, aboutirait à remettre en cause la notion même de revenu - en effet, les salariés licenciés ne sont pas seuls à connaître des variations brusques de revenus ; c'est aussi le cas des commerçants ou des membres de professions libérales, des propriétaires fonciers... - alors qu'un système généralisé d'étalement vers l'avenir paraît devoir être exclu, car l'option du contribuable ne pourrait reposer que sur des supputations quant à sa situation de famille, au montant de son revenu courant, à l'évolution du barème et de la législation.

Le Médiateur a l'intention de " relancer " cette question.

- La seconde proposition portant sur l'application du principe de l'annualité de l'impôt est relative à la charge des impôts locaux en cas d'expropriation ou d'acquisition par une collectivité publique (n° FIN 76-23).

La proposition de réforme n° FIN 76-18 concerne les difficultés relevées dans l'établissement des impositions forfaitaires en matière de taxes sur le chiffre d'affaires ou la valeur ajoutée, d'une part, de bénéfices industriels ou commerciaux, d'autre part.

Les forfaits établis au nom d'un même redevable, au titre des taxes sur le chiffre d'affaires ou de la T.V.A., d'une part, au titre des bénéfices industriels ou commerciaux, d'autre part, constituent à l'évidence deux impositions de nature différente, et dont les bases de calcul sont également différentes.

L'instruction d'une affaire (n° II-2199) a cependant montré qu'en attendant la généralisation des " inspections fusionnées d'assiette et de contrôle " (I.F.A.C.), l'établissement de ces deux impositions par deux services distincts pouvait aboutir à des résultats déroutants pour le redevable. En particulier, la correction, par les services des contributions indirectes - en général les premiers intervenants - du chiffre d'affaires déclaré par l'intéressé sur l'imprimé n° 951 ou 951 S, rend inévitablement inexacte, au titre des B. I. C. la même déclaration, faite sur le même imprimé. En outre, les périodes d'imposition forfaitaire au titre de la T. V. A. et au titre des B. I. C. peuvent ne pas coïncider, ce qui entraîne des complications nouvelles et a priori inutiles.

Aussi le Médiateur estimerait-il souhaitable que la coordination - dans le temps et dans les modes de calcul des forfaits réalisée dans les services constitués en I. F. A. C., soit étendue par des mesures appropriées aux services non encore regroupés : les relations des entreprises au forfait avec les services fiscaux gagneraient en clarté, le malentendu dont témoignent le dossier à l'origine de la proposition n'étant pas isolé.

La proposition n° FIN 76-21 concerne l'appréciation de la notion de force majeure permettant, malgré le défaut de construction dans le délai de quatre ans, l'exonération des droits d'enregistrement frappant les acquisitions de terrains à bâtir (cf. ci-avant les affaires n° III-550 et II-2426).

La proposition de réforme n° FIN 76-17 est relative aux conditions d'exonération des paiements de la taxe d'apprentissage en cas de versements effectués en faveur de l'enseignement technique ou professionnel.

Selon la réglementation actuellement en vigueur, des exonérations de la taxe d'apprentissage peuvent être accordées aux entreprises sur la production, aux services fiscaux compétents, avant le 5 avril de l'exercice suivant, d'une demande spéciale, jointe à la " déclaration des salaires passibles de la taxe ", qui est ensuite soumise au comité départemental de l'enseignement technique, seul compétent pour en apprécier le bien-fondé. La demande doit être accompagnée des reçus qui ont été délivrés par les organismes de l'enseignement technique ou professionnel auxquels ont été effectués les versements.

Les comités départementaux statuent sur les demandes sous réserve des appels qui peuvent être formés devant la " commission spéciale de la taxe d'apprentissage ". Les demandes d'exonération déposées avec un retard supérieur à deux mois sont obligatoirement rejetées par les comités. Lorsque aucune demande d'exonération n'a été présentée, ou que celle-ci a été rejetée, les services fiscaux sont tenus de mettre en recouvrement les droits dus assortis éventuellement d'intérêts de retard.

En aucun cas l'administration fiscale ne peut décider de l'exonération à la place du comité compétent, de même qu'elle ne peut se substituer à cet organisme pour apprécier le caractère libératoire des versements dont il est fait état.

Or, dans un nombre appréciable de cas (réclamations nos I-791, I-1319, I-1561, II-2042, II-2285), des chefs d'entreprises se sont plaints auprès du Médiateur d'avoir été imposés à la taxe d'apprentissage, nonobstant l'existence, incontestable, de versements pour eux " libératoires ", qu'ils avaient effectués au profit de divers organismes.

Le Médiateur n'entend pas, à cette occasion, mettre en cause la réglementation actuelle. Il a fait procéder à un examen approfondi de la procédure et des imprimés (formulaire n° 2482 pour la D.G.I. et imprimé C.E.R.F.A. n° 40, 2259 pour le ministère de l'éducation), pour essayer de comprendre la source des difficultés rencontrées. Cet examen a montré la qualité des imprimés et la clarté des indications données. Il est apparu simplement que quelques améliorations de détail pouvaient contribuer à une meilleure information. En outre, il semble que des instructions pourraient être données aux centres d'enseignement agrées pour la formation des apprentis pour les inciter à mieux informer les entreprises cotisantes. Cette intervention des centres pour la diffusion des formulaires de demande d'exonération ne devrait provoquer aucun gaspillage et allégerait la tâche des services préfectoraux ou du rectorat en évitant aux entreprises ignorantes, démarches, délais et sanctions.

Aucune réponse à cette proposition n'est encore parvenue du ministère de l'économie et des finances. Le ministre de l'éducation, quant à lui, a déjà fait savoir qu'il était favorable au principe de la recherche d'une amélioration du système mais que certains points devaient être discutés.

Enfin la proposition n° FIN 76-22 a trait au rôle informatif de la Commission des opérations de Bourse en matière de fusion, fusion-absorption ou fusion-scission de sociétés.

Dans une affaire n° III-1312, relative à un cas de fusion-absorption de sociétés, le réclamant avait contesté à plusieurs reprises, à la fais les conditions de fond de l'opération et l'information fournie aux actionnaires. Il critiquait surtout la méthode suivie par le commissaire aux apports, ainsi que le taux d'échange proposé par lui, et finalement retenu ; il se plaignait aussi de ne pas avoir reçu communication du rapport de ce commissaire.

Le Médiateur a pensé que, pour éviter le retour de pareilles situations, ou tout au moins permettre aux actionnaires mécontents de mieux fonder leurs critiques, il serait souhaitable qu'en cas de fusion, fusion-absorption ou fusion-scission de sociétés, la liste des documents et renseignements visés aux articles 133, 138 et 135, 71, du décret du 23 mars 1967 et que les sociétés sont tenues de fournir à leurs actionnaires, s'augmente des documents suivants :

- les rapports des commissaires aux apports ;

- à défaut - car ces documents peuvent être très volumineux - une note des commissaires aux apports explicitant clairement les méthodes d'évaluation ;

- ou encore le rapport d'échange des droits sociaux visé à l'article 254, 4°, du même décret.

Ainsi, la commission des opérations de bourse pourrait-elle, sans sortir de son rôle, vérifier la sincérité des indications contenues dans ces documents complémentaires.

Cette proposition de réforme, qui est récente, n'a encore fait l'objet d'aucune réponse de la part de l'administration.

Les réclamations dirigées contre les organismes publics par leurs agents.

Il a paru logique cette année de traiter des problèmes des agents des administrations et différents organismes publics après la rubrique consacrée à l'action et aux prestations sociales et celle relative à l'action des services économiques et financiers. En effet, l'essentiel des réclamations intéressant ce secteur ont mis en cause la législation des pensions civiles et militaires de retraite : elles rejoignaient donc, à ce titre, bien des problèmes déjà étudiés plus haut ; elles relèvent en outre, dans tous ces cas, non seulement de la compétence du département qui se trouve être l'employeur direct de l'agent intéressé, mais également du service des pensions du ministère de l'économie et des finances.

En réalité, très nombreuses ont été cette année encore les plaintes dans lesquelles le réclamant posait le problème de sa carrière : demande d'intégration ou de titularisation dans la fonction publique, de mutations, questions disciplinaires ou statutaires, etc.

Mais le Médiateur doit alors régulièrement se déclarer incompétent (Cf. le rapport de 1973, p. 33 et suivantes, et p. 235 et 236). Il peut malgré tout, si l'affaire lui semble digne d'intérêt, s'informer de la situation du plaignant, mais son intervention est en tout état de cause très limitée, excepté lorsqu'est mis en lumière un fonctionnement défectueux des services.

Même en matière de pensions, l'intervention du Médiateur peut se heurter aux dispositions de l'article 8 de loi de 1973 : il en est ainsi chaque fois que le réclamant remet en cause, à l'occasion de la liquidation de sa pension, un acte de l'administration pris dans l'exercice de son pouvoir hiérarchique - lorsqu'il conteste, par exemple, l'appréciation faite de sa carrière administrative par son employeur (nos II-2521 ou III-967) ou critique une mesure d'ordre général ou statutaire intervenue à l'égard d'une certaine catégorie de personnels (n° II-2548).

Dans l'ensemble des réclamations instruites par le Médiateur, les rubriques habituelles se sont là encore retrouvées. Dans la majorité des cas, les plaignants contestent la législation applicable ; règles relatives à la durée de services exigés pour avoir droit à une pension de retraite (n° III-499), règles régissant l'attribution des pensions de réversion (n° II-2981, III-1523) ou permettant la majoration de la pension (n° III-1136), délais limitant la possibilité de demander la révision de la pension, etc. Nombreuses sont également les demandes de validation de services, et surtout de services militaires, pour le calcul de la pension civile ou militaire de l'intéressé (n° III-41, III-55, III-303, etc.) ou les plaintes dans lesquelles le requérant met en cause une attitude trop rigide de l'administration.

L'analyse des diverses recommandations intéressant ce secteur permettra d'illustrer à bien des égards les causes de mécontentement motivant les réclamations en cause. De plus, les principaux problèmes mis en lumière en ce domaine ont fait l'objet de propositions de réforme de la part du Médiateur. Il ne semble donc pas utile d'examiner ici l'ensemble des affaires reçues par le Médiateur en la matière.

Un problème particulier mérite cependant d'être noté : c'est celui que pose l'application de la loi n° 73-74 du 21 novembre 1973 donnant aux anciens combattants et aux anciens prisonniers de guerre la possibilité de bénéficier, dès l'âge de soixante ans, d'une retraite anticipée liquidée au taux plein. Le Médiateur a en effet été saisi de plusieurs réclamations sur la question.

L'examen de ces affaires a permis de rappeler certaines des conditions à remplir pour bénéficier des dispositions de la loi de 1973 ; par exemple :

- n° II-2672 et III-450 : pour obtenir satisfaction, il est indispensable de justifier, soit de cinquante-quatre mois de services militaires en temps de guerre, soit d'une captivité d'au moins six mois avant son évasion, ou avoir été rapatrié pour raison de santé. Les assurés qui réunissent de trente à quarante et un mois de durée de captivité et de services militaires en temps de guerre ne peuvent demander leur retraite anticipée au taux plein qu'à compter de leur soixante deuxième anniversaire.

- n° III-790 : il ne suffit pas que les services à prendre en compte soient considérés comme des " services militaires " ; il faut, en outre, que l'unité dans laquelle l'intéressé a servi soit reconnue comme unité combattante.

Dans la plupart de ces affaires, les services incriminés avaient correctement appliqué la loi et il n'était pas possible de faire droit aux demandes des intéressés. Il est, par ailleurs, difficile de porter un jugement de valeur sur l'économie d'un texte dont la mise en œuvre est encore récente.

Enfin, en ce qui concerne les agents non titulaires de l'Etat, le problème essentiel qui s'est posé en la matière était relatif à la validation de services auxiliaires accomplis par des étrangers naturalisés par la suite.

La question a déjà été évoquée au début de ce rapport et sera reprise par la suite.

LES RECOMMANDATIONS DU MEDIATEUR

Nos I-1137 et II-866 : recommandations suivies d'une proposition de réforme relatives à la péréquation des pensions des attachés principaux de préfecture rayés des cadres avant le 1er octobre 1968.

Le litige était né d'une réforme statutaire intervenue en 1970 concernant le corps des chefs de division, attachés principaux et attachés de préfecture.

Sur le fond du problème, rien n'est à ajouter à ce qui a été dit dans le rapport de 1975 (p. 49 et 50).

Se rangeant finalement à l'argumentation du Médiateur, le ministre des finances a demandé au ministre de l'intérieur de faire préparer un projet de décret modifiant le décret du 11 avril 1974 dans le sens préconisé par le Médiateur.

N° II-1171 : recommandation relative à l'attribution d'une pension de réversion à la veuve d'un ouvrier de la S.N.C.F.

L'intéressée, veuve d'un ouvrier de la S.N.C.F., s'était vu refuser le bénéfice d'une pension de réversion pour elle et ses cinq enfants au motif que son mari, au moment de son décès, ne totalisait pas quinze ans de services, mais quatorze ans, onze mois et vingt-sept jours selon le décompte effectué par la direction du personnel.

En réalité, tout le problème consistait à savoir s'il fallait tenir compte des services militaires que cet ouvrier avait effectués alors qu'il avait devancé l'appel et avait été maintenu sous les drapeaux en raison des événements d'Algérie. En effet, si l'on ajoutait la totalité des services militaires réellement effectués et les années de services à la S.N.C.F., l'intéressé comptait plus de quinze années de services et sa veuve devait alors pouvoir bénéficier d'une pension de réversion.

Mais le règlement de la S.N.C.F. ne prévoit la prise en compte que des seuls services effectués par les appelés.

Dans la mesure où le système d'aide mis au point par la S.N.C.F. permettait d'assurer à la veuve des avantages très voisins de ceux dont elle aurait bénéficié si elle avait pu prétendre à une pension de réversion, le Médiateur a estimé pouvoir abandonner la recommandation qu'il avait initialement émise sur cette affaire.

N° II-1875 : recommandation relative à l'attribution d'une pension proportionnelle à jouissance immédiate.

Ancienne employée de préfecture, radiée des cadres sur sa demande à compter du 3 avril 1964 avec le bénéfice d'une pension proportionnelle à jouissance différée au 1er novembre 1983, l'intéressée souhaitait obtenir le remplacement de cette prestation par une pension d'invalidité à jouissance immédiate. Le ministère de l'économie et des finances avait d'abord opposé à cette demande une forclusion tirée du caractère définitif de la décision de mise à la retraite de l'intéressée, à sa demande, le 3 avril 1964. Or, l'article L. 36, le, alinéa, du code issu de la loi du 20 septembre 1948, applicable en l'espèce, prévoit que la jouissance immédiate d'une pension ne peut être accordée aux fonctionnaires titulaires d'une pension proportionnelle que s'ils ont été mis à la retraite pour invalidité ou atteints par la limite d'âge. L'intéressée ne pouvait donc obtenir la jouissance immédiate de sa pension proportionnelle que si elle était rétroactivement mise à la retraite pour invalidité, comme elle l'avait demandé.

Certes, faute d'avoir été contestée dans les délais du recours contentieux, la décision de mise à la retraite de la réclamante était devenue définitive.

Mais le Médiateur constata qu'en 1972, la commission de réforme avait émis l'avis que l'intéressée avait contracté la maladie mentale dont elle souffrait avant sa mise à la retraite et qu'elle était, à cette date, inapte à poursuivre ses fonctions - avis qui semblait d'ailleurs n'avoir soulevé aucune contestation ; il estima donc humainement souhaitable qu'une décision favorable soit prise en l'espèce.

Le ministre de l'économie et des finances, tout en soulignant le caractère tout à fait exceptionnel de sa décision, a accepté de donner satisfaction à la réclamante.

N° I-1121 : recommandation relative à la possibilité de reporter la date d'admission à la retraite de l'intéressé.

Cette affaire est déjà analysée ci-avant.

- N° II-710 : recommandation tendant à faire bénéficier le réclamant à la majoration de pension prévue par l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

Deux recommandations tendent à l'obtention au profit des intéressés d'une pension d'invalidité.

- N° II-1956 : recommandation relative à l'octroi d'une pension d'invalidité imputable au service.

Cette affaire, qui a donné lieu à une recommandation adressée au ministre de l'intérieur, est déjà analysée ci-avant dans ce rapport.

- N° II-1257 : recommandation relative aux bases de liquidation d'une pension militaire d'invalidité.

L'intéressée se plaignait de ce que sa pension militaire d'invalidité lui ait été concédée au taux du grade de second maître de 2e classe, alors qu'elle estimait avoir droit à ce qu'elle le soit au taux du grade de sous-lieutenant.

L'examen du dossier a montré que cette réclamation était fondée. En effet, en vertu des dispositions des articles L. 9 et L. 11 du code des pensions militaires d'invalidité, la pension doit être liquidée au taux du grade dont le bénéficiaire était titulaire à la fin de la période d'activité au cours de laquelle a eu lieu l'événement (blessure ou maladie) qui lui a ouvert droit à pension. En l'espèce, l'intéressée avait un grade assimilé à celui de sous-lieutenant lorsque, le 5 novembre 1954, elle avait été radiée des contrôles, à la fin de la période d'activité au cours de laquelle elle avait contracté son infirmité. Elle avait donc droit à ce que sa pension soit calculée au taux du grade de sous-lieutenant. La circonstance - invoquée par les services - que, quelques années plus tard, elle avait repris du service et terminé une nouvelle période d'activité avec un grade assimilé à celui de second maître n'avait pu la priver de ce droit.

Le Médiateur a dès lors estimé souhaitable, en droit et en équité, que l'erreur commise par les services soit réparée.

Les ministres compétents - économie et finances, et défense - ont accepté de faire droit à cette recommandation.

Deux recommandations tendaient à la validation pour la retraite de services civils ou militaires accomplis par des agents non titulaires avant l'acquisition de la nationalité française.

N° II-528 : on peut ajouter à ce qui a été dit ci-avant qu'en l'espèce, la décision initiale prise à l'encontre de la réclamante semblait d'autant plus injuste qu'elle avait été empêchée pendant très longtemps de régulariser sa situation. En effet, lorsqu'elle avait épousé en 1935, un de ses compatriotes naturalisé depuis 1932, l'officier d'état civil lui avait déclaré qu'étant l'épouse d'un Français, il ne lui était pas nécessaire de demander sa naturalisation ; elle avait par la suite obtenu sans difficulté ses cartes d'identité française et, à partir de 1946, ses cartes d'électrice. Ce n'était qu'en 1968, à l'occasion d'un renouvellement de sa carte d'identité, que la préfecture l'avait avisée quelle était toujours de nationalité espagnole.

N° III-236 : certaines remarques s'imposent ici également.

Pour opposer un refus à la demande de l'intéressé, l'administration a fait valoir :

- le fait que ce dernier n'était pas français à l'époque où il a accompli les services en cause ;

- qu'il n'avait pas servi dans l'armée française mais dans l'armée polonaise ;

- et enfin, qu'il ne pouvait être naturalisé avant 1946 puisqu'il ne résidait pas en France et n'était pas placé, du fait des circonstances, sous la souveraineté française.

Mais le Médiateur a estimé que, compte tenu des circonstances de l'espèce, cette position faisait preuve d'une rigueur excessive. En effet, l'intéressé avait souscrit, le 16 août 1939, une déclaration selon laquelle il indiquait vouloir servir dans l'armée française en cas de conflit. Ce sont alors les autorités françaises qui ont enregistré son engagement de servir, ce sont ces mêmes autorités qui l'ont ensuite affecté à la première armée franco-polonaise, celle-ci étant commandée en partie par des officiers français, et placée sous les ordres du commandant en chef français ; ce sont elles, enfin, qui l'ont démobilisé en 1945. Il semblait dès lors difficile de considérer que les services litigieux avaient été effectués dans une armée " étrangère ".

Par ailleurs, il paraissait injuste d'opposer à l'intéressé le motif qu'il n'était pas Français au moment de la guerre : le réclamant avait en effet demandé, le 22 avril 1939, à être naturalisé français. Un décret de naturalisation lui aurait été " adressé pour notification ", au domicile de sa femme, au cours de l'année 1941 ; mais comme il était à l'époque prisonnier, l'administration, constatant qu'il était alors sans domicile fixe, a considéré que de ce fait, la notification n'était pas régulière et a par la suite refusé de statuer sur cette question.

A la suite de la recommandation adressée par le Médiateur au ministre de l'économie et des finances, ce dernier a fait savoir qu'il acceptait de faire réexaminer le dossier de l'intéressé. Le Médiateur suit l'affaire.

LES PROPOSITIONS DE REFORME

On se contentera de signaler ici qu'un certain nombre de problèmes essentiels concernant les agents des organismes publics - notamment la fameuse règle des quinze années de services publics exigés pour avoir droit à une retraite de fonctionnaires - ont été intégrés par le Médiateur dans son étude sur l'harmonisation des régimes de sécurité sociale.

En outre, plusieurs propositions de réforme ponctuelles entrent dans cette rubrique. On signalera parmi elles :

- Les trois propositions relatives aux problèmes des majorations de pension au titre des enfants élevés par le titulaire de la retraite.

L'une (n° FIN 75-13) tend à élargir les conditions d'ouverture du droit à majoration en faveur des titulaires d'une pension militaire proportionnelle.

En vertu des dispositions de la loi du 26 décembre 1964 et du décret du 28 octobre 1966, l'octroi de cette majoration n'est possible que dans le cas où la seconde carrière a été effectuée en qualité de fonctionnaire ou d'ouvrier de l'Etat, ou dans un emploi des administrations mentionnées à l'article L. 5 du code des pensions.

Le Médiateur a proposé, comme une étape vers l'harmonisation et la proratisation des pensions et des droits accessoires, d'abroger ces dispositions restrictives de façon à permettre l'attribution des majorations pour enfants aux pensions militaires proportionnelles, quelle que soit l'activité de l'intéressé après la cessation de ses services militaires.

Le ministre de l'économie et des finances a déjà fait savoir au Médiateur qu'il n'était pas favorable à une telle réforme car, à son avis, elle comporterait le risque grave de porter atteinte à la cohérence interne d'un régime de pensions qu'il n'est pas envisagé de confondre avec la législation des assurances sociales.

Tous les ministères concernés n'ayant pas encore fait connaître leur réponse, il est difficile de préjuger de la suite qui sera donnée à cette proposition.

La proposition n° FIN 76-16 est à rapprocher de la proposition n° STR 76-23 : ces deux propositions en effet sont basées sur les mêmes constatations et contiennent les mêmes suggestions.

Le ministre de l'économie et des finances et le secrétaire d'Etat chargé de la fonction publique auprès du Premier ministre, faisant prévaloir des considérations de simplicité sur celles d'équité, ont donné une réponse négative à ces propositions. Mais dans la mesure où un autre département concerné (la défense) s'est montré favorable au principe d'une telle modification, le Médiateur est décidé à "relancer" ces propositions.

La proposition n° FIN 76-15, tendant à rendre automatique l'attribution de la majoration pour enfants, a déjà été analysée ci-avant.

- La proposition n° FIN 76-24, tendant à porter à deux ans le délai pendant lequel doit pouvoir être demandé la révision de la pension ou de la rente viagère d'invalidité en cas d'erreur de droit, a également été déjà analysée.

Le ministre de l'économie et des finances n'a pas encore fait connaître sa réponse mais le secrétaire d'Etat chargé de la fonction publique a d'ores et déjà fait savoir qu'il était favorable à l'allongement du délai susvisé.

- La proposition n° DEF 76-5 est relative à la validation des services effectués dans les armées alliées par des militaires naturalisés français ultérieurement.

Dans les années qui ont suivi la fin de la guerre 1939-1945, diverses lois ont réglé la situation, au regard de la validation de leurs services militaires, de la plupart des citoyens français qui ont combattu au service de la cause alliée. C'est ainsi que la loi n° 57-896 du 7 août 1957 a validé les services accomplis par les Français dans les armées alliées ainsi que ceux accomplis, sous l'empire de la contrainte, dans l'armée et la gendarmerie allemande. C'est ainsi également que la loi n° 64-493 du 4 juin 1964 a permis la validation des services accomplis dans l'armée française par des militaires naturalisés français ultérieurement.

Seuls demeurent exclus du bénéfice de la validation de leurs services certains Français, d'origine étrangère qui, antérieurement à leur naturalisation, ont accompli au cours de la guerre 1939-1945 des services militaires dans les armées alliées et plus particulièrement dans les formations polonaises.

Une telle exclusion n'est pas le fruit du hasard et semble avoir été expressément voulue par le Parlement lorsqu'il a voté la loi de 1957 susvisée. Selon le ministre de l'économie et des finances, le Parlement aurait à l'époque fondé sa position sur le fait qu'il n'existait pas de convention de réciprocité entre les pays d'origine des intéressés et la France sur ce point. Or, le ministre de l'économie et des finances estime que " les considérations qui ont conduit le Parlement à adopter une telle position demeurent d'actualité ".

Le Médiateur ne saurait souscrire à ce point de vue. Il estime en effet qu'il convient certainement d'attribuer la position du Parlement à une inadvertance et d'estimer que ce dernier n'a pas eu pleinement conscience des implications réelles de sa position. Le Médiateur est convaincu que le Parlement aurait a cœur de redresser une situation aussi choquante qu'inéquitable.

Pour se faire une idée exacte des implications du texte, il faut avoir présent à l'esprit les diverses catégories de personnes concernées.

Ce sont essentiellement deux groupes de personnes :

- des ouvriers immigrés venus chercher du travail en France et ayant considéré petit à petit leur terre d'accueil comme leur véritable patrie ;

- des réfugiés fuyant le régime nazi au cours des années 1930.

Ces étrangers - devenus depuis lors Français - pouvaient-ils aller se battre " dans l'armée de leur pays d'origine " - qui ne leur était plus rien - pour voir reconnaître leurs droits ? Il ne faut pas perdre de vue que ces hommes se sont battus souvent contre leur pays d'origine...

S'abriter derrière l'absence d'une convention de réciprocité revient, de la part de la France, à faire preuve d'une singulière ingratitude et à nier tout droit aux intéressés.

Aussi le Médiateur estime-t-il que c'est à la législation française qu'il appartient de valider des services militaires effectués par des étrangers devenus Français. Cette conviction rejoint d'ailleurs les conclusions de l'étude que le Médiateur avait demandée à la commission du rapport et des études du Conseil d'Etat.

Le ministre de la défense s'est d'ores et déjà montré favorable à cette suggestion.

Aménagement du territoire, équipement, logement.

De la matière particulièrement ample que constituent les affaires d'équipement se dégagent des problèmes généraux ayant trait à telle ou telle partie de ce secteur.

Se retrouvent également, et de façon, quasi constante, dans l'ensemble des affaires soumises au Médiateur en cette matière, certains des défauts caractéristiques de l'administration qui ont été dénoncés précédemment (mauvaise coordination, manque d'empressement, de décision, d'information...).

Les affaires analysées tout au long de ce développement - qui comportera les trois subdivisions principales que forment les problèmes relatifs à l'aménagement du territoire, au logement et aux équipements publics, et une section relative aux dommages de guerre - donneront une idée précise, sinon complète, des difficultés auxquelles peuvent se heurter les administrés, en même temps qu'elles montreront ce que peut apporter ou solutionner l'action du Médiateur.

Au terme de ce développement seront analysées les propositions de réforme que le Médiateur a formulées.

A. - LES DIFFICULTES SOULEVEES PAR LES RECLAMATIONS REÇUES

1° Aménagement du territoire et urbanisme.

Aménagement du territoire, gel des terrains, élaboration de plans d'occupation des sols, demandes de certificats d'urbanisme, de permis de construire, constituent des sujets de litiges fréquents et sur lesquels l'attention du Médiateur a été attirée tout au long de l'année 1976.

Quelques affaires portant sur l'un ou l'autre de ces sujets seront analysées pour illustrer des interventions efficaces du Médiateur, principalement lorsque le comportement des services incriminés aura été directement mis en cause.

Mais, dans ce domaine également, l'action du Médiateur dépasse le stade de la simple intervention puisque des conclusions qu'il a tirées de l'examen des nombreux dossiers qui lui ont été soumis sur un même thème a été dégagée la nécessité de remédier aux situations dénoncées en étudiant de près les causes de mécontentement

Elaboration des P. O. S. et " gel " des terrains.

Il convient à ce sujet de rappeler ce qui avait été écrit dans le rapport 1975 (p. 76), à savoir que plusieurs réclamations posent au Médiateur le problème du " gel" de terrains, propriétés de particuliers, du fait de l'élaboration d'un schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme (S.D.A.U.) ou d'un P. O. S.

Il est apparu au Médiateur, au travers des nombreuses réclamations reçues sur ce thème, que la prorogation des délais pour l'élaboration et la mise en œuvre des P. O.S. par la loi du 27 décembre 1974 avait parfois des conséquences sociales regrettables. Il en est particulièrement ainsi dans le cas de personnes âgées, ou parvenant à la retraite, qui souhaitent disposer rapidement, soit de revenus procurés par la vente d'un bien, soit d'une habitation pour y passer la fin de leur vie.

Notons cependant que la loi n° 76-1285 du 31 décembre 1976 relative à la réforme de l'urbanisme apporte quelques dispositions nouvelles relatives notamment aux projets d'aménagement, aux plans d'urbanisme, aux plans d'occupation des sols et aux secteurs sauvegardés (articles 7 à 23).

Documents généraux d'urbanisme.

Un grand nombre de réclamants se plaignent de ne pouvoir obtenir la délivrance du certificat d'urbanisme qu'ils ont sollicité ou de ne l'obtenir qu'avec retard.

Ainsi, à la suite d'un échange entre son terrain et une parcelle de la commune, un propriétaire a dû attendre sept ans (de 1969 à 1976) pour obtenir un certificat d'urbanisme. Ledit certificat a finalement été délivré le 18 juin 1976 à l'intéressé. Ce document prévoit, compte tenu de la situation de ce tènement dans la zone de bruit modéré d'un aéroport, la possibilité de construire une maison d'habitation unifamiliale sous réserve d'une isolation phonique appropriée, du respect des dispositions de l'article R. 123-35, quatrième alinéa, du code de l'urbanisme, étant précisé que le groupe de travail chargé de l'élaboration du plan d'occupation des sols s'était déjà prononcé sur la vocation future du terrain en zone urbanisée A (affaire n°III-1162).

En cas de refus ou de retard excessif, le Médiateur s'efforce de rechercher les motifs qui s'opposent à la délivrance du document et il fait en sorte que l'intéressé lui-même en soit informé, car c'est souvent un manque total d'information ou l'insuffisance de l'information donnée qui motive la réclamation.

Permis de construire.

Comme les années précédentes, le Médiateur a reçu de nombreuses réclamations relatives aux permis de construire. Une étude très approfondie de ces affaires a conduit le Médiateur à formuler une proposition de réforme relative à l'amélioration de l'information des titulaires du permis de construire sur la possibilité de retrait de permis dans les délais de recours contentieux. Elle ne sera donc pas reprise ici.

Par contre, quelques affaires méritent d'être signalées, soit parce qu'elles complètent ce qui a été expliqué par ailleurs, soit parce qu'elles soulèvent une question ou une difficulté non encore évoquée, soit enfin parce qu'après intervention du Médiateur, elles ont connu un dénouement satisfaisant.

Ainsi, de ces trois affaires :

Retrait de permis de construire tacite.

Il a été exposé plus haut les conditions dans lesquelles des administrés peuvent éventuellement se prévaloir d'un permis de construire tacite.

Dans une autre affaire également (n° II-3125) le réclamant, se prévalant d'un permis tacite, avait fait édifier la construction qu'il projetait. Peu après, le maire de la commune, accompagné des gendarmes, lui avait dressé procès-verbal pour construction non conforme au permis de construire.

L'instruction a montré qu'en l'espèce, le réclamant n'était pas de bonne foi : en effet, alors que le projet pour lequel il avait demandé une autorisation de construire consistait en un abri de jardin, il avait en fait réalisé une véritable maison d'habitation.

Dans ces conditions, il n'était pas possible au Médiateur d'intervenir en faveur de l'intéressé.

Refus de délivrance d'un permis de construire pour inopportunité (affaire n° II-1006).

L'intéressé s'élevait contre la décision de sursis à statuer opposé à ses demandes de permis de construire et de création de lotissement sur un terrain lui appartenant. Un plan d'occupation des sols avait été prescrit, par arrêté préfectoral, sur cette commune, Or, aux termes de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme, l'autorité administrative peut décider de surseoir à statuer sur les demandes de permis de construire qui seraient de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l'exécution du P. O. S.

Si le sursis doit être motivé par le risque d'incompatibilité du projet avec le P. O. S. en cours d'étude, il est indispensable cependant que la preuve de ce risque soit fournie par la production des procès-verbaux des groupes de travail.

Dans le cas cité, en l'absence de telles preuves, les arrêtés de sursis à statuer étaient indéfendables. C'est pourquoi, dans un premier temps, il a été demandé au préfet du département de retirer ces arrêtés et d'examiner les demandes présentées par l'intéressé dans le cadre de la réglementation applicable, c'est-à-dire le règlement national d'urbanisme. Mais ce haut fonctionnaire a estimé qu'il n'y avait pas lieu pour des raisons d'opportunité de retirer les arrêtés litigieux et a décidé de s'en remettre à la sagesse du tribunal administratif devant lequel le réclamant avait formé un recours. Ce tribunal, après examen de l'affaire, a, d'une part, annulé le premier des arrêtés de sursis à statuer et, d'autre part, demandé un complément d'enquête pour les deux autres.

A l'issue de cette enquête et par arrêtés ultérieurs, un permis de construire pour une maison individuelle a, en définitive, été accordé à l'intéressé et le lotissement en sept parcelles de sa propriété a été autorisé, ces projets ne présentant pas d'incompatibilité avec le P. O. S. en cours d'étude.

Octroi du permis de construire sollicité.

Le réclamant désirait construire une maison d'habitation sur une commune en bordure d'autoroute.

Le dossier relatif à l'affaire (n° II-2165) était soumis à l'appréciation du groupe de travail chargé de l'élaboration d'un plan d'occupation des sols. Celui-ci a émis un avis favorable à l'octroi du permis de construire sollicité, sous réserve que le terrain fasse l'objet d'une étude géologique sérieuse quant à sa stabilité.

Cette étude ayant donné des résultats positifs, le directeur départemental de l'équipement a fait part de son avis favorable à l'octroi du permis de construire.

En ce qui concerne les acquisitions d'immeubles (ou de terrains comme on le verra plus loin à la section équipements publics) par les collectivités locales, le Médiateur a souvent relevé - et signalé aux services compétents - le caractère choquant de certaines situations créées par les hésitations ou les indécisions de l'acquéreur, la municipalité par exemple.

Ainsi, l'affaire n° III-610, relative à une acquisition d'immeubles, s'est traduite par dix-neuf ans d'incertitude pour le réclamant, si l'on considère que la municipalité, désirant se porter acquéreur de ces habitations, avait manifesté, pendant toute cette période, ses hésitations.

Quels que soient les motifs qui empêchent ou retardent le règlement d'une affaire d'acquisition de terrain ou d'immeuble, le Médiateur, conscient du préjudice causé à l'administré du fait de l'incertitude dans laquelle il est tenu, et particulièrement indigné quand c'est sans explication que la municipalité rend à l'administré la possibilité de disposer de ses biens dont elle n'a pas voulu ou eu besoin, ne se prive pas d'adresser aux services concernés les remarques nécessaires pour que de telles situations ne se reproduisent pas (affaire n° III-610 précitée).

2° Logement.

a) En matière de logement, la mise en cause d'organismes d'H. L. M. a nécessité plusieurs interventions du Médiateur dans le cadre de son action quotidienne. Pour la plupart, elles concernaient le remboursement ou le prix des loyers et, dans l'ensemble, elles ont pu être résolues.

Il en est ainsi pour l'affaire n° II-1057.

Le réclamant, qui avait occupé un appartement situé dans une H. L. M., se plaignait de ne pouvoir obtenir le remboursement de loyers versés à titre de caution lors de son entrée dans les lieux et ce, en dépit de plusieurs demandes présentées auprès de l'office d'H. L. M.

L'intervention du Médiateur auprès du préfet a permis de débloquer l'affaire, mais il avait fallu deux ans pour que l'intéressé se voit enfin restituer son dû.

Cette affaire illustre une fois de plus l'efficacité des interventions du Médiateur et se situe parfaitement dans le cadre de son action quotidienne.

b) Primes à la construction.

Les principales difficultés et les principales causes de litiges concernant l'obtention de ces primes proviennent du fait que, depuis le 1er janvier 1974, les crédits affectés aux primes non convertibles en bonifications d'intérêt, c'est-à-dire à celles susceptibles d'être versées directement à leur titulaire, ont été supprimés, conformément aux dispositions de la loi de finances pour 1974.

Il en résulte un grand nombre de malentendus - et, par là même, de réclamations - les personnes qui avaient formé une demande de prime conforme aux normes exigées et qui remplissaient toutes les conditions pour pouvoir en bénéficier, ne percevant pas la prime escomptée.

Dans l'affaire n° II-2341, la réclamante avait formulé une demande de prime non convertible en bonifications d'intérêt. Or, il était précisé sur le formulaire de demande de prime qu'elle eut à remplir : " Je reconnais avoir pris connaissance de l'interdiction de commencer les travaux avant la notification de la décision de principe d'octroi de prime ". Cette condition était complétée de la mention suivante " Cette déclaration ne s'applique pas à la prime non convertible ".

Or, le 17 janvier 1974, la requérante avait reçu une décision de rejet à sa demande de prime au double motif que :

1° Les travaux commencés avant l'attribution d'une décision de principe sont exclus du bénéfice des primes ;

2° Les primes sollicitées sont supprimées depuis le 11 janvier 1974.

L'intéressée avait donc subi un préjudice grave du fait que :

1° L'interdiction de commencer les travaux ne s'appliquait pas à la catégorie de primes sollicitées ;

2° L'administration avait mis deux ans pour lui répondre que sa demande n'était pas recevable alors que les primes à la construction venaient d'être supprimées.

Le Médiateur s'est informé auprès du ministre de l'équipement des conditions dans lesquelles la réclamante pouvait être indemnisée.

En réponse, les services concernés de l'équipement ont précisé que " la prime à la construction n'était pas un droit mais un avantage accordé dans la limite des crédits ouverts chaque année dans le budget de l'Etat.

C'est pourquoi il n'existe aucune directive ministérielle permettant une indemnisation en réparation des dommages supportés par les demandeurs qui se sont trouvés dans une situation analogue à celle de cette réclamante et il n'est de ce fait pas possible de réserver une suite favorable dans le cas de l'intéressée. "

Cet argument n'apparaissant pas au Médiateur satisfaisant, tant sur le plan du droit que sur le plan de l'équité, ce dernier ayant par ailleurs été saisi de réclamations similaires dues soit à des erreurs d'imprimé soit à des confusions sur le type de prime sollicitée, a demandé que soit examinée dans l'avenir la possibilité d'indemniser les requérants qui avaient subi un préjudice du fait de la négligence fautive de l'administration. Un chapitre spécial prévu pour les primes d'équipement pourrait être, selon lui, proposé pour le budget de 1978.

Une autre affaire, n° III-409, a retenu toute l'attention du Médiateur non seulement parce qu'elle portait sur les conditions d'octroi de la prime mais parce que l'administration avait, dans cette affaire, mal informé l'intéressé.

En effet, par lettre du 6 mai 1971, le réclamant apprenait qu'il avait la faculté de louer sa maison de manière permanente, à condition qu'il s'agisse d'une location nue, le bénéfice des primes convertibles étant perdu pour les années au cours desquelles les locaux sont utilisés comme résidence secondaire ou affectés à une location en meublé (décret n° 54-264 du 11 mars 1954). En l'occurrence, il s'agissait bien d'une location nue dans le cas de l'intéressé. En revanche, il n'était pas fait explicitement mention, aussi bien dans cette correspondance que dans la décision d'octroi de prime adressée à l'intéressé le 19 février 1963, de l'interdiction de louer une maison principale ou un logement quel qu'il soit en tant que logement de fonction.

Le Médiateur, considérant que l'intéressé n'avait pas été suffisamment informé par l'administration des conditions selon lesquelles il pouvait louer sa maison, a demandé au ministère de l'équipement de bien vouloir en tenir compte lors de la prochaine commission consultative de primes qui devait statuer sur cette affaire.

Le Médiateur a eu la satisfaction d'apprendre que cette commission, se référant à un arrêt du Conseil d'Etat relatif à une affaire similaire, a estimé que la décision d'annulation émise à l'encontre du réclamant devait être rapportée. La demande de prime formulée par l'intéressé fait actuellement l'objet d'une nouvelle instruction.

c) A. N. A. H.

Une affaire, n° III-1444, a soulevé la question des conditions d'attribution d'une subvention plus substantielle de l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.

Le calcul de cette subvention étant conforme à la réglementation de l'agence, le directeur de cet organisme a fait connaître qu'il ne pouvait que s'en tenir, au chiffre notifié à l'intéressée.

3° Equipements publics.

Conséquences des travaux d'équipements publics.

Affaire n° II-611 : l'intéressé se plaignait de ne pouvoir disposer librement de sa propriété en raison d'un projet de percée d'une voie, prévue depuis 1966, et pas encore réalisée.

Il s'était toujours vu refuser le permis de construire qu'il sollicitait pour améliorer son commerce.

Selon la réponse du préfet en date du 10 août 1976, un projet de voie avait été prévu dans le plan d'urbanisme directeur de la ville. Ce plan avait été mis en révision pour être transformé en P. O. S. qui prévoyait l'incorporation du terrain de l'intéressé en zone non aedificandi.

Il n'était donc pas possible de fixer l'utilisation du terrain ni de préciser si la voie serait ou non maintenue.

Au stade de cette étude, toute demande de permis de construire sur cette propriété aurait fait l'objet d'un arrêté de sursis à statuer...

Dans l'affaire n° II-1838, la difficulté pour parvenir à une solution provenait du fait que trois administrations étaient concernées.

L'immeuble de l'intéressé était grevé d'une servitude pour élargissement du boulevard sur lequel il était situé. Par ailleurs, la parcelle hors alignement de cet immeuble, également propriété de l'intéressé, était réservée pour la création d'un espace vert et d'une aire de stationnement.

Trois administrations étaient concernées par l'acquisition de cette propriété :

- l'une pour l'élargissement du boulevard ;

- une autre pour la création de l'aire de stationnement ;

- une autre enfin pour la création de, l'espace vert.

Néanmoins, cette affaire a pu être réglée dans le sens souhaité par l'intéressé.

On peut voir également dans l'issue de ce litige consécutif à la réalisation de travaux publics pour l'aménagement d'une rivière un bon exemple de coordination de différents services déclenchée par le Médiateur :

N° I-83 : contestations portant sur l'aménagement d'une rivière :

Les réclamants étaient en litige avec l'administration au sujet de la réalisation d'un ouvrage public, complément nécessaire aux travaux entrepris par un syndicat intercommunal d'aménagement hydraulique.

En effet, afin de mettre un terme aux inondations fréquentes causées par une rivière, le syndicat en cause avait entrepris d'importants travaux pour régulariser le cours de cette rivière. Les propriétaires riverains ne contestaient pas l'utilité des travaux, mais ils les estimaient insuffisants et demandaient, pour les compléter, la construction d'un barrage mobile. Ils s'élevaient contre la décision de la direction départementale de l'équipement de différer l'exécution de ce barrage.

Indépendamment des dispositifs techniques à mettre au point, une question juridique était à résoudre : celle du caractère domanial ou non de la section de la rivière sur laquelle les travaux litigieux devaient être exécutés ; cette question préalable était essentielle puisqu'elle déterminait le service compétent pour assurer la maîtrise et le financement de l'ouvrage en cause ; la solution du problème impliquait en réalité la nécessité d'un accord entre les différentes administrations concernées (les ministères de l'équipement et de l'agriculture).

Finalement, après de nombreux contacts entre ces deux départements, il a été décidé qu'une mission, composée d'ingénieurs généraux des ponts et chaussées, du génie rural et des eaux et forêts, serait chargée de régler les différents problèmes soulevés par l'aménagement du cours d'eau. Les conclusions de cette mission n'ayant pas résolu tous les problèmes d'ordre technique et financier, le ministère de l'agriculture a prescrit à ses services départementaux une enquête complémentaire.

A l'issue de toutes ces démarches, il est apparu possible de donner satisfaction aux intéressés.

Un projet d'aménagement d'un carrefour empêchait - depuis longtemps - l'intéressé de construire ; le Médiateur est intervenu estimant que, là encore, l'indécision de l'administration portait tort à l'administré.

Réclamation n° III-297 : désirant réaliser certains projets de construction, notamment d'un immeuble, sur un terrain lui appartenant, l'intéressée demandait à l'administration depuis 1971 de lui faire connaître les servitudes susceptibles de grever sa propriété dans le cadre de projets d'aménagement d'un carrefour voisin.

Ayant à opter entre deux solutions pour la transformation dudit carrefour, dont le principe avait été admis depuis l'année 1968, la municipalité avait effectivement tardé à fixer son choix.

Intervenu en avril 1976, pour demander un règlement rapide de cette affaire, le Médiateur a été informé qu'un projet élaboré en 1974 avait fait l'objet d'une enquête ouverte du 28 octobre au 14 novembre 1974 ; la déclaration d'utilité publique avait été prononcée par arrêté préfectoral du 13 mai 1975 et ce n'est que le 21 mai 1976 que le dossier de l'affaire avait été transmis à la direction départementale de l'équipement.

La solution retenue pour l'aménagement du carrefour ne concernait plus l'immeuble de la réclamante, pour lequel elle avait demandé un certificat d'urbanisme.

Dans ces conditions, et sous réserve des avis émis par les différents services intéressés, son projet était susceptible de recevoir une suite favorable.

Une telle affaire montre une fois de plus que l'attitude de l'administration est critiquable lorsqu'elle laisse trop longtemps un particulier dans l'attente d'une décision administrative. L'action du Médiateur consiste, dans de tels cas, à " réveiller " les services concernés pour permettre un déblocage de l'affaire. C'est, comme il l'a déjà été dit, un des aspects de l'action quotidienne du Médiateur.

Emprise de terrains.

Ont précédemment été évoquées les difficultés provoquées par le retard mis par l'administration pour acquérir des immeubles. Les mêmes difficultés se retrouvent lorsqu'il s'agit de terrains.

En témoigne l'affaire suivante qui a nécessité une réunion sur place pour rendre effective l'acquisition d'un terrain par une collectivité :

Affaire n° III-986 : à raison des études entreprises pour la construction d'une future autoroute dont le tracé devait couper sa propriété, le réclamant s'était vu opposer en 1964 un sursis à statuer à la demande de lotissement qu'il avait alors déposée.

Obligé de mettre fin à ses activités de pépiniériste-paysagiste en 1968, il demanda, à cette date, que l'administration procède à l'acquisition de sa propriété.

L'administration acquiesça et procéda au bornage des emprises simultanément, l'intéressé permettait aux domaines de faire un inventaire de sa propriété dont l'estimation était portée à 263 700 F.

Mais en 1975, le réclamant saisit le Médiateur, affirmant qu'aucune suite n'avait été donnée à son affaire et que, du fait de la négligence de l'administration, il avait perdu tous ses biens.

L'instruction montra qu'en réalité, les circonstances de l'espèce étaient très sensiblement différentes de celles que l'intéressé avait présentées au Médiateur. Atteint d'une grave déficience physique, le plaignant avait été hospitalisé en 1968 et aucun membre de sa famille ne s'était occupé de ses affaires pendant son hospitalisation ; si bien que les lettres que l'administration lui envoyait restaient sans réponse : ainsi s'expliquait que la question n'ait pu trouver une issue plus rapide.

Une enquête sur place, tenue à la demande du Médiateur, sous la présidence du préfet et en présence des responsables de l'administration (équipement et domaines) et du parlementaire intervenu en faveur du réclamant, a permis de dégager des bases de négociations très satisfaisantes ; les services ont en effet accepté d'acquérir l'ensemble des terrains de l'intéressé, que ces terrains soient ou non inclus dans l'assiette de la future autoroute, et de lui verser une indemnité de remploi substantielle.

Cette solution représentait une réponse très généreuse et largement dérogatoire aux règles administratives en vigueur ; elle a reçu le plein accord de tous les participants à la réunion.

Problèmes relatifs à l'expropriation.

De même que pour les problèmes relatifs aux permis de construire, les principaux problèmes liés à l'expropriation sont amplement mis en relief par la proposition de réforme (référence Synergie 1) relative aux difficultés de l'administré devant l'expropriation pour cause d'utilité publique.

Il paraît donc inutile de les reprendre ici. Les affaires retenues pour cette partie dénoncent, quant à elles, des comportements défectueux de certains services administratifs et illustrent ce que peut faire le Médiateur quand il constate ces défectuosités.

Le Médiateur peut s'informer sur la régularité d'une procédure :

Affaire n° II-1670 la réclamante contestait le caractère d'utilité publique d'une opération : le Médiateur était incompétent ; mais il est, par contre, compétent pour s'informer sur la régularité de la procédure suivie. Dans l'espèce, il est apparu que les méthodes de réalisation adoptées étaient parfaitement adaptées aux objectifs poursuivis et conformes aux décisions prises en conseil interministériel, et que les procédures administratives, avaient été régulières.

A l'heure actuelle, des recours contentieux sont engagés.

Le Médiateur ne peut, en matière d'expropriation, s'immiscer dans la détermination du montant de l'indemnité allouée à l'exproprié ; il peut, par contre, agir efficacement pour accélérer le règlement d'une affaire, règlement retardé en raison de la légèreté des services municipaux.

Affaire n° III-165 : âgé de quatre-vingt-quatre ans, le réclamant est propriétaire d'un logement qu'il désire vendre. Il a d'ailleurs, en 1973, trouvé acquéreur, par l'intermédiaire de son notaire. Mais le logement en question fait, depuis cette même année, l'objet d'une emprise par la ville, dans le cadre d'un plan d'urbanisme directeur pour la construction d'une voie naturelle.

Du fait de cette emprise, l'intéressé est en droit de mettre la ville en demeure d'acquérir sa propriété dans un délai de trois ans, mais aucun accord amiable ne peut intervenir sur le prix, le réclamant refusant la somme de 85 000 F que la ville lui propose alors que le premier acquéreur lui offrait celle de 125 000 F.

Saisi de l'affaire, le Médiateur est intervenu pour que le projet d'acquisition se concrétise au plus vite ; il était en effet souhaitable que le problème soit réglé rapidement, l'intéressé, vu son âge, risquant de ne pas voir son affaire résolue de son vivant, et ce, à cause d'une certaine désinvolture des services municipaux qui ne faisaient, en l'espèce, preuve d'aucune diligence.

A la suite de son intervention, le Médiateur fut informé que la ville avait adressé, en mars 1976, au notaire de l'intéressé, une nouvelle proposition d'achat portant l'offre initiale à 100 000 F puis, à la suite d'une nouvelle expertise consécutive a un rappel du Médiateur, à 118 000 F toutes indemnités comprises.

Il semble donc que l'on s'achemine vers un compromis. Le Médiateur continue cependant de suivre l'affaire.

4° Questions diverses : reconstruction, dommages de guerre.

Dans le rapport de synthèse, a été analysé comme cause de malaise dans les relations entre l'administration et le public, le manque d'unité de l'administration.

Une affaire, n° III-877, soumise au Médiateur et concernant l'indemnisation due au titre de dommages de guerre mérite d'être citée à ce sujet.

Propriétaire d'un immeuble qui avait été détruit en 1943, lors des bombardements de la ville, une réclamante avait été dédommagée à ce titre par le ministère de la reconstruction et de l'urbanisme, déduction faite des vestiges estimés à 55 384 F valeur 1939 sur lesquels l'administration estimait que l'intéressée pouvait reconstruire.

En 1957 l'intéressée, désirant reconstruire un immeuble sur son terrain, formula une demande de permis de construire que lui refusa la municipalité en raison d'un projet d'expropriation.

Le ministère de la reconstruction estimant que le dossier de l'intéressée était définitivement réglé faisait observer que la collectivité expropriante devrait prendre à sa charge l'indemnisation des vestiges.

La municipalité quant à elle soutenait qu'il ne lui appartenait pas de réparer le préjudice résultant de la réduction opérée par le ministère de la reconstruction.

La requérante se trouvait donc victime des contradictions de deux administrations, l'une considérant que les vestiges du terrain étaient réutilisables et qu'il n'y avait pas lieu d'indemniser, l'autre estimant ne pas être directement concernée par l'indemnisation des vestiges et s'opposant à leur utilisation.

Quant au juge de l'expropriation du tribunal de grande instance, il n'avait pu que constater que le préjudice subi pal la requérante était effectivement indirect à l'expropriation (jugement du 4 juillet 1975).

L'administration auprès de laquelle le Médiateur était intervenu a fait toutefois valoir que le juge, bien qu'incompétent en ce qui concerne l'indemnisation des vestiges, semblait avoir été disposé à réparer le préjudice subi par l'intéressée. En effet, le montant de l'allocation que le juge avait fixé à 210 218 F approchait de très près la demande formulée par celle-ci.

Il n'en demeurait pas moins que conformément aux termes du jugement du 4 juillet 1975 " le juge de l'expropriation n'est pas compétent pour statuer sur les litiges qui n'ont pas pour objet la fixation de l'indemnité d'expropriation ". L'intéressée estimait donc qu'en dépit de la générosité du juge, elle n'avait pas été indemnisée comme elle aurait dû l'être.

Le Médiateur poursuit son instruction.

Au sujet d'une demande de réévaluation de l'indemnité accordée pour dommage de guerre (dossier n° II-2057) il a été précisé au réclamant qu'il n'était pas possible d'évaluer l'indemnité à une date différente de celle du remplacement des biens sinistrés.

En effet, l'article 15 de la loi du 28 octobre 1946, dispose que l'indemnité " est égale à l'intégralité du coût de reconstitution du bien détruit tel qu'il se comportait au moment du sinistre, déduction faite d'abattements destinés à tenir compte de sa vétusté et de son mauvais état ". Il prévoit, en outre, que cette indemnité " ne peut en aucun cas excéder les dépenses réellement faites ".

L'administration ne peut, non plus, tenir compte de la dépréciation de la valeur de la monnaie, ainsi qu'en a jugé le Conseil d'Etat par arrêt du 4 mai 1966.

Il a été en outre rappelé que la législation sur les dommages de guerre est une législation d'exception. L'importance des dommages subis a conduit le législateur à prévoir l'institution d'un ordre de priorité, le versement des indemnités devant nécessairement s'étendre sur de nombreuses années.

Enfin, il a été souligné qu'à l'inverse, les sinistrés ayant, ,pour des causes diverses, bénéficié de trop-perçus ne sont tenus de reverser à l'Etat que la somme correspondant à l'indu, quel que soit le laps de temps durant lequel cette somme est demeurée en leur possession.

La procédure d'indemnisation de tels dossiers étant souvent fort longue et les intéressés pouvant légitimement s'estimer pénalisés de façon injuste par ces lenteurs, le Médiateur s'est informé auprès du ministre de l'équipement des raisons pouvant justifier ces lenteurs (cf. Rapport du Médiateur pour l'année 1974).

En réponse, le ministre a précisé que son département avait mis en œuvre le rapport que l'inspection générale avait consacré à la question.

L'ensemble des dossiers dispersés dans les départements est pratiquement regroupé au centre de règlement de dommages de guerre qui est chargé de leur liquidation. Pour accélérer cette liquidation, un renforcement des effectifs du centre a été prévu et est déjà en partie réalisé.

De plus, un chargé de mission a été désigné pour étudier sur place les difficultés que présente une liquidation plus rapide des groupements de reconstruction et des travaux de l'Etat restant à effectuer. Il travaille en liaison avec les liquidateurs de groupements et les agents chargés d'assurer les travaux de l'Etat.

B. - LES PROPOSITIONS DE REFORME

1. - L'administré devant l'expropriation.

Chaque année, de nombreuses réclamations signalent au Médiateur les difficultés que peut rencontrer l'administré dans les différentes phases de la procédure d'expropriation.

Dans l'annexe A ci-avant de ce rapport est analysée la proposition de réforme émise par le Médiateur (Synergie n° 1) dans sa partie tendant à améliorer l'information de l'administré dans la phase judiciaire de l'expropriation et sur le régime fiscal de l'indemnité d'expropriation.

Au début de cette même proposition de réforme, le Médiateur constate avec satisfaction que, dans la phase administrative de l'expropriation les conditions du déroulement de l'enquête publique et les modalités de l'information des usagers ont été considérablement améliorées par le décret n° 76-432 et la directive du Premier Ministre, l'un et l'autre en date du 14 mai 1976.

Les mesures arrêtées ou conseillées répondent aussi complètement que possible aux propositions que le Médiateur pouvait déduire des doléances qu'il avait reçues depuis trois.

Le Médiateur a cru bon, dans cette proposition de réforme, de souligner, toutefois, que la durée minimale de quinze jours assignée à l'enquête ne devrait être retenue que dans les cas exceptionnels d'opérations particulièrement simples n'intéressant que des citoyens ayant leur résidence principale dans la commune.

Il paraît souhaitable, en effet, de respecter un certain équilibre entre les délais accordés d'une part à l'usager pour faire connaître ses objections, d'autre part à l'expropriant pour prononcer l'utilité publique. La loi du 31 décembre 1975, article 34, a fixé à un an après la clôture de l'enquête le délai dans lequel doit intervenir la déclaration d'utilité publique (dix-huit mois si elle doit être prononcée par décret). L'allongement de la durée de l'enquête permettrait d'agir sur l'autre terme de la comparaison.

Concernant l'indemnité d'expropriation, outre la nécessité - déjà soulignée - d'une meilleure information de l'administré sur le régime fiscal de cette indemnité, le Médiateur attache une particulière importance à ce que, dans tous les cas où il y a expropriation et dans toute la mesure du possible, expropriant et exproprié s'efforcent de parvenir, dans les meilleurs délais, à un accord sur le montant de l'indemnité.

Bon nombre de réclamations soumises à ce propos au Médiateur témoignent des difficultés qu'éprouvent les parties concernées à réaliser une entente.

Cependant, la généralisation du transfert sur les lieux du juge de l'expropriation devrait être de nature à faciliter ces ententes.

Enfin, le Médiateur ayant été saisi de nombreuses doléances sur le régime fiscal des plus-values dans le cadre de la réglementation actuelle (articles 35A et 150 ter du code général des impôts) il a, dans cette même proposition de réforme relative à l'expropriation, émis certaines suggestions.

En effet, le projet de loi sur les plus-values (si, dans l'ensemble, il réalise un progrès vers l'équité par la prise en considération, pour les terrains à bâtir et assimilés, avec l'indice du coût de la vie, de bases de réévaluation plus réalistes) fait disparaître certaines des mesures prises en faveur des cessions amiables ou par jugement résultant d'une procédure d'expropriation. D'autre part, l'occasion n'est pas mise à profit pour faire disparaître certaines lacunes de la réglementation actuelle :

1° Dans le cas d'indemnisation par décision judiciaire, le projet de loi semble abolir la distinction entre l'indemnité principale et les indemnités accessoires non représentatives de la valeur des biens cédés et visant à couvrir les frais de remploi, frais de déménagement, pertes de loyers, troubles de jouissance, etc.

Sous le régime actuel, le cédant à l'amiable était déjà pénalisé par rapport à l'indemnisé puisque le prix de cession n'était pas articulé comme l'indemnité et était retenu pour sa totalité dans le calcul des plus-values sans aucune considération pour les frais entraînés pour le propriétaire par cette " cession forcée ".

Il serait souhaitable que dans le nouveau projet, ces réalités indiscutables soient prises en considération ;

2° La plus-value résultant de l'expropriation est soumise au même régime fiscal que la cession volontaire de droit privé qui, elle, résulte d'une décision de vendre prise librement par le propriétaire :

- le triplement de l'exonération de base en cas d'U.P. est supprimé ;

- le système de la décote qui prévoyait un triplement au bénéfice de l'exproprié disparaît ;

3° La réduction de 70 p. 100 applicable à la plus-value d'expropriation disparaît ;

4° L'abattement de 10 p. 100 sur la plus-value résultant d'une cession à une collectivité publique est supprimé ;

5° L'article 5 du projet de loi exonère les plus-values réalisées à l'occasion de la cession d'une résidence principale possédée depuis cinq ans. La suppression de la condition de durée n'est pas accordée dans le cas d'expropriation ou de cession amiable à une collectivité, ce qui paraît inéquitable.

De même, l'article 10 exclut du projet de loi - sans considération du cas d'expropriation - les plus-values professionnelles réalisées par les contribuables soumis au régime du bénéfice réel. Il exonère, au-delà de la cinquième année, les contribuables patentés et exploitants agricoles assujettis au régime du forfait ou de l'évaluation administrative. Le cas d'expropriation n'est pas visé ;

6° Enfin, aucune disposition - ni dans le texte actuel sauf pour certaines exploitations agricoles, ni dans le projet de loi - ne tient compte de la nécessité de remploi dans laquelle l'exproprié se trouve normalement placé par l'expropriation :

- celle dont bénéficient dans certaines conditions les pépiniéristes, arboriculteurs, maraîchers, horticulteurs est supprimée, ce qui est logique puisque les plus-values sur terrains agricoles ne sont plus taxées ;

- il n'est pas prévu de clause de remploi pour les immobilisations de caractère industriel ou commercial ;

- il n'en est pas prévu, non plus, pour les terrains à bâtir et les immeubles autres que la résidence principale.

Or, l'expropriation (qu'elle soit " amiable " ou par voie judiciaire) vient interrompre la possession. Le moins que l'on puisse dire c'est que l'intention spéculative ne peut - sauf exception - être présumée.

Il serait plus conforme à l'équité que l'exproprié (quel que soit le mode de cession) bénéficie d'un délai raisonnable pour faire remploi de l'indemnité ou du prix de cession, l'objet du remploi pouvant être choisi librement par celui qui, à divers titres, sera le plus souvent " victime " de l'expropriation ;

7° En toute hypothèse, l'équité voudrait que soit prévu un régime fiscal particulier pour les plus-values réalisées dans le cadre d'une opération d'utilité publique quel que soit le mode de réalisation, cession " amiable " ou expropriation judiciaire. Le système de l'abattement forfaitaire recommandé par la commission des finances de l'Assemblée Nationale n'apporte pas à ce problème une solution valable.

Ces propositions sont inspirées par les doléances reçues et qui sont apparues fondées. S'il est naturel que la collectivité ait le droit d'exproprier, il n'est pas équitable que la poursuite de l'intérêt commun se traduise par un prélèvement sur le petit nombre de ceux qui en subissent déjà les contraintes.

Une solution plus équitable de ce problème serait de nature à apaiser un grand nombre de mécontentements à une époque où le développement des infrastructures et l'expansion urbaine conduisent à multiplier le nombre des citoyens atteints par cette manifestation du progrès économique.

2. - Retrait du permis de construire.

Une affaire (n° II-2742) soumise au Médiateur et analysée ci-avant a constitué le support d'une proposition adressée au ministère de l'équipement relative à l'information des demandeurs de permis de construire.

Sur la base de cette même affaire, le Médiateur a jugé bon d'ajouter à sa proposition une récente proposition de réforme (référence : n° EQ 76-8) concernant l'information des titulaires du permis de construire sur la possibilité de retrait du permis dans les délais de recours contentieux.

Le Médiateur fait observer que les accusés de réception (adressés aux pétitionnaires) portent l'indication ci-après :

" Si aucune décision ne vous a été adressée avant cette date (date précédemment indiquée), la présente lettre vaudra permis de construire et les travaux pourront être entrepris conformément au projet déposé. "

Mais, suivant la jurisprudence du Conseil d'Etat, un refus de permis de construire signifié dans les délais de recours contentieux doit être considéré comme un retrait de permis de construire obligeant les intéressés à démolir les bâtiments qui auraient été construits ou dont la construction aurait été entreprise.

L'accusé de réception et le permis lui-même devraient, selon le Médiateur, être complétés par la formule suivante éventuellement encadrée :

" Je vous rappelle qu'en tout état de cause, le présent permis est délivré sous réserve du droit des tiers et peut être retiré par l'administration en cas d'illégalité dans les délais de recours contentieux ".

" En conséquence, il vous est recommandé de prendre contact avec les services de l'équipement avant d'entreprendre les travaux pour ne pas vous exposer au risque de démolition de la construction que pourrait entraîner le retrait du permis de construire. "

Bien que des améliorations aient été apportées par la circulaire du 31 décembre 1976 relative à la publicité des demandes de permis de construire, le Médiateur est conscient de l'insuffisance de l'information actuellement donnée. Outre qu'elle ne précise pas l'ordre de grandeur des délais d'incertitude (huit à dix mois, en fait), elle oblige l'administré à effectuer une démarche auprès des services de l'équipement parfois très éloignés de son domicile et à exiger de ceux-ci une réponse écrite avec les délais habituels de réponse.

C'est la raison pour laquelle le Médiateur serait prêt à examiner toute autre proposition du ministère de l'équipement.



LES AUTRES SERVICES





Affaires étrangères.

Les réclamations concernant ce département ministériel sont relativement peu nombreuses.

Un certain nombre de plaintes en ce domaine sont formulées par des coopérants.

Le Médiateur doit se déclarer incompétent, en raison de l'article 8 de la loi de 1973, chaque fois que le réclamant demande l'obtention ou le renouvellement d'un contrat de coopération (n° III-756) ou se plaint de ce que son contrat ait été brusquement résilié (n° I-1021).

Il peut par contre intervenir lorsque l'intéressé se plaint de ne pouvoir obtenir le paiement de créances qu'il possède à l'encontre du pays dans lequel il a servi - il s'agit en général de la partie du salaire qui doit être versée par cet Etat :

N° III-514 : le réclamant, ancien expert de coopération technique en Algérie, demandait le paiement d'un rappel de rémunération qui lui était dû par l'administration algérienne.

La loi n° 72-659 du 13 juillet 1972 relative à la situation du personnel civil de coopération culturelle, scientifique et technique auprès des Etats étrangers et les décrets qui en précisent l'application prévoient la garantie de l'Etat français dans les domaines de la carrière, de la sécurité sociale et de la privation d'emploi, mais non en matière de rémunérations versées par les pays étrangers.

En l'absence de texte législatif français nouveau, les ambassades de France ne peuvent que négocier cas par cas avec les administrations étrangères responsables le versement de ce qui est dû aux coopérants.

En l'espèce, la situation de l'intéressé a finalement pu être régularisée.

En réalité, les demandes tendant au recouvrement d'une créance possédée sur un pays étranger ne sont pas simplement le fait des coopérants. Le Médiateur a eu divers exemples de réclamations analogues :

N° II-28O7 : le réclamant, ancien agent de l'office de la mise en valeur agricole du Maroc, demandait le remboursement d'un emprunt auquel il avait dû souscrire. Il a fallu de multiples démarches de l'ambassade de France auprès du ministre de l'agriculture et de la réforme agraire pour qu'il obtienne enfin satisfaction.

N° II-2956 : l'intéressé avait été accidenté du travail au Maroc et, après dix-neuf années de procès, avait obtenu d'un tribunal local - le 6 janvier 1972 - un arrêt définitif condamnant le Gouvernement marocain à une rente annuelle - à vie - de 7 700 DH, plus rappel avec intérêts composés à partir du 17 avril 1956. Mais les multiples démarches qu'il avait fait soit auprès du Gouvernement marocain, soit auprès de l'ambassade de France, pour obtenir le versement effectif de, cette rente, s'étaient révélées vaines. Or, l'intéressé, infirme, handicapé à 95 p. 100, se trouvait démuni de toutes ressources et vivait à la charge complète de parents. Il risquait en outre d'être pénalisé par la prescription quadriennale.

Après intervention du Médiateur, l'intéressé a pu voir sa situation régularisée. L'administration marocaine a fait savoir que le retard apporté à la liquidation du dossier tenait à l'obligation dans laquelle le ministère marocain du travail se trouvait d'obtenir du tribunal la rectification d'une erreur matérielle commise lors de la rédaction du jugement rendu le 6 janvier 1972. Ce jugement condamnait en effet le chef d'établissement et non l'administration marocaine au paiement d'une rente, ce qui rendait impossible son exécution par l'administration locale.

Une troisième source de difficultés peut également provenir des restrictions en matière de transfert de fonds : le problème se pose fréquemment pour les fonds provenant de la vente d'un bien immeuble situé dans le pays en cause.

En réalité, dans toutes ces affaires, l'intervention doit être plus politique qu'administrative. L'action du Médiateur risque de se heurter dans bien des cas à cette évidence.

Agriculture.

A. - AFFAIRES ILLUSTRANT L'ACTION DU MEDIATEUR DANS LE SECTEUR DU SERVICE PUBLIC CONSIDERE

Affaire n° II-681 : l'affaire a déjà fait l'objet d'une analyse rapide au rapport de synthèse, à propos de l'inexécution des décisions de justice.

On rappellera ici que ;la réclamation émanait des propriétaires indivis d'un étang de Haute-Corse, lesquels ne pouvaient obtenir l'exécution de décisions de justice tendant à la démolition d'un pont construit par un syndicat intercommunal sur le goulet reliant cet étang à la mer.

Après diverses procédures, les propriétaires avaient finalement obtenu de la cour d'appel compétente qu'elle ordonne la démolition de l'ouvrage et l'évacuation des lieux dans un délai d'un an, sans astreinte.

Mais il est de doctrine et de jurisprudence qu'un ouvrage publie, même " mal planté ", ne se démolit pas. Au surplus, le préjudice réellement causé par la construction du pont apparaissait difficile à apprécier, et était en fait compensé par la " plus-value " que cet aménagement apportait à la région.

Le Médiateur ne pouvait donc intervenir que sur le plan de l'indemnisation des propriétaires lésés, et c'est sur ce plan qu'il a recherché avec ténacité une solution acceptable pour tous.

Finalement, à la suite d'une réunion organisée à sa diligence au ministère de l'agriculture, il a proposé qu'une indemnisation de 50 000 F soit accordée par le syndicat intercommunal en cause, moyennant une subvention de l'Etat couvrant la moitié de cette somme, et que le surplus, soit 25 000 F, soit procuré par un emprunt à long terme souscrit par plusieurs communes de la région.

Si ces propositions ne recevaient pas de suite, alors serait envisagé l'envoi à l'administration d'une " injonction ", en exécution de l'article 11 nouveau de la loi du 3 janvier 1973 modifiée par celle du 24 décembre 1976.

Affaire n° III-1192 : deux anciennes exploitantes agricoles se plaignaient, l'une du montant insuffisant de l'" indemnité viagère de départ " qui lui avait été attribuée, l'autre de se voir réclamer les sommes qu'elle avait perçues en trop au titre de cette indemnité.

L'instruction de cette double affaire a abouti aux résultats suivants :

- la première réclamante ayant la qualité de bailleresse en métayage au moment du transfert de son exploitation, ne peut, en application des dispositions de l'article 13 du décret n° 74-131 du 20 février 1974, prétendre qu'au tiers du montant de l'indemnité viagère de départ, soit la somme qu'elle perçoit actuellement ;

- quant à la seconde, son cas a été soumis à la commission de recours gracieux de la caisse de mutualité sociale agricole compétente, laquelle a décidé une remise de 50 p. 100 de sa dette.

Le remboursement sera échelonné sur trois ans.

Affaire n° II-375 : le réclamant attirait l'attention du Médiateur sur les difficultés que recentrait sa mère pour obtenir de la caisse de mutualité sociale agricole compétente le remboursement de frais médicaux et pharmaceutiques.

En application de l'article 9 du décret n° 51-727 du 6 juin 1951 modifié, seuls les assurés titulaires d'un avantage de vieillesse servi au titre des législations sociales agricoles ont droit aux prestations en nature de l'assurance maladie des régimes agricoles.

Le refus opposé par l'organisme assureur tenait sans doute au fait que l'intéressée n'avait jamais sollicité la liquidation de ses droits à pension de vieillesse au titre du régime agricole, puisqu'elle avait exercé une activité de salariée agricole de 1919 à 1951.

Mais il s'est avéré, après enquête complémentaire, que l'intéressée était, depuis le 1er mai 1975, titulaire d'une pension de vieillesse agricole, ce qui lui ouvre désormais le droit au remboursement de ses frais médicaux et pharmaceutiques auprès de la caisse de mutualité sociale agricole compétente.

Affaire n° III-1532 : la réclamante, qui avait acquis un fonds de commerce en 1975, s'était vu attribuer une autorisation provisoire d'enregistrement des paris par la direction du Pari mutuel urbain.

Cette autorisation, accordée à titre précaire, devait permettre de mener l'enquête habituelle de moralité par les soins du préfet.

A la suite de l'avis émis par ce haut fonctionnaire, l'intéressée a été avisée en février 1976 du refus d'attribution de la licence et le poste d'enregistrement des paris a été fermé.

Il convient de noter que l'attribution d'une licence de " mandataire accrédité spécial " ne constitue en aucune façon un droit. La décision de l'administration en cette matière n'est prise qu'après une double enquête. Sur le plan technique et économique, elle relève de la direction du P.M.U. Sur le plan de la moralité, elle relève du préfet.

La règle appliquée consiste à ne proposer aucune attribution de licence en l'absence de l'avis favorable du préfet.

Cette règle a bien été respectée en la circonstance et la réclamante ne pouvait se prévaloir de l'autorisation provisoire qui lui avait été accordée pour soutenir qu'un préjudice lui avait été causé par la décision négative concernant l'attribution de sa licence.

Si, en effet, son interprétation était retenue, on aboutirait, soit à la suppression de toute autorisation provisoire, soit à l'impossibilité de tenir compte du résultat des enquêtes qui peuvent dans certains cas être relativement longues.

Toutefois, compte tenu des éléments du dossier, le Médiateur a fait procéder à un complément d'enquête et le ministre de l'agriculture lui a fait savoir que le préfet ne s'opposait plus à l'attribution de la licence à l'intéressée.

En conséquence, toutes instructions utiles ont été données en vue de la réouverture du bureau d'enregistrement des paris dans l'établissement tenu par la réclamante.

Cette décision, prise " intuitu personnae ", ne saurait évidemment engager l'administration vis-à-vis du successeur éventuel de l'intéressée.

B. - AFFAIRES SOULEVANT DES PROBLEMES D'INTERET GENERAL

1. - Problèmes du remembrement.

La complexité et les lenteurs des procédures relatives au remembrement ont été déjà abondamment dénoncées par le Médiateur, notamment dans son rapport de 1975.

C'est pourquoi il ne saurait trop se montrer satisfait de l'envoi, par le Ministre de l'Agriculture, de la circulaire n° 51-20 du 10 décembre 1976, que l'on trouvera ci-après reproduite in extenso :

" Objet. - Remembrement : application des décisions de justice. Par circulaire du 7 août 1973 et, plus récemment, du 9 janvier 1976, relatives à l'objet cité en référence, l'impérieuse nécessité qui s'attache à l'exécution des décisions de la juridiction administrative dans les délais légaux, c'est-à-dire dans l'année qui suit la date de la décision de justice, vous a été rappelée.

" Malgré ces instructions, je suis encore trop souvent amené à m'expliquer, notamment à la requête du Médiateur, sur les raisons de retards apportés à l'application des jugements, quand ce n'est pas le refus de fait, au moins apparemment, du respect de l'autorité de la chose jugée.

" Ces errements sont d'autant plus regrettables que les demandes d'indemnités, souvent importantes, pour dédommagement des préjudices subis, imputables aux retards, sont de plus en plus fréquentes.

" Sans ignorer, certes, que les décisions définitives appartiennent nient aux commissions départementales de réorganisation foncière et de remembrement, les retards excessifs desdites décisions sont de plus en plus généralement analysés comme le résultat de négligences de nature à porter un discrédit sur l'administration.

" Sans doute, certaines décisions de justice, qui interviennent longtemps après la clôture des opérations de remembrement, sent-elles d'application difficile. Vous devez, cependant, vous attacher avec vos collaborateurs concernés, à mettre toute votre autorité et votre compétence au service de la commission départementale afin de l'aider à trouver une solution qui respecte la légalité.

" En bonne administration, il n'est plus guère possible de se contenter, de la part des services, des réponses d'attente, ou de la notification de nouvelles décisions des commissions départementales prises, souvent, plusieurs fois de suite, en contradiction avec le jugement rendu et qui, en allongeant abusivement la procédure, ne font qu'aggraver les conflits. Je vous demande donc de veiller personnellement, encore plus que par le passé, à ce que tout soit mis en œuvre pour que les décisions de justice soient appliquées dans le respect de la légalité et de l'autorité de la chose jugée ; si de telles entorses à cette autorité de la chose jugée devaient être encore regrettées, au moins devons-nous pouvoir affirmer que nous avons fait tous les efforts utiles et prodigué tous les conseils pour les éviter. "

Affaires particulières :

N° II-968 : l'intéressé contestait des opérations de remembrement réalisées entre 1968 et 1972, en se plaignant notamment de ce qu'une parcelle lui appartenant ait été attribuée à un autre, sans aucune justification du point de vue du but que doit poursuivre toute opération de ce genre.

Par ailleurs, il faisait valoir que la notification de la décision lui faisant grief n'ait pas fait mention des délais de recours dont il pouvait user pour en contester le bien-fondé.

L'instruction a montré que sur le fond, l'affaire avait fait l'objet d'une décision juridictionnelle, et que la commission de remembrement s'était conformée à la décision rendue.

Mais le fait que la notification de cette décision n'ait pas mentionné les délais dans lesquels elle pouvait être contestée constitue une faute grave, et à vrai dire à peine croyable, de l'administration : en se reportera à ce sujet au chapitre III de l'annexe A du présent rapport pour constater que de tels errements ne sont pas admissibles.

Le Médiateur va donc poursuivre cette affaire, ne serait-ce que pour le principe.

2. - Valeur juridique du certificat d'attribution de l'indemnité viagère de départ (I. V. D.).

Deux exploitants agricoles s'étaient vu attribuer l'indemnité viagère de départ, à l'exclusion de l'indemnité complémentaire de restructuration, consécutive à la cession de leur exploitation agricole au fils de l'un d'eux.

Le préfet leur avait adressé le 10 mai 1973, individuellement, un certificat d'attribution de l'I. V. D. s'élevant à 3 000 F pour chacun.

Le 10 août 1973, un nouveau certificat préfectoral avait ramené le montant de l'I. V. D. à 1 500 F, par suppression de l'indemnité complémentaire.

La position du Médiateur était la suivante : même si le préfet estimait que la surface de l'exploitation n'était pas suffisante pour ouvrir droit à l'indemnité complémentaire, ne devait-on pas considérer que le certificat d'attribution de l'I. V. D. constituait un acte individuel générateur de droits, qui même s'il était irrégulier par suite d'une erreur quelconque, fût-elle de droit, ne pouvait être retiré que dans le délai du recours contentieux ?

Sur la recommandation du Médiateur en date du 2 juin 1975, le ministère de l'agriculture a accepté de reprendre l'examen de l'affaire. Il en résulte que la position traditionnelle du ministère de l'agriculture a changé. Elle était jusqu'alors de considérer la décision préfectorale comme une attestation constatant que les conditions réglementaires ouvrant droit à indemnité viagère de départ étaient remplies par le demandeur : cette décision avait ainsi le caractère d'acte récognitif de droit. Mais après étude des textes et de la jurisprudence (Conseil d'Etat, Auvray, 9 avril 1975) le ministère de l'agriculture a admis que le certificat d'attribution de l'I. V. D. était créateur de droit.

C. - RECOMMANDATIONS DU MEDIATEUR

Affaire n° II-1689 : le réclamant se plaignait d'avoir été obligé de céder son terrain à une S.A.F.E.R., aux conditions erronées mentionnées dans le bordereau imprimé valant offre de vente, transmis par l'étude du notaire s'occupant de cet organisme.

L'intéressé, qui a informé la S.A.F.E.R. de l'erreur commise, environ douze jours après avoir reçu notification de la décision de préemption, trouve particulièrement inique de la part d'un organisme investi d'une mission de service public, qu'en dépit de sa bonne foi, celui-ci ait poursuivi et obtenu en justice la validation de son titre.

Après un nouvel examen attentif de cette affaire, le Médiateur s'est trouvé contraint de se rendre aux conclusions du ministère, et d'attendre que la cour d'appel se prononce sur une affaire dont elle est saisie.

Il ne peut toutefois s'empêcher de constater que, malgré son intervention réitérée dans cette affaire, et avant qu'il ne soit en mesure de formuler ses conclusions, les commissaires du Gouvernement chargés du contrôle de la S.A.F.E.R. n'ont pas essayé d'empêcher le conseil d'administration de cet organisme d'intenter une action en justice pour couvrir de l'autorité de la chose jugée une acquisition qu'ils savaient choquante sur le plan de l'équité.

C'est pourquoi le Médiateur a demandé au ministre de l'agriculture d'intervenir une nouvelle fois pour tenter d'obtenir un accord amiable avant que la cour ne se prononce.

D. - PROPOSITIONS DE REFORME

Proposition n° AGR 76-4 : aux termes du décret n° 75-167 du 17 mars 1975 (art. 2, alinéa 1er).

" Sont seuls admis au bénéfice de la prime (spéciale agricole) les chefs d'exploitation agricole dont le revenu cadastral était au plus égal à 4 800 F au 1er janvier 1974 et qui sont : soit bénéficiaires des prestations de l'assurance maladie maternité et invalidité instituée aux chapitres III-1 et III-2 du titre II du livre VII du code rural où en sont exclus en tant qu'invalides, veuves ou orphelins de guerre en vertu de l'article 6 (deuxième alinéa) du décret n° 61-294 du 31 mars 1961, soit bénéficiaires des prestations du régime des assurances sociales agricoles en application de l'article 1025 du code rural. "

Or, dans une affaire soumise au Médiateur, le réclamant qui présente d'importantes séquelles de poliomyélite, ne pouvait, selon le ministère, prétendre au bénéfice de cette prime, et cela pour deux raisons :

- parce que, n'exerçant pas à titre principal la profession de chef d'exploitation agricole, il n'était inscrit que " pour ordre " à l'assurance maladie des exploitants, et relevait en fait du régime d'assurance maladie des salariés ;

- parce que la dérogation prévue dans le texte en faveur des invalides " ne concerne que les invalides de guerre au sens strict du terme, et ne peut être invoquée en faveur des invalides civils ".

La première de ces raisons paraît pertinente (encore qu'on puisse se demander quel intérêt pouvait présenter, pour l'intéressé, son inscription " pour ordre " au régime des exploitants) : en tout état de cause le réclamant n'était pas, à titre principal, " chef d'exploitation agricole ".

Mais la seconde, qui dépasse le cas particulier étudié, semble beaucoup moins fondée : comment admettre, en effet, qu'un chef d'exploitation agricole ait, en matière d'" aides exceptionnelles ", plus de droits s'il est invalide de guerre que s'il est invalide civil ?

Le Médiateur a cherché en vain un fondement juridique possible à cette distinction, qui, en toute hypothèse, blesse manifestement l'équité.

D'ailleurs, lorsqu'on lit le décret n° 75-168 en date du même jour (17 mars 1975), instituant une " prime au maintien des vaches dans les exploitations agricoles ", on constate (art. 3) que parmi les assujettis à un régime de protection sociale non agricole qui peuvent demander cette prime, figurent, séparément, les " invalides ", et, à la ligne suivante, les " veuves et orphelins de guerre ", ce qui implique que le terme " invalides " ne couvre pas que les invalides de guerre.

On conçoit bien que cette prime au maintien des vaches soit accordée dans des conditions plus larges que la prime spéciale agricole - mais, pour ce qui concerne les invalides, il est difficile de comprendre qu'ils puissent recevoir un traitement différent d'un texte à l'autre.

C'est pourquoi le Médiateur a suggéré de modifier le décret n° 75-167 du 17 mars 1975 afin d'en ouvrir le bénéfice aux chefs d'exploitation agricole invalides, quelle que soit l'origine de leur invalidité.

La réponse du ministère à cette proposition a été décevante, il semble qu'il faudrait une loi pour obliger les pouvoirs publics à ne pas considérer les invalides "civils" comme victimes d'infirmités honteuses, et en tout cas moins exploitables que les lésions d'origine militaire.

Les anciens combattants et victimes de guerre.

Il y a peu à dire sous cette rubrique, les questions les plus importantes, qui concernaient essentiellement des problèmes de pensions, ayant déjà été analysées plus haut.

Il faut cependant signaler dès maintenant que le fonctionnement des juridictions des pensions qui, depuis le début de l'institution du Médiateur, a donné lieu à de très nombreuses réclamations, a fait cette année l'objet d'une proposition de réforme.

Les autres réclamations adressées au Médiateur ont consisté en des questions classiques de demandes de cartes de combattant, de décorations, du titre de déporté ou d'évadé.

Seules quelques affaires méritent d'être signalées, en ce qu'elles ont donné lieu à une intervention positive du Médiateur, tout en mettant en lumière un fonctionnement défectueux des services.

N° III-1025 : l'intéressée, ancien agent permanent (P 1) d'un bureau central de renseignement et d'action (B.C.R.A.), se plaignait de ne pas pouvoir obtenir la carte de combattant volontaire de la Résistance, les attestations nécessaires à l'octroi de cette carte n'ayant pu être délivrées en temps utile en raison d'un encombrement des archives du B.C.R.A. ; la réclamante se trouvait ainsi frappée de forclusion par la faute de l'administration ; cette forclusion avait été confirmée par jugement du tribunal administratif.

Sur intervention du Médiateur, la commission nationale compétente a accepté de réexaminer le dossier et, constatant que le retard dans la production des pièces était dû à l'administration, a émis un avis favorable. La décision ministérielle de rejet prise deux ans auparavant à l'égard de l'intéressée a été annulée et cette dernière a alors pu obtenir satisfaction.

N° II-2381 : l'épouse d'un grand mutilé de guerre, pensionné à 100 p. 100 et hospitalisé, ne percevait que très irrégulièrement et incomplètement la pension d'invalidité militaire de son mari, versée entre les mains du percepteur qui devait pourtant la tenir à la disposition de l'intéressée.

Après de multiples échanges de correspondances entre les services concernés et à la suite de l'intervention du Médiateur, le trésorier principal s'est engagé à faire verser chaque trimestre à l'intéressée un acompte de 2 500 F dès réception des arrérages de pension de son mari, le paiement du solde devant lui être attribué après production du décompte définitif établi trimestriellement par le centre hospitalier. Suivant le désir du réclamant et après accord écrit de celui-ci les différentes allocations dont il bénéficiait devaient également être restituées à son épouse.

Cette affaire a donc pu être réglée favorablement pour l'intéressée, mais le Médiateur a jugé excessif le nombre d'interventions nécessitées pour régler selon le bon sens un problème simple.

N° III-1182 : mesures prises à l'égard d'un fonctionnaire négligent.

L'intéressé se plaignait de ne pouvoir toucher les arrérages de sa pension militaire d'invalidité - dont il s'était vu reconnaître le droit par jugement - à cause du retard mis par la commission spéciale de cassation des pensions à retourner son dossier aux services administratifs compétents.

L'enquête - menée avec l'aide du Conseil d'Etat - a montré qu'en effet, le dossier de l'intéressé avait été transmis à l'administration avec un retard inhabituel et inadmissible.

Les observations qui s'imposaient ont été faites au fonctionnaire responsable de ce retard et les mesures d'organisation nécessaires pour éviter le renouvellement de telles situations ont été immédiatement prises.

Enfin, il convient de citer surtout la proposition de réforme faite en la matière, proposition fondamentale puisqu'elle tend à accélérer les procédures devant les juridictions de pensions militaires d'invalidité.

Les déficiences de l'organisation actuelle ont été mises en lumière par une étude de la commission du rapport du Conseil d'Etat, entreprise à la suite d'une intervention du Médiateur.

Cette étude a souligné que la lenteur mise par les juridictions de pensions à statuer était imputable à divers facteurs :

- des structures juridictionnelles trop lourdes et mal adaptées ;

- une insuffisance des moyens dont disposent ces juridictions ;

- la lenteur des administrations intéressées à présenter leurs observations.

Les conclusions du Conseil d'Etat comportaient un certain nombre de propositions concrètes qui ont été adressées à tous les ministères intéressés.

Le Médiateur souhaite suivre l'évolution de la question.

Défense.

Outre les problèmes des personnels dépendant du ministère de la défense, dont il a déjà été question à propos des réclamations adressées contre les organismes publics par leurs agents, et les litiges résultants des conséquences des " bangs supersoniques ", les réclamations concernant ce département ont été surtout relatives aux questions découlant de l'obligation d'accomplir le service national demandes de report d'incorporation (nos II-2510 et III-1001) problèmes des accidents subis par un appelé au cours d'une permission (n° II-1905).

Une seule affaire (n° II-2785) relative aux conséquences qui peuvent résulter d'un devancement d'appel, mérite d'être signalée :

Le réclamant demandait réparation à l'administration militaire du préjudice qu'il avait subi du fait de l'appel avancé sous les drapeaux d'un de ses employés ; il faisait valoir que l'armée, étant devenue le nouvel employeur de ce dernier, avait contribué à la rupture du contrat.

L'article L. 122-15 du code du travail prévoit en effet que le nouvel employeur est solidairement responsable avec le salarié qui a rompu abusivement son contrat et qui engage à nouveau ses services quand, notamment, il est démontré qu'il est intervenu dans le débauchage où quand il a embauché un travailleur qu'il savait lié par un contrat de travail.

Mais ces dispositions ne sauraient être invoquées à l'encontre de l'autorité militaire.

L'appel au service militaire, quelles qu'en soient les modalités (appel avancé, à date normale, après report d'incorporation) prévues par la loi, constitue du point de vue juridique une seule entité, corollaire de l'obligation légale d'accomplissement du service national. L'appel avancé a seulement pour effet de modifier la date à laquelle s'effectuent les obligations du service national. Il ne résulte pas d'un contrat puisque l'administration est tenue d'accepter les demandes qui lui sont présentées. L'armée ne peut en aucune façon être considérée comme un employeur au sens juridique du terme, l'acte d'engagement qu'elle fait signer ne pouvant être assimilé à un contrat de travail : en effet, les jeunes gens qui demandent à devancer l'appel ne perçoivent pas de rémunération autre que le prêt versé à tous les appelés et n'effectuent que la durée légale du service.

LES PROPOSITIONS DE REFORME

- L'une (n° DEF 73-1) est relative au sursis d'incorporation à accorder aux jeunes gens fréquentant des établissements universitaires européens.

Les intéressés ne pouvant bénéficier de sursis au-delà de l'âge de vingt-cinq ans se trouvent obligés d'interrompre leurs études. De même, lorsqu'ils ont obtenu un diplôme de vétérinaire étranger, ils ne peuvent être affectés en qualité de vétérinaire, lors de l'accomplissement du service national, le droit d'établissement des vétérinaires en France étant subordonné à la possession d'un diplôme français.

Le ministre de l'agriculture, dont dépend la solution du problème, a fait savoir qu'une décision définitive ne pourrait intervenir que lorsque seraient achevées les études engagées au sein de la Communauté économique européenne en ce qui concerne les équivalences entre les différents diplômes européens de vétérinaires.

Une seconde (n° DEF 74-3) tend à la possibilité d'étendre la réglementation exemptant du service national les fils ou frères de militaires décédés au cours du service national.

Les dispositions de l'article 31 du code du service national ne dispensent du service national les fils ou frères de militaires que lorsque ces derniers sont décédés des suites d'un accident survenu au cours de manœuvres ou d'exercices préparant au combat.

Les conditions restrictives mises à l'application de l'article L. 31 Se justifiaient lorsque la faiblesse des classes ou les opérations militaires en cours exigeaient l'exploitation maximale des possibilités du contingent. Les circonstances ayant changé, il Semble maintenant possible et équitable d'étendre les cas d'exemption de service militaire aux fils et frères de tous ceux qui sont décédés des suites d'accidents survenus ou de maladies contractées en service, sous réserve qu'aucune faute personnelle détachable du service, quelle qu'en soit la cause, n'ait été relevée à l'encontre de la victime.

Le ministre de la défense a fait savoir qu'il estimait nécessaire que cette proposition qui, en son état actuel, porte, sur un point très particulier soit reprise dans une proposition de loi d'origine parlementaire.

Education, universités.

Les réclamations reçues et traitées en 1976 concernant les services de l'éducation se sont réparties, pour l'ensemble, entre les différentes rubriques déjà répertoriées précédemment, à savoir :

- examens, concours, diplômes, admissions dans les classes ;

- établissements d'enseignement ; constructions et transports scolaires ;

- bourses.

De nombreuses demandes de mutation d'enseignants ont été adressées au Médiateur, mais pratiquement aucune ne faisait apparaître un mauvais fonctionnement des services incriminés.

La plupart de ces affaires ne posaient pas de problèmes particuliers et ont pu être réglées, dans un délai plus ou moins long, après une simple intervention du Médiateur.

On notera, comme seul exemple, la réclamation n° III-32 :

La réclamante se plaignait de ce que l'académie d'une ville lui refuse le bénéfice d'une bourse d'enseignement supérieur alors que l'académie d'une autre ville la lui avait accordée.

L'en quête prescrite à propos de cette affaire a révélé que l'intéressée était, en 1974-1975, en première année à l'U.E.R. d'éducation physique et sportive. Elle n'était pas boursière. N'ayant pas satisfait aux examens de fin d'année, elle avait été contrainte de redoubler son année universitaire. L'Académie, par mesure de bienveillance, avait accordé, malgré l'échec de fin d'année, la bourse sollicitée, étant donné que c'était une première demande. L'intéressée n'ayant pu redoubler son année à cet endroit s'était faite inscrire dans une autre localité et avait demandé le transfert de son dossier de bourse. Mais le rectorat de cette nouvelle localité n'avait pas accepté de maintenir la décision d'attribution de bourse qui avait été prise en faveur de cette étudiante par l'Académie d'origine.

A la suite de l'intervention du Médiateur des accords ont été pris entre les deux Académies. La deuxième a accepté de payer la bourse promise. Toutes ces démarches avaient été la cause du retard apporté au mandatement de la bourse.

D'autres affaires, par contre, ont soulevé une question d'ordre plus général.

On citera à cet égard une affaire relative à la simplification des formalités pour la constitution des dossiers d'examen.

N° II-2864 : une candidate à un certain nombre de concours d'accès à la fonction publique (notamment au ministère de l'éducation) se plaignait d'avoir, pour chacun de ces concours, à constituer un nouveau dossier d'inscription et d'être dans l'obligation de fournir les originaux des pièces demandées et, pour plusieurs concours successifs, la totalité des pièces dans chaque dossier.

Le Médiateur ayant appelé l'attention du ministre de l'éducation sur la nécessité d'une simplification des formalités de constitution des dossiers d'examen a reçu la réponse suivante :

" Le bureau des concours administratifs du ministère de l'éducation n'a jamais exigé, lorsque cela était possible, les originaux des documents qui permettent d'apprécier si le candidat remplit les conditions requises. En effet, les copies ou photocopies certifiées conformes de diplômes ont toujours été acceptées. Il est bien évident qu'en principe, le candidat peut à son gré, produire un original, une photocopie certifiée conforme par un organisme habilité ou faire certifier exactes, par le service chargé de la réception des candidatures, les mentions qu'il aura portées sur l'imprimé inclu dans le dossier. Il lui appartient de choisir entre ces trois possibilités celle qui lui occasionnera le moins de frais et lui évitera des démarches.

" Le seul document pour lequel l'original est exigé par les services du ministère est l'extrait de casier judiciaire. Il s'agit là d'une pièce importante qui touche à la procédure pénale. La loi a prévu que la justification de la bonne moralité ne pouvait s'effectuer que par la production d'un extrait de casier judiciaire. Ce point a été confirmé par les services de la chancellerie et c'est l'une des raisons pour lesquelles l'extrait de casier judiciaire peut être délivré autant de fois que la demande en est faite.

" Si un candidat se présente à plusieurs concours administratifs dans le ministère de l'éducation, il lui suffit de compléter un seul dossier et de noter dans les autres que les pièces demandées sont jointes au premier dossier constitué. Par ailleurs, les personnes qui sont en fonction dans une administration peuvent se contenter de faire établir un certificat attestant que les pièces réclamées ont été produites lors de leur entrée dans l'administration.

" Les services du ministère de l'éducation étudient actuellement les modalités d'une simplification totale des formalités d'inscription pour ne réclamer l'ensemble des pièces qu'aux seuls candidats admis. Mais cette procédure ne pourra être appliquée qu'après la mise au point de nouveaux dossiers et de notices informant de façon précise et détaillée les candidats sur les conditions d'accès, pour leur permettre d'apprécier leur capacité à concourir et leur éviter de subir inutilement les épreuves. En outre, cette procédure exige de modifier les dates traditionnellement retenues pour les concours. Le nouveau calendrier devra concilier les impératifs des bureaux de gestion et les organismes de préparation et de formation et s'insérer dans le calendrier général des concours administratifs pour le recrutement des personnels de catégorie A, B, C et D, arrêté en début d'année, au cours d'une réunion à la fonction publique. Il est probable que cette nouvelle procédure pourra être appliquée en 1977. "

UNIVERSITES

Deux autres affaires soumises au Médiateur, dont l'une (n° I-1087) avait d'ailleurs été signalée dans le rapport de 1974 ont soulevé le problème des conditions d'attribution du diplôme de docteur en médecine aux étrangers naturalisés français.

Dans l'affaire n° 795, l'intéressée avait commencé ses études de médecine en Bulgarie puis, venue en France, elle s'était inscrite en 1968 à l'université en vue d'obtenir le diplôme d'université de docteur en médecine.

Mais lorsque, par l'effet de son mariage avec un Français, elle obtint en 1969 la nationalité française, il ne lui fut plus réglementairement possible de postuler ce diplôme (réservé aux candidats de nationalité étrangère) mais uniquement le diplôme d'Etat de docteur en médecine.

Mais pour obtenir ce diplôme, elle devait satisfaire aux examens correspondant aux années d'études médicales dont elle avait pourtant obtenu auparavant l'équivalence, ainsi qu'au baccalauréat ou à l'examen spécial d'entrée en faculté ; c'est ce dont elle se plaignait.

Elle faisait en effet remarquer, à l'appui de sa réclamation, que si elle avait conservé la nationalité bulgare, elle aurait pu obtenir le doctorat d'université et demander, à ce titre, la dispense du baccalauréat en vue du doctorat d'Etat (conformément à l'arrêté du 25 août 1969, article 2).

Les décisions prises à l'égard de cette réclamante résultaient de la simple application d'un décret (n° 51-387 du 20 mars 1951 modifié par le décret n° 60-395 du 12 avril 1960). S'étant soumise aux conditions imposées et ayant soutenu sa thèse, l'intéressée avait d'ailleurs obtenu son diplôme d'Etat de docteur en médecine. Mais il était un fait que l'acquisition de la nationalité française l'avait pénalisée par rapport aux étrangers nationalisés après l'obtention de leur diplôme.

En raison de la sévérité de la réglementation en vigueur, un projet de modification des textes visés a été mis à l'étude dans les services du ministère de l'éducation nationale. Ce projet comportait en particulier la suppression de l'exigence du baccalauréat français et de l'obligation de subir les examens des années d'études dont l'équivalence avait été accordée auparavant.

Conscient des iniquités que pouvait engendrer effectivement une telle réglementation et de la nécessité d'une simplification en la matière, le Médiateur a fortement soutenu l'élaboration de ce nouveau texte visant à modifier profondément les conditions d'obtention de ces diplômes par les étudiants ayant effectué des études de médecine à l'étranger.

Ayant suivi cette affaire avec toute l'attention qu'elle méritait, c'est avec satisfaction que le Médiateur a récemment pris connaissance du projet de décret établi en liaison avec tous les ministères intéressés et devant être prochainement soumis au Conseil d'Etat.

Industrie et recherche.

I. - COMME LES ANNEES PRECEDENTES, LES RECLAMATIONS METTANT CE MINISTERE EN CAUSE ONT PRINCIPALEMENT TRAIT A L'ACTION DES DEUX ENTREPRISES NATIONALES, E. D. F. et G. D. F., QUI SONT PLACEES SOUS SA TUTELLE

A. - Mise en cause des services de l'E. D. F.

La plupart des réclamants se plaignent des conditions dans lesquelles s'opèrent les relevés des compteurs et les opérations de facturation consécutives et l'on a vu aux précédents rapports (1974 ; 1973) combien ces problèmes, qui peuvent paraître minimes, étaient parfois ressentis de façon particulièrement aiguë par les administrés.

Cette année, les réclamations apparaissent moins nombreuses, et pour ainsi dire moins importantes. Sans doute faut-il voir là l'effet des mesures de grande ampleur décidées par le Gouvernement en matière d'informatisation des services publics. Mais l'informatique est déjà très largement utilisée dans nos sociétés nationales, et des problèmes demeurent, dont on citera maintenant quelques exemples :

Affaire n° II-1242 : le réclamant se plaignait du système de facturation pratiqué par l'E. D. F. depuis 1970, intitulé d'abord " acompte forfaitaire " puis " montant estimé de votre consommation ".

Il estimait anormal en effet d'avoir été taxé forfaitairement en août 1970 de 139,43 F + 23,57 F de T. V. A. pour une consommation réelle de 207,31 F après le relevé du 3 décembre 1970.

De même, en août 1971, il avait été taxé d'une somme de 215,54 F + 36,46 F de T.V.A., alors que sa consommation réelle, au 8 décembre 1971, n'était que de 206,31 F. Il en concluait qu'E.D.F. lui avait facturé d'avril à août 1971 une somme de 215,54 F supérieure de 9,23 F à celle effectivement consommée.

Il s'élevait en définitive contre un système qui fait payer arbitrairement à l'abonné une somme souvent disproportionnée par rapport à sa consommation réelle.

Le Médiateur a souhaité être informé sur les modalités de ce système et sur les mesures susceptibles d'être adoptées pour remédier aux inconvénients signalés par le réclamant.

Il a obtenu en réponse des précisions intéressantes sur ce qu'on appelle les factures intermédiaires :

- leur but est d'éviter les fréquentes opérations de relevés de compteur et de réduire les frais de gestion de l'E. D. F. ;

- leurs modalités sont les suivantes : un relevé tous les quatre mois, pour éviter les conséquences sur la trésorerie des usagers " des factures intermédiaires " établies sur la base de consommations estimées suivant les consommations antérieures.

Les consommations estimées sont ensuite déduites de celles enregistrées au compteur, et, au total, la somme payée par le client découle strictement des consommations dont le dernier est redevable.

L'E. D. F. a proposé au réclamant le choix entre trois formules :

- maintien du statu quo ;

- répartition concertée avec régularisation annuelle ;

- suppression des facturations intermédiaires.

L'intéressé aurait opté pour la seconde formule, mais, ayant déménagé, il n'utilise plus dans son nouveau domicile un système de chauffage électrique.

Sa réclamation se trouve donc abandonnée.

Mais le système de la répartition concertée ne mérite-t-il pas pour autant d'être généralisé ?

L'E. D. F. n'en préconise pas le développement, mais l'usager doit accepter les dispositions de l'ordonnance du 24 septembre 1958 qui limitent à six mois au maximum l'intervalle entre deux relevés de compteur.

Affaire n° III-368 : le réclamant souhaitait obtenir des modifications dans le calendrier des relevés des compteurs E. D. F. Il se plaignait, en effet, de ce que son compteur n'ait pas été relevé entre le 1er avril et la fin de l'année, ce qui, selon lui, aurait entraîné des " majorations abusives ".

Bien que l'enquête prescrite n'ait fait apparaître aucun mauvais fonctionnement des services concernés, le Médiateur a néanmoins demandé aux services compétents si le faible litige - d'un montant de 2 F - dont se plaignait le réclamant, ne permettrait pas de déceler un mauvais fonctionnement des services de nature à entraîner des anomalies plus importantes à l'égard d'autres usagers.

Les conclusions de cette enquête amènent à conclure que tel ne paraît pas être le cas :

En effet, les arrêtés ministériels portant relèvement des prix de l'électricité stipulent que " lorsqu'un relevé comportera simultanément des consommations payables aux anciens et aux nouveaux prix, il sera effectué une répartition proportionnelle de caractère forfaitaire ". Il n'est matériellement pas possible, en effet, aux services d'Electricité de France de faire une ventilation entre les consommations effectuées avant et après les hausses de tarifs en raison de l'impossibilité de faire tous les relevés de compteurs à la date d'effet de l'augmentation de tarif. Aussi recourt-on à une facturation à des prix moyens résultant d'une pondération en fonction de la date des deux relevés de compteurs encadrant la date d'effet de l'augmentation.

Dans le cas particulier, la hausse des tarifs est intervenue le 1er janvier 1975 et la facturation des fournitures d'électricité à l'intéressé a été établie selon les dispositions précitées.

Partant, il n'y aurait eu aucune différence entre les prix ayant servi de base à la facture adressée à l'intéressé en décembre -dernier et couvrant la période avril-décembre 1975, et ceux qui auraient été retenus si une relève du compteur avait été effectuée en août, ainsi que le souhaitait cet abonné.

Affaire n° II-2748 : Lors d'une coupure de courant dans sa commune, la réclamante, qui possède un congélateur de 570 litres, n'avait pu obtenir des services de l'E. D. F. qu'ils lui précisent le poste duquel son alimentation dépendait.

Elle demandait que les factures E. D. F. fassent mention du poste dont dépend chaque usager.

La réponse a été que l'utilisation rationnelle de l'énergie conduit E. D. F. à effectuer fréquemment des reports de charges d'un poste sur l'autre et que de ce fait E. D. F. ne peut indiquer le poste dont dépend chaque usager. On ne saurait guère le lui reprocher.

B. - Mise en cause des services de G. D. F.

Affaire n° I-870 : le réclamant contestait le taux de la redevance exigée par G. D. F. au titre des " frais de mise en gaz " (En français courant : " frais de raccordement au réseau de distribution du gaz ") de son appartement. Il estimait en effet que, l'intervention du centre de distribution ayant été limitée à la visite d'un employé à son domicile pour effectuer le relevé du compteur, les 61 F demandés représentaient une somme beaucoup trop élevée.

Il est apparu que la pratique suivie en matière de facturation de la " mise en gaz " consistait en un système forfaitaire dont le taux (61 F) était unique, que l'opération en cause ait ou non nécessité la pose d'un compteur. Cette pratique, commune à l'ensemble des centres de distribution, ne correspondait pourtant à aucune disposition du cahier des charges type pour la concession des distributions publiques de gaz et elle était, en effet, difficile à justifier à l'égard de l'abonné. C'est pourquoi le Médiateur a demandé que soit étudié un système plus nuancé.

A la suite de cette intervention, G. D. F. a accepté de mettre en place un nouveau système (entré en vigueur le 1er avril 1976) avec l'application de deux types de redevances :

- l'une dans les cas où les interventions du service national sont réduites à des formalités administratives (relevé des index du compteur, création du dossier commercial de l'abonné, introduction des informations nouvelles dans les chaînes informatiques de facturation)

- l'autre, plus élevée, dans le cas où la mutation nécessite, en outre, le déplacement des agents pour une intervention sur le compteur.

Mais si, à l'occasion de l'examen de cette affaire, il a été possible d'améliorer les règles en vigueur en la matière, il n'a pas été possible, par contre, de donner satisfaction au réclamant lui-même : en effet, tant que les nouvelles mesures n'avaient pas été adoptées, c'était le régime ancien qui s'appliquait et, compte tenu du principe de l'égalité de traitement de tous les abonnés devant le service public, le Gaz de France ne pouvait pratiquer un régime de faveur au profit d'un seul usager.

Affaire n° III-108 : à la suite du relevé de mars 1975, G. D. F. constate le fonctionnement défectueux du compteur du réclamant. Ce compteur est changé en juin, mais l'intéressé continue à voir arriver des factures de gaz très élevées et ne correspondant pas à une consommation familiale normale. Chacune de ses multiples réclamations auprès de G.D.F. se conclut par un " ne payez surtout pas ", mais aucune n'est suivie d'une régularisation de sa situation... Impuissant à résoudre le litige, le réclamant décide de s'adresser au Médiateur.

Plusieurs erreurs avaient en effet été commises par G.D.F. Après intervention du Médiateur, un accord a finalement pu être conclu entre le service en cause et le réclamant.

Il n'en reste pas moins regrettable, là encore, qu'un litige aussi simple n'ait pu trouver une issue plus rapide. Le Médiateur a attiré l'attention du ministre de tutelle pour éviter que de telles situations ne se reproduisent.

II. - COMME AU COURS DES ANNEES PRECEDENTES EGALEMENT (Rapport de 1973 ; rapport de 1974), LE MEDIATEUR A ETE SAISI DE QUELQUES RECLAMATIONS RELATIVES AU PROBLEME DES INVENTIONS, BREVETS D'INVENTION, BREVETS INDUSTRIELS...

On citera à cet égard :

La proposition de réforme n° I.C.A. 75-2, rappelée le 23 septembre 1976 au ministre de l'industrie et de la recherche, et qui avait pour objet la modification de la réglementation au recouvrement des redevances annuelles dues par les titulaires des brevets industriels.

Il a été constaté en effet qu'un certain nombre de titulaires de brevets s'étaient vu privés de leurs droits pour n'avoir pas payé, en temps voulu, les redevances instituées par la loi du 2 janvier 1968 et le décret du 5 décembre 1968 au profit de l'institut national, de la propriété industrielle.

Après avoir noté que la commission instituée pour réformer la réglementation dont il s'agit n'a pu achever ses travaux, d'autant plus que se pose le problème de l'harmonisation des réglementations dans le cadre de la Communauté européenne, le Médiateur a demandé, en conséquence, à être avisé du calendrier probable des travaux de cette commission.

L'affaire n° II-702, dans laquelle se posait une question d'antériorité de brevets.

Le réclamant avait déposé en 1952 un brevet concernant un mobile sur coussin d'air. Faute de moyens financiers, les services compétents du ministère de la défense n'avaient pu subventionner la réalisation pratique de cette découverte.

L'intéressé, qui prétend que la société britannique Sanders Roe en a repris le principe pour réaliser le premier " hovercraft ", souhaitait obtenir un dédommagement financier de l'Etat, dont le refus d'aide lui avait causé préjudice.

L'instruction de l'affaire a montré que l'institut national pour la protection industrielle avait délivré quatre brevets au nom du réclamant, en 1956, 1958, 1962 et 1965. Mais seule une addition au second de ces brevets, demandée en 1960, parle de " coussin d'air ".

Or, la première présentation en public d'un appareil sur coussin d'air par la société Sanders Roe a été faite en 1959, c'est-à-dire avant le dépôt de la demande de l'intéressé. Une action contre la société anglaise n'aurait donc guère de chance d'aboutir.

Par ailleurs, le directeur du service aéronautique est seul juge des engagements de crédits qu'il peut faire et il ne peut lui être reproché de n'avoir pas donné suite à la demande de marché formulée par le réclamant.

L'administration a cependant mis ce dernier en rapport avec la Société nationale de constructions aéronautiques du Sud-Ouest, où il a été engagé en qualité de contrôleur.

III. - ENFIN, IL EST DIFFICILE DE NE PAS FAIRE ETAT DE L'HEUREUSE INTERVENTION DU MEDIATEUR DANS UN LITIGE COMPLEXE OPPOSANT UN RECLAMANT AUX CHARBONNAGES DE FRANCE, A PROPOS DE LA LIQUIDATION D'UNE SOCIETE DE SOUS-TRAITANCE QU'IL PRESIDAIT

A la suite de nombreuses démarches, le président des Charbonnages de France a fait connaître son acceptation de contribuer au règlement de cette affaire dans le sens que souhaitait le réclamant. A cette fin, les Charbonnages seraient disposés, dans la mesure où les autres créanciers adopteraient une attitude analogue, à faire abandon de la totalité de leur créance. Un de leurs représentants a pris contact avec l'une des deux banques créancières pour essayer d'obtenir de sa part une attitude conciliante.

Il va sans dire que cela ne saurait préjuger un éventuel abandon par le Trésor et les autres créanciers chirographaires de leurs droits dans la liquidation.

Mais on peut penser que le fait que le principal créancier adopte une position aussi bienveillante sera de nature à faciliter les négociations qu'il reste à mener avec le syndic.

Intérieur et collectivités locales.

CIRCULATION

Permis de conduire.

Une décision ordonnant le retrait d'un permis de conduire ou son usage limitatif (possibilité de modulation que confère la loi du 11 juillet 1975 en matière de suspension de permis), les conditions, ou la durée du retrait sont souvent contestés par les réclamants ; le Médiateur intervient alors s'il lui semble qu'il y a mauvais fonctionnement des services, pour s'enquérir du bien-fondé des décisions prises à l'encontre du réclamant.

Aucune procédure arbitraire - bien que ressentie comme telle par le condamné - n'a pu être relevée à ce titre.

Par contre, peuvent être dénoncées des discordances malencontreuses (affaire n° II-2201 : le préfet avait proposé une suspension d'un mais, la commission de retrait une suspension de trois semaines) mais difficilement évitables dès lors qu'existent deux procédures indépendantes et parallèles, l'une judiciaire, l'autre administrative. Le Médiateur se préoccupe actuellement de cette question.

Une autre question, entrant en même temps dans cette rubrique et dans celle des affaires sociales concerne les examens médicaux que doivent subir les handicapés en vue de l'obtention du permis de conduire.

Plusieurs réclamations ont été adressées au Médiateur sur ce sujet. Dans l'affaire n° III-2080, le réclamant, hémiplégique de naissance, se plaignait de ne pouvoir obtenir un permis de conduire à titre définitif et d'être obligé, pour en conserver le bénéfice, de passer une visite médicale tous les six mois en application de l'arrêté du ministre de l'équipement du 10 mai 1972.

Le caractère particulier de cette maladie résultant d'un traumatisme de naissance et, à ce titre, insusceptible d'évolution, a incité le Médiateur à demander un assouplissement des conditions posées par l'arrêté susvisé, c'est-à-dire une modification de la liste établie des affections classées en différentes catégories. Le ministère de la santé partageant ce point de vue a alors saisi le ministère de l'équipement. Il semble que cette modification puisse intervenir en application de l'article 52 de la loi d'orientation du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées qui dispose que " ... les personnes atteintes d'une invalidité ou d'une infirmité reconnue incurable, définitive ou stabilisée subiront un examen médical unique ".

EXPULSION : EMPLOI DE LA FORCE

La difficulté pour régler les affaires d'expulsion réside dans le fait, notamment lorsqu'il s'agit de faire appel au concours de la force publique ou d'en user, qu'entrent en jeu d'une part l'obligation de respecter ou de faire respecter l'application des décisions judiciaires mais également un souci de mesurer les conséquences de l'acte d'expulsion. On comprend aisément les réticences à user de la force publique pour mener à bien une affaire d'expulsion lorsque celle-ci risquera d'entraîner des situations difficiles ou des perturbations (lorsqu'il s'agit, par exemple, de cas sociaux particulièrement délicats ou lorsque des enfants sont concernés).

Les préfets, correspondant du Médiateur en la matière, ont parfaitement conscience de cette difficulté et ont souvent eu l'occasion de rappeler au Médiateur que " le pouvoir d'appréciation de l'autorité administrative en matière d'emploi de la force publique est de jurisprudence constante, assez discrétionnaire ".

Dans certaines situations, il est difficile de demander à la puissance publique de faire procéder à une expulsion. Par contre, le Médiateur peut lui demander de tout entreprendre pour que le propriétaire des lieux ne soit pas matériellement lésé. Ainsi, dans une affaire (n° 2329), le réclamant se plaignait de ne pouvoir obtenir l'expulsion de sa locataire. Compte tenu de la situation de celle-ci, qui avait été abandonnée par son mari et demeurait seule pour élever ses trois jeunes enfants à charge, le préfet avait estimé opportun de surseoir à l'opération d'expulsion en l'absence d'une solution concernant le problème du relogement préalable de l'occupante. La position du préfet se justifiait par des considérations de simple humanité. En définitive, avant que ne soit résolue la question du relogement de la locataire - auquel d'ailleurs elle s'opposait, ses revenus trop modestes ne lui permettant pas de payer un logement dans une H. L. M. - il a été procédé à une saisie-arrêt sur les appointements de son mari.

Le propriétaire a pu ainsi être remboursé de la dette locative et il a, en conséquence, abandonné les poursuites.

EQUIPEMENTS COMMUNAUX ET DEPARTEMENTAUX

La responsabilité des collectivités publiques est particulièrement mise en cause, sur le plan local, lors de problèmes de voirie, de litiges fonciers ou de litiges relatifs à divers travaux de rénovation ou d'aménagement. Les rapports précédents ont largement développé ces difficultés que rencontrent les administrés, les solutions qui ont pu être apportées à des situations difficiles, l'efficacité aussi des interventions du Médiateur.

Ne sera retenue à ce titre qu'une affaire (n° 1280) pour laquelle le Médiateur a été amené à demander au Conseil d'Etat une étude approfondie.

Le réclamant se plaignait du déversement sur sa propriété - rendue de ce fait impropre à toute culture ou toute construction - des eaux pluviales acheminées par un aqueduc destiné à recueillir les eaux de ruissellement d'un chemin départemental et d'un chemin communal.

Au terme de cette étude, il est apparu que la responsabilité de l'Etat n'était pas engagée. Il n'y avait donc pas lieu d'indemniser l'intéressé comme il le réclamait.

Par contre, après un déplacement sur les lieux, a été dégagée la possibilité d'une solution au problème. Elle faisait entrer en ligne de compte un élément qui n'apparaissait pas dans le dossier.

En effet, sur l'un des terrains appartenant à l'intéressé, et qui n'était pas celui qui subissait le dommage, se trouvait une source. Cette source n'était utilisée ni par la commune ni par un particulier et elle n'était plus entretenue.

L'intéressé s'était alors déclaré prêt à renoncer à sa réclamation si la commune lui concédait d'une manière ou d'une autre l'usage de la source et en reprenait l'entretien.

Un accord a finalement pu être conclu entre la commune et le réclamant.

Il a été convenu que ce dernier pouvait utiliser cette source pour la culture de son jardin, ce qu'il désirait. La commune, quant à elle, conservait le droit de recourir à l'eau de cette source au cas où des circonstances particulières l'y obligeraient pour alimenter les habitants. La commune devait prendre l'engagement précis d'entretenir la source.

Justice.

Cette année comme les précédentes, presque toutes les rubriques que l'analyse peut distinguer dans l'action des services judiciaires (mise en cause de personnes ; mise en cause des services eux-mêmes ; mise en cause de décisions de justice ; difficultés relatives au dépôt des plaintes ; durée excessive de certaines procédures, ainsi que des questions diverses comme celles de l'adoption, de la détention, des recherches de personnes disparues, de l'expulsion de locataires...) ont été " remplies " par des réclamations, pour la plupart d'ailleurs reconnues injustifiées.

Mais il demeure un certain nombre d'affaires qui, elles, méritent d'être citées.

Il est certaines de ces affaires qui n'ont pas exactement leur place ici, mais dont il paraît difficile de parler ailleurs.

Ainsi, d'abord, de celles qui posent le problème de l'inexécution des décisions de justice mais qui ont sans doute été suffisamment analysées ci-avant au rapport de synthèse.

Mais ainsi également de deux autres affaires, qui soulèvent le problème, assez différent, des conditions et des modalités suivant lesquelles une administration, se reconnaissant responsable d'un dommage, accepte ou non d'en réparer d'elle-même les conséquences :

N° 1760 : l'intéressé, qui souhaitait obtenir l'amodiation d'un terrain, propriété de l'office national des forêts, a vu rejeter sa demande de concession, compte tenu des exigences de la protection des sites dans le massif de l'Estérel. Il avait toutefois engagé des frais d'étude importants que le ministre de l'agriculture s'est refusé à rembourser.

A l'occasion de cette affaire, le Médiateur a regretté, sur un plan général, que l'administration n'accepte pas de transiger pour réparer rapidement, et aux moindres frais, les dommages causés par sa faute. Il souhaitait connaître le point de vue du département des finances sur ce point.

Celui-ci lui a fait connaître qu'aucun principe n'interdisait aux administrations de l'Etat de régler par un accord amiable les réparations civiles dont celui-ci peut être débiteur. Il appartient à chaque ministre, dans le domaine de compétence de son département, de liquider les sommes dues par l'Etat.

" Toutefois, l'engagement de la responsabilité pécuniaire de l'Etat, soit par une faute de ses services, soit même en dehors de toute nature, soulève souvent des problèmes très délicats, dont témoignent l'abondance et la complexité de la jurisprudence en cette matière. L'évaluation du préjudice, son imputabilité à l'administration, peuvent également se révéler particulièrement difficiles.

" Aussi l'administration ne peut-elle accepter de donner suite amiablement aux demandes d'indemnisation qui lui sont présentées que s'il apparaît de manière non douteuse, suivant les règles de responsabilité de la puissance publique, que le dommage doit être réparé par l'Etat. Dans l'hypothèse où, au contraire, le bien-fondé de la demande est contestable et tel est vraisemblablement le cas pour la réclamation en cause, l'administration est nécessairement amenée, pour assurer un règlement objectif et équitable des affaires de cette nature, à s'en remettre à la décision des tribunaux. "

N° II-2429 : s'étant rendue, inconsciente, dans les couloirs du pavillon où elle était hospitalisée à la suite d'une opération chirurgicale, l'intéressée, ramenée brutalement dans son lit, avait été attachée à celui-ci et laissée dans cette situation pendant plusieurs heures.

Les deux aides-soignantes, auteurs de ces brutalités, ont été congédiées sur-le-champ, mais l'état de la réclamante s'étant aggravé à la suite de ce traitement, elle demandait réparation, sur le plan financier, du préjudice qui lui avait été causé.

La direction de l'établissement, en renvoyant deux membres du personnel, avait reconnu le fonctionnement défectueux de ses services mais n'a pas accepté pour autant de verser directement, de sa propre initiative une indemnité à l'intéressée. C'est uniquement si celle-ci avait décidé d'agir sur le plan judiciaire que l'administration, consultant les conclusions des médecins experts amenés éventuellement à se prononcer sur la réalité du préjudice invoqué, aurait pu alors lui verser une compensation financière.

Le rapport de synthèse du Médiateur a déjà évoqué ci-avant cette attitude, plus ou moins justifiée par des arguments rationnels, de l'administration devant les évidences de sa responsabilité.

SECTION A. - AFFAIRES ILLUSTRANT L'ACTION DU MEDIATEUR

Affaire n° III-889 : l'intéressé se plaignait de ne pouvoir obtenir du tribunal de grande instance la copie du procès-verbal dressé par la gendarmerie à la suite de l'accident de la circulation dont il avait été victime. En l'absence de ce document, il ne pouvait être indemnisé par son assureur.

Dès l'intervention du Médiateur, le Procureur de la République a fait remettre cette copie au conseiller du plaignant qui l'avait lui-même déjà réclamée.

Une fois de plus, l'intéressé s'était heurté à l'inertie administrative pour une affaire pourtant bien facile à résoudre.

Affaire n° III-1065 : le réclamant se plaignait de ne pouvoir obtenir l'exécution d'un jugement d'expulsion pris depuis plus d'un an à l'encontre d'une famille qui était sa locataire.

Mais l'enquête prescrite par le Médiateur avait fait apparaître que la situation de cette famille était extrêmement difficile, et que le règlement de l'affaire s'annonçait délicat en raison du problème humain qu'elle soulevait.

En effet, le chef de cette famille (une femme) avait été abandonné par son mari, et elle avait à sa charge quatre jeunes enfants issus de ce mariage ainsi que sa belle-mère, âgée et malade.

Si légitimes que fussent les prétentions du réclamant à rentrer en possession de son bien, il était pourtant impossible de mettre à la rue cette famille sans lui avoir trouvé un logement de remplacement. Malheureusement l'extrême modicité de ses ressources rendait l'entreprise difficile.

Cependant, grâce au concours du préfet, un appartement correspondant à ses besoins vient d'être mis à la disposition du chef de la famille dans un immeuble social " de transition ". L'intéressée a été avisée que faute par elle d'accepter ce local, son expulsion serait réalisée dès la fin de la période scolaire, si regrettables que puissent être les conséquences d'une opération de cette nature effectuée manu militari.

SECTION B. - RECLAMATIONS SOULEVANT UN PROBLEME D'INTERET GENERAL

Affaire n° II-1972 : divorcée, ayant la garde de ses deux enfants mineurs, la réclamante se plaignait des formalités exigées pour obtenir l'ouverture d'un livret de caisse d'épargne au nom de l'un d'eux.

Il lui était demandé de faire la preuve qu'elle avait la garde légale de ses fils. L'autorisation de sortie de France établie par le commissariat de police sur la vue du jugement du divorce et stipulant qu'elle était " investie du droit de garde " n'était pas jugée comme une preuve suffisante, et elle se voyait dans l'obligation de produire la grosse du jugement de divorce.

La réclamante suggérait, pour simplifier ces formalités, que soit indiqué sur le livret de famille, à la suite de la mention " mariage dissous ", le nom du titulaire du droit de garde.

Cette suggestion, soumise au ministère de la justice, n'a pu être retenue pour deux raisons :

Un jugement relatif à la garde des enfants, étant sans incidence sur l'état civil, ne saurait être mentionné sur les actes de naissance des époux divorcés et, par voie de conséquence, sur un livret les concernant.

Les décisions relatives au droit de garde pouvant être modifiées à tout moment suivant l'intérêt des enfants, l'obligation qui serait :alors faite au détenteur d'un livret de faire procéder à sa mise à jour, lorsque son droit de garde serait modifié, entraînerait dans la pratique une sujétion au moins aussi lourde que celle résultant de la production d'un extrait de jugement pour obtenir l'ouverture d'un livret de caisse d'épargne.

La parution du décret n° 75-1124 du 5 décembre 1975 portant réforme de la procédure du divorce a toutefois permis de remédier à la situation évoquée par l'intéressée puisque, selon ce décret, la production d'un extrait de la décision de divorce ou de séparation de corps est désormais suffisante.

SECTION C. - RECOMMANDATIONS ET PROPOSITIONS DU MEDIATEUR

(Art. 9 de la loi du 3 janvier 1973.)

Recommandation n° III-484 : à la suite du décès, en novembre 1974, d'une amie de la réclamante, a été découvert un testament en faveur de cette dernière. Ce testament avait été dicté par la malade et signé par la testataire.

Puis, ce testament a été porté à la connaissance de la réclamante par la direction générale des impôts le 29 avril 1975, par une lettre dans laquelle elle était informée qu'elle était légataire universel de la défunte et invitée à faire savoir si elle acceptait ou renonçait à la succession. Le testament était ensuite remis au notaire.

Par lettre du 12 juin 1975, la réclamante était, en tant qu'héritière, invitée par le propriétaire, à libérer l'appartement occupé par la défunte.

Cette démarche était appuyée également par une lettre recommandée du notaire en date du 2 juillet 1975.

L'intéressée déféra aux demandes qui lui étaient faites ; elle obtint, du greffier du tribunal, la remise des clefs et libéra l'appartement, ce qui occasionna des frais, alors que le contenu de l'appartement était de très peu de valeur. Elle régla également au propriétaire le montant des loyers et charges encore dus et versa une provision au notaire.

Ce n'est que le 24 novembre 1975 que l'intéressée fut avisée par le notaire que le testament pourrait n'être pas valable.

L'administration lui précisait le 22 décembre 1975 qu'elle n'avait pas " qualité " pour prendre parti sur la validité du testament.

L'intervention de l'administration dans cette affaire résultait d'un jugement du tribunal de grande instance rendu le 15 avril 1975, nommant le directeur des services fiscaux curateur de la succession vacante de la défunte. Le directeur des services fiscaux, devant rendre compte de sa gestion au tribunal, entendit dégager sa responsabilité dès qu'il fut informé de l'éventuelle nullité du testament. Il soutint alors qu'à aucun moment ses services n'avaient considéré l'intéressée comme légataire universelle.

Le processus administratif se mit alors en marche. Le 12 mai 1976, une lettre adressée à l'intéressée reprit l'affaire à la date de l'inventaire le 23 avril 1975 et, sans aucune mention du testament, pourtant remis au notaire un an plus tôt par les soins de ces services, fit reproche à la réclamante de n'avoir pas fait vendre les biens aux enchères publiques. Cette dernière fut invitée expressément à faire savoir ce qu'elle avait fait des biens et, si elle les avait vendus, le prix qu'elle en avait tiré. Le 1er juin, elle était informée que si elle ne répondait pas dans les huit jours, elle serait réputée avoir enlevé le mobilier.

Le Médiateur, saisi de cette affaire, a aussitôt demandé au préfet (car l'affaire mettait en cause à la fois les services fiscaux, le notaire et le greffier) de prendre en considération la bonne foi de la requérante, qui pouvait légitimement considérer que l'attitude de l'administration, du notaire et du greffier du tribunal était de nature à lui faire croire qu'aucun problème ne se posait quant à sa situation d'héritière.

Il souhaitait donc, si la nullité du testament était en définitive opposée à l'intéressée, que cette dernière sait équitablement indemnisée du préjudice subi.

Devant le refus des services fiscaux de se reconnaître responsables de la situation ainsi faite à l'intéressée, le Médiateur a été amené à adresser au préfet une recommandation formelle lui demandant d'intervenir au nom de l'équité pour que soit trouvée rapidement à ce problème une solution acceptable.

Par lettre reçue, le 14 septembre 1976, le préfet faisait parvenir une note du directeur des services fiscaux dans laquelle il mettait en cause la bonne foi de l'intéressée et affirmait qu'elle s'était instituée un titre à elle-même. Il refusait de reconsidérer sa position et estimait dans cette affaire n'avoir de comptes à rendre qu'au tribunal.

A la suite de cette réponse, un nouvel examen très approfondi des divers éléments de ce dossier a amené le Médiateur à saisir les services du ministère des finances.

Contrairement à ce que soutenait le directeur départemental, il apparaissait, en effet, que c'était bien la lettre du 29 avril 1975 de l'inspection des domaines qui avait été à l'origine de la situation actuelle. A cette première erreur, s'était ajoutée celle du notaire. Enfin, le greffier du tribunal ne devait pas remettre les clefs à la requérante sans ordonnance d'envoi en possession. Cette accumulation de fautes de service ne pouvait que conduire à rechercher au problème posé une solution équitable et honorable.

Par ailleurs, et surtout, compte tenu de la modicité de l'héritage, d'une part, et, d'autre part, des dépenses déjà exposées par l'intéressée, le Médiateur a estimé que l'autorité compétente pouvait faire abandon total ou partiel de la succession.

C'est en ce sens qu'il vient d'intervenir auprès du ministère de l'économie et des finances.

Recommandation n° III-703 : la fusion des professions d'avocat et d'avoué, décidée par la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, a eu parfois des conséquences singulières, et même inéquitables, sur la situation de certains retraités de ces professions.

Ainsi le réclamant, qui avait exercé successivement en Algérie les professions d'avocat puis d'avoué, avait obtenu, en sus de divers " avantages " de vieillesse, une " allocation de vieillesse " dont le montant fut majoré ultérieurement de la moitié.

Mais, à la suite de la fusion ci-dessus rappelée, la " Caisse nationale des barreaux français ", désormais seule compétente en la matière, réduisit cette allocation à son taux minimal, ce qui fit l'objet de la réclamation.

Après consultation du Conseil d'Etat, le Médiateur a conclu que, dans cette affaire extrêmement complexe du point de vue juridique, l'équité, au moins, commandait que le réclamant conserve le bénéfice d'une allocation que tout avait concouru à lui faire croire qu'il pourrait en bénéficier sa vie durant.

C'est en ce sens qu'il a adressé en novembre 1976 une recommandation au garde des sceaux, que celui-ci a aussitôt transmise à la " Caisse nationale des barreaux français ".

La réponse à cette recommandation qui vient de parvenir au Médiateur est négative. Elle est à l'étude dans ses services.

SECTION D. - LES PROPOSITIONS DE REFORME DU MEDIATEUR

Proposition de réforme n° JUS 76-5 : par cette proposition, adressée en octobre 1976 au ministre de la justice, le Médiateur a fait observer que la loi du 31 décembre 1903, modifiée par celle du 31 décembre 1968 et introduite dans les trois départements alsaciens-lorrains par la loi du ler juin 1924, avait prévu qu'il appartenait aux détenteurs de véhicules abandonnés de demander au tribunal d'instance l'autorisation de mettre en vente ces véhicules.

Or, la licitation des véhicules abandonnés est soumise à la mise en œuvre d'une procédure de signification publique relativement compliquée et onéreuse, prévue par le code de procédure civile locale, et d'autant moins justifiée qu'il s'agit généralement d'épaves de faible valeur. Cette procédure est d'ailleurs généralement considérée comme archaïque et inopérante.

Le Médiateur suggère en conséquence que la simplification de cette procédure pourrait faire l'objet :

- soit d'un texte introduisant, dans les départements concernés, les dispositions du droit général relatives aux significations à des personnes dont le domicile est inconnu ;

- soit d'un texte autorisant la vente d'un véhicule abandonné en application de la réglementation précitée, après notification par lettre recommandée adressée au propriétaire présumé dudit véhicule.

Proposition de réforme n° JUS 75-8 : rappelée en octobre 1976 au ministre de la justice ainsi qu'au ministre de l'économie et des finances, et relative à la " réforme de la procédure du règlement judiciaire et du statut des syndics ".

Le Médiateur y observait que, la rétribution des syndics étant proportionnelle au montant total des créances d'une part, et au montant de la liquidation des biens d'autre part, certains syndics sont tentés de multiplier les actes de procédure, d'accueillir des créances non entièrement justifiées et de faire échouer le concordat en vue de vendre les biens.

Il avait en conséquence suggéré :

- de modifier le système de rémunération des syndics ;

- d'organiser le contrôle de leur activité ;

- d'instituer un magistrat à plein temps chargé de surveiller le déroulement de la procédure.

Certes, ces réformes sont actuellement étudiées dans le cadre d'un texte général concernant la réforme de l'entreprise en cours d'élaboration.

Toutefois, le Médiateur estime qu'il conviendrait de dissocier le statut des syndics du texte en cours d'élaboration sur l'entreprise.

A cet égard, il conviendrait à son avis de s'inspirer de la solution adoptée en ce qui concerne d'autres professions libérales, et, notamment, celles des experts-comptables (Ordonnance du 19 septembre 1945 modifiée par la loi du 31 octobre 1968) et des commissaires aux comptes. Ces derniers, comme les syndics, ont vu leur activité réglementée par un texte :

- commissaires aux comptes de sociétés : loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, et décret d'application du 23 mars 1967 ;

- syndics : loi du 13 juillet 1967 sur le règlement judiciaire, la liquidation de biens incorporée dans le code de commerce (livre troisième).

Mais les commissaires aux comptes bénéficient d'un statut fixé par le décret du 12 août 1969. Il devrait en être de même pour les syndics, dont le statut devrait faire l'objet d'un texte particulier.

Les défauts du système actuel de rémunération et de surveillance des syndics conduisent à souhaiter qu'il y soit remédié le plus rapidement possible, sans attendre la réforme de l'entreprise qui pose un problème socio-économique tout différent.

Proposition de réforme n° FIN 76-19 : adressée le 7 septembre 1976 au ministre de l'économie et des finances et au ministre de la justice, relative à l'exclusion des marchés publics de certaines entreprises à raison des condamnations pour fraude fiscale encourues par certains de leurs dirigeants ou associés.

Le Médiateur fait observer que selon les dispositions des articles 49 à 51 et de l'article 259 du code des marchés publics, ne peuvent obtenir de commandes de fournitures ou de travaux de la part de l'Etat et des autres collectivités publiques, les entreprises dans lesquelles une personne ayant fait l'objet, à raison de l'une des dispositions du code général des impôts prévoyant des sanctions correctionnelles, et ce, pour des faits commis postérieurement à la promulgation de la loi n° 52-401 du 14 avril 1952, d'une condamnation définitive, occuperait la fonction de directeur, de fondé de pouvoir ou d'associé.

Ces dispositions instituent une sanction accessoire aux sanctions fiscales ou pénales prévues en matière de fraude fiscale ou d'opposition à contrôle fiscal. Elles étaient, à l'évidence, la contrepartie de l'" amnistie fiscale " accordée pour les faits antérieurs à la promulgation de la loi du 14 avril 1952 précitée.

La nécessité de sanctions rigoureuses contre les fraudeurs de l'impôt ne saurait être discutée. Les cas dans lesquels l'exclusion des marchés est prononcée (poursuites correctionnelles) correspondent d'ailleurs à des fautes graves. Cependant, dans l'état actuel de la réglementation, cette exclusion n'est pas une peine accessoire que le juge pourrait moduler, mais une conséquence réglementaire, automatique, qui échappe à l'appréciation du juge. Elle est totale, définitive et irrévocable.

Alors que les pires crimes peuvent bénéficier d'une amnistie, d'une grâce ou même d'une remise de peine, aucun tempérament ne peut être apporté à cette mesure administrative qui sanctionne un délit.

Enfin, la personne pénalisée est celle que son statut, sa position administrative ou des conflits de personne désigneront comme juridiquement responsable au moment des faits même si elle n'a pas une responsabilité directe et personnelle dans le cas visé. Cette sanction " administrative ", qui l'écarte nécessairement d'un grand nombre de postes de responsabilité, le suit dans toute sa carrière et peut la briser définitivement.

Aussi le Médiateur a-t-il proposé :

- que l'exclusion des marchés publics soit rétablie comme une peine accessoire soumise à l'appréciation du juge, quitte à faire à celui-ci obligation de se prononcer sur cette peine ;

- que cette peine puisse être prononcée pour une durée déterminée et pas seulement " à vie "

- que des dispositions ouvrent la possibilité d'une remise de peine après une période probatoire.

Le ministère de la justice a adressé la réponse suivante :

" L'exclusion des marchés publics n'est pas une peine mais une sanction administrative qui atteint les entreprises occupant des personnes condamnées à des peines correctionnelles pour infraction au code général des impôts.

" Frappant donc des personnes morales qui ont pu être étrangères au délit, elle n'est pas rémissible par voie de grâce.

" De même et par voie de conséquence, l'autorité administrative saisie d'un recours tendant à relever l'entreprise de la déchéance qui la frappe ne pourrait y faire droit sans prendre une mesure contraire à la loi.

" Pour assouplir l'application de l'article 50 de la loi du 14 avril 1952, on ne peut davantage envisager de mettre en œuvre l'article 55-1 du code pénal relatif au relèvement des déchéances ou incapacités car cet article ne vise que les personnes physiques alors que l'article 50 de la loi du 14 avril 1952 concerne seulement les entreprises.

" En revanche, il est permis de se demander si l'une des dispositions de la loi du 11 juillet 1975 ne pourrait pas fournir une solution au problème. En effet, le nouvel article 775-1 du code de procédure pénale permet au tribunal qui prononce une condamnation d'en exclure expressément la mention au bulletin n° 2, soit dans le jugement de condamnation, soit par décision rendue postérieurement sur requête de l'intéressé. Cette exclusion entraîne ainsi le relèvement de toutes les interdictions, déchéances ou incapacités résultant de la condamnation.

" L'administration qui serait en possession du bulletin n° 2 expurgé, ne pourrait pas, en cas de soumissions pour des adjudications de travaux ou de marchés publics, trouver motif à application des dispositions de l'article 50 de la loi du 14 avril 1952.

" Il s'agit là d'une solution qui ne paraît pas cependant très satisfaisante, mais en l'était de la législation il est difficile d'en trouver une autre. "

Service des postes et télécommunications.

A. - SERVICE DES TELECOMMUNICATIONS

Comme les années précédentes, ce sont les réclamations mettant en cause ce service qui ont été les plus nombreuses.

De l'ensemble des dossiers transmis au Médiateur sur ce thème, quatre causes principales de litige ressortent de façon constante :

1. - La comptabilisation des communications téléphoniques des abonnés.

Beaucoup de requérants contestent le montant des communications qui leur sont facturées.

La position de l'administration est qu'il n'existe qu'en deux pays au monde (les Etats-Unis et le Canada) un relevé précisant l'origine et le montant de chaque communication, et que l'introduction d'un tel système en France nécessiterait un " investissement considérable ".

L'idée du Médiateur est de faire contrôler la ligne, en cas de contestation, au moyen d'un compteur spécial dont le branchement ne soulève aucune difficulté technique. Ce moyen a d'ailleurs été fréquemment mis en œuvre à la suite d'interventions du Médiateur.

Le prix d'installation de ce compteur a été évalué à 490 F et celui de l'abonnement mensuel à 5,25 F. Mais il faudrait que sa mise en place soit gratuite lorsque l'abonné relève une anomalie exceptionnelle dans le relevé de ses communications. Bien entendu, les critères de l'" anomalie exceptionnelle " devraient être au préalable précisément définis.

2. - La responsabilité du titulaire de la ligne en cas de location à autrui.

De nombreuses réclamations (notamment III-429, II-2043, II-2533), et portant sur des sommes parfois considérables, montrent l'importance du problème posé par les factures laissées impayées par le locataire de la ligne à son départ.

Pour l'administration, le propriétaire de la ligne devrait prévenir les services de l'existence d'un nouvel utilisateur, et dégagerait ainsi sa responsabilité vis-à-vis d'eux. En revanche, les services des P. et T. estiment que, mis à part le cas des sociétés commerciales, les propriétaires de lignes sont toujours responsables, même s'ils ont averti les services.

Le Médiateur, quant à lui, propose ceci :

- les P. et T. devraient avertir tout nouvel abonné de sa responsabilité en l'invitant à notifier à l'administration le changement d'utilisateur ;

- les P. et T. devraient prévenir le propriétaire de la ligne dès la première facture impayée, à défaut de quoi sa responsabilité serait ipso facto dégagée.

On pourrait songer d'ailleurs à appliquer en la matière les règles beaucoup plus simples en usage à E.D.F. - G.D.F.

3. - Les problèmes posés par la " taxe de raccordement "

Le propriétaire d'une ligne peut " l'emporter avec lui ". Mais s'il ne le fait pas, une taxe spéciale et assez élevée est réclamée à son successeur dans les lieux.

L'administration justifie ce système par trois arguments : le gain d'argent, d'abord ; puis le fait que la taxe prélevée ralentirait la spéculation sur les logements ; enfin qu'elle éviterait que les personnes prioritaires ne soient pénalisées.

Il est vrai que cette taxe est justifiée, qu'elle est moins coûteuse qu'une taxe de raccordement " ordinaire " et qu'elle représente le prix d'un service " immédiatement rendu ".

Mais il n'est pas impensable d'envisager la suppression pure et simple de cette taxe spéciale : la ligne serait alors attribuée aux prioritaires selon la procédure normale, mais moyennant le paiement de la taxe ordinaire de raccordement.

4. - Problème posé par la " propriété " de la ligne téléphonique.

Le titulaire d'une ligne téléphonique qui quitte les lieux " l'emporte " avec lui et devient pour ainsi dire " super-prioritaire " dans sa nouvelle résidence.

Toutefois, la ligne demeure matériellement dans l'ancien local, et l'administration exige du nouveau titulaire la taxe ordinaire de raccordement.

Pendant un certain temps, il y a donc deux titulaires d'une ligne " matérielle " unique.

Il faut souligner que le premier titulaire continue de payer l'abonnement alors qu'il n'est pas encore en mesure d'utiliser sa ligne...

A l'évidence, l'équité commanderait d'exonérer le " partant " de la taxe d'abonnement jusqu'à ce qu'il ait à nouveau une ligne.

C'est dans ce sens que le Médiateur se propose de soumettre aux services intéressés un certain nombre de propositions de reforme détaillées, et qui ne seront sans doute pas sans effet sur l'évolution en France du " problème téléphonique ".

B. - SERVICE DE LA POSTE

Les réclamations les plus notables reçues en ce domaine portent toutes sur les conditions d'utilisation des comptes courants postaux.

Ainsi de :

N° II-2467 : le réclamant se plaignait des difficultés qu'il rencontrait à la suite de la transformation de son compte personnel en un compte joint.

En effet, alors que l'administration des P. et T. lui avait expressément indiqué que " toutes dispositions seraient prises pour que les pièces de crédit... soient transmises d'office pour imputation au compte joint ", il voyait revenir, avec la mention " compte clôturé ", tous les chèques qu'il avait signés avant de recevoir l'avis de clôture ; certains de ces chèques avaient même été mis par leurs bénéficiaires entre les mains d'organismes de recouvrement.

L'administration concernée a reconnu qu'en l'espèce il y avait effectivement eu mauvais fonctionnement du service. Toutes instructions utiles ont alors été données pour que les frais supplémentaires acquittés par le réclamant lors du règlement des chèques lui soient remboursés par le centre des chèques postaux. Le Médiateur ayant estimé, en outre, que certaines mesures devraient être prises pour permettre à l'intéressé de justifier de son honnêteté, le service en cause a été invité à la rayer de toute urgence de la liste des " mauvais payeurs " et à lui délivrer une attestation de sa bonne foi.

La situation dénoncée devrait, du même coup, se trouver parfaitement régularisée.

N° III-47 : la réclamante s'interrogeait sur les raisons pour lesquelles l'administration des P. et T. n'accepte pas les paiements par C. C. P. pour les mandats-lettres, alors qu'elle les accepte pour les autres mandats.

L'intéressée, qui s'était heurtée à cette mesure réglementaire pour l'envoi d'un mandat-lettre à un détenu en maison d'arrêt, estimait que cette disposition multipliait inutilement les manipulations d'argent.

Dans le cadre des dispositions réglementaires, le chèque postal ou bancaire est effectivement un moyen de paiement accepté dans les établissements postaux où, d'ailleurs, il est d'un usage tout à fait courant.

Toutefois lorsque l'opération est effectuée dans l'intérêt de la partie versante (émission d'un mandat-lettre, par exemple), le receveur, dont la responsabilité personnelle et pécuniaire est susceptible d'être engagée, est tenu de se conformer à certaines règles précises, telles que la prise en note de l'identité du tireur et l'exigence de la certification de tout titre d'un montant supérieur à 1 000 F.

Il semblerait que le refus opposé à la réclamante ait pour fondement une interprétation trop restrictive de la réglementation. Sous réserve d'acceptation des mesures de précaution qui ont été mentionnées, elle pourra donc effectuer, à l'avenir, le paiement par C. C. P. pour les mandats-lettres.

Qualité de la vie.

I. - LES CONSTATATIONS ET L'ACTION DU MEDIATEUR

Les réclamations reçues en 1976 concernant les problèmes de la qualité de la vie et de la protection de l'environnement ont porté sur des sujets tout aussi variés que les années précédentes.

La majorité des réclamants continuent à dénoncer gênes de voisinage et nuisances diverses, occasionnées, dans la plupart des cas, par des installations :

- bruyantes ou dangereuses (réclamations n° III-1402 : viaduc autoroutier ; n° III-1542 : chaudronnerie ; n° III-2523 : scierie)

- insalubres ou malodorantes (n° III-1490 : porcherie ; n° III-1890 : étable ; n° III-2865 et n° III-2868 : élevage de veaux)

- inesthétiques ou portant atteinte au site (n° III-2010, n° III-2598, n° III-2935, n° III-2936 : pylônes ou poteaux électriques).

Dans bien des cas, le Médiateur s'informe, en premier lieu, de la régularité des constructions ou des activités créatrices des nuisances. Mais il lui arrive ensuite d'intervenir afin de faire respecter les dispositions réglementaires lorsqu'elles ne l'ont pas été (cas d'installations soumises à autorisation par exemple). Ainsi, dans une affaire (n° II-2869), la réclamante se plaignait de dommages résultant de l'exploitation de carrières situées en bordure de sa propriété ; l'exploitant a été invité à prendre toutes initiatives pour remédier à la situation signalée ; il a dû achever les travaux entrepris dans un délai minimum qui lui a été fixé.

Une autre réclamation (n° II-2394) a amené le Médiateur à contrôler la régularité de la construction d'un abri pour une bascule, installé par une société exploitant un séchoir à céréales. L'infraction a été constatée - la construction avait été réalisée sans permis de construire - puis sanctionnée.

La réparation des dommages subis par les réclamants relève, quant à elle, des tribunaux.

Lorsqu'aucune irrégularité n'est constatée, mais que les conditions de vie créées par la situation dénoncée se révèlent effectivement difficiles et que la gêne subie présente un caractère de gravité certain, le Médiateur s'efforce, en liaison avec l'administration, de rechercher toutes les mesures susceptibles - si ce n'est de supprimer définitivement, tout au moins de réduire considérablement - les troubles occasionnés.

Illustrant cette action, peut être citée, à titre d'exemple, l'affaire suivante (n° III-1610) :

Importunée par les allées et venues, de jour comme de nuit, et le stationnement dans sa rue des camions d'une entreprise de transports, implantée au centre même de l'agglomération, la réclamante sollicitait le transfert effectif et définitif de cette entreprise.

La société visée avait été autorisée, par arrêté préfectoral, à exploiter pour une durée d'un an, en attendant son transfert dans une autre localité, le garage de véhicules automobiles en cause.

Or, le directeur de la société ayant invoqué les difficultés tant financières qu'administratives auxquelles il se heurtait pour mener à bien ce projet, avait obtenu de la préfecture des délais supplémentaires pour transférer l'atelier de réparations proprement dit, sous réserve de l'observation de certaines prescriptions (horaire de travail et stationnement des véhicules réglementés).

Ces prescriptions n'ayant pas été observées, et la gêne occasionnée ayant une nouvelle fois été dénoncée par l'intéressée, le Médiateur a été conduit à poursuivre l'instruction de l'affaire. Finalement, le directeur de l'entreprise a été mis en demeure de transférer définitivement et sans délais ses activités.

Pour chaque cas, pour chaque type de nuisance, seront donc envisagés tous les remèdes pouvant améliorer la situation dénoncée. Le Médiateur a reçu l'assurance, par exemple que, pour diminuer les nuisances dont étaient victimes les riverains d'un viaduc autoroutier, des travaux d'insonorisation des bâtiments situés le long de cet ouvrage seraient effectués (réclamation n° III-1402 déjà citée).

Bien souvent, les parties parviendront à un arrangement amiable. Un effort de concertation est pour cela nécessaire et les services concernés sont souvent invités à faire preuve d'un esprit de conciliation.

II. - LES PROPOSITIONS DE REFORME

Toutefois, l'action du Médiateur ne se limite pas à ce type d'intervention. Décelant certains inconvénients de l'état actuel du droit concernant la qualité de la vie, le Médiateur a adressé au ministère concerné des propositions de réforme, notamment la proposition n° QV 76-1 envoyée le 13 octobre 1976 et relative à l'exercice du droit d'opposition aux associations communales de chasse agréées.

Le Médiateur y fait remarquer que, conformément à l'article 3 de la loi du 10 juillet 1964, seuls peuvent faire opposition et conserver leurs droits de chasse les propriétaires ou détenteurs de droits de chasse sur des terrains dont la superficie est déterminée en fonction de leur nature. Mais ces conditions doivent être appréciées à la date de publication du décret d'application de cette loi en date du 6 octobre 1966, et non au jour de l'opposition. Cette solution a été confirmée par un arrêt du Conseil d'Etat du 16 juin 1972.

Il conviendrait, selon le Médiateur, de modifier la réglementation en vigueur en fonction de cette jurisprudence.

C'est pourquoi il a demandé à être tenu au courant des travaux de la commission qui a été constituée en vue de l'examen des divers problèmes posés par l'application de la loi du 10 juillet 1964.

Le Médiateur avait émis une suggestion relative au droit de timbre des affiches, suggestion à laquelle le ministère de l'économie et des finances avait répondu (voir rapport de 1974). Ayant poursuivi son étude sur cette question, le Médiateur a, le 7 septembre 1976, adressé au secrétaire d'Etat auprès du ministre de la qualité de, la vie et au ministre de l'économie et des finances une proposition de réforme (référence : FIN 76-11) relative au droit de timbre sur les panneaux publicitaires.

En effet, le problème n'est pas simple. Il est certain, d'une part, que l'extension de l'exonération de droit de timbre aux affiches présignalant de nouvelles formes d'hébergement et de restauration dans le secteur touristique (logement dans des gîtes d'étapes, chambres meublées louées à la nuit et ne constituant pas des hôtels, crêperies, fermes-auberges, dégustation de coquillages) permettrait aux petites exploitations de régions faiblement peuplées et sous-équipées de se faire connaître, et aux touristes d'être renseignés sur les possibilités d'hébergement de ces régions.

Mais il est non moins certain que, comme l'a fait remarquer le ministre de l'économie et des finances, les exonérations de droit de timbre prévues à l'article 944-II-2° du code général des impôts ont pour objet de signaler aux usagers de la route certains services indispensables, et non de permettre aux établissements concernés (hôtels, restaurants, garages et postes de distribution de carburants) de faire de la publicité en exemption du droit de timbre.

S'ensuit-il pour autant que les nouvelles formes d'hébergement et de restauration qui se développent en milieu rural ne s'adressent pas, de par leur nature même, aux voyageurs " qui, au cours du déplacement, ont besoin d'être restaurés ou hébergés pour une durée très brève ", et qu'il ne soit donc pas possible d'étendre à ces établissements l'exonération prévue au profit des affiches constituant la présignalisation des hôtels et des restaurants.

La crainte du ministère de voir se multiplier les panneaux publicitaires à l'entrée des agglomérations avec tous les inconvénients qui pourraient en résulter (détérioration des sites, risques pour la sécurité) est parfaitement fondée. Mais elle ne conduit pas nécessairement à refuser une exonération aux annonces concernant les formes nouvelles d'hébergement ou les modes économiques de restauration.

On peut, en effet, imaginer que l'exonération soit accordée à ces " autres catégories ", à condition que les panneaux publicitaires soient regroupés dans un cadre unique - esthétique, si possible - groupant toutes les informations utiles au tourisme et plus spécialement au tourisme rural que l'on cherche à développer.

Dans de nombreux autres pays, des bureaux d'accueil sont organisés pour orienter les touristes et même parfois établir contact et accord avec les " logeurs ". Certains syndicats d'initiative assurent cette fonction en France. Autoriser en franchise de timbre ces annonces groupées permettrait d'assurer un minimum d'information dans les agglomérations qui ne peuvent assumer les frais d'un accueil personnalisé.

Dans cette perspective, le Médiateur proposait :

- que l'exonération du droit de timbre soit - dans l'esprit des dispositions actuelles du code général des impôts - étendue à toutes les formes d'hébergement et de restauration ;

- et qu'elle soit subordonnée à un regroupement, éventuellement par rubriques, dans un cadre unique, près duquel une petite aire de stationnement serait ménagée, le tout étant fait à la diligence et aux frais des municipalités, premières intéressées au développement du tourisme et à l'accueil économique de l'agglomération.

La question ainsi évoquée a suscité un vif intérêt de la part du secrétaire d'Etat au tourisme qui, favorable à cette exemption, est intervenu auprès des autres ministères intéressés. Cette proposition a donc de grandes chances d'être acceptée.

Rapatriés.

Les difficultés auxquelles se heurte le Médiateur lorsqu'il est saisi d'une réclamation émanant d'un rapatrié sont les mêmes que celles qui ont été évoquées sous la rubrique concernant le secteur des affaires étrangères : il s'agit des limites imposées à toute intervention administrative, alors qu'est mise en cause une autorité politique étrangère, car ce sont là les règles de la diplomatie qui doivent prévaloir.

Le même problème juridique se pose également : celui de la prise en charge par l'Etat français des créances incombant à un Etat étranger : il y a là un thème fréquent de réclamations mais pour lequel, malheureusement, les moyens du Médiateur sont là encore limités.

D'une manière générale, les réclamations soumises au Médiateur dans ce domaine ont posé le problème de l'information des intéressés en ce qui concerne :

- leurs droits à indemnisation - conditions personnelles à remplir pour avoir droit à cette indemnisation (n° II-1532) ; catégories de dommages ouvrant droit à une indemnisation (n° II-2545) ;

- les pièces justificatives qu'ils doivent fournir (n° I-1361) ;

- les barèmes en fonction desquels sont calculés les indemnisations (n° II-2862).

Se pose aussi, très souvent, la question des lenteurs avec lesquelles interviennent les indemnisations ; une affaire (n° II-2551) est, à cet égard, caractéristique :

La réclamante s'interrogeait sur le sens de l'expression utilisée par l'A. N. I. F. O. M. " rang de priorité peu favorable " pour expliquer les délais nécessaires à l'instruction de son dossier d'indemnisation pour les biens qu'elle avait dû laisser en Algérie.

Il lui a été expliqué que la loi du 15 juillet 1970, relative à l'indemnisation des Français dépossédés de leurs biens outre-mer, a prévu que l'instruction des dossiers d'indemnisation serait effectuée par l'agence selon le rang de priorité qui leur est attribué par les commissions paritaires départementales sur la liste de classement de l'ensemble des demandes enregistrées dans le département - ce rang de priorité tenant compte des ressources des intéressés, de leur état de santé, de la composition de leur famille, et surtout de l'âge du demandeur. Il était précisé que les décisions des commissions paritaires sont souveraines et s'imposent à l'agence qui n'a aucun droit d'intervention dans leurs travaux.

C'est ainsi que le rang de classement attribué au dossier de la plaignante ne permettait pas de prévoir une indemnisation prochaine.

Alors que les délais d'abord prévus pour mener à bonne fin la procédure définie par la loi de 1970 devaient s'échelonner sur une période d'environ 14 années, une décision prise en 1974 par le Président de la République a ramené à 1981 le terme des opérations d'indemnisation. L'agence a, à cet effet, été dotée de moyens financiers et matériels supplémentaires et le nombre de 23 000 dossiers qu'elle est ainsi en mesure de liquider annuellement devrait lui permettre de respecter le nouvel échéancier.

Cette affaire illustre ce qui a déjà été dit plus haut. D'une manière générale, ce n'est pas le fonctionnement des services qui peut être remis en cause, mais les dispositions mêmes de la loi d'indemnisation. Le problème est moins technique que politique.

Transports.

Les problèmes posés en matière de transports se répartissent naturellement (cf. les précédents rapports du Médiateur) entre les matières des transports ferroviaires, routiers et aériens.

A ces problèmes s'ajoutent ceux que peut soulever l'existence de régimes de sécurité sociale particuliers aux travailleurs des transports.

C'est dans cet ordre (remarque étant faite qu'en matière de transports routiers aucune affaire n'a paru, cette année, digne d'être mentionnée) que l'on examinera les plus notables des réclamations parvenues au Médiateur en ce domaine, ainsi que les plus notables des interventions de celui-ci.

A. - TRANSPORTS FERROVIAIRES

Extension à tous les immigrés, des réductions de tarif consenties par la S. N. C. F. et la R. A. T. P. aux membres de familles nombreuses (Cf. rapport de 1975).

Le 15 novembre 1976, le Médiateur a rappelé aux divers départements ministériels intéressés la proposition de réforme (Référence : n° TRP 74-1) qu'il leur avait adressée en 1974 sur le sujet. Il faisait observer :

- que l'extension :aux immigrés des réductions sur les tarifs de transport accordées aux familles nombreuses de nationalité française tait partie d'un ensemble de mesures qui avaient recueilli, dès 1975, l'accord du Gouvernement ;

- que cependant, cette réforme n'a pu encore aboutir, car le crédit de 15 millions de francs prévu au budget de 1976 pour le remboursement par l'Etat à la S. N. C. F. et à la R. A. T. P., de la perte de recettes en résultant, a fait l'objet d'une annulation ;

- qu'il ne pouvait qu'insister afin que le crédit annulé soit rétabli au budget de 1977 et que des mesures d'application soient prises.

A la fin de l'année 1976, le secrétariat d'Etat aux transports a reconnu que la mesure a été envisagée par le Gouvernement français mais que ses incidences financières en ont retardé la réalisation : en effet, les réductions imposées à la S. N. C. F. par des dispositions législatives ou réglementaires donnent lieu au remboursement, par le budget de l'Etat, de la perte de recettes qui en résulte pour le transporteur.

Cependant, il a été décidé, dans un premier temps, de faire bénéficier de ces réductions les originaires des pays membres de la C. E. E.

Cette mesure est entrée en vigueur en juillet 1976.

Affaire n° II-3098 : conditions de transport faites aux militaires.

Un militaire affecté en République Fédérale Allemande avait pris un titre de transport pour le trajet à effectuer dans ce pays seulement, sa gare de départ ne pouvant lui délivrer de titre à tarif militaire jusqu'à sa destination en France.

Pendant le trajet, l'intéressé a pu obtenir, moyennant supplément, le titre de transport complémentaire. Néanmoins, en vertu d'une décision du ministère des armées, il a dû régler une amende pour voyage en situation irrégulière.

Sur l'intervention du Médiateur, il lui a été fait remise de cette amende.

Une telle affaire ne mériterait certes pas d'être citée, si elle ne posait le problème général des conditions de transport faites à nos militaires en Allemagne, et qui mériterait que les pouvoirs publics lui accordent quelque attention.

B. - TRANSPORTS AERIENS

Affaire n° I-1153 : le réclamant, agissant en tant que maire au nom de ses administrés, protestait contre le projet de transfert d'un centre de formation aéronautique sur l'aéroport situé dans sa commune ; l'opposition à ce transfert était en effet générale et se manifestait chez toutes les catégories socio-professionnelles concernées.

Cette plainte ne présentait pas le caractère d'une réclamation individuelle exigé par l'article 6 de la loi du 3 janvier 1973 ; mais comme elle mettait en cause le bon fonctionnement de services publics, le Médiateur a estimé pouvoir s'informer auprès du préfet compétent.

Peu après cette démarche, le secrétaire d'Etat aux transports visitait la région concernée et était personnellement saisi de l'ensemble du dossier.

Pour concilier les diverses positions en cause, il a semblé utile d'organiser une confrontation de tous les intéressés : une réunion s'est tenue sous la présidence du préfet, le secrétaire d'Etat aux transports représenté par des fonctionnaires appartenant à tous les services compétents, a pu répondre aux questions qui lui ont été posées par les élus locaux, le président de la chambre de commerce et d'industrie et le président du club sportif.

Une solution satisfaisante a finalement pu être dégagée de cette confrontation : cette fois encore, la politique de concertation avait porté ses fruits.

Affaire n° III-1149: la formation des pilotes de ligne.

Les réclamants se plaignaient de ce que l'école nationale de l'aviation civile ait suspendu la formation "A" des pilotes de lignes à la suite d'une décision du secrétariat général à l'aviation civile.

Les élèves en cours de formation se voyaient donc dans l'obligation d'interrompre leurs études.

A la suite de l'intervention du Médiateur, le secrétariat d'Etat aux transports est revenu sur sa décision et a autorisé les élèves à reprendre les cours jusqu'à l'achèvement de la formation due en exécution de l'article 11 de l'arrêté du 3 avril 1968.

Les élèves ont été informés de cette décision par lettre individuelle.

C. - REGIMES DE SECURITE SOCIALE APPLICABLES AUX AGENTS DE TRANSPORTS

Le 15 novembre 1976, le Médiateur rappelait aux divers départements ministériels concernés, une proposition de réforme (Référence TRP 75-2) ayant pour objet la répartition de la pension de réversion, dans certains régimes particuliers, au prorata des années de mariage, au lieu d'une répartition par moitié entre la veuve et la femme divorcée.

Il faisait observer que si les dispositions da code des pensions civiles et militaires prévoient que la pension de réversion est répartie entre les épouses ayants droit, au prorata des années de mariage de chacune d'entre elles, certains régimes de retraite répartissent la pension de réversion par parts égales entre les intéressées.

Mais la loi du 11 juillet 1975 sur la réforme du divorce, après avoir modifié expressément le régime de sécurité sociale, de façon à établir la règle du partage des pensions éventuelles entre veuves et divorcées, au prorata des années de mariage, dispose dans son article 12 que " le Gouvernement prendra les dispositions nécessaires pour adapter aux régimes de retraites légaux et réglementaires les dispositions de l'article précédent ".

Or, les mesures réglementaires prévues, dont l'étude s'est poursuivie depuis un an environ, n'ont pas encore vu le jour.

Le Médiateur ne pouvait donc qu'insister pour que ces mesures qui n'impliquent aucune dépense nouvelle, interviennent dans les meilleurs délais.

La réponse du secrétaire d'Etat aux transports a été la suivante :

La règle du partage de la pension par moitié entre la femme divorcée à son profit ou aux torts réciproques et la veuve a été instituée en 1923, par référence aux dispositions déjà contenues dans le règlement intérieur des grands réseaux, dont le régime de retraites avait inspiré la loi de 1922 ; la question a été posée à la caisse autonome mutuelle de retraite, gérant le régime institué par la loi du 22 juillet 1922, en 1961, à l'occasion d'un cas particulier et le ministère des transports consulté a alors exposé par écrit que les textes en vigueur en matière de réversibilité devaient conduire à admettre dans ce régime comme règle de partage de la pension celle du prorata temporis des mariages. Le conseil d'administration a refusé de modifier son point de vue antérieur et la règle a été maintenue. D'ailleurs, le bien-fondé de la position de la C. A. M. R. a été, à deux reprises, reconnu par les tribunaux. Un arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 28 octobre 1965 et un arrêt de la cour d'appel de Colmar du 12 juillet 1966 ont en effet débouté respectivement deux requérantes de leur action à l'encontre des modalités de partage retenues par la caisse autonome.

Il est donc actuellement impossible au secrétaire d'Etat aux transports de modifier la règle existante par simple décision comme le suggère le Médiateur.

La révision, sur le fondement de la loi du 11 juillet 1975 portant réforme du divorce, a été par contre entreprise à l'initiative du secrétaire d'Etat aux transports, qui estime que ce texte oblige les autorités tutrices de la C.A.M.R. à prendre un texte d'alignement dans le sens demandé ; mais, selon des renseignements officieux, cette position ne paraît pas s'imposer au ministre des finances, cotuteur de la C.A.M.R. En tout cas, la réponse officielle de ce dernier n'est pas parvenue au secrétaire d'Etat aux transports malgré plusieurs rappels de cette affaire.

 



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